Benjamin des exilés


Sleeping man in Ouagadougou. Auteur: Roman Bonnefoy. This file is licensed under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International, 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic license.
Poème
L’aventure humaine est source d’inspiration pour ceux qui savent écouter la nature et flairer les émotions soudaines. Le poème « Benjamin des exilés » retrace une réalité teintée de parfum culturel et social qui interpelle encore ceux qui ont encouragé leurs fils vers les chemins de l’exode. Un départ qui laisse souvent derrière tristesse et regrets. A travers ces vers, un cœur a encore parlé.
Depuis l’aube de mon esprit innocent
Jusqu’au crépuscule aux saveurs d’encens
S’incrustant dans mes cauchemars de trépas
Qui nargue ma joie évanescente, et pas à pas
Me narre les épisodes funestes de ma destinée
Je me vois échoir sur mes dernières matinées
Depuis les confidences des moustiques ailés
Qui bourdonnent à l’orée de mes oreilles fêlées
Succombant sous l’acouphène de ces clameurs
Venus chanter avec les voix rauques des rameurs
Je me vois balayer devant la hutte des viragos
Gardiennes des autels dormant sous les marigots
Depuis l’aube du fameux départ des initiés
Vers les incertains horizons aux espoirs émaciés
Les mères ont tronqué les pagnes des beaux jours
Pour s’humilier devant le Créateur de tous les jours
Escomptant une once de providence sur les exilés
Bénis des dieux et des sorciers du baobab mutilé
Depuis lundi, jour de la lune compatissante
Aux douceurs maternelles, aux vertus saintes
Le poids de la séparation, encore asservit les cœurs
En berne, les mélodies gaies du matin et les chœurs
Se sont assoupis, même les chants gais des oiseaux
Pour le mil des premières lueurs loin des ruisseaux
Depuis le sombre réveil du mardi jour de mars
Le lit orphelin de ses habits de feuilles éparses
Qui consolaient les chérubins du soleil des labeurs
Attend le coup de grâce pour comble de son malheur
Hors de la chaumière qui l’a materné souventes fois
Dans les moites nuits et les froides d’autrefois
Depuis le départ des aînés, les feuilles sont fanées
Les regards sont absents visitant les primes années
Et dans les nuits de ma pensée rebelle, j’ai rechigné
Refusé de voir l’indigence nous pousser à être résigné
Malgré nos élans de liberté moulus maintes fois encore
Sous le regard des cieux prompts à accueillir nos corps
Issa
Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils