Articles en Français | English | Arabic

Le Musée de l’immigration est à la recherche de nouveaux locaux

Partager l'article sur les réseaux :
image_pdfimage_print
Interview d'Ernesto Ricou par Niangu. Dessin: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d'Exils.

Interview d’Ernesto Ricou par Niangu. Dessin: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Le plus petit musée de Suisse, sis à Lausanne, a été contraint de mettre la clé sous la porte en janvier de cette année mais il ne baisse pas les bras ! 

Crée en 2005 par Ernesto Ricou et anciennement situé à l’avenue de Tivoli 14 à Lausanne, le musée des migrations avait une double vocation. D’une part, sauvegarder la mémoire des migrants et d’autre part, améliorer le dialogue intercommunautaire. Pari réussi, puisque le Musée à réalisé de multiples actions éducatives et culturelles en organisant des conférences, des colloques, des cours et des expositions.

Comment le Musée de l’immigration a-t-il  vu le jour et qu’est ce qui vous a motivé à le créer ?

Le musée a officiellement ouvert en 2005 mais, ce qui est curieux, c’est qu’à cette date, le musée tournait en réalité déjà depuis une année. Au début, je ne peux pas vous cacher que j’avais un petit peu la crainte que cette initiative tombe dans dérisoire – voire tourne au ridicule – parce qu’on avait des installations tellement modestes que je me suis dit « bon, il faut voir si ça marche ou pas ». Donc, pendant une année, on a mené nos activités en appelant les communautés étrangères à participer, à recevoir et accueillir les personnes âgées afin qu’elles puissent témoigner de leurs parcours de vie et de leur enracinement en Suisse. Et puis, on s’est dit à un certain stade qu’on était au point. On a alors pris contact avec Monsieur Michel Sartori, qui est le directeur du Musée Zoologique de Lausanne et le président de l’association des musées Suisse, pour lui exposer notre projet. Alors que j’avais une crainte énorme qu’il nous dise que notre idée ne vaut rien, ce fut la grande surprise ! Après avoir passé une matinée ensemble, il m’a dit : « Monsieur Ricou, vous êtes un pionnier, continuez s’il vous plaît ! Je suis le président d’une association qui représente plus de milles musées en Suisse et je rien vu de pareil bravo ! ».

Quels étaient les objectifs que poursuivait votre musée ?

Le premier objectif est la sauvegarde de la mémoire des migrants. Donc, ici, on est plein dans la patrimoine immatériel. On va essayer d’enregistrer le plus possible de récits de parcours de vie de migrants qui sont âgés maintenant pour qu’ils nous racontent leur déracinement dans leur pays d’origine et leur enracinement en Suisse. Avec tous les éléments liés en quelque sorte à ces passages qui sont à la fois bénéfiques : car ils signifient pour eux et pour le pays d’accueil le bien-être et la prospérité ; mais qui symbolisent aussi, pour beaucoup, la tragédie humaine : la séparation, la rupture avec un passé, une famille, des amitiés, le village. Je parle bien ici des Italiens, des Espagnols et des Portugais entre autres.

Le deuxième objectif que poursuit le musée c’est l’éducation. L’éducation est une énorme préoccupation qui m’habite depuis toujours et je suis plus que convaincu que je ne suis pas le seul. La raison est que c’est par l’éducation qu’on peut effectuer des progrès sociaux, et que les progrès sociaux nous amènent la paix et que la paix nous conduit à la créativité voilà.

Justement, pouvez-vous nous en dire plus à propos des activités pédagogiques et scolaires du Musée de l’immigration ?

Notre principale préoccupation était d’améliorer le dialogue entre les communautés. Donc, on est ici en plein dans l’école publique suisse que beaucoup d’enfants, provenant de pays lointains, fréquentent. Des pays avec des cultures très diverses et qui sont parfois en guerre. Donc, il fallait harmoniser les rapports entre tous ces enfants et améliorer le langage, la compréhension et surtout dire a chaque communauté qu’elle regorge de trésors culturels qui leur sont propres.

Quelles ont été concrètement les raisons et les étapes de la fermeture du Musée de l’immigration ?

Le Musée est fermé depuis qu’on à rendu les clés au mois de janvier 2016. En février, on a encore négocié avec les autorités et notre gérance. Puis les difficultés se sont accrues et finalement on a décidé de fermer sur ordre de la gérance car on ne pouvait plus exercer une activité muséographique parce que les locaux ne sont pas aux normes légales. On a alors décidé de fermer le musée en attendant qu’on puisse trouver parmi nos partenaires et nos réseaux une solution pour pouvoir poursuivre notre activité. Voilà un petit peu le point de la situation. Ce qui est aujourd’hui dommage, c’est que paradoxalement d’un coté on à une suractivité car on est très sollicité de partout. Malgré le fait que nous ne puissions pas continuer à animer notre lieu, nous maintenons cependant une collaboration avec des étudiants de différents niveaux scolaires en continuant à leur fournir des renseignements et des informations et à les accompagner dans leurs recherches sur les thèmes de la migration. Vraiment, nos activités ont besoin d’espace et méritent d’autres conditions que celles dont nous bénéficions aujourd’hui !

N’avez-vous pas le soutien de la commune de Lausanne ou du canton ?

Oui, on a reçu différentes aides à l’époque qui nous ont été très utiles. Je profite ici de remercier les différentes autorités. Récemment, même pour venir à bout de notre résiliation de contrat, l’Etat nous a gracieusement offert 4 mois des loyers pour que ce passage se fasse en douceur au regard de notre situation financière très précaire. A l’époque, on a aussi reçu de l’aide de la Loterie Romande, de l’ancienne Office des migrations de Berne, ainsi que des dons de la part de nos usagers et des communautés. Bref, nous avons toujours reçu des aides ponctuelles, au coup par coup, mais jamais des grosses sommes, ce qui nous aurait permis d’obtenir des locaux plus spacieux, plus aérés et surtout conformes aux normes légales.

Qu’attendez-vous de la part des autorités ou des particuliers aujourd’hui ?

De la part des autorités quelles soient communale, cantonale, culturelles, ou sociales, j’attends qu’elles nous viennent en aide en nous demandant un loyer symbolique. On attend beaucoup de bienveillance et de compréhension de la part des autorités et, parfois, je me demande si elles n’ont pas une crainte que nous couvions des activités politiques. Ben non, nous sommes impartiaux, neutres, et nous ne cherchons pas d’éléments qui puissent nous séparer. Au regard de la diversité des individus qui fréquentent notre musée, nous ne pouvons que rechercher tout ce qui peut nous réunir : la paix, l’amour et la compréhension.

Si vous souhaitiez lancer un appel aujourd’hui, que diriez-vous ? 

Je lance un appel aux communautés historiques des Italiennes, des Espagnols, et des Portugaises, aux autorités universitaires, aux autorités scolaires, aux autorités de l’éducation de nous aider à trouver un local afin que nous puissions poursuivre le travail bénévole que nous menons depuis tant d’années de manière très intense et qui produit autant de résultats positifs sur le plan éducatif.

Propos recueillis par :

Niangu Nginamau

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

 

 



Répondre

Votre message ne sera envoyé que si tous les champs marqués d'un *     sont remplis

Nom: *








WordPress Video Lightbox Plugin