Articles en Français | English | Arabic

«En Suisse, nous essayons de favoriser une approche pragmatique de l’accueil des migrants»

Partager l'article sur les réseaux :
image_pdfimage_print
Gabriela Amarelle, déléguée à l’intégration de la Ville de Lausanne. Photo: Voix d'Exils

Gabriela Amarelle, déléguée
à l’intégration de la
Ville de Lausanne. Photo: Voix d’Exils.

Le Bureau lausannois pour les immigrés (le BLI) vient de reprendre son nom d’origine et d’abandonner son ancienne appellation : le Bureau lausannois pour l’intégration des immigrés. L’occasion d’ouvrir une réflexion autour des pratiques helvétiques d’accueil des migrants en compagnie de Gabriela Amarelle, déléguée à l’intégration de la Ville de Lausanne. Interview.

Voix d’Exils : Le Bureau lausannois pour les Immigrés, ex Bureau lausannois pour l’intégration des immigrés, a repris son nom d’origine, pour quelle raison ?

Gabriela Amarelle : Le terme d’intégration, fortement controversé, a toujours contenu de nombreuses ambiguïtés, notamment quand son acception se limite à servir d’euphémisme pour « assimilation ». Pour tenir compte de notre approche inclusive, qui ne fait pas porter la responsabilité de l’intégration uniquement sur les immigrés, la Municipalité a décidé tout récemment de revenir à l’appellation d’origine, à savoir « Bureau lausannois pour les immigrés ». Cette appellation a pour avantage de mettre en avant l’effort investi par la collectivité lausannoise pour combler les inégalités qui persistent dans tous les domaines de la vie quotidienne à l’égard de la population migrante, tout en gardant la dénomination et l’abréviation connue depuis plus de quarante ans.

Le BLI a pour mission de favoriser l’intégration des étrangers. Comment définissez-vous « l’intégration » ?

Dans la Loi fédérale sur les étrangers, elle est définie comme un « processus réciproque » entre les personnes qui arrivent en Suisse et la société d’accueil. La promotion de l’intégration, selon l’Office fédéral des migrations, vise un accès égal aux ressources sociales, politiques et économiques disponibles dans notre société, afin de pouvoir participer pleinement à la société et à ses prises de décisions. Cette définition, largement consensuelle aujourd’hui, implique que l’intégration nous concerne toutes et tous, immigrés et autochtones. L’intégration constitue, dès lors, un enjeu majeur en matière de cohésion sociale.

Quelles sont les actions et les mesures entreprises par le BLI pour intégrer les migrants ?

Les mesures mises sur pied par le BLI pour favoriser l’égalité des chances visent premièrement à orienter sur les thèmes liés à la migration : cours de français, formation, travail par exemple. Nous avons développé, en collaboration avec les services communaux concernés, un ambitieux programme d’accueil destiné justement aux personnes nouvellement arrivées. L’information et la formation sont également au coeur de l’action du BLI car, de notre point de vue, il est essentiel de favoriser l’accès aux prestations. Le BLI met également sur pied des mesures destinées à prévenir le racisme et contribue à favoriser la participation citoyenne sous toutes ses formes, par exemple, en favorisant la vie associative et de quartier et en informant sur les droits politiques. En tant qu’organe de l’administration communale, notre rôle est aussi de sensibiliser à l’interne de l’administration sur ces thématiques.

La politique d’intégration, telle quelle s’est développée en Suisse, est-elle, selon vous, efficace pour créer une coexistence harmonieuse entre les étrangers et les autochtones ?

La Suisse est un pays fédéraliste. La définition d’une politique publique requiert, en Suisse plus qu’ailleurs, le respect des partenaires et une implication réelle de ceux-ci. La force du modèle helvétique est que chaque niveau étatique – Confédération, cantons, communes – est important et contribue, dans l’idéal, à la définition de la politique d’intégration. Bien sûr, il peut y avoir de fortes divergences sur le plan politique, et aussi en matière d’enjeux financiers entre tous les partenaires. La recherche du compromis helvétique n’est pas un mythe… et cela prend du temps, de la patience, de l’énergie. Dans un système tel que le nôtre, avec un enchevêtrement parfois complexe des compétences, l’approche est forcément pragmatique. Cela implique, aussi en matière de politique d’intégration, des réponses concrètes plurielles selon les régions. Je crois qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas une seule politique d’intégration en Suisse. Car les contextes régionaux dans lesquels nous vivons, ont un impact réel sur les politiques locales d’intégration. La proximité peut être un atout.

Quelles sont les principales difficultés que rencontrent les migrants dans le processus d’intégration ?

La population migrante, tout comme la population suisse, est fortement hétérogène. Chaque parcours est différent. Si l’on essaie de parler globalement, les obstacles les plus récurrents sont dus au statut juridique des personnes, et les difficultés liées à l’obtention ou non d’un permis de séjour. Pour les ressortissants hors de l’Union européenne, notamment, il est particulièrement difficile d’obtenir un travail. Et bien sûr, pour apprendre le français, nous ne sommes pas, là non plus, tous égaux !

Quels sont les autres modèles de politiques publiques permettant cette coexistence harmonieuse entre les étrangers et les autochtones ?

On me demande souvent si en Suisse, nous sommes plus proches du modèle français ou du modèle britannique … Je crois qu’en Suisse nous nous méfions des modèles et que nous essayons de favoriser une approche pragmatique, avec l’ambition, sans y arriver parfois, de prendre du bon dans chacun des systèmes. A Lausanne, et certainement aussi du côté de la Suisse romande en général, nous essayons de conjuguer le respect des valeurs citoyennes – telles le principe d’égalité de traitement et l’égalité entre hommes et femmes -, et le respect de la personne qui nous fait face dans son individualité. Identifier ce qui nous rassemble, plutôt que ce qui nous différencie, est aussi une piste pour échapper au communautarisme.

Propos recueillis par :

Samir

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Infos :

Rendez-vous sur le site du BLI en cliquant ici



Répondre

Votre message ne sera envoyé que si tous les champs marqués d'un *     sont remplis

Nom: *








WordPress Video Lightbox Plugin