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Nous voulons avancer

Johnny Cohen / unspash.com

Personne n’a l’intention de devenir un réfugié, cela arrive tout simplement

Ta vie commence comme celle de beaucoup de personnes : ta première école est celle de tes parents ; ensuite, tu entres à l’école obligatoire, puis tu progresses toujours, régulièrement, vers d’autres acquis et diplômes. En fonction du métier que tu auras choisi, tu feras des mises à jour fréquentes, tu assisteras à des séminaires, à des cours de langues. Ta vie professionnelle se développera tout au long de nombreuses années d’efforts, d’objectifs réalisés en nouveaux objectifs à atteindre, sans répit. Oui, la vie est pleine de défis…

Quand j’ai quitté la Colombie, je n’imaginais pas ce à quoi j’allais devoir faire face, dans un pays inconnu, avec une langue nouvelle, avec des coutumes et des lois totalement différentes de celles de mon pays.

 Je suis venue chargée du sac à dos de mes connaissances. J’espérais qu’une fois admise comme réfugiée, je pourrais continuer à exercer mon métier. Eh bien non ! Au lieu d’avancer, nous passons nos journées à brûler nos neurones en réfléchissant à comment utiliser nos connaissances pour accéder à une vie professionnelle afin de sortir de l’aide sociale. Je ne comprends pas comment tant de compétences et de professionnalisme peuvent être gaspillés, pour la seule raison que nous sommes arrivés dans le pays en tant que réfugiés.

« Oublie ce que tu étais auparavant et recommence tout », voilà le message que nous recevons. C’est peut-être une bonne chose dans certains cas et, pour certaines personnes, l’oubli en vaut peut-être la peine. Mais pas pour moi.

Au fond, ce que nous avons vécu est délaissé, mis de côté, à partir du moment où nous obtenons notre « diplôme » de réfugié.

Avec la force qui nous reste, nous donnons tout pour avancer, pour continuer ce chemin que nous suivons dorénavant sans but, sans rêves, avec l’âme brisée et épuisée.

Martha Campo

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Les situations de handicap diffèrent d’un pays à l’autre

Illustration graphique de Kristine Kostava / Voix d’Exils

« Mon handicap ne m’empêche pas de vivre librement »

Malgré ses déplacements en scooter électrique adapté, notre rédactrice, Kristine Kostava, essaye de vivre de façon la plus autonome possible. Originaire de Géorgie, elle compare la situation vécue par les personnes handicapées dans son pays et en Suisse. Son témoignage :

« Je n’ai jamais rêvé de vivre dans un autre pays, malgré beaucoup de problèmes et de misère. Je ne parle pas seulement de la condition matérielle. A ma naissance, en Géorgie, il y a eu des complications. Les erreurs médicales ont engendré ma situation de handicap qui me force à rester en fauteuil roulant pour toujours.

En grandissant, je prenais conscience de mon problème et ça me complexais. Je ne voulais plus sortir de la maison. J’avais honte de ne pas pouvoir marcher. Dans la rue, les personnes me regardaient avec pitié et d’autre m’insultaient à cause de mon handicap.

« En Géorgie, les espaces publics sont inadaptés »

A 20 ans, l’association « Education Development and Employment Center » m’a contacté et m’a proposé des cours pour développer des connaissances sur les différents handicaps.

En Géorgie, je ne pouvais pas traverser la rue en fauteuil roulant, car il n’y avait pas de rampes à proximité des bâtiments. Les ascenseurs, les bus, les trains n’étaient pas adaptés aux personnes handicapées. Je n’ai jamais voyagé en transports en commun. Alors, je devais prendre un taxi. Heureusement, mon père était chauffeur de taxi et il assurait mon transport. Je n’aurais jamais pu me le permettre avec ma pension de 200 GEL qui représentent 60 franc suisse.

À 27 ans, j’ai étudié le graphisme, puis j’ai commencé à travailler comme designer dans l’une des imprimeries de Kutaisi. En raison de conditions inadaptées et d’un salaire très bas, mon père m’emmenait au travail.  Sans son aide, tout mon salaire aurait été dépensé dans les frais de transport. J’étais toujours contente d’aller travailler.  Le personnel et les patrons étaient très gentils et chaleureux ! Mon métier me passionnait.

J’ai travaillé pendant environ un an. J’ai commencé à avoir des douleurs atroces aux jambes et à la colonne vertébrale en raison de la détérioration de ma santé.  J’avais besoin d’une chirurgie et d’une physiothérapie intensive. Les traitements dont j’avais besoin sont impossible à faire en Géorgie, à cause du manque d’assurance maladie et des faibles revenus. L’accès à la sante est difficile, car les coûts sont élevés et la population a peu de moyens financiers. Les bons médecins sont tous partis à l’étranger en raison du manque de salaire et de la sous-estimation de leur métier.

« En Suisse, je me déplace de manière autonome »

C’est à cause de ces problèmes que j’ai dû quitter mon pays et venir en Suisse ! En espérant qu’ils pourraient m’aider ici ! C’était très difficile de tout recommencer dans un pays étranger, mais l’humain s’habitue à tout. L’essentiel pour moi était d’améliorer ma santé et la Suisse a vraiment réussi! Je bénéficie d’exercices intensifs, de la physiothérapie, des soins médicaux. Aujourd’hui, je suis en attente d’une date pour une opération qui a été reportée deux fois à cause de la pandémie.

J’ai rencontré beaucoup de gentilles personnes en Suisse qui m’ont aidé. Une fondation orthodoxe m’a donné un scooter électrique ce dont je ne pouvais même pas rêver en Géorgie. Maintenant je peux me déplacer n’importe où de manière indépendante, sans aucun obstacle. En Suisse, toutes les conditions sont réunies pour qu’une personne handicapée vive de manière autonome. Je peux utiliser les transports publics et accéder à tous les bâtiments. Je vis librement sans complexe! Je n’ai plus honte de sortir dans la rue ou que quelqu’un me regarde avec pitié! Ici, tous les individus sont égaux, tous les droits de l’homme sont protégés !

« J’ai, enfin, trouvé ma part de bonheur »

C’est très difficile de se développer dans un pays étranger quand l’état ne vous permet pas de rester. Le Secrétariat d’Etat aux Migration (SEM) a refusé quatre fois ma demande d’asile mais je ne suis pas venue ici pour ce papier. L’essentiel pour moi est de retrouver la santé et le bonheur ! J’ai trouvé ma part de bonheur, ici, et mon objectif n’est pas de rester éternellement en Suisse.

Je souhaiterai apporter mon expérience de vie, une vision, un environnement, une réflexion, une liberté différente à mon pays. Mon objectif serait d’aider les gens qui sont déçus comme moi !  Peu importe comment nous sommes nés, qui nous sommes, quel genre de problèmes de santé nous avons, l’essentiel est de nous aimer tel que nous sommes et de ne permettre à personne de nous regarder comme une chose inutile ! Je me sens comme une personne à part entière en Suisse. Je respire ici, je suis libre, avec de grands espoirs. Bientôt, je serai en bonne santé ! Merci à la Suisse pour tout cela ! Maintenant, je peux dire: Il n’y a pas de limites ! Il y a un environnement handicapé ! »

Kristine Kostava

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.




Voix d’Exils poursuit son développement et gagne en visibilité

Les trois rédactions cantonales à la formation multimédia en Valais, juin 2012

Les trois rédactions cantonales à la formation multimédia en Valais, juin 2012.

Voix d’Exils, le blog des personnes migrantes coordonné par le Programme d’occupation Communication de l’EVAM, a poursuivi le développement de ses activités en recourant notamment à des nouveaux supports de communication. Bilan des principales réalisations pour l’année 2012 et perspectives pour l’année 2013.

Voix d’Exils se compose de trois rédactions cantonales : les rédactions vaudoise, neuchâteloise et valaisanne, qui fonctionnent en réseau, ce qui permet d’assurer des publications régulières sur le blog, mais aussi de regrouper des compétences ainsi que des infrastructures complémentaires.

Des activités éditoriales pointues et diversifiées

De janvier à novembre 2012, les trois rédactions cantonales de Voix d’Exils ont publié 74 articles, parfois très pointus, sur des thèmes variés en lien avec la problématique de la migration. Mentionnons trois articles exemplaires : l’article du rédacteur vaudois Roland FBradley, qui immerge le lecteur dans l’univers sordide de la prostitution des femmes migrantes en Suisse ; la couverture très bien documentée du 14 ème Sommet de la Francophonie, qui s’est tenu en octobre de cette année à Kinshasa, par Angèle Bawumue Nkongolo et Paul Kiesse, membres de la rédaction neuchâteloise ; ou, encore, le témoignage lumineux de Pita, rédacteur valaisan, qui invite les requérants d’asile à garder l’espoir, malgré les nombreuses difficultés qu’ils rencontrent sur les chemins tortueux de l’asile.

Voix d’Exils a également diversifié ses activités éditoriales. Ainsi, durant le mois de juillet, Sara Pages, de la rédaction vaudoise, a tourné et monté le premier film documentaire signé Voix d’Exils qui est consacré à l’utilisation des murs d’un abri PC de Monthey en Valais comme support d’art communautaire.

Caravane FM. Photo: Gilaine Heger

Caravane FM. Photo: Gislaine Heger.

A la fin de l’été, la participation de Voix d’Exils au nouveau projet de la Ville de Lausanne : la Caravane des Quartiers et à sa radio a offert aux membres de la rédaction vaudoise la possibilité d’expérimenter le reportage radiophonique en interviewant des animateurs et des résidents de la structure de jour EVAM des Boveresses.

Enfin, une nouvelle rubrique a aussi fait son apparition : l’Edito, qui permet aux rédacteurs chevronnés de s’exprimer de manière plus directe et plus personnelle sur des thèmes d’actualité et de société.

Consolidation de la formation multimédia pour personnes migrantes

La collaboration inter-cantonale est assurément le pilier qui permet au projet de se développer et d’innover dans ses différents domaines d’activités. Chaque semestre, les trois rédactions cantonales se rencontrent à l’occasion de réunions inter-cantonales où se définissent les orientations générales de Voix d’Exils. Notons que 28 participants étaient réunis le 31 mai dernier à Lausanne pour débattre des projets communs du blog.

En 2012, Voix d’Exils a centré son développement sur l’amélioration de sa formation multimédia qui est destinée aux trois rédactions cantonales et qui est coordonnée par la rédaction valaisanne. Cette dernière offre également l’accueil et l’infrastructure nécessaires pour dispenser les cours. La formation multimédia vise à initier les participants aux techniques de rédaction du journalisme, au web publishing, à la photographie et au droit de la communication, dans le but de rendre les rédacteurs autonomes dans la gestion d’un blog.

Voix d’Exils a notamment amélioré la formule de sa formation multimédia cette année, car les cours ont été préparés de façon à dynamiser la participation des membres. La durée des modules a été également augmentée, ce qui a permis d’approfondir les matières.

Une fréquentation en constante progression

Statistiques du nombre de pages vues par mois sur Voix d’Exils de juillet 2010 à novembre 2012.

Statistiques du nombre de pages vues par mois sur Voix d’Exils de juillet 2010 à novembre 2012.

La fréquentation du blog par les internautes est, quant à elle, en progression constante, ce qui atteste de la vitalité du média. La courbe de la fréquentation de ses pages a même connu une nette augmentation en octobre de cette année en passant de de 19’032 pages vues en septembre à 24’696 en octobre. Notons aussi, qu’en moyenne, la fréquentation du blog a quasi doublée entre les années 2011 et 2012. Cette hausse peut être notamment corrélée à deux facteurs. D’une part, le développement de nouveaux supports de communication et de promotion. A l’instar du nouveau dépliant présentant de manière succincte le blog en français, en anglais et en arabe, ce qui permet de mieux faire connaître le projet auprès des populations migrantes et du grand public suisse. D’autre part, à la médiatisation du projet, car Voix d’Exils s’est vu accorder une pleine page dans le quotidien romand Le Courrier (édition du 14.08.12), et une autre dans le mensuel des étudiants de l’Université de Lausanne L’Auditoire (édition de novembre 2012).

Perspectives pour 2013

Les objectifs pour l’année 2013, qui ont été discutés lors de la réunion inter-cantonale du 3 décembre, sont les suivants:

  1. Augmenter le nombre d’heures d’enseignement de la formation multimédia,
  2. Augmenter la visibilité du blog,
  3. Élargir la collaboration inter-cantonale à de nouveaux cantons romands.

Malgré la modestie des ressources dont dispose Voix d’Exils, ce média fait preuve d’un dynamisme surprenant et réjouissant. Cependant, la réalisation des nouveaux objectifs pour 2013 est aussi tributaire des moyens qui seront alloués au projet.

N’hésitez pas à consulter nos dernières actualités sur http://voixdexils.ch/ ou à nous suggérer des sujets d’articles.

Omar ODERMATT

Responsable de la rédaction de Voix d’Exils

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