1

L’insouciance des papillons

« Mon frère ne savait pas que cette voiture serait le feu qui le brûlera »

 

Tous les enfants du quartier l’aimaient. Il était plus calme qu’une brise, il prenait son argent de poche à mon père et me le donnait. Tout le monde l’aimait.

Ce matin-là, il est parti à l’école avec ses amis. Ils sont partis en courant comme des papillons ; s’envoler du sol… comme si le monde avait été créé pour eux.

Les avions de guerre israéliens grondaient dans le ciel. Ils ressemblaient à des monstres prêts à bondir sur leur proie.

Une voiture de combattants palestiniens roulait dans la rue Yarmouk et les papillons étaient près de la voiture. Les papillons ne savaient pas que cette voiture serait le feu qui les brûleront.

Une roquette est tombée sur la voiture. Mon frère Tareq a volé trois mètres et est retombé au sol. Il a volé plus haut que la voiture. L’ambulance est venue et a pris les cadavres. Les gens lui ont dit de monter dans l’ambulance, mais il a refusé et s’est remis à marcher avec ses amis en direction de l’école.

Cent mètres plus loin, il a posé sa main sur son cœur et est tombé mort. J’étais dans la rue, j’attendais le bus scolaire et ma sœur m’a dit d’aller voir ce qui se passait. Oui, mais je n’ai pas vu Tareq et je suis allé à l’école.

Pendant que j’étais en classe, mon oncle est venu et m’a dit que j’allais prendre trois jours de congé scolaire. Je ne me doutais de rien; nous sommes montés dans la voiture… Mon oncle a dit au chauffeur d’éteindre les nouvelles à la radio. Puis j’ai commencé à avoir des soupçons. Nous sommes arrivés à la maison où il y avait une grande foule de gens. Avant de descendre, j’ai vu mon père assis sur une chaise en train de pleurer. C’était la première fois que je voyais mon père pleurer et il tenait dans ses mains la photo de mon frère Tareq. Je lui ai demandé : « Papa, mon frère a-t-il été tué ? » Il a répondu : « Que Dieu ait pitié de son âme ».

L’ambulance l’a ramené de l’hôpital… nous avons tous tourné autour de lui pour le moment d’adieu. Il dormait comme un ange, avec le livre qu’il portait encore dans ses mains.

Mon père a refusé de nous laisser aller au cimetière mais je suis monté dans la voiture et j’y suis allé avec eux. J’ai continué à aller sur la tombe de Tarek tous les jours pendant trois mois pour lui parler.

La nuit, je regarde sa photo jusqu’à ce que je m’endorme.

Depuis que mon frère est mort, je me suis habitué à dormir seul dans mon lit. Nous avions l’habitude de dormir côte à côte. Mais aujourd’hui j’ai un lit pour moi tout seul.

Je n’oublierai jamais mon frère.

Wael Afana

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Le permis de conduire

Le permis de conduire

Kakar Mohammad Tariq. Photo: rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Un passeport pour l’emploi!

Le permis de conduire est une étape importante dans le processus d’intégration : on se sent comme les autres, plus libre de se déplacer et, pour l’accès à l’emploi, c’est un atout immense !

La Suisse est un pays démocratique qui offre l’égalité des chances pour tous. Devant le permis de conduire, les citoyens suisses et les étrangers jouent à égalité : il faut maîtriser le code de la route et son véhicule pour décrocher son permis !

La procédure à suivre

L’obtention d’un permis de conduire en Suisse peut prendre beaucoup de temps, mais tout dépend de la capacité du demandeur. Celui qui dispose d’un permis de conduire valable de son pays d’origine peut l’échanger pour un permis suisse après vérification. Le demandeur va recevoir une carte provisoire de 90 jours non-renouvelable. Il vaut la peine de mentionner que, dans ce cas, le demandeur a seulement une chance de passer l’examen pratique pour avoir un permis de conduire suisse. En cas d’échec, il devra suivre la procédure normale, c’est-à-dire obtenir un nouveau permis de conduire selon la loi suisse.

Les conditions à remplir

Il faut être âgé au minimum de 18 ans, remplir un formulaire attesté par la commune du demandeur et l’envoyer à l’autorité compétente. Il faut ensuite suivre un cours de samaritains (premier secours) avant l’examen théorique sous la forme de questions à choix multiples au centre de circulation routière. Les candidats à l’examen théorique, en cas d’échec, ne peuvent se représenter que 7 fois. Après, ils sont obligés de se soumettre à un examen psychologique.

Après l’examen théorique, il y a le cours de sensibilisation pour avoir accès à l’examen pratique. Si vous échouez pour la quatrième fois à l’examen pratique, vous ne serez admis à un nouvel examen qu’à la suite d’une expertise psychologique favorable.

Une longue liste de coûts

Les coûts varient selon les régions, mais ils restent toujours élevés pour le budget d’un requérant d’asile, si l’on tient compte de toutes les dépenses nécessaires : photos d’identité, test de vue, CD de préparation à l’examen théorique, cours de Samaritains, cours de sensibilisation, taxe de l’examen théorique, cours de pratique avec auto-école, taxe pour l’examen pratique et frais pour l’établissement du permis de conduire ! Cet investissement exige de gros sacrifices mais peut se révéler très fructueux.

Personnellement, j’ai échangé mon permis d’Afghanistan sans rencontrer de problème administratif. Ensuite, j’ai passé mon permis de chauffeur de taxi B121. J’ai financé moi-même les deux permis. Peu de temps après, j’ai eu la chance de trouver un emploi auprès d’une compagnie de taxis, ce qui est très exceptionnel en Valais pour un titulaire de permis N. La série de bonnes nouvelles a continué, puisque ma famille s’est ensuite vu reconnaître le statut de réfugié et que nous avons reçu un permis B !

Votre ordinateur ne marche pas !

Un compatriote Afghan, lui, a perdu son permis de conduire d’origine et pour cette raison a été obligé de tout refaire à nouveau. Après avoir passé par toutes les procédures administratives, il a malheureusement raté quatre fois son examen théorique. Il est un peu découragé, mais il va continuer à se battre, parce que dans sa famille ils sont 8 personnes et que les déplacements avec d’autres moyens de transports pourraient être très chers et difficiles.

Un autre Afghan est resté combatif après un échec à son examen théorique lorsqu’il a dit au moniteur : «  C’est votre ordinateur qui ne marche pas ! J’ai réussis l’examen sans problème sur mon smartphone et ici rien ne va. Comment est-ce possible ? ».

Pour traverser le long chemin jusqu’au permis, c’est sûr, il vaut mieux garder le sens de l’humour !

Kakar Mohammad Tariq

Ancien membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Sources:

http://www.ocn.ch/ocn/fr/pub/ocn_online/formulaires___notices.htm

https://www.ch.ch/fr/examen-theorique-de-conduite

https://www.vs.ch/web/guest/search?_3_keywords=combien+de+la+chance+pour+l%27examen+theorique&_3_struts_action=%2Fsearch%2Fsearch&_3_groupId=18119&p_p_id=3&x=0&y=0