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Réflexion sur le COVID-19

Street art – graffiti sur un mur d’un masque chirurgical pendant la pandémie actuelle de coronavirus (COVID-19) à Varsovie, Pologne. Auteur: Adam Nieścioruk.

Entrons-nous dans une nouvelle ère de notre histoire ?

Être dans l’isolement et la solitude m’a souvent apporté un sentiment de paix et d’équilibre. Cela m’a permis de m’unir à mes pensées les plus intimes et de contempler la vie et l’univers! Dans mon pays d’origine, la Syrie, la solitude a été mon fidèle compagnon. Mais ici, en Suisse, et avec un sentiment d’aliénation croissant, notre relation s’est encore renforcée!

Avec le déclenchement de la pandémie de Covid-19 en mars de cette année et la fermeture du pays, j’ai été transféré de l’isolement volontaire à l’isolement obligatoire! Un de mes amis a décrit son nouveau statut de confiné en plaisantant : « je passe d’une grande prison à l’isolement cellulaire! »

En fait, ce n’est pas le confinement, avec toutes ses restrictions et ses instructions de protection qui me dérange. Au contraire, j’essaie de respecter autant que possible les mesures préventives et je crois sincèrement qu’au milieu de cette hystérie collective, ce sont les seuls boucliers disponibles en ma possession pour me protéger et protéger les autres contre l’infection ou la maladie.

J’ai perdu le décompte du nombre de fois que je me lave les mains tous les jours! J’essaie d’éviter de toucher mon visage, de veiller à la distanciation sociale lorsque je fais mes courses ou lorsque je me promène… Bref, j’essaie de suivre les alertes et les instructions sur la pandémie de Covid-19 qui font désormais partie de notre nouvelle routine quotidienne.

Cependant, ce qui m’effraie le plus, ce sont les images et les rapports choquants et macabres diffusés régulièrement par les médias de masse et les réseaux sociaux, des scénarios apocalyptiques qui attendent l’humanité au lendemain de cette catastrophe! Les mises à jour quotidiennes montrant la propagation de la pandémie: les cas confirmés dans le monde, le nombre de morts et le nombre total de guérisons sont alarmants! Et pire encore, l’absence de solidarité et de coopération à l’échelle mondiale ajouté aux diverses tentatives de politiser la crise, sont d’autres facteurs aggravants qui « contribuent à alimenter la pandémie », a déclaré le Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (l’OMS).

Quatre mois après l’émergence du virus, le monde est toujours en état de choc et de grande confusion, car on ne sait ni comment le contenir, ni comment il se comporte! Chaque jour, nous entendons des déclarations émises par des institutions respectables qui semblent ambigües et incertaines! Sans parler des discours prononcés par certains dirigeants mondiaux qui semblent déroutants et contradictoires!

Combien de temps cela prendra-t-il avant que la vie ne redevienne normale? Comment la pandémie de Covid-19 va-t-elle changer notre façon de vivre? Je n’en sais rien! Mais une chose dont je suis sûre, c’est qu’il y a des gens là-bas, à quelques pas de chez moi, qui combattent jour et nuit sans relâche cet ennemi invisible et insidieux au péril de leur vie! La communauté de la santé, les volontaires, l’armée …

A tous ces braves soldats inconnus, je leur tire mon chapeau.

Dono

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

23/04/2020

 

 




«Mes premiers jours en Suisse»

La Suisse. Auteur: Damien Ligiardi (CC BY-NC-ND 2.0)

La Suisse. Une photo de Damien Ligiardi (CC BY-NC-ND 2.0)

André, un jeune Congolais de 21 ans, raconte son arrivée en Suisse. De surprises en déceptions, de rencontres en découvertes, il nous emmène sur les chemins tortueux de l’asile. Témoignage.

«Le mercredi 14 mars 2012, j’arrive au Centre d’enregistrement et de procédure de Vallorbe où je vis mon premier choc : lors du dépôt de ma demande d’asile – mon premier jour en Europe – je suis placé en «semi-détention» (selon les propos d’un gardien), comme l’exige la procédure.

Au centre d’enregistrement et de procédure de Vallorbe

Je passe donc près d’un mois en semi-détention à Vallorbe et cette expérience est très traumatisante. Mis à part le décor qui a changé, je retrouve ce que je fuyais dans mon pays : des hommes en uniforme qui se prennent pour des dieux, le mépris, l’enfermement, la misère lisible sur le visage des résidents et une alimentation bizarre, comme des macaronis roses mélangés à de la salade.

Au moment du départ du centre, on me remet un ticket de train. Destination : la ville de Lausanne. Arrivé à Lausanne, je me rends au service de la population de Canton de Vaud – le SPOP – qui me délivre un permis N, puis à l’antenne administrative de l’Établissement vaudois d’accueil des migrants – l’Evam – qui me remet 12 francs d’assistance financière journalière. Je me rends alors compte que je vais être transféré à Sainte-Croix ! je me demande alors «c’est où Sainte-Croix ?» J’interroge un Monsieur à la gare de Lausanne qui m’explique l’itinéraire à prendre. Désorienté et n’ayant pas la connaissance du pays, j’arrive à la gare de Sainte-Croix et je me demande si je suis toujours en Suisse, parce que dans mon imagination et vu le trajet effectué depuis Vallorbe, je pense être renvoyé hors des frontières du pays.

Arrivé au foyer Evam de Sainte-Croix

Arrivé au foyer Evam de Sainte-Croix, et selon le protocole, je me rends à l’intendance où l’on m’attribue un lit ainsi que quelques ustensiles pour la cuisine. Après m’être installé dans la chambre que je partage avec quatre autres requérants d’asile qui sont arrivés avant moi, je sors prendre l’air à la découverte du village qui m’accueille. Durant mon parcours à pieds, je me rends compte combien je suis loin de chez moi : Boma, une ville portuaire qui se trouve en République démocratique du Congo. Je ne peux retenir mes larmes qui se mettent alors à couler telles la pluie un jour d’orage. Je me rappelle alors les miens que je ne reverrai pas de si tôt et je me dis alors qu’il y a vraiment de quoi péter un plomb et devenir fou, se mettre une balle en pleine tête ou simplement essayer d’écrire un livre de deux mille pages jusqu’à en devenir ivre.

M’ayant aperçu en train de pleurer, un groupe de requérants d’asile s’approche de moi pour me consoler en me disant de prendre courage, que je m’adapterai, que ce parcours de la procédure d’asile me fortifiera et me rendra plus endurant. Ils m’invitent alors à jouer avec eux au volley-ball, histoire de me changer les idées. Une fois la nuit tombée, impossible pour moi de fermer l’œil, car ma tête est bourrée d’appréhensions. Je passe alors une nuit blanche. Le lendemain matin, avec mes compagnons de chambre, impossible de communiquer, car on ne parle aucune langue commune. Une vraie Tour de Babel ! C’est ainsi que s’ajoute l’ennui et l’isolement à la litanie de mes soucis. N’ayant personne avec qui discuter dans la chambre et n’étant pas enthousiaste à l’idée d’aller à l’extérieur à cause du froid extrême inconnu du jeune Africain que je suis, je pense alors à mes amis d’autrefois jouant au football pieds nus sous la chaleur brûlante de l’Afrique. Je m’exclame alors: « Dieu sauve moi ! ». Après mon bain, n’arrivant pas à manger par manque d’appétit et à cause de mes tourments, je cherche alors à savoir s’il y a dans le foyer des gens provenant du même pays que moi. C’est alors que j’en découvre un avec qui je sympathise et que je ne le lâche plus de la journée, soulagé de ne plus être seul. Avec ce dernier, on discute alors de tout et de rien et on mange avec appétit de la nourriture de notre pays. Le soir tombé, nous décidons d’aller regarder la télévision dans la salle prévue à cet effet, où je croise des gens venus des quatre coins du globe. Après avoir échangé avec eux, je commence enfin à me réjouir de mon séjour au foyer, qui m’offre la possibilité de mieux connaître le monde en étant en contact avec des personnes de diverses origines et cultures.

Quelques mois plus tard

C’est ainsi que débuta mon parcours en Suisse. D’un côté certes peu évident quant à ses débouchés, mais enrichissant et fortifiant de l’autre.

Aujourd’hui, mon activité de rédacteur à Voix d’Exils me permet de sortir de ma coquille de Sainte-Croix et de rencontrer du monde – dont le syndic de la Ville de Lausanne – par le biais d’interviews et de reportages. Je suis encore dans la même situation stressante, improbable et sans perspectives d’avenir. Mais, depuis que je suis à Voix d’Exils, je suis sorti de la déprime. Le sentiment d’utilité conféré par le choix, l’élaboration et l’aboutissement d’un article me redonne confiance en moi et fait que je ne me considère plus comme la cinquième roue du carrosse.»

André

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Où suis-je?

Dessin de Leyha GS

 

 

 

 

 

 

 

 

Mes yeux étaient verts d’espoir

Mais avec un regard profond et révolté

La solidarité que l’on n’atteint jamais

Comme une douleur qui s’en va et toujours revient.

 

Je garde mille questions sans réponses

La compassion, ce terme galvaudé

C’est seulement un mot, pas la réalité

Mes larmes tombent dans l’obscurité.

 

En cet endroit des fautes sans coupables

Ils ont fermé toutes les portes de leur cœur

Personne ici ne me tend la main

Mon angoisse ce n’est pas seulement la Solitude.

 

Si hier ressemblait à un nouveau demain

Il n’existerait pas de différences entre la nuit et le jour

Sachez que la souffrance n’est pas une option

Les choses ne se répètent jamais de la même façon. 

 

 

Parfois, nous avons laissé notre esprit voler dans le souffle du vent…

Aujourd’hui nous sommes ici, mais nous ne pouvons connaître notre destin.

 

Leyha GS

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

 

 

 

 

 

 

 

 




La solitude de l’exil


« La solitude de l’exil »

Photographie prise par Jacqueline Allouch le 27 décembre 2011 à Ouchy, Lausanne.