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Droits et devoirs des requérants d’asile à Neuchâtel

Vincent Schlatter chef de l’Office social de l’asile en premier accueil (OSAP) du canton de Neuchâtel

Interview de Monsieur Vincent Schlatter, chef de l’Office social de l’asile en premier accueil (OSAP) du canton de Neuchâtel

Voix d’Exils : Quelle est votre fonction au Service des Migrations (SMIG) du canton de Neuchâtel ?

Vincent Schlatter : Je suis responsable de l’OSAP. C’est principalement la gestion de l’hébergement collectif (centres de 1er accueil) et de l’assistance (l’argent et l’encadrement) pour les personnes qui arrivent dans le canton. Ça fait 6 ans que je travaille au SMIG.

Quel a été votre parcours professionnel avant de rejoindre le SMIG ?

J’ai fait beaucoup de missions humanitaires dans différents pays.

Combien y a-t-il actuellement de requérants d’asile dans le canton de Neuchâtel ?

Les statistiques de fin juin 2018 nous donnaient 110 personnes en 1er accueil (hébergement collectif) et 1030 personnes 2èmes accueil (en appartement), et 900 réfugiés, soit un total d’environ 2100 personnes.

Un requérant d’asile a-t-il le droit de travailler ?

Oui, après 3 mois de son dépôt de demande d’asile, mais ça ne veut pas dire que ça va être facile de trouver un travail.

Y-a-t-il des cours de langues pour les requérants d’asile ?

Oui, ils sont obligatoires. C’est la principale porte d’entrée pour trouver du travail.

Y a-t-il des formations professionnelles pour les requérants d’asile ?

Oui, nous « poussons » nos jeunes mineurs non accompagnées (MNA) à faire des formations. C’est un objectif de l’agenda d’intégration Suisse et un devoir des cantons d’y parvenir. L’intégration passe par l’apprentissage de la langue, par l’accès au travail, nous mettons tout en œuvre pour aider ces personnes à s’intégrer.

Que se passe-t-il quand une personne reçoit une décision négative. Peut-elle travailler ?

Les personnes ayant reçu une décision négative doivent quitter la Suisse, donc elles n’ont plus le droit de travailler.

Peut-elle garder son appartement ?

Non, la personne retourne en hébergement collectif et c’est le régime de l’aide d’urgence qui s’applique, si la personne le demande.

Est-ce qu’il y a des différences entre les cantons ?

La loi est la même pour toute la Suisse, mais l’application de la loi est cantonale. Nous avons une même loi et potentiellement 26 mises en œuvre différentes. C’est aussi ça la Suisse.

J’ai observé dans mon entourage des personnes ayant reçu une décision négative qui travaillaient, qui étaient en appartement, comment vous l’expliquer ?

La loi est pareille pour tous, mais chaque procédure est individuelle. Ce n’est pas tout d’avoir une décision négative. En principe la personne doit quitter la Suisse dans un certain délai, mais parfois le renvoi n’est pas exécutable. Après plusieurs années, ça peut devenir un cas de rigueur, c’est la justification d’une différence par rapport à la règle.

Il y a aussi des personnes qui travaillent au noir. Qu’en pensez-vous ?

Le travail au noir n’est pas légal. La législation n’est pas forcément respectée et cela peut amener à des dérives. Je comprends, si une personne ayant l’obligation de quitter la Suisse veut continuer à vivre en Suisse, le travail au noir est une alternative pour gagner sa vie et rester. La Suisse lui demande de partir, la personne travaille au noir et reste. Que faut-il changer ? La loi sur le travail ou la loi sur l’asile, je n’ai pas la réponse et je ne peux pas émettre un jugement.

Une personne ayant reçu une réponse négative peut-elle se marier ? Avec un Suisse ou une personne permis B ou C ?

La loi sur le mariage est très compliquée et subtile. Un avocat pourra mieux vous répondre.

Ce que je peux vous en dire c’est qu’en Suisse le mariage est un contrat. Il faut apporter des documents. Le mariage religieux ou coutumier n’est pas reconnu.

Si une personne ayant reçu une réponse négative peut apporter les documents demandés, elle pourra entamer les démarches en vue d’un mariage mais sans garantir d’aboutir. C’est du cas par cas.

Si un homme arrive en Suisse, demande l’asile et à 4 femmes et 30 enfants (j’en connais un) comment la Suisse va traiter son cas ?

En suisse le mariage est autorisé avec une femme et un homme. Les autres sont des amies, des copines qui devront demander l’asile séparément. Les enfants doivent probablement être reconnus légalement par l’homme pour son droit de paternité.

Avez-vous des projets pour améliorer la situation des requérants d’asile dans le canton ?

Nous sommes en réflexion permanentes pour améliorer les choses. Certains changements sont réalisables rapidement, d’autres prennent du temps, d’autres ne sont pas réalisables pour des raisons économiques.

Il faut toujours s’adapter car la population migrante change continuellement. Ça va très vite, parfois on arrive à anticiper, parfois on a un train de retard.

On doit aussi tenir compte des lois qui se votent sur le plan Suisse. Le peuple est souverain.

Muslim Sabah Muhammad Faraj

Membre de la rédaction Neuchâteloise de Voix d’Exils

 

Un exercice difficile

 Notre rédacteur Muslim Sabah Muhammad Faraj est arrivé en Suisse il y a environ 2 ans et demi. Très assidu aux cours de français, il a intégré le programme Voix d’Exils début 2018, apprenant peu à peu les bases du journalisme. Il m’a demandé comme première publication pour le site de faire une interview. C’est  un exercice difficile. Après 1h15 d’interview, et sur la base de notes et d’enregistrements, nous avons essayé de retranscrire au mieux les mots de Monsieur Vincent Schlatter, tout en gardant les mots de Monsieur Muslim Sabah Muhammad Faraj.

Marie-France Bitz

Responsable de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Un camp de vacances inoubliable

Photo: Voix d'Exils

Photo: Voix d’Exils

Du lundi 15 au vendredi 19 juillet 2013, le Service des Migrations du canton de Neuchâtel (le SMIG) a organisé pour la sixième fois un camp de vacances destiné aux enfants des requérants d’asile. Une dizaine de filles et de garçons, dont l’âge oscille entre 8 et 12 ans, ont passé des moments inoubliables au camp de Vaumarcus, dans le district de Boudry.

Ce camp de vacances, institué depuis 2002, est ouvert aux enfants des requérants d’asile. La première édition du camp a eu lieu dans la commune de Lignières, la seconde à La Côte-aux-Fées dans le district du Val-de-Travers et, depuis 2008, il se tient à Vaumarcus, dans un centre de rencontres, de formation et de vacances situé à mi-chemin entre Neuchâtel et Yverdon-les-Bains.

«On organise ce camp pour donner la possibilité une fois par année aux enfants des requérants d’asile de se retrouver hors du contexte familial, de venir dans des endroits comme le camp de Vaumarcus, d’avoir diverses activités et aussi pour permettre aux parents de souffler. Cette année, on avait prévu d’avoir 30 enfants. Mais seuls 15 enfants, dont 13 de requérants d’asile, ont répondu à l’invitation», explique Daniel Kienholz, responsable des programmes d’occupation du SMIG.

Sous la supervision de quatre accompagnants, ces enfants de diverses nationalités ont pratiqué des activités ludiques et sportives telles que du football, du basket-ball, du tennis de table, des joutes, de la marche à pied, ou du dessin.

Visites à Champ-Pittet et Grandson

Tout a débuté le lundi 15 juillet par une marche à pied, de la gare de Gorgier-Saint-Aubin à

Photo: Voix d'Exils

Photo: Voix d’Exils

Vaumarcus, d’une longueur d’environ 3,8 kilomètres.

Le mardi 16, les enfants et les accompagnants ont embarqué sur un bateau depuis le port de Vaumarcus et ont traversé le lac de Neuchâtel pour visiter la Fondation Champ-Pittet, située au cœur de la Grande Cariçaie: le plus grand marais lacustre de Suisse, qui se situe sur la rive sud du lac. Sur place, les enfants ont fait un jeu de piste avant de pique-niquer. Le mercredi 17, l’équipe s’est rendue au Château de Grandson – une ancienne forteresse située dans la commune vaudoise de Grandson – qui abrite une collection exceptionnelle d’armes et d’armures, ainsi qu’un musée historique. Les enfants ont pu s’amuser en participant à une chasse au trésor.

Capoeira et festin au menu

Jeudi 18, dans la soirée, les enfants ont eu droit aux démonstrations des jeunes «capoeiristes», vêtus de pantalons et t-shirts blancs avec inscription de l’association Capoeira de Neuchâtel. Ces derniers ont présenté l’art martial afro-brésilien avec des méthodes de combat et des danses africaines datant du temps de l’esclavage au Brésil. Un bal dansant a clos la démonstration des capoeiristes. S’en est suivi une soirée festive, à laquelle a été convié le personnel du SMIG. Marie-France Bitz, enseignante de français au centre de Couvet et Larisa Daudova, requérante d’asile d’origine Tchétchène, étaient aux fourneaux pour offrir aux enfants et aux convives des mets exquis.

Cap sur l’été 2014

Selon Daniel Kienholz, «cette année, les enfants ont été impeccables, il n’y a eu aucun problème de cohabitation». Ravis d’avoir passé de bons moments, les enfants des requérants d’asile ont unanimement loué l’initiative et ont particulièrement apprécié la qualité de la restauration et de l’hébergement. Pratheep, un jeune Sri-lankais, n’a pas manqué de mots pour féliciter l’organisation du camp de vacances: «je me réjouis de me retrouver ici et de rencontrer de nouveaux amis. La prochaine fois, je ne manquerai pas d’y participer». Une jeune érythréenne, qui n’a pas souhaité révélé son identité, a déclaré sa satisfaction en ces termes: «la croisière sur le lac m’a beaucoup plu. Pour une fois, je me sens valorisée et honorée en Suisse».

Le responsable des programmes d’occupation du canton de Neuchâtel a conclu en affirmant que «selon toute vraisemblance, le camp de vacances aura lieu l’année prochaine si les finances le permettent. Les enfants qui sont encore jeunes et dans la mesure ou il y a suffisamment de place pourront revenir ; mais on privilégiera des enfants n’ayant pas encore participé au camp».

Somme toute, les enfants ont quitté ce camp de vacances débordant de joie et ravis d’avoir passé des moments de découverte. Ils sont également heureux d’avoir élargi leurs cercles d’amis et souhaitent vivement que de telles rencontres se multiplient.

Paul Kiesse

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils