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La guerre hybride : une façon moderne de faire la guerre

Kramatorsk est une localité ayant une population de 200 000 habitants située dans la province de Donetsk qui est devenue l’un des principaux foyers du conflit en Ukraine. Les forces gouvernementales spéciales, comme celle sur l’image, ont pris le contrôle de l’aéroport, mais des miliciens pro-russes occupent le centre de la ville. Marko Djurica / Reuters / 19.04.2014 / CC BY 2.0.

Opinion sur la guerre hybride qui sévit en Ukraine depuis plus de 5 ans

L’humanité évolue tout le temps, et avec elle évolue aussi la façon de faire la guerre. Au XXI siècle, pour faire la guerre, il n’y a pas forcément besoin de la déclarer. Il s’agit d’un type de guerre généralement présenté comme alliant guerre conventionnelle et non conventionnelle, guerre régulière et irrégulière, guerre de l’information et cyberguerre. La formule « guerre hybride » est apparue encore en 2006 pour décrire la stratégie employée par le Hezbollah lors de la guerre du Liban, mais elle a été développée plus largement un peu plus tard.

Voici un exemple. Après la Révolution de la Dignité en Ukraine en 2014 et la fuite du Président ukrainien Viktor Yanukovych, l’Etat ukrainien était décapité. Personne ne pouvait donner d’ordres adéquats à l’armée ukrainienne. D’un autre coté, l’armée ukrainienne, elle-même, était affaiblie par la gestion inefficace, le financement insuffisant et la corruption. Le président de la Fédération de Russie a profité de la situation de chaos en Ukraine. En effet, les Russes ont porté un coup dans le dos de ceux qu’ils appelaient depuis plusieurs siècles « les frères ». Et pourtant, cela ne les avait jamais empêchés de tenter d’effacer ces « frères » de la surface de la Terre, par de multiples guerres, par l’assimilation de l’Ukraine en entier, par des russifications diverses, des répressions sanglantes, ou encore l’extermination par la famine appelée Holodomor etc.

Donc, cette fois-ci, les Russes n’ont de nouveau pas hésité à attaquer leurs « frères », en profitant du fait que l’Etat ukrainien se trouvait temporairement dans le chaos et l’anarchie. Ils ont envoyé leurs soldats déguisés, sans signes de reconnaissance, en leur inventant la légende qu’ils sont des « forces locales d’auto-défense ». Ils ont commencé à encercler des bases militaires ukrainiennes pour contraindre les gardes-côtes à rendre les armes. Ensuite, après le prétendu référendum tenu le 16 mars 2014, en fait illégal, de l’attachement à la Russie qui n’était qu’un spectacle organisé par les envahisseurs et mené sous la menace des Kalachnikov, la Crimée a été annexée.

Mais les Russes ne se sont pas arrêtés là, ils voulaient toute l’Ukraine ou du moins celle du sud-est. Dès lors, ils ont commencé à envoyer des militaires déguisés à l’Est de l’Ukraine, notamment dans la région de Donetsk et de Louhansk, qui se faisaient passer pour des rebelles locaux. Certes, il y avait des individus parmi les gens locaux qui ne voulaient pas que leur région fasse partie de l’Ukraine, mais ils étaient minoritaires, voire ultra-minoritaires. Les Russes ont organisé à travers les parties de la frontière ukrainienne, qui n’étaient pas sous le contrôle des autorités ukrainiennes, la livraison continue des armements et des personnes prêtes à tirer sur les Ukrainiens. Ils se sont engagés dans cette aventure délictueuse, autant de véritables militaires, officiellement retirés de l’armée russe, que toutes sortes de « bénévoles » qui étaient prêt à tirer sur les Ukrainiens, mais aussi des armées privées, comme le groupe Wagner.

Selon l’Amnesty International, les rebelles plaçaient des cibles militaires dans des quartiers d’habitation. A mon avis, l’objectif était que l’armée ukrainienne bombarde ces quartiers d’habitation pour que les Russes puissent montrer à la télévision comment l’armée ukrainienne « massacre » son propre peuple. A mon sens, ils se cachaient donc, un peu comme en Crimée, mais de façon beaucoup plus « sophistiquée », derrière et parmi les civils, en provocant les militaires ukrainiens pour qu’ils tirent dans leur direction. Cette guerre non déclarée dure toujours et on n’en voit pas la fin.

Voilà pour ce petit exemple. Il y en a d’autres, mais ils ne peuvent pas être décrits dans un seul article. A part le désastre, l’horreur, les douleurs et les tortures qu’engendre la guerre, la question subsidiaire est la suivante: est-il possible d’octroyer le statut de réfugié aux demandeurs d’asile qui viennent de pays où la guerre n’est même pas déclarée officiellement ? Cette question reste toujours ouverte.

VALMAR

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Regard d’un kurde Syrien sur son pays

Le Tunisien Bouazizi a allumé l’arc-en-ciel qui a coloré le ciel arabe d’est en ouest. Suite à l’immolation de Bouazizi, alors que les premiers éclats de révolte crépitaient en Tunisie, les dirigeants des autres pays arabes se croyaient encore à l’abri. Mais l’inondation a dépassé les prédictions et les ondes de la liberté se sont propagées pour faire tomber tous les dictateurs.

Un organisateur inattendu a surgi : Facebook. D’une part, Facebook a ouvert un grand champ de bataille médiatique aux personnes favorables au pouvoir en place qui ont accusé l’Ouest de vouloir se mêler des affaires internes des pays arabes. D’autre part, Facebook a offert aux manifestants un champ médiatique pour pouvoir communiquer leurs idées et leurs projets, créant ainsi une vraie organisation révolutionnaire. Pour rappel, à chaque fois, ces révolutions étaient spontanées.

Regard en arrière

En Syrie, deux manifestations ont avorté sous la violence du régime. La première a eu lieu en 2002, elle était organisée par les Kurdes devant le Parlement. la deuxième, en 2003, mettait en scène les enfants Kurdes qui revendiquaient le droit à la nationalité. Il faut savoir que les Kurdes ont perdu leur nationalité lorsqu’ils ont déposé, sur demande du gouvernement syrien, leurs documents d’identité.

En 2004 encore, les Kurdes ont manifesté pacifiquement leur mécontentement dans le nord du pays, lors d’un match de football, au Qameshli. Plusieurs Kurdes ont été violentés par la police pendant le match et ont été tués. Les manifestations ont gagné tout le nord du pays mais, rapidement, le régime a fait taire les Kurdes en déployant son armée et sa propagande pour susciter la haine entre les Kurdes et les Arabes. Le régime de Bashar Al-Assad voulait diviser le peuple, monter les gens les uns contre les autres pour qu’aucune opposition réelle ne puisse s’organiser.

L’histoire se répète

Depuis février 2011, bien que le régime en place était convaincu que le printemps arabe n’arriverait pas en Syrie, bien que beaucoup d’observateurs pensaient que la conscience politique des citoyens syriens n’était pas assez mûre pour que la révolution s’étendent, le peuple syrien s’est levé, et les manifestations se sont étendues du sud au nord.

Dès le début des manifestations, le gouvernement s’est montré mesuré dans ses déclarations, mais sa réponse a été d’une violence extrême. Selon une estimation, il y aurait plus de 10 000 morts et plus de 50’000 détenus, ainsi que plusieurs milliers de disparus, sans compter toute une population qui souffre et sans oublier les personnalités syriennes qui s’opposent au système politique et qui sont brutalisées par les milices d’Al-Assad. Certaines personnes, comme c’est le cas de M. Tammo (qui était le chef d’un parti Kurde) ont même été éliminées.

Le plan du régime

Que fait le régime actuellement? Il régionalise les mouvements, divise les manifestants par ethnies, religions et croyances. Il attise la haine entre les personnes en utilisant tous les moyens à disposition pour créer des conflits entre les communautés. Il prêche que la sécurité de certains groupes est menacée par cette révolution et il prétend aussi que cette révolution est liée aux mouvements salafistes.

Pour confirmer sa théorie, le régime attaque les manifestants dans certaines villes, comme à Deraa, où a commencé la révolution, menée par des enfants ; ou à Homs qui, avec ses diverses ethnies chiites, sunnites, alaouites et chrétiennes, est devenue la capitale de la révolution. Et aussi d’autres villes phares qui se sont révoltées et ont franchi la ligne rouge de la peur, comme à Hama, Idlib, Banyass, Deir ez zorr.

Entretemps, le régime évite d’ouvrir un front contre les Kurdes, sachant qu’il sera perdant. Il se contente de faire des arrestations par-ci par-là et de faire disparaître les victimes dans les cachots de « la République ».

Mais les autorités syriennes ne peuvent pas empêcher la population de déclencher des manifestations dans tout le pays. Actuellement, l’optimisme n’est pas de mise car l’assassinat et la torture sont le quotidien du régime. Si un homme rentre chez lui sain et sauf après une manifestation, on peut le considérer comme un miraculé. Les stades et les écoles sont transformés en camps de détention. Les citoyens se couchent et se réveillent avec la mort, toujours la mort : dans les médias, dans les familles, dans l’air… la mort est partout ! En Syrie, ce n’est pas le 21ème siècle, c’est le retour à l’Âge de pierre, sauf qu’aujourd’hui les combats se font aux lance-roquettes !

La situation humanitaire se dégrade toujours plus et devient précaire. L’État abuse de sa force et envahit les hôpitaux et les services d’urgence afin de tuer les blessés, pensant effacer ainsi les traces de sa répression cruelle et assassine.

Il y a une grave pénurie de produits de premières nécessités, tels que des médicaments pour soigner les blessés, du lait pour les enfants et les bébés, du mazout et du gaz. A cela s’ajoutent les coupures de courant pendant de longues périodes, l’augmentation du prix des denrées alimentaires de première nécessité et les difficultés de déplacements.

Les Syriens aspirent à la liberté, au changement, au besoin d’aller de l’avant. Le peuple est prêt à mourir pour parvenir à réaliser son rêve, car il n’y a aucun sens de continuer à vivre dans ces conditions !

Juan ALA

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




بصدد بعض « التجاوزات » اللغوية

Les abus de langage de l'UDC

Affiche de l’UDC produite à l’occasion de la votation fédérale du 26.09.10 ayant pour objet la révision de l’assurance chômage

« التجاوز » مفهوم يصعب تحديده، وبالتالي فهو عرضة لكل الاستعمالات، بما فيها تلك الأكثر تدليسا.  سمعنا من يتكلم عن « تجاوزات » في مجالات المعونة الاجتماعية والتأمين وبشكل خاص التأمين ضد العجز الصحي أو ضد البطالة والتجاوزات في حق اللجوء. ونشير بهذه المناسبة إلى أننا لم نسمع الكثيرعن « تجاوزات » في مجال المنافسة المالية، أو في حق العمل أو في ممارسات الشركات الكبرى. ويبدو أن الذين يرتكبون التجاوزات هم حصرا من فئات الأقليات المقهورة والمستغلة. إن من يرتكب التجاوزات في سويسرا هو الضعيف دائما وليس القوي. أما على المستوى السياسي، فإن مفهوم التجاوز يطرح مسألتين أساسيتين أود هنا إمعان النظر فيهما.

نطاق القانون غير المحدّد

إن العنصر الأول الذي يرتكز عليه الخطاب ضد التجاوزات يقوم على توسيع نطاق القانون بشكل يتعدى نصه، وسبر أعماقه للوصول إلى « روحه » أي بالطبع إلى معناه الضمني. وبعبارة أخرى، وعلى عكس مبدأ الليبرالية القديم ، الذي يقول بأن « الشيء غير المحظور ليس مسموح به تماما »، فهناك أمور جديرة بالعقاب لا تظهر بشكل صريح في القوانين السارية.

يركّز الخطاب ضد « التجاوزات » على القانون الذي ينظم مجتمع منضبط ومستقر، وأكثر من القانون، الذي تتسم بالطبع حدوده بالضبابية والتي قد تتغير حسب الظروف السياسية. ولكن من المنظور الديمقراطي، نجد أنه على العكس تماما، هناك القانون والأهداف التي يتوخاها هذا القانون، وهي ليست الانضباط والاستقرار ولكن الحرية والمساواة. يوجد دائما تفاوت ما بين القانون وأهدافه، ومن أجل هذا وجدت السياسة.  إن هذا التفاوت ليس من صنع شاة جرباء أو أغنام سوداء، ولكن لأنه لا يمكن أن يوجد في الواقع، مجتمع منضبط انضباطا كاملا فهو بحاجة دائما إلى قوانين تكيّف لاحقا طبقا للحاجة. وعلى عكس ذلك، فإننا نجد في خطاب التجاوزات أنه يلقي على القواعد المكتوبة وغير المكتوبة وحدها عاتق ضمان دوام الانضباط، وأن الأشخاص الذين لا يحترمون القواعد الأولى أو الثانية هم وحدهم من يتحمل مسؤولية الإخلال بالنظام. من هنا برزت هذه الفكرة الرعناء أنه بطرد هؤلاء الأشخاص يمكن التخلص من مسببات هذا الخلل.

من هم الأشخاص الذين قد يخالفوا هذه القواعد غير المكتوبة، أو بالاحرى الأشخاص الذين من الممكن أن يعتقد بسهولة معظم الناس أنهم يخالفونها؟ بالطبع هم الأشخاص الذين لا يعرفون سويسرا بالقدر الكافي، أي لا يلمّون بعاداتها وتقاليدها، لكي يدركوا هذه الدقائق واللطائف التي يشار إليها  تلميحا.

التفريد (إلقاء اللوم على الأفراد) في المعضلات الاجتماعية

هذا ما يسوقني إلى التعليق الثاني. إن مسألة التجاوزات ترتبط بشكل منطقي بالتفريد المتطرف للمسائل السياسية. بالنسبة للسياسة، لا يوجد معضلات اجتماعية. لا يوجد إلا أفراد مسؤولون عن أوضاعهم. وحينئذ يمكن الادعاء بأن البطالة ناجمة عن العاطلين عن العمل أنفسهم، وأن ديون مؤسسة التأمينات ضد العجز الصحي ناجمة عن الأشخاص الذين يرتكبون التجاوزات بحقها، وأن المعضلات المرتبطة بالهجرة ناجمة عن المهاجرين أنفسهم. إن إلقاء اللوم على الأفراد يسوق بالطبع إلى سحب المسؤولية عن السلطات السياسية بالكامل وإلى نضوب القدرة على الإبداع في العمل السياسي. فإذا ما ساءت الأمور، وعمّت الفوضى،  فهذا بسبب  أفراد لا يلتزمون بالقواعد، أناس « لا يشبهوننا »، جاؤوا للإخلال بالنظام والهدوء اللذين لولاهم لكانا مستتبين بشكل كامل.

إزاء هذه التفسيرات المضحكة، يجدر بنا أن نذكّر بأننا نعاني من معضلات اجتماعية. فوراء مسائل البطالة والإعاقة والإجرام والفقر قوى ديناميكية معقدة تتعدّى في معظم الأحيان بكثير قدرة سلوك الأفراد وحدهم. هذا لا يعني أن هؤلاء الأفراد لا يتمتعون بأية حرية بل على العكس، ولكن علينا أن نعاود القول بأنه لا يمكننا صنع سياسة جيدة باستبعاد هذه المعطيات البنيوية لسبب بسيط هو أن نسيانها يجعل كل القرارات السياسية غير فعالة. إن كل شخص يعتقد بأنه يكفي لكي تسترد مؤسسة التأمين ضد العجز الصحي صحتها المالية تنظيفها من مرتكبي التجاوزات أو طرد المجرمين الأجانب لكي يعمّ الأمن في سويسرا إنما هو ساذج وجاهل. إن هؤلاء يحلقون في عالم طوباوي ويجب مواجهتهم بواقعية العالم المعقدة من خلال حلول أحيانا معقدة بالتأكيد هي الأخرى، ولكن لا يمكن استبدالها بالإرادية الجامدة التي لا تأخذ في الاعتبار الثقل الذي تشكله المجتمعات.

التصدي للتبسيط والعودة إلى ممارسة السياسة

إن الخطاب حول التجاوزات يهدف إلى خلق عدو للمجتمع، عدو داخلي يجب حسر القناع عنه وطرده. هذا العدو هو المسؤول عن كل ما يعاني منه المجتمع من مصائب، فهو الذي يخلّ بالنظام ويضعفه. مثل هذا الخطاب له سابقة تاريخية، ويذكرنا بالأيام الحالكة التي شهدتها أوروبا خلال النصف الأول من القرن العشرين، ولهذا السبب يتحتم علينا التصدي له بحزم.

لعلنا ننجح في ذلك بالتذكير ببعض المبادئ الديمقراطية: ليس هناك « عدو » للمجتمع وإنما هناك خطوط انقسام اقتصادية واجتماعية وسياسية فيه. هناك أغنياء وفقراء. هناك مّلاك وعاملين، وهناك من ينتمي إلى اليمين ومن ينتمي إلى اليسار، الخ. ونحن لا نتفق فيما بيننا لا حول الأهداف التي نتوخاها ولا حول الوسائل للوصول إليها، فالسياسة هي بالضبط الحلبة التي يدور فيها هذا الصراع المتجدد دائما. وهذا بالضبط ما لا يقبله الذين يتشدقون باستمرار في خطاباتهم بـ »التجاوزات »: إن المجتمع السويسري، كما هو الحال في كل المجتمعات الأخرى، مجتمع غير متجانس، وهو غير محكم التنظيم. وذلك لأنه لا يوجد نظام نموذجي يمكنه ضبط عمله بشكل تام. ولذلك علينا باستمرار قراءة وإعادة التفكير بكل شيء: بسياساتنا، وبرؤيتنا للعالم، وبتعريفنا للمجتمع، وبأهدافنا، وحتى بقيمنا نفسها.

إن مجتمعنا ليس حقلا نطرد منه الأغنام السوداء لضمان الهدوء، بل أنه مجتمع متعدد الانقسامات وفي حركة دائمة.

أنطوان شوليه

مركز دراسة تاريخ الفكر السياسي والمؤسسات