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« Vous portez les Voix de celles et ceux dont on pense tant savoir et qui pourtant sont les plus silencieux »

De gauche à droite: Ezio Leet, Ahmed Jasim Mohammed, Jovan Mircetic et Elvana Tufa de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

 Lettre ouverte à la rédaction de Voix d’Exils

Il est temps pour notre coordinateur de programme et ancien civiliste, Monsieur Mircetic Jovan, de quitter la rédaction vaudoise de Voix d’Exils. A cet effet, il a souhaité adresser un dernier mot aux rédacteurs et rédactrices qu’il a eu l’occasion de côtoyer durant son passage.

 Chers rédacteurs, chères rédactrices,

On dit souvent que chaque nouveau début est difficile. Pour ma part, je dirais plutôt que toute bonne chose a une fin. En effet, après plus de 10 mois, il est temps pour moi de quitter la rédaction vaudoise de Voix d’Exils afin de poursuivre mon chemin. Comme vous le devinez sans doute, grâce à vous, mais aussi grâce à l’ensemble des collaborateurs et collaboratrices de l’EVAM que j’ai eu l’occasion de rencontrer, mon passage à Voix d’Exils fut une expérience très agréable. Afin de mettre un point final à cette aventure à vos côtés, je vous dédie ces quelques lignes.

« Voix d’Exils est bien plus qu’un média en ligne »

Tout d’abord, je souhaite vous dire que grâce à vous, Voix d’Exils est bien plus qu’un média en ligne. En effet, grâce à vous, pour les personnes qui ont l’occasion de vivre la chose de l’intérieur, comme j’en ai eu l’occasion moi-même, Voix d’Exils prend la forme d’une expérience humaine au travers de laquelle on peut beaucoup apprendre. Grâce à vous, Voix d’Exils est une belle équipe de rédacteurs et de rédactrices qui ont des messages à faire passer et des Voix à faire entendre. Grâce à vous, Voix d’Exils ce sont aussi des vécus, des échanges et du réconfort. Comme vous le devinez, au-delà du travail que nous avons accompli ensemble, échanger avec vous, découvrir vos parcours et vos récits fut très enrichissant. Je ne cache pas d’avoir été touché par vos histoires et vos personnes. Vous m’avez permis d’apprendre, de réfléchir et parfois de relativiser. Merci pour cela.

« Ensemble nous avons réussi à faire entendre vos Voix un peu plus loin »

Nous avons souvent travaillé avec les moyens du bord. Ensemble, nous avons imaginé certains projets qui n’ont pas pu être réalisés, par manque de moyens financiers ou de temps. D’autres n’ont pas vu voir le jour en raison de la période particulière que nous traversons. Finalement, certains projets ont subitement été interrompus, car l’un ou l’une d’entre vous nous a quitté, parfois pour des raisons très réjouissantes comme l’obtention du permis B ou un stage, parfois pour des raisons plus difficiles comme une réponse négative du SEM. Néanmoins, j’estime qu’ensemble nous avons tout de même réussi à faire entendre vos Voix un peu plus loin. Au travers de vos différents articles et projets, nous avons réussi à faire passer des messages qui vous tiennent à cœur et qui méritent, n’en doutez pas, que l’on s’attarde autour d’eux. J’ai eu du plaisir à voir vos idées prendre forme et à collaborer avec vous. Merci pour cela.

« Vous êtes la ressource la plus importante de la rédaction »

Après avoir passé plus de 10 mois avec vous, je peux dire avec assurance que vous êtes la ressource la plus importante de la rédaction. Au travers de vos contributions, vous portez les Voix d’Exils de sans doute beaucoup d’autre personnes qui n’ont pas l’opportunité de mettre sur papier leurs réflexions, leurs ressentis et leurs vécus. Vous portez les Voix de celles et ceux dont on pense tant savoir et qui pourtant sont les plus silencieux. Par conséquent, je vous encourage à continuer de partager un bout de vos personnes et de vos parcours avec nous. Au travers de vos écrits, vous poussez vos lecteurs et lectrices à rompre avec leurs prénotions et balayez les clichés qui façonnent les images que nous pouvons avoir des personnes requérantes d’asile. Merci pour cela.

« Nous aurons réussi ensemble à apporter notre pierre à l’édifice »

Comme annoncé, il est désormais temps pour moi de vous quitter. Un autre civiliste viendra me remplacer et peut-être qu’avec le temps, vous m’oublierez. Peut-être que prochainement d’autres rédacteurs et rédactrices prendront le relais et deviendront les porteurs et porteuses des Voix d’Exils à votre place. Peut-être que les couloirs de l’EVAM ne se souviendront ni de mon passage, ni du votre. Pourtant, nous aurons réussi ensemble à apporter notre pierre à l’édifice et à faire raisonner vos Voix un peu plus fort et un peu plus loin. Pour ma part, je ne l’oublierai pas. Je vous souhaite que la chance et le bonheur vous accompagne peu importe où les vents vous mèneront. De mon côté, je continuerai à vous lire. Je sais que de beaux projets sont cours de préparation et me réjouis de les voir publiés. Ce fut un réel plaisir d’être membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Au revoir belle équipe.

Mircetic Jovan

 

 

 

 




Un atelier de couture pour se sentir utile et favoriser les échanges

Chasuble de sport

A gauche, l’un des assistants sociaux portant le chasuble de sport confectionné par les couturières du Centre. A droite, l’une des couturières.

Depuis son ouverture en juin dernier, l’atelier de couture du centre de Couvet/ Neuchâtel ne désemplit pas. Voix d’Exils est allé à la rencontre des requérantes qui confectionnent dans la créativité et la bonne humeur des vêtements et du linge de maison destinés aux requérants. Interview de Liliane et Pirémila.

Liliane BERNADETTA MAMBO vient d’Angola, et Pirémila UTHAYAKUMAR du Sri Lanka. Toutes deux ne tarissent pas d’éloge sur leur atelier de couture qui leur apporte un peu d’argent et beaucoup de satisfactions. Après une vingtaine de minutes, Steefan, 18 ans, le fils de Pirémila, ainsi que Narcisse, jeune apprentie couturière de Syrie, âgée de 9 ans, se sont joints à nous.

Voix d’Exils: Depuis combien de temps êtes-vous au centre de Couvet?
Liliane : depuis décembre 2014.
Pirémila : depuis plus d’une année.

Comment occupez-vous vos journées au centre ?
Liliane : la journée, je m’occupe avec les activités de couture, après je passe à la cuisine, ensuite place au repos. C’est la routine.

Combien de temps passez-vous dans l’atelier de couture par semaine ?
Pirémila : nous travaillons tous les mardis et vendredis de 13h 30 à 17h30.

Quels sont vos sentiments en exerçant cette activité ?
Liliane : je me sens très bien, je me sens utile.

Pirémila : moi, j’ai beaucoup de plaisir dans l’exercice de cette activité, surtout avec Narcisse, cette fillette de 9 ans passionnée par le métier, à qui nous apprenons la couture.

Que faites-vous en particulier ?
Liliane : nous avons confectionnés une soixantaine de rideaux pour les fenêtres du centre.

Pirémila : nous avons aussi confectionné des chasubles pour le sport, soit des gilets de couleurs diverses pour différencier deux équipes. Actuellement nous sommes sur la production d’une centaine de grandes pièces en tissu, avec des poches, à suspendre au mur, pour le rangement. Elles sont faites avec des carrés de tissus récupérés d’habits donnés dans le centre. C’est la technique du patchwork.
Je précise que nous allons aussi travailler pour le centre de Fontainemelon, et aussi pour les Abris PC.

Quelle est votre rémunération ?
Liliane : 90 fr. par mois. Notre activité s’inscrit dans le cadre des TUP, des Travaux d’Utilité publique.

Êtes-vous satisfaites de cette rémunération ?
Liliane : oui, nous sommes très reconnaissantes, ça nous aide beaucoup.

Quel lien votre activité crée-t-elle avec les autres requérants du centre ?
Liliane : une ambiance gaie, chaleureuse et harmonieuse.

Pirémila : ils sont nombreux à s’intéresser à notre métier, d’aucuns pour apprendre et d’autres nous sollicitent pour les éventuelles retouches de leurs vêtements.

Y-a-t-il des difficultés auxquelles vous êtes confrontées dans l’exercice de cette activité ?
Liliane : non, pas tellement. Il y a des petits problèmes techniques au niveau des machines, mais qui sont vite résolus. Les machines tournent à fond, parfois elles tombent en panne et il faut les réparer.

Quels sont vos rapports avec les responsables du centre ?
Liliane : excellents ! Ils sont très ouverts, sympas, disponibles, à l’écoute et aussi porteurs d’un regard clairvoyant.

Quel est l’origine de cette idée d’atelier de couture au centre ?
Liliane : l’idée vient de notre enseignante Marie-France qui est soutenue par la direction.

Avez-vous des doléances ?
Liliane : oui, on aimerait que les responsables du centre nous soutiennent encore plus afin d’agrandir cet atelier, car je suis persuadée qu’il y a plusieurs besoins.

Avez-vous le droit de prendre des commandes externes ?
Pirémila : non, l’idée n’est pas de faire du business mais de donner aux requérants d’asile intéressés une occupation.

vide-poche

Vide-poche confectionné par les couturières du Centre

Avez-vous des projets personnels ?
Liliane : je n’ai pas de projet pour l’instant. Je vous remercie vivement pour l’intérêt porté à notre activité. Je profite aussi, pour remercier et exprimer toute ma reconnaissance à tous les responsables du centre de Couvet, en particulier le directeur, qui ont permis la création de cet atelier. Il nous permet de nous occuper, de combler une partie du vide et de créer beaucoup de contacts.

Pirémila : moi, cela fait plus d’un an que je suis au centre, et tout ce que je veux c’est le transfert dans un appartement. Je suis fatiguée de la vie au centre, même si j’ai du plaisir à exercer cette activité. Je saisis aussi l’occasion pour exprimer ma reconnaissance et ma gratitude à l’endroit des responsables du centre de requérants de Couvet, qui ont eu cette magnifique idée de créer cet atelier de couture, qui pour moi donne désormais une autre dimension à ma vie, une lueur d’espoir…

AKC, Membre de la rédaction Neuchâteloise de Voix d’Exils

P.S. Depuis notre passage, Liliane a été transférée dans un appartement et Pirémila continue à coudre avec passion.