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FLASH INFOS #90

Photo: Voix d’Exils

Sous la loupe : Interdiction stricte de voyager pour les permis F / La mairie de Grande-Synthe attaquée en justice / La Lituanie subventionne les retours au pays

Interdiction stricte de voyager pour les permis F

UNHCR, le 06.12.2021

En Suisse, le Conseil national a approuvé une interdiction générale de voyager pour les personnes admises à titre provisoire. Par conséquent, les voyages ne sont désormais accordés qu’à des conditions très strictes, en Suisse, pour les permis F.

L’adoption de cette réglementation risque d’aggraver la situation juridique de nombreuses familles réfugiées. En effet, ces personnes risquent désormais de voir leur admission provisoire annulée et d’être privées d’une autorisation de séjour pendant dix ans, dans le cas où elles se rendent dans un autre Etat.

Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a plaidé pour un compromis afin d’autoriser sous certaines conditions les voyages dans d’autres Etats Schengen.

L. B.

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

La mairie de Grande-Synthe attaquée en justice

infomigrants.net, le 10.12.2021

Vendredi dernier, six migrants iraniens, appuyés par les associations Utopia 56 et Human Right Observers, ont déposé une plainte contre la mairie de Grande-Synthe.  Ils ont saisi la justice afin de condamner la mairie pour ses actes, celle-ci n’ayant pas respecté la procédure d’expulsion du campement. Cette plainte survient après plusieurs expulsions illégales et le démantèlement du camp des personnes en situation d’exil par un convoi de police débarqué sans prévenir et sans mandat préalable. Les associations dénoncent notamment le fait que les tentes aient été lacérées et détruites et que les biens des personnes exilées aient été confisqués.

Rachid Boukhemis

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

La Lituanie subventionne les retours au pays

infomigrants.net, le 10.12.2021

La Lituanie a annoncé jeudi 9 décembre qu’une somme de 1 000 euros sera remise aux personnes exilées qui accepteront de rentrer dans leur pays, en plus d’un billet d’avion pour le retour. Cette somme d’argent est fournie par les fonds de la Commission européenne pour aider la Lituanie à faire face à la crise migratoire à ses frontières.

La Ministre de l’Intérieur Agne Bilotaite a déclaré à ce propos qu’après avoir rejeté la plupart des demandes d’asile, la Lituanie a besoin de solutions pour renvoyer les migrant·e·s dans leur pays d’origine. Actuellement, sur les 3’272 demandes d’asile formulées, la Lituanie n’a accepté le statut de réfugié qu’à 54 personnes.

L. B.

Membre de la rédaction vaudoise Voix d’Exils

 




La laïcité au Moyen-Orient

Source: unsplasch.com.

Les raisons de l’échec de la laïcisation au Moyen-Orient et particulièrement en Iran

La révolution philosophique qui a eu lieu en Europe entre les 17ème et 18ème dit «Siècle des Lumières» n’a jamais pris fin au Moyen-Orient. L’ingérence de gouvernements étrangers et de communautés religieuses très conservatrices dans cette région du monde n’ont pas favorisé la laïcité. L’Iran, à présent dirigé par une politique idéologique, est le meilleur exemple que l’on peut examiner pour comprendre cette situation.

En Europe, le premier pays à avoir connu la laïcité après des développements politiques a été la France. La question de la séparation de la religion et de la politique est devenue une loi fondamentale en France avec la Constitution de la 4ème République de 1948. Après la France, des pays tels que la Belgique, la Turquie et des villes canadiennes comme Québec, ainsi que Genève et Neuchâtel en Suisse ont adopté la laïcité dans leur Constitution.

Que signifie la laïcité ?

Laïcité signifie qu’un gouvernement n’adhère à aucune religion. La religion fonctionne librement dans la société civile, mais elle n’exerce aucun pouvoir sur le champ politique.

Les partisans de la laïcité en Occident estiment que la religion devrait rester dans les lieux de culte et ne pas se mélanger avec les lois des États. Mais en Orient, cela a un autre sens. La majorité des populations du Moyen-Orient pense que la laïcité est anti-religieuse et elles ont peur de «perdre leur religion».

 

Source: unsplasch.com.

En Iran

Dans mon pays – l’Iran – il y a aussi d’autres raisons qui expliquent cet échec de la laïcisation. Par exemple, l’existence du pétrole, la colonisation du pays par la Grande-Bretagne et les États-Unis et un régime communiste imposé par les russes. Ces emprises politiques sont des raisons historiques qui ont rendu les peuple incapable d’agir de manière indépendante dans ses décisions politiques.

L’exemple le plus important à citer dans l’histoire iranienne est celui du gouvernement de Mohammad Mossadegh. Mohammad Mossadegh était Premier ministre de l’Iran de 1951 à 1953. Mentionnons au passage qu’il a étudié à l’Université de Neuchâtel. Pendant ces années, il a essayé de séparer l’État de la religion et de promouvoir la laïcité dans ce pays religieux. Mais son gouvernement a fini par être renversé par trois groupes d’intérêts:

1 : Les dirigeants religieux

2 : Le Shah (Mohammad Reza Pahlavi) et ses partisans

3 : Les puissances étrangères: la Grande-Bretagne et la nouvelle puissance des États-Unis (qui lorgnaient sur le pétrole du pays).

Les dirigeants religieux se sentaient menacés par la précarité de l’emploi ; Le Shah craignait de perdre du pouvoir et de l’argent et, enfin, La Grande-Bretagne et l’Amérique à cause du pétrole. Ces trois groupes d’intérêts de l’époque se sont donc unis pour organiser un coup d’État contre le gouvernement laïc de Mohammad Mossadegh en 1953. Le principal prétexte qui justifiait leur action commune était de combattre les communistes soviétiques, car l’Iran occupe une position stratégique et géographique importante. Mais plus encore, c’était la sauvegarde de la communauté religieuse iranienne.

Source: unsplasch.com.

L’anti-religion

Actuellement, la société iranienne considère la laïcité comme une anti-religion. Les particularités religieuses, culturelles et sociales du peuple iranien font aussi qu’il est très difficile de gouverner ce pays. Les ayatollahs iraniens, qui détiennent le pouvoir politique depuis maintenant 40 ans, n’ont pas été en mesure de gouverner le pays. Même ceci est compréhensible pour la plupart des citoyens et citoyennes iraniens.

Cette situation est cependant bien complexe. Car il y a d’un côté, la jeunesse iranienne qui cherche une ouverture plus grande; et de l’autre, les forces conservatrices qui restent très puissantes. Les théoriciens de la politique doivent trouver le moyen pour diriger le clergé vers sa position d’origine: à savoir les mosquées. Reste aux politiciens et politiciennes de tracer un chemin pour arriver à la laïcité. Des exemples inspirants sont les chemins suivis par l’Italie et l’Allemagne.

Un tel chemin pour l’Iran signifierait que d’un côté, la religion fonctionne de manière autonome. Et de l’autre, que le pays soit par conséquent davantage dirigé par des hommes et des femmes politiques. Mais ces futurs dirigeants devront avancer pas à pas afin de ne pas couper leurs relations avec les universités et les écoles. Sinon, la population iranienne ne l’acceptera pas. Mais pour l’heure, la société ne veut pas abandonner ses croyances. Du moins, jusqu’à aujourd’hui, c’est toujours le cas…

Vahid Farkhondeh Khoy Fard

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils

 




Interview de Dick Marty

Dick Marty au Salon du livre romand 2019. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Au Salon du livre romand

Ancien procureur général, parlementaire et magistrat chargé d’enquêtes internationales auprès du Conseil de l’Europe, Dick Marty s’est engagé dans toutes ses missions avec courage et sans concessions.

Il a travaillé en tant que rapporteur dans des dossiers sensibles au Kosovo, en Tchétchénie et sur les prisons secrètes de la CIA, mais aussi en Suisse dans son rôle de procureur sur des enquêtes difficiles liées au trafic de drogues et au terrorisme.

En 2018, lors d’une longue convalescence, Dick Marty décide de réunir ses souvenirs dans un livre au titre explicite :

« Une certaine idée de la justice ».

Dans ce récit, l’auteur ose dénoncer les implications de nos démocraties occidentales dans les conflits au Moyen-Orient et ailleurs. C’est aussi un livre émouvant qui relate ses rencontres avec des victimes d’injustices partout dans le monde. Car pour Dick Marty, il ne faut jamais perdre de vue les victimes a qui l’on doit reconnaissance et réparation.

Son livre se termine par un hommage dédié aux femmes courageuses qu’il a rencontré dans ses nombreuses missions : « Les femmes qui sauront bien mieux que nous avons su le faire, œuvrer pour un monde plus juste. »

Marie-France Hamou

Contributrice à Voix d’Exils

Interview de Dick Marty

Photos de Dick Marty au Salon du livre romand 2019

 

Dick Marty au Salon du livre romand 2019. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

 

Dick Marty au Salon du livre romand 2019. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

 

Dick Marty et la rédaction de Voix d’Exils au Salon du livre romand 2019. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

 




« Schéhérazade »

pixabay.com CC0 Creative Commons

Chroniqueur du génocide

En mémoire du 103ème anniversaire du génocide arménien

J’ai lu l’œuvre épique de Franz Werfel (900 pages) Les_Quarante_Jours_du_Musa_Dagh (1933), il y a près de vingt ans. Un roman passionnant basé sur les témoignages épouvantables des réfugiés arméniens, que le célèbre écrivain autrichien-bohémien avait rencontrés à Damas-Syrie, en 1929, lors d’une tournée au Moyen-Orient avec sa femme[i].

J’ai été tellement impressionné par les événements et les personnages que pendant des mois ils sont devenus une partie de moi. Je ne sais pas pourquoi, peut-être parce que je suis moi-même un descendant d’un survivant du génocide et mon âme troublée a été hantée par d’innombrables histoires de massacres et de déportations.

Pour vous dire la vérité, je me suis parfois posé la question hypothétique: Si Franz Werfel avait poursuivi son voyage en Syrie en traversant les camps de concentration de Deir elzor au nord-est de la Syrie: Ras alain, et ma ville natale Qamichli, il aurait pu rencontrer, parmi innombrable d’autres survivants du génocide arménien, mon grand-père Bedros et bien entendu son incroyable histoire de mort et de résurrection! Et pourquoi pas? Il aurait pu produire son deuxième chef d’œuvre intitulé Schéhérazade, d’après la célèbre conteuse des Mille et Une Nuits!

Tout a commencé dans un petit village du sud-est de la Turquie dans la province de Batman, district de Besiri, région principalement peuplée de Kurdes, d’Arméniens et d’autres minorités chrétiennes, pendant et à la suite le génocide arménien perpétré par la Turquie ottomane en 1915.

Après le massacre de sa famille élargie, l’orphelin Bedros, ne fut pas mis à mort pour la seule raison d’avoir été doté d’une voix merveilleuse et d’une étonnante capacité à mémoriser et chanter des chants traditionnels kurdes d’origine folklorique!

Ainsi, l’enfant arménien analphabète, qui ne parlait que kurde, âgé probablement de 14 à 15 ans, grandira pour devenir le principal chanteur traditionnel d’un chef féodal kurde influent de la région.

Chaque soir, les villageois fatigués et les invités des régions voisines affluaient dans la grande salle, présidée par le Chef, désireux d’entendre le « divertissement » de Bedros. Il récitait de son « répertoire » sans fin, des chansons folkloriques et des récits historiques qu’il avait entendus depuis son enfance: des histoires de batailles féroces, de vaillants héros et de grandes villes. Il chantait aussi les louanges du Chef, louant ses vertus ainsi que les mérites de ses ancêtres. Mais, pas un mot de la douleur brûlante qui tourmentait son corps et son âme: les horribles images du massacre de sa famille et de l’extermination de toute son ethnie !

Comme l’héroïne intelligente des Mille et Une Nuits qui gardait le roi Shahryar excité par ses contes pour qu’il puisse épargner sa vie un jour de plus, Grand-père n’oublia jamais le récit du jour suivant, de peur que cela ne lui coûte sa vie.

Mais, tandis que l’histoire de Schéhérazade se termine heureusement à la fin des Mille et Une Nuits, son épreuve prend encore un autre tour tragique.

Une fin de soirée morne, ayant terminé sa « performance », épuisé et désespéré, il traîne ses pieds à la maison à l’extrémité du village, et découvre une scène qui lui glace le sang et qui laissera abasourdi jusqu’au dernier jour de sa vie! Sa maison était totalement pillée, sa femme kidnappée, son petit-fils et son neveu, âgés de 3-4 ans, étroitement attachés aux barreaux de la fenêtre, égorgés d’une oreille à l’autre…

Je n’ai pas vu mon grand-père qui est décédé quelques années après son évasion miraculeuse en Syrie et après avoir sauvé sa femme. Mais, je me souviens bien de son visage pâle qui regarde le vide sur une photo accrochée au mur de notre chambre. Ses yeux grands ouverts semblaient désespérément à la recherche de quelqu’un pour raconter les histoires jamais racontées de ses êtres chers, ainsi que de nombreuses autres histoires douloureuses et tristes…

H. Dono

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

1-  BBC radio Documentaire sur le roman de Franz Werfel Quarante jours de Musa Dagh http://www.bbc.co.uk/programmes/b09pkmpc

2- Base documentaire sur le génocide arménien http://www.imprescriptible.fr/

 




« Je suis Charlie » : stop mobilization!

Auteur: nadassfoto "Je suis Charlie" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: nadassfoto « Je suis Charlie », manifestation suite au massacre de la rédaction du journal Charlie Hebdo » (CC BY-NC-SA 2.0)

Is Charlie Hebdo attack new to social phenomena? What are the reasons behind Islamic terrorism? Is freedom of speech a western value? This article attempts to handle these tough questions by giving way to thinking outside the box into which mobilizers are forcefully pushing us.

What shocked me in Paris terror attacks was different from what afflicted a large part of the Occident. Even though much of what I experienced in my life as a free writer would make me identify with humanists and free artists in general, I see in social identification a great part of the problem.

I was stunned by the speed western society mobilized after the 7th of January attacks. This difference in attitudes is due to the fact that I had my secular upbringing in a widely religious society, and I learnt how to deliver, pass and code my messages and my divergent views in an environment that does not acknowledge individuality, human rights, and the freedom of expression. In contrast, Europeans and Americans, generally, think of human rights and freedom of speech as part of their cultural heritage rather than universal values, and tend to think of terrorism as rooted in another culture or other cultures. However, by thinking like that, they are likely to marginalize and exclude a considerable percentage of western citizens who come from oriental origins whether well integrated or not.

I wonder why all those muslims in France feel the need to defend themselves against putative accusation of terrorism as the French law does not convict people of terrorism unless they are complicit in it. In other words, if I were a French Muslim and I trusted the rule of law in France, why would I feel threatened if five million French Muslims turned to be terrorists?

Auteur: Bernard Blanc "Pau est Charlie, Béarn, Pyrénées Atlantiques, Aquitaine, France" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Bernard Blanc « Pau est Charlie, Béarn, Pyrénées Atlantiques, Aquitaine, France » (CC BY-NC-SA 2.0)

I wonder also why a parallel mobilization is taking place in the USA where more extremist reactions are coming out. Paris attacks are being excessively exploited by Obama’s opponents to denounce his policy regarding the Middle East and the Muslim world in general. Moreover, the talk about pausing Muslim immigration is witnessing a renewal. Such reaction is excessive when we realize that France has proportionately a much larger Muslim population than North America. I wonder also why a terrorist attack conducted by a small number of people triggers off such controversy in the American medias about a menacing third world war unless there is a desire to declare it. If we exclude the notion that this kind of mobilization is part of the preparations for this war (which is the worst possible scenario) and tend to think that occidentals are responding to the threat by highlighting a principal emblem of their culture (freedom of expression), then it is also not the best thing to do.

Auteur: Quentin Chandelier "Je suis Charlie" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Quentin Chandelier « Je suis Charlie » (CC BY-NC-SA 2.0)

Occidentals should be very careful with matters of identity and should not overuse the slogan « I am Charlie » for the risk of becoming an alienating slogan as well as paving the way for a rivaling slogan « I am not Charlie » as long as they actually care about stability in and out of the Western world. I would like to bring the attention to the frustration Muslims might feel as a result of finding themselves constantly stigmatized as perpetrators of terrorism. Moreover, the reluctance or the failure at integrating Muslims is liable to lead the frustrated ones to succumb to the call of terrorists. Personally, I think of Islamic terrorism as a natural aggregate result of the failure of integration programs in the west, and the obvious unwillingness of the global powers to make peace in the Middle East.

I would like to direct the attention of those who are involved in the movement of mobilization that stressing certain values is actually a symptom of an imminent crisis because all the human values are consequently reduced to one highlighted value − in this case it is « freedom of expression ». Hitler relied heavily on two values (dignity and pride) to mobilize Germans. Likewise, Islamic terrorists prioritize the value of « martyrdom » to mobilize their recruits. Needless to mention also that to create a crisis is much easier than to solve it. Social identification is a capacity of our minds and a method to defend our identity against the outside world, but also a risky rejection and by extension, knowledge of the « other ». In fact, a Muslim who identifies with his prophet Mohammed is going through the same mental process by which a professor identifies with his/her titles and certificates and gets mad because a student addresses him/her without this title. Both Mohammed and the title work as sources of values. An original problem arises when this Muslim or that professor has no other sources of values to safeguard his/her self-image, and the second problem comes when individuals or the society shakes their self image constantly and pushes them to eliminate the sources of their trouble by murdering or rejecting their « offenders ». I do not pretend that I know all the details or the motives for the Charlie Hebdo massacre, but what I am sure about is that it is not new to social phenomena and if we broaden the scope of our social identification, we will find out that it is not more horrific than what is taking place all over the world.

Auteur: Franck Mée "Hommage" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Franck Mée « Hommage » (CC BY-NC-SA 2.0)

I think it is not reasonable to say that all of France or the western world has been attacked, and those who do so, are actually using the same logic that Islamists use when they say that Islam has been attacked. Really, by adopting this exaggeration for either assessing threats or evading them, occidentals give a justification for Islamists who would have more reason to talk about anti-Muslim attacks after all that chaos in the Muslim world and the overt intervention of different western powers.

If occidentals care about stability and freedom of expression inside their borders they have to work for stability, democracy and human rights outside their borders. By doing so, they would help Muslims and others criticize their own values, broaden their vision of their humanity and bolster their intolerance. By doing the opposite along with an insistent association between Islam and terrorism, they just push them towards radicalism.

Ibrahim Rami

Membre de la rédaction Neuchâteloise de Voix d’Exils

« Je suis Charlie » : arrêtez la mobilisation !

Est-ce que l’attaque contre Charlie Hebdo est un nouveau phénomène social? Quelles sont les raisons qui animent le terrorisme Islamique? Est-ce que la liberté d’expression est une valeur occidentale? Cet article tente de traiter ces questions difficiles en proposant un point de vue qui sort du carcan dans lequel les protestataires du mouvement «Je suis Charlie» nous enferment forcément.

Ce qui m’a choqué dans les attaques terroristes à Paris était différent de ce qui a affligé à une grande partie de l’Occident. Même si une grande partie de ce que j’ai vécu dans ma vie en tant qu’écrivain libre me conduirait à m’identifier aux humanistes et artistes libres, en général, je vois dans l’identification sociale une grande partie du problème de cette mobilisation.

J’ai été stupéfait par la vitesse avec laquelle la société occidentale s’est mobilisée suite aux attaques de janvier 2015 à Paris. Cette différence d’attitude est due au fait que j’ai une éducation laïque dans une société largement religieuse et j’ai appris comment livrer, passer et coder mes messages et mes points de vue divergents dans un environnement qui ne reconnaît pas l’individualité, les droits de l’homme, et la liberté d’expression.

En revanche, les européens et les américains, en général, considèrent les droits de l’homme et la liberté d’expression comme étant l’héritage de leur patrimoine culturel plutôt que des valeurs universelles et tendent à penser que le terrorisme est enraciné dans une autre culture ou d’autres cultures. Toutefois, en pensant de la sorte, ils sont susceptibles de marginaliser et d’exclure une partie considérable des citoyens occidentaux qui sont d’origine orientale, bien intégrés ou non.

Je me demande aussi pourquoi tous ces musulmans en France sentent la nécessité de se défendre contre l’accusation présumée de terrorisme, étant donné que la loi française ne reconnaît pas les gens comme terroristes, à moins d’y être directement impliqué. En d’autres termes, si j’étais un musulman français et que je faisais confiance à la primauté du droit en France, pourquoi devrais-je me sentir menacé si cinq millions de musulmans français se sont tournés vers les terroristes ?

Je me demande aussi pourquoi une mobilisation parallèle se déroule aux États-Unis, où davantage de réactions extrémistes se manifestent. Les attentats de Paris sont excessivement exploités par les adversaires d’Obama pour dénoncer sa politique au Moyen-Orient et dans le monde musulman en général.

En outre, le discours sur la suspension de l’immigration musulmane témoigne d’un renouveau. Cette réaction est excessive, lorsque nous nous rendons compte que la France a une population musulmane proportionnellement beaucoup plus grande que l’Amérique du Nord. Je me demande aussi pourquoi une attaque terroriste menée par un petit nombre de personnes déclenche une telle controverse dans les médias américains qui parlent d’une troisième guerre mondiale menaçante si ce n’est un désir de la déclarer.

Si l’on exclut l’idée d’une telle mobilisation en guise de préparatifs pour cette guerre (ce qui serait le pire scénario possible) et tendons plutôt à penser que les occidentaux font face à la menace en mettant en évidence l’emblème principal de leur culture (liberté d’expression) alors ce n’est également pas la meilleure chose à faire….

Les occidentaux devraient être très prudents avec les questions d’identité et ne doivent pas abuser du slogan «je suis Charlie» qui risque de devenir un slogan aliénant ouvrant la voie à un slogan rivalisant «je ne suis pas Charlie». Ce, bien entendu, pour autant qu’ils se préoccupent vraiment de la stabilité à l’intérieur et en dehors du monde occidental.

Je voudrais aussi attirer l’attention sur la frustration des musulmans qui pourraient se sentir par la suite en étant constamment stigmatisés comme auteurs potentiels d’actes terroristes. Personnellement, je pense que le terrorisme islamique est le résultat naturel de l’échec des programmes d’intégration dans l’Ouest, de la réticence évidente des grandes puissances mondiales à faire la paix aux Moyen-Orient et de la réticence ou l’incapacité à intégrer les musulmans, ce qui est susceptible d’amener les frustrés à succomber à l’appel des terroristes.

Discutons à présent des personnes qui sont impliquées dans le mouvement de mobilisation «Stop Charlie» et qui, en soulignant certaines valeurs, en font le symptôme d’une crise imminente où toutes les valeurs humaines sont réduites à une valeur mise en évidence. Dans ce cas: « la liberté d’expression ». Hitler s’était fortement appuyé sur deux valeurs : la dignité et la fierté pour mobiliser les Allemands… De même, les terroristes islamiques mettent la priorité sur la valeur de « martyrs » pour mobiliser leurs recrues. Inutile de mentionner également que créer une crise est beaucoup plus facile que de la résoudre…

L’identification sociale est une capacité de notre esprit et une méthode pour défendre notre identité contre le monde extérieur, mais aussi, par extension, un rejet risqué de la connaissance de « l’autre ».

En fait, un musulman qui s’identifie à son prophète Mahomed passe par le même processus mental que par lequel un professeur s’identifie avec ses titres et se met en colère parce qu’un élève l’aborde sans faire appel à ses titres. Comme le titre de professeur, le prophète Mohamed est une source de valeurs. Un problème initial se pose lorsque ce musulman ou ce professeur n’a pas d’autres sources de valeurs pour sauvegarder son image et le second problème vient quand les individus ou la société bouscule leur image en permanence en les poussant à éliminer les sources de leur détresse en assassinant ou rejetant leurs « délinquants ».

Je ne prétends pas connaître tous les détails ou les motifs du massacre de Charlie Hebdo, mais ce dont je suis sûr, c’est que ce n’est pas nouveau en tant que phénomène social et que si nous élargissons la portée de notre identification sociale, nous allons découvrir qu’elle n’est pas plus horrible que ce qui se passe partout ailleurs dans le monde.

Je pense que ce n’est pas raisonnable de dire que toute la France ou le monde occidental a été attaqué, et ceux qui le font effectivement utilisent la même logique que les islamistes quand ils disent que l’islam à été attaqué.

Vraiment, en adoptant cette exagération soit pour évaluer les menaces ou les élucider, les occidentaux donnent une justification pour les islamistes qui auraient plus de raisons de parler d’attaques anti-musulmanes après tout le chaos dans le monde musulman généré par l’intervention manifeste de plusieurs puissances occidentales dans cette région…

Si les occidentaux se soucient réellement de la stabilité et de la liberté d’expression à l’intérieur de leurs frontières, ils doivent aussi travailler pour la stabilité, le respect de la démocratie et des droits humains en dehors de leurs frontières.

En faisant de la sorte ils aideraient les musulmans et tous ceux qui critiquent leurs valeurs à élargir leur vision de l’humanité et à renforcer leur tolérance. En faisant le contraire et en associant de manière insistante l’islam au terrorisme, ils ne font que pousser les musulmans  vers le radicalisme.

Ibrahim Rami

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils