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Pourquoi les dictateurs des pays de tiers-monde s’accrochent tant au pouvoir ?

Congo, Ouganda, Sri Lanka et bien d’autres : nombreux sont les pays en voie de développement qui sont encore aujourd’hui dirigés par des dictateurs souvent sanglants. Comment ces régimes parviennent-ils à s’installer durablement ? A quand la démocratie dans les États du Tiers-monde ? La rédaction valaisanne de Voix d’Exils apporte son regard sur cette problématique ô combien sensible.

Mouammar Kadhafi. (CC BY-NC-SA 2.0). Auteur: Ssstto

Mouammar Kadhafi. (CC BY-NC-SA 2.0). Auteur: Ssstto

Le monde est rempli de chefs d’Etat dictatoriaux qui ne connaissent pas la valeur de la démocratie. Ils privilégient leurs intérêts personnels plutôt que ceux de leur pays et s’accrochent au pouvoir éternellement, quel qu’en soit le prix.

Un simple regard sur l’histoire des pays en voie développement permet d’observer la longue lignée de dictatures militaires qui ont prévalu dans ces régions. Cela a été la tendance ces 50 dernières années, presque à chaque fois qu’une nation colonisée a retrouvé son indépendance.

Richesses naturelles et influences internationales

Après l’indépendance, l’espoir était souvent le même : un meilleur futur en pouvant disposer des propres ressources naturelles du pays. Mais après quelques années, force est de constater que de nombreux pays se sont retrouvés coincés entre deux forces : le bloc communiste d’un côté, le bloc capitaliste de l’autre. Dans un contexte de guerre froide, ces deux rivaux ont souvent agi dans la crainte de voir une région basculer dans le camp ennemi et de perdre du même coup le contrôle de précieuses richesses naturelles. La peur d’une avancée adverse a mené à une politique sans scrupule et à des interventions militaires, notamment en Afrique. L’exemple du Congo est frappant : Patrice Lumumba, considéré comme proche du régime soviétique, a été tué par une combinaison d’agences belges et américaines au profit de Mobutu, plus « occidento-compatible », qui est par la suite devenu – entre 1965 et 1997 – l’un des plus rudes dictateurs jamais connus en Afrique.

Les richesses naturelles dont disposent bon nombre de pays en voie de développement – bien que souvent exploitées par un pays du bloc Nord – expliquent également le maintien à long terme de ces dirigeants assoiffés de pouvoir. Avec un accès presque sans surveillance à ces ressources et à l’argent qu’elles génèrent, les dictateurs en ont profité pour acheter des armes et s’enrichir.

 

Mahinda Rajapakse, Président du Sri Lanka depuis 2005. affiche de Mahinda, prise en 2009 (CC BY 2.0)

Mahinda Rajapakse, Président du Sri Lanka depuis 2005. affiche de Mahinda, prise en 2009 (CC BY 2.0)

Le népotisme au service de dynasties familiales

Au quotidien, ces dictatures érigent en norme les violations de la constitution, l’impunité, la gabegie, ou encore la torture de leurs adversaires politiques. Le népotisme devient également monnaie courante, à l’image du Sri Lanka, où le président Mahinda Rajapakse, arrivé au pouvoir en 2005, a mis en place une véritable dynastie familiale. Un de ses frères est le président du parlement, un autre est le ministre du développement économique, un troisième frère n’est autre que le puissant et redouté secrétaire d’Etat au ministère de la défense, enfin son fils, Namal Rajapakse, joue également un rôle important dans les affaires du gouvernement.

Une bonne partie des dirigeants des pays en développement foulent leur Constitution nationale (s’il y en a une) et se déclarent président à vie. Cela les pousse à un point de non-retour, prenant ainsi la direction du despotisme sans autorité légale. Ils créent tant de dégâts qu’ils ont peur de quitter le pouvoir par crainte de représailles. Ils savent que ceux qu’ils ont blessés voudront avoir leur revanche.

Quelques rares exemples de démocratie

Sous l’influence de quelques meneurs européens, comme Gorbatchev ou Mitterrand, qui prônent plus de démocratie pour le continent africain, la donne a malgré tout évolué au passage des années 80. Dès 1991, des conférences nationales se tiennent, des mutations voient le jour dans les administrations, des nouvelles constitutions sont rédigées : la démocratie est en marche. Plus récemment, l’Afrique du Nord a également semblé faire un pas vers la démocratie. Le « printemps arabe », déclenché en Tunisie en 2011, a fait tomber le régime de Ben Ali (24 ans de règne), celui de Kadhafi en Lybie (42 ans) et de Moubarak en Egypte (30 ans).

 

Denis Sassou Nguesso, President of the Republic of the Congo, addresses the general debate of the sixty-fourth session of the General Assembly. 25/Sep/2009. United Nations, New York. UN Photo/Marco Castro. www.unmultimedia.org/photo/

Denis Sassou Nguesso, President of the Republic of the Congo, addresses the general debate of the sixty-fourth session of the General Assembly.
25/Sep/2009. United Nations, New York. UN Photo/Marco Castro. www.unmultimedia.org/photo/

Mais, malgré ces bouleversements, les régimes autoritaires refont souvent surface, à l’image du pouvoir autoritaire réintroduit en Egypte durant le court passage à la présidence de Mohamed Morsi, qui est resté au pouvoir de 2012 à 2014. Ce dernier a néanmoins été élu démocratiquement. D’autres pays n’entrevoient, eux, aucun signe de changement. C’est notamment le cas du Congo Brazzaville, ou Denis Sassou, président de 1979 à 1992, règne à nouveau sur le pays depuis 1997.

Il semble donc que les valeurs traditionnelles de la démocratie mettront du temps à s’installer dans les habitudes des pays du tiers-monde, Afrique en tête. Quelques nations ont malgré tout réussi à assurer une transition présidentielle démocratique. C’est le cas de la Tanzanie, du Ghana, de l’Afrique du Sud, de la Mauritanie, ou encore du Botswana. Les autres nations doivent s’en inspirer.

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Sarkozy guillotiné ?

Une guillotine. Source: http://www.flickr.com/creativecommons/

Après cinq années passées au sommet de l’Etat français, Nicolas Sarkozy a été battu hier aux élections présidentielles par le socialiste François Hollande. Apparu quelques minutes seulement au palais de la mutualité à Paris après l’annonce par les médias français de sa défaite, il s’est montré très ému et a notamment affirmé qu’il redeviendra « un citoyen comme les autres ». Tout porte à croire qu’il prendra ses distances avec la politique. Or, c’est la justice qui risque fort bien de le rattraper aujourd’hui !


/wiki/Jacques_Chirac »>Jacques Chirac
, président de la République Française pendant 12 ans de 1995 à 2007, avait été condamné
à deux ans de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Paris le jeudi 15 décembre 2011, pour une affaire d’emplois fictifs à la ville de Paris qui remonte au début des années 1990, alors qu’il était maire de la capitale. Protégé pendant son séjour à l’Elysée par une généreuse immunité de fonction, ce politicien de 79 ans, considéré par certains spécialistes de la politique intérieur française comme « le maître du pot-de-vin politique », avait donc été jugé plus de quinze ans après les faits. Il est le premier et le seul ancien président de la République Française condamné en correctionnelle. Mais ce palmarès, pour le reste peu glorieux, risque fort bien de s’enrichir avec la probable arrivée de Nicolas Sarkozy dans la liste.

Des ambitions communes et un destin partagé

Car plutôt que de mettre fin au problème de financement illicite, les condamnations de Chirac ont simplement exposé comment la corruption, le détournement de fonds publics, l’abus de confiance, la prise illégale d’intérêt, le trafic d’influence étaient devenus des institutions en France. Et Sarkozy, le successeur de Chirac au sommet de l’Etat, aurait même fait pire. Son goût effréné pour le luxe lui aurait sans doute joué des sales tours. Et à voir l’allure que prend la tournure des événements, il est « mal barré », car sa chute de hier soir marque peut-être le début d’un long calvaire qui le conduira probablement du palais de l’Elysée à la prison de la santé à Paris, si la justice venait à prendre au sérieux les nombreuses chefs d’inculpation qui pèsent sur lui. Pire, Sarkozy risque fort de tomber comme Louis XVI (Roi de France de 1774 à 1791) exécuté le 21 janvier 1793 par la guillotine, sur la place de la Révolution à Paris. En effet, il serait impliqué dans plusieurs scandales politico-judiciaires et, avec sa défaite au second tour des élections présidentielles hier ainsi que la perte de l’immunité juridique qui s’en suivra, le futur ex- président français Nicolas Sarkozy pourrait être confronté à toute une série de procès.

Sarkozy éclaboussé par « l’affaire Karachi »

Le nom du président sortant apparaît notamment dans « l’affaire Karachi », où il est accusé de corruption. Pendant sept ans, Al-Qaïda avait été soupçonnée d’être derrière l’attentat du 8 mai 2002 à Karachi, au Pakistan, contre des employés de la Direction des constructions navales (DCN), qui avait fait 14 morts, dont 11 Français. Mais depuis 2009, c’est la thèse d’un règlement de comptes lié au non-versement de commissions par l’Etat français qui est privilégiée. Cette enquête a mis au jour des mécanismes occultes qui pourraient avoir financé illégalement la campagne d’Edouard Balladur aux élections présidentielles françaises en 1995, dont Nicolas Sarkozy était le porte-parole. En 1994, lors de la signature des contrats avec le Pakistan, Nicolas Sarkozy occupait le poste de ministre du Budget. C’est à ce titre qu’il aurait validé la création d’une société offshore luxembourgeoise par laquelle auraient transité les fameuses rétro-commissions, selon plusieurs journaux français.  Les journaux qui ajoutent avec un brin de malice que pendant la campagne de Balladur, Sarkozy n’aurait pas été qu’un simple porte-parole. Mais, selon les précisions de l’Elysée en septembre 2011, (sur le site web de la présidence française) Nicolas Sarkozy « n’a jamais dirigé la campagne d’Edouard Balladur » et n’a « jamais exercé la moindre responsabilité dans le financement de cette campagne ». Dans cette affaire, plusieurs proches de Sarkozy ont été mis en examen. D’autres ont été condamnés à des peines avec sursis, comme Thierry Gaudet, condamné jeudi passé, le 3 mai 2012, à dix-mois de prison avec sursis pour malversations financières.

Le colonel Kadhafi, mécène de la campagne présidentielle de Sarkozy en 2007 ?

Un document daté du 10 décembre 2006, publié par Mediapart (un site web d’information français) samedi 28 avril, indique que le régime Kadhafi aurait débloqué une somme de 50 millions d’euros pour financer la campagne de Nicolas Sarkozy de 2007. La note ne précise pas si le financement a effectivement eu lieu. Nicolas Sarkozy, qui a qualifié ces soupçons de « grotesques » sur Bfm tv, a annoncé qu’il allait porter plainte contre Mediapart. Tant qu’il sera président, Nicolas Sarkozy ne risque rien juridiquement. Comme …Chirac, cité plus haut. Son immunité l’empêche d’être mis en cause et interdit aux juges d’enquêter sur lui nommément concernant des actes extérieurs à sa fonction. L’article 67 de la Constitution française, modifié en février 2007 par….. Jacques Chirac, précise que le président de la République « ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite ». En cas de réélection, Nicolas Sarkozy aurait donc pu être crédité d’un sursis de cinq années supplémentaires avant de se risquer de comparaître devant les tribunaux français, comme l’avait déjà fait Chirac lors de sa réélection….Hélas pour lui, l’histoire ne s’est pas répétée !

Les liasses de Liliane Bettencourt

Eric Woerth, trésorier de l’UMP et de la campagne de Nicolas Sarkozy pour la présidentielle de 2007, avait rendu visite à l’héritière de L’Oréal, Liliane Bettencourt en 2007. L’ancienne comptable de la milliardaire affirme que le gestionnaire de fortune Patrice de Maistre, aujourd’hui en prison, lui avait demandé 150’000 euros en liquide pour les remettre à Eric Woerth. Une somme largement supérieure aux dons autorisés dans le cadre d’une campagne électorale. L’ex-comptable des Bettencourt a aussi affirmé qu’un témoin avait vu Nicolas Sarkozy en personne recevoir de l’argent. Le témoin en question, une ex-infirmière de Liliane Bettencourt, avait démenti.

Selon L’Express, (journal français) du 28 mars, « derrière le nom de Woerth, c’est celui de Nicolas Sarkozy qui s’inscrit en filigrane ». Mais « pour être inquiété, il faudrait toutefois qu’Eric Woerth cite nommément le chef de l’Etat dans cette affaire ». Ce qui est toutefois peu probable car « Eric Woerth jouera le rôle de fusible », assure à l’hebdomadaire Christian Eckert, vice-président du groupe PS à l’Assemblée. A moins que les juges d’instruction parviennent à prouver que Nicolas Sarkozy a lui-même reçu de l’argent.

Sarkozy parviendra-t-il à se soustraire à la justice ?

A voir toutes ces affaires en cours, sans compter d’autres qui s’en suivront probablement, l’ont peut se demander comment Sarkozy parviendra à se faufiler entre les mailles du filet de la justice française. Eva Joly, ancienne juge d’instruction anti-corruption, connue notamment pour avoir « jeté » l’ancien tout-puissant PDG d’ELF, Loïk Lefloch Prigent, en prison, aujourd’hui convertie en ex candidate politique des verts aux élections présidentielles, avait déjà donné le ton pendant la campagne en organisant notamment un « Sarko-Tour », qui consistait à emmener des journalistes dans un bus pour visiter les biens de Sarkozy, ce qui visait à étayer ses soupçons de malversations. Aujourd’hui, avec l’élection de François Hollande à la présidence française, Eva Joly risque fort bien de prendre les commandes du ministère de la justice et de vouloir « finir le boulot ».

Sarkozy n’a pas été réélu comme c’était le cas pour Jacques Chirac, il va donc probablement perdre son immunité. Mais il pourra toujours recourir à d’autres échappatoires s’il n’arrive pas à prouver son innocence dans les différentes affaires en cours. Par exemple, il pourrait s’inspirer encore une fois de… Chirac par exemple en « tombant gravement malade » pour échapper à la justice. Personne ne veut, ni ne peut contester la maladie de Monsieur Chirac, faute de véritables preuves. Il faut cependant admettre qu’il existe un épais brouillard sur sa maladie. Souffrant officiellement « d’Anosognosie » selon le site français ladepeche.fr, un mot bien barbare pour définir la maladie de l’ancien président, dont l’une des caractéristiques est l’amnésie et qui semble avoir été taillée sur mesure afin de lui éviter de répondre de ses actes devant les tribunaux.

Sarkozy pourrait toujours emprunter le yacht ou le Falcon de son ami milliardaire Vincent Bolloré, comme il l’avait fait au lendemain de son élection à la présidence française en Mai 2007, pour fêter sa victoire ! Avec la différence que cette fois-ci, il utiliserait son yacht, non pas pour fêter une autre victoire, mais pour prendre le large : cap sur le golfe de Guinée, destination ?… Le Cameroun, où il pourrait déposer une demande d’asile politique au pays de son autre ami, le dictateur Paul Biya.

En tous cas, le pire pour Sarkozy serait d’affronter la justice française et de risquer le destin similaire et peu enviable de Louis XVI et sa femme Marie-Antoinette (pour la petite histoire elle était aussi glamour que Carla Bruni, l’actuelle première dame de France). Tous les deux ont fini guillotinés! Sarkozy a peut-être commencé sa marche funeste vers l’échafaud de la justice hier soir. Mais nous ne savons toujours pas si Carla Bruni subira le même sort que Marie-Antoinette. Wait and see.

Fbradley Roland

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Édito. Monde civilisé ? Du n’importe quoi !

l’Édito est une nouvelle rubrique qui fait aujourd’hui son apparition dans Voix d’Exils.

On vit dans un monde où les pays dits « civilisés » dictent ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Ils nous dictent aussi ce qui est politiquement correct de dire/faire et même de penser en société et au nom de leur civilisation. Dans ce monde on assassine même en direct des prisonniers de guerre et on sourit quand on voit ces choses horribles.

Le monde civilisé est champion de la politique deux poids deux mesures. Capable de diaboliser Mugabe du Zimbabwe. De chasser Gbagbo de la Côte d’ivoire et de l’incarcérer à la Haye. D’organiser l’assassinat de Kadhafi en direct et en mondovision. Pour quelles raisons? Au nom de la démocratie? De la civilisation? Au nom d’intérêts économiques inavoués ? Allez savoir.

Ce qui est sûr, c’est que les réels motifs de ces acharnements n’ont rien à voir avec l’envie des pays civilisés de restaurer la démocratie et le bien-être dans ces pays. Sinon, comment expliquer que les dictateurs les plus féroces et les plus sanguinaires comme Paul Biya du Cameroun, Teodoro Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale, Sassou Nguesso du Congo, Joseph Kabila de la République Démocratique du Congo, continuent à séjourner en Occident et sont reçus en grandes pompes par les pays dits « civilisés » et sans la moindre gêne? « On va vous aider avec une coopération policière ». Propos de Michèle Alliot-Marie, alors ministre français des Affaires étrangères, tenus pendant que le printemps arabe battait son plein en Tunisie et que les morts se comptaient par dizaines déjà. Cela avait montré aux yeux du monde entier une insensibilité incroyable de ce pays dit « civilisé ». Le dictateur Ben Ali était un « ami » (leur ami). Réveillez-vous ! Le monde est déjà un enfer ou des humains dansent autour des cadavres et où des gens se considérant comme « civilisés » fêtent avec un grand sourire la mort. Pourquoi ferment-ils les yeux sur ce qui se passe dans les autres pays comme le Gabon, l’Ethiopie, l’Erythrée, la Guinée équatoriale, le Maroc, le Swaziland, la République centrafricaine, l’Ouganda, le Soudan, le Cameroun, la République Démocratique du Congo, le Congo, le Burkina Faso ou le Togo? Et pourtant, nombre de ces régimes dictatoriaux (en Afrique, au Moyen-Orient, au Sri Lanka, à Cuba…) pourraient être renversés sans difficultés majeures si les occidentaux (monde civilisé) fournissaient les moyens adéquats comme la mise en place de sanctions diplomatiques, politiques et économiques contre ces dictatures ; grâce auxquelles les populations et les institutions indépendantes pourraient, au nom de la démocratie, restreindre les sources de pouvoir des dirigeants en place et, ainsi, endiguer leur nuisance. Ce qui n’est pas le cas. Pourquoi ?

Il y a vingt ans, la jeunesse africaine de la plupart des pays susmentionnés était déjà descendue dans la rue pour manifester son exaspération contre les dictateurs. Malheureusement, à l’époque, cette jeunesse africaine connaissait moins de succès. En fait, la jeunesse africaine avait été sacrifiée sur l’autel de la « realpolitik », autrement dit, par le cynisme des Occidentaux (le monde civilisé) en terre africaine. Les despotes africains, ayant eu plus de soutiens de la part des pays occidentaux (le monde civilisé) qui défendirent dans les années 90 leurs intérêts impérialistes, y compris à coups d’interventions militaires. Ils se sont offerts le luxe de ne pas céder à la pression de la rue. En lieu et place, il y a eu des milliers de meurtres perpétrés en plein jour par des forces armées.

On a organisé des conférences nationales dites souveraines par ici, composées des gouvernements de transition démocratique par là. Malgré tout cela, le changement espéré est demeuré une utopie. Pire, lorsque les tensions ont baissé, les dictateurs sont revenus au-devant de la scène, en force. Certains sont même morts de vieillesse au pouvoir comme Omar Bongo Ondimba du Gabon après… 42 années de règne sans partage ou encore Gnassingbé Eyadema du Togo après… 38 années de dictature. Et ils se sont faits remplacer à la tête de ces Républiques par leurs fils avec la bienveillance et la bénédiction des pays dits civilisés !

Ces régimes sont notoirement imperméables au changement, à l’alternance et ils répriment lourdement la dissidence. La corruption (y compris le détournement de l’argent du fond mondial destiné aux interventions contre la pauvreté et les maladies) et les atteintes massives aux droits humains sont le lot quotidien de millions de citoyens dans ces pays qui sont à la peine économiquement et qui, pourtant, recèlent d’immenses richesses naturelles, comme des gisements de diamants, de pétrole, d’or, ou la culture du cacao, du café etc. En parlant de la corruption, elle est si répandue que les conditions de vie dans ces pays, pour la majorité de la population, sont révoltantes. Le prix abordable des produits de première nécessité, l’accès à l’eau potable, à l’électricité, aux services de santé, de l’éducation, à l’emploi et à la sécurité sont de véritables gageures.

Face à ça, l’extravagance du train de vie de la classe dirigeante. Par exemple, le dictateur Paul Barthelemy Biya Bi Mvondo du Cameroun vit trois quarts de l’année à l’Hôtel InterContinental de Genève en Suisse, l’un des hôtels les plus chers du monde. Les ressortissants camerounais établis en Europe organisent d’ailleurs régulièrement des marches de protestation devant cet hôtel. La facture exorbitante que dégage ses séjours prolongés là-bas (plusieurs millions de francs suisses par… mois) est bien entendu assurée par le contribuable camerounais. Rien que ça. Il n’est ni Kadhafi, ni Gbagbo. Il n’a pas tenu tête aux Occidentaux (monde civilisé). On ferme les yeux tant qu’il protège nos intérêts en Afrique. On s’en fout, même s’il massacre les siens.

Monde civilisé ? Du n’importe quoi !

Edito signé :

Fbradley Roland

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Du « printemps arabe » à l’automne des « indignés » : les pauvres mènent la cadence

Depuis déjà plusieurs mois, on a vu pointer dans plusieurs pays d’Europe le mouvement dit des « Indignés ». Ce mouvement  mondial  a bousculé  la semaine du 11 au 15 octobre 2011 les habitudes avec des manifestations appelant à davantage de considération pour la gent humaine de la part de la minorité de financiers et de multinationales enclins à s’approprier toutes les richesses du monde au détriment de la majorité.

Cinq mois après l’apparition du mouvement « los Indignados », le 15 mai à Madrid, les Indignés ont ciblé tout particulièrement des hauts lieux  de la finance mondiale. Ainsi, le samedi 15 octobre dernier restera gravé à jamais dans la mémoire des grands banquiers géniteurs du système capitaliste qui, depuis des  lustres, a déjà appauvri plus d’un milliard d’individus, à travers le monde selon l’organisation Oxfam, et serait, selon certains analystes, à la base de la crise financière de 2008 avec ses effets  néfastes persistants.

Depuis plusieurs semaines déjà, des événements annonçant les occupations se sont multipliés sur Facebook,  Twitter, pour faire de ce 15 octobre, la journée mondiale des Indignés. Comme pour le printemps arabe, le mouvement des Indignés s’est servi des réseaux sociaux pour soulever les foules et exiger plus de justice sociale pour le plus grand nombre.

Ainsi, diverses communautés se sont organisées à travers le monde et ont appelé les populations à exprimer leur ras-le-bol contre un système décadent imposé par une minorité et dévastateur pour la majorité. Elles ont impulsé un mouvement  global, planétaire, qui a largement débordé des frontières de l’Espagne où il a pris naissance.

Plus que le printemps arabe qui a fait tomber les têtes de quelques dictateurs – dont le charismatique, fantasque mais aussi cruel Kadhafi en Libye – le mouvement des « indignés » a pris une dimension et une détermination plus ou moins unanime et mondiale. C’est ainsi  que des groupes se sont retrouvés le samedi 15 octobre, à Rome, Bruxelles, New York, Taipei, raconte la BBC. A Kuala Lumpur, Buenos Aires, Santiago du Chili, Los Angeles, Sao Paolo, ajoute le journal Espagnol El Pais , mais aussi dans plusieurs ville des Etats-Unis, d’Allemagne, des Pays-Bas, d’Angleterre et de Suisse (à Zurich et à Genève). Bref, ils ont manifesté dans 951 villes éparpillées dans 81 pays.

Les Indignés s’attaquent aux gouvernements, accusés de jouer le jeu des banquiers, mais aussi et surtout au système financier mondial. Les organisateurs dénoncent haut et fort que depuis plusieurs années  déjà, les gouvernements européens, toutes tendances confondues – de la gauche social-démocrate à la droite la plus réactionnaire – utilisent l’argument  de la crise économique pour endormir toute velléité de contestation.

Au final, les indignés dénoncent le capitalisme financier. Les puissances  dirigeantes, qui travaillent pour les bénéfices de quelques-uns, ignorent la volonté du plus grand nombre et le coût humain et environnemental que nous aurons à payer, écrivent en substance les organisateurs sur de nombreux sites. « Les politiciens qui nous gouvernent, qui sont censés nous protéger, servent plutôt les intérêts des banques, les intérêts du système financier au détriment des citoyens », balance par exemple un Indigné sur le site 15octobre.net.

Ainsi, ceux qui se surnomment « Les 99% » qui ne tolèrent plus la cupidité des 1% les plus favorisés, ont marqué une victoire dont bénéficiera le reste du monde. Certes, selon des experts, l’événement du samedi 15 octobre 2011 ne pourra guère aboutir à des résultats  immédiats et substantiels, ce d’autant plus que beaucoup de manifestants ont des demandes différentes malgré leur colère commune. Néanmoins, le mouvement qui ne s’est pas arrêté le samedi 15 octobre mais se poursuit encore, a le mérite d’éveiller les consciences des uns et des autres. C’est un signal fort en direction des tenants du système qui appelle une reconsidération globale pour un partage plus équitable avant que le pire n’arrive.

Fbradley Roland

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils





La fin des 42 années de règne du Guide suprême annonce-t-elle enfin une ère de paix en Libye ?

Kadhafi

La mort de Muammar Muhammad Al-Gaddafi, intervenue le jeudi 20 octobre 2011, représente une étape cruciale pour la Libye. Le pays tourne ainsi une page de son histoire en mettant fin à 42 années d’un règne sans partage.

Al Kadhafi, 69 ans, a été tué plus de huit mois après le début de la campagne de bombardement de l’OTAN en Libye. Pendant cette période agitée, des milliers de Libyens ont perdu la vie et plusieurs villes du pays ont connu des crises humanitaires. La mort de Kadhafi mettrait fin une fois pour toute au conflit interne libyen, et permettrait au pays de se stabiliser.

Mais une question subsiste : pourquoi un conflit entre Libyens incite la communauté internationale à investir autant de moyens – tant financiers que matériels – alors que la crise économique secoue en ce moment plusieurs pays, tels que la France, qui a dépensé près de 300 millions d’euros dans ce conflit ?

Mansour Daw, chef de la sécurité du colonel Kadhafi, un de ses plus fidèle compagnon, a accordé une interview à la chaîne de télé Al Arabiya. Ce dernier a été blessé par des fragments d’obus lors du bombardement du convoi du colonel Kadhafi. Il a affirmé, au cours de son interview, qu’il était en compagnie du Guide suprême depuis le 20 août 2011 jusqu’à sa mort à Syrte en Lybie, contrairement à ce que prétendaient les médias quant à sa fuite au Niger. Mais est-ce la seule propagande médiatique occidentale ? Existerait-il d’autres vérités qui nous sont cachées concernant la capture et la mort de el Kadhafi ? La question reste donc posée.

Bref, la mort du soi-disant tyran prive ses loyalistes politiques et militaires d’un leader ainsi que des raisons de poursuivre la confrontation avec les autorités de transition libyennes. A partir de maintenant, le Conseil national de transition (CNT) doit employer tous ses efforts à la réconciliation nationale ainsi qu’à la reconstruction politique, économique et sociale. Ayant survécu aux agitations, les Libyens doivent désormais rechercher la paix, panser les blessures causées par la guerre et relancer la construction économique. La communauté internationale, quant à elle, doit maintenant réfléchir au rôle qu’elle devra jouer pour aider la Libye à se remettre sur les rails après avoir contribué à sa destruction.

Alors que la vie de Kadhafi a pris fin dans les flammes de la guerre, la Libye est sur le point d’ouvrir une nouvelle page de son histoire. On espère que le pays réussira à émerger de la violence et des conflits et pourra se développer en paix. Néanmoins, la mort de Kadhafi ne signifie pas nécessairement que tout ira comme il le faudrait pour le pays à l’avenir. Le reste des forces armées de Kadhafi, les conflits entre les régions, les tribus et les partis politiques, la prolifération d’armes au sein de la population civile, l’intervention des puissances étrangères et les attaques des extrémistes et des terroristes viendront s’ajouter à la complexité et à l’imprévisibilité de la situation dans le pays. En ce sens, la mort du Guide suprême signifie peut-être le début d’un nouveau cycle de conflits et de disputes dans une ère post-Kadhafi.

MAK

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils