1

Des mots justes pour parler de migration

Niangu Nginamau en interview avec Cristina Del Biaggio

Niangu Nginamau en interview avec Cristina Del Biaggio. Photo: Voix d’Exils

Genève – L’association Vivre Ensemble dévoile son glossaire à l’intention des journalistes 

Le 30 mars dernier, l’association genevoise Vivre Ensemble à présenté lors d’une conférence de presse la version finale de son « Mémo[ts] » qui avait déjà fait l’objet d’un article dans Voix d’Exils en 2016. Il s’agit d’un glossaire initialement créé à l’intention des journalistes afin de les aider à choisir les termes qu’ils emploient lorsqu’ils parlent de migration mais qui s’adresse, en réalité, à une palette d’acteurs plus large.

A l’issue de cette conférence de presse, Voix d’Exils a réalisé une interview de Madame Cristina Del Biaggio qui est chargée de la réalisation de ce glossaire. Retour sur cette rencontre lors du Grand Direct de Radio Django (cliquez ici).

Niangu Nginamau

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Informations:
Télécharger le Mémo[ts] en cliquant ici

 

 

 

 

 




Employer les bons termes lorsqu’on parle de phénomènes migratoires : Un défi pour les journalistes!

Sophie Malka, responsable du journal en ligne Asile.ch attire l'attention des participantes et participants sur les enjeux des statistiques. Photo: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d'Exils

Sophie Malka, responsable du journal en ligne asile.ch. Photo: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Un glossaire à l’attention des journalistes a été débattu lors d’une rencontre à Genève

Jeudi 13 octobre 2016, des journalistes, des blogueurs, ainsi que des représentants d’associations et d’instances officielles en charge de l’accueil des migrants se sont rencontrés à Genève, à l’initiative de l’association genevoise Vivre Ensemble. Cette rencontre visait à réfléchir et débattre des termes employés par les journalistes lorsqu’ils parlent d’asile et de migration dans le but de constituer un glossaire de la migration. Retour sur cette journée enrichissante à laquelle a assisté la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

En 2013, l’association Vivre Ensemble lance un projet dénommé « le comptoir des médias », dont le but est de contribuer à produire une information basée sur les éléments factuels et dénudée de préjugés à propos des phénomènes migratoires. Les informations produites par divers médias suisses sont alors vérifiées afin d’éviter qu’elles soient inexactes ou susceptibles d’alimenter des idées reçues auprès du public.

Anya Klug. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d'Exils.

Anja Klug. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

La création d’un glossaire de la migration, soumis à la discussion des participantes et participants de la journée, est dans la continuation logique du travail entrepris par le comptoir des médias. D’emblée, Sophie Malka, responsable du journal en ligne asile.ch, souligne la connaissance parfois très approximative des journalistes des phénomènes migratoire. Face à ce constat, Vivre Ensemble a constitué un outil destiné aux journalistes afin de leur fournir des notions utiles et des contacts d’organisations pour faciliter leur travail de vérification des informations. « L’objectif [de notre démarche ndlr.] étant de ne pas stigmatiser les travaux des médias, ni d’imposer ou aseptiser un discours unique, mais de réfléchir et d’échanger sur le contenu du glossaire. Notre association est militante dans le sens qu’elle cherche à renforcer le droit des réfugiés. Nous l’assumons totalement et notre outil est l’information : l’un des piliers de la démocratie » a précisé Sophie Malka.

Des « flux » et des « stocks »

Lors de la série de conférences qui ont précédé les ateliers thématiques, Martine Brunschwig Graf, la présidente de la Commission fédérale contre le racisme, a souligné l’importance de réhumaniser le langage lorsqu’on parle de migration et d’éviter des notions comme « flux » ou « stocks ». Elle mentionne à ce titre, non sans humour, que le terme de NEM (non entrée en matière) lui avait évoqué « les fameux rouleaux de printemps » la première fois qu’elle l’avait entendu. De même, certains sujets prennent une importance exagérée et sont non contrôlés par les journalistes. Elle cite, par exemple, les moyens de communication comme les courriers des lecteurs ou les commentaires en ligne des articles qui sont « des caisses de résonnance disproportionnées faiseuses d’une opinion du café du commerce ». Un contrôle est dès lors nécessaire pour vérifier que les termes employés restent dans la légalité. En l’absence de ce contrôle, la confusion entre l’information et l’intox est, toujours selon Madame Brunschwig Graf, un risque auquel le journaliste doit savoir faire face.

Martine Bunschwig Graf

Martine Brunschwig Graf, présidente de la Commission fédérale contre le racisme. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Une telle maîtrise passe, selon Anja Klug, directrice du Bureau du HCR pour la Suisse, par une information correcte issue d’une recherche minutieuse et complète des événements, ainsi que par l’emploi d’une terminologie correcte au niveau juridique. Anja Klug a illustré l’importance que revêtent les mots lors de la publication d’une information, en distinguant, entre autres, les termes de réfugié et migrant, qui ont des significations distinctes. Dès lors, les confondre peut poser des problèmes considérables à ces deux catégories de populations. Cependant, les mots ne sont pas seulement tributaires du champ médiatique mais également du cadre juridique. À ce titre, les termes d’illégaux et de demandeurs d’asiles déboutés nécessiteraient d’être supprimés car ils n’indiquent pas que ces personnes aient besoin de l’aide internationale. D’où l’importance du glossaire, qui aidera les journalistes à trouver un vocabulaire adéquat.

Nicolas Roget au centre évoque l'importance du tzravail des journaliste. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d'Exils.

Nicolas Roget (deuxième depuis la droite). Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Dominique Von Burg, président du Conseil suisse de la presse, a ajouté qu’un vocabulaire adéquat émane également du respect de la charte de déontologie journalistique en plus de la recherche de vérité et d’une information correcte. Il admet que parler de migration c’est relater de phénomènes complexes mais souligne, en même temps, le devoir de distance et de décodage des propositions politiques par les journalistes qui sont susceptibles de produire des confusions. C’est ainsi que « la droite parle plutôt de « migrants » et que la gauche parle plutôt de « réfugiés » et qu’on mélange allègrement tout » relève-t-il. Cette relation entre les médias et le politique se retrouve aussi au niveau institutionnel. Nicolas Roguet, délégué du Bureau de l’intégration des étrangers du canton de Genève, met en exergue le fait que les journalistes produisent davantage des informations utiles aux institutions au travers d’articles employant de bonnes terminologies et démontrant une compréhension du sujet et du domaine. Il gratifie aussi le travail que mène le comptoir de médias pour garantir l’équilibre et la justesse de l’information qui est très importante pour les institutions.

Dominique Von Burg. Photo: Georgi

Dominique Von Burg. Photo: Georgi, rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Décortiquer les statistiques et les mots 

S’en est suivi des ateliers de travail qui visaient à créer une réflexion commune sur les termes employés par les journalistes ou les chiffres produits par certaines institution dans le domaine de la migration. L’objectif final étant de contribuer à alimenter un glossaire qui serve aux journalistes à produire une information qui soit correcte, factuelle et qui n’alimente ni la peur, ni les stéréotypes sur les personnes réfugiées, en procédure d’asile ou migrantes. Un exemple de question qui initiait la réflexion d’un des ateliers était : « Réfugiés ou migrants, quel mot utiliseriez vous pour une famille syrienne fuyant la guerre, un opposant politique turc et un adolescent gambien fuyant la famine ? À mes yeux, ce sont tous des refugiés » répond une blogueuse. Mais, dans les faits, la Confédération accorderait un permis provisoire aux premiers, l’asile au second, et une non-entrée en matière au dernier.

Des ateliers studieux. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d'Exils

Des ateliers studieux. Photo: Giorgi, rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

L’atelier numéro 3 animé par Sophie Malka abordait le problème des confusions pouvant résulter d’un emploi inadéquat des statistiques sur les mouvements migratoires en Suisse. Selon elle, le corps des gardes-frontières ne comptabilise pas les personnes migrantes qui résident sur le sol helvétique mais alimente ses statistiques sur la base des entrées et sorties du territoire national. Dès lors, une même personne peut tenter de franchir la frontière et être renvoyée à plusieurs reprises, ce qui semble être largement le cas à Chiasso dans le canton du Tessin. De ce fait, parler de « personnes » pour décrire des mouvement induit, selon Sophie Malka,  le lecteur en erreur, car cela conduit à une surestimation du nombre de personnes effectivement rentrées ou renvoyées de Suisse. « Le chiffre de plus de 4’000 renvois à la frontière suisse durant le seul mois de juillet de cette année qui a été avancé est en réalité biaisé. Dans les faits, environ 1’000 personnes faisant des allers et retours sur le territoire suisse auraient été renvoyées » conclut-elle.

Un procès-verbal a été établi à la fin de la journée qui nourrira le glossaire du comptoir des médias des échanges fructueux qui ont eu lieu durant toute cette journée du 13 octobre. Ce glossaire deviendra, avec un peu de chance, un véritable outil de travail et de référence pour aider les journalistes à accomplir leur devoir d’information.

Propos recueillis par :

Niangu Nginamau

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




Être journaliste en Syrie «c’est comme marcher sur un champ de mines»

Le photo-journaliste canadien Ali Mustapha assassiné en 2014 à proximité d'Alep. Auteur: DC Protests  (CC BY-NC-SA 2.0)

Le photojournaliste canadien Ali Mustapha assassiné en 2014 à proximité d’Alep. Auteur: DC Protests (CC BY-NC-SA 2.0)

Témoignages exclusifs de reporters de guerre syriens

Il est de plus en plus difficile de couvrir le conflit qui s’envenime en Syrie, pays à feu et à sang considéré par Reporters sans frontières comme le plus dangereux au monde pour les journalistes et les citoyens-journalistes. Voix d’Exils a réussi à entrer en contact avec quelques reporters de guerre syriens pour recueillir leurs témoignages à propos de leur travail au quotidien*. Immersion dans les coulisses des médias de l’État Syrien.

Avant le soulèvement contre le régime de Bachar el-Assad en 2011, Mazen Darwish, Président du Centre syrien des médias et de la liberté d’expression (SCM), avait décrit son travail en tant que journaliste en Syrie de la manière suivante : «quand vous êtes journaliste en Syrie, c’est comme si vous marchez sur un champ de mines». Cette situation était celle de dizaines de journalistes syriens qui dura pendant plusieurs décennies caractérisées par un droit d’expression largement bafoué et un harcèlement sans répit des services secrets à leur égard. Leur quotidien était marqué par la peur au ventre de se retrouver, un jour, sujet d’une arrestation et d’accusations montées de toutes pièces. Tout dépendait, en fait, de l’humeur du corps responsable de la surveillance et du contrôle de l’information et des services de sûreté du régime syrien. Cette situation a eu, bien entendu, des conséquences néfastes sur la qualité de l’écriture journalistique: on voyait les mêmes communiqués de presse et les mêmes sujets, les mêmes approches voire les mêmes titres dans Al Ba’athALThawra et Tishreen, les trois journaux officiels du gouvernement qui sont totalement contrôlés par l’Agence Arabe syrienne d’Information (SANA), qui était l’unique source incontournable pour les informations politiques.

La journaliste japonaise Mika Yamamoto assassinée en Syrie en août 2012. Son image est projetée sur un écran à Tokyo. Auteur Robert Huffsutter. (CC BY 2.0)

La journaliste japonaise Mika Yamamoto assassinée en Syrie en août 2012. Son image est projetée sur un écran à Tokyo. Auteur Robert Huffsutter (CC BY 2.0)

Les journalistes étaient devenus, au début de la crise en Syrie, la cible privilégiée de l’armée syrienne qui tentait de les empêcher de couvrir les manifestations anti-régime. Actuellement, les journalistes étrangers et syriens se trouvent pris entre le marteau de l’armée et l’enclume des groupes armées; et il est aujourd’hui facile de distinguer deux catégories de média en Syrie: ceux du régime et ceux de la révolution et des groupes armés.

Le contrôle de l’information a pris de l’ampleur dans tous les domaines: il touche presque tous les niveaux et les régions qu’elles soient dominées par l’armée du régime syrienne ou par les rebelles. La couverture des événements devient alors très dangereuse. Les correspondants de guerre sont continuellement exposés au risque d’enlèvements et de mort. Ce danger a encore augmenté avec l’émergence des groupes extrémistes comme celui de l’État Islamique en Irak et dans le al-Sham (Daesh) qui considèrent les journalistes comme une monnaie d’échange. Pour Christophe Deloire, Secrétaire général de Reporters sans frontières, réagissant à la décapitation de Steven Sotloff par l’État Islamique en septembre 2014, il s’agit d’un «crime de guerre effarant, ignoble et dément qui devrait être condamné par la justice internationale». La conséquence désastreuse de cette situation est qu’il «n’est plus possible de couvrir les conflits dans les régions qui sont sous le contrôle de Daesh». Dès lors, il ne reste pour les journalistes que les sources d’information indirectes avec le risque de manipuler les vérités et de changer ainsi le déroulement des événements.»

Les journalistes : «un bataillon de l’armée»

En Syrie, les médias sont complètement régis par l’État. Lors d’une interview du journal syrien Al-Watan, en date du 27 juillet 2014, Le ministre syrien de l’information – Omran El Zohbi – a indiqué que «les médias sont en principe tenus de garder la neutralité». Mais il précise que «maintenant, en état de guerre, nous ne sommes certainement pas neutres! Nous faisons partie de l’État et soutenons nos forces armées. D’ailleurs, je l’ai toujours dit (aux journalistes ndlr) de se considérer comme un bataillon de l’armée et nous avons, au niveau du gouvernement, œuvré et agi sur cette base.»

Bothaina**, journaliste syrienne, confirme les propos du ministre et précise que «nous formons, en fait, un même bloc avec les forces armées. En leur présence, nous ne sentons pas la peur!». Elle explique que «les membres de l’armée sont soit l’un de nos proches ou l’un des habitants de notre ville. Raison pour laquelle, nous nous sentons en sécurité en compagnie des fils de notre pays.» La couverture des nouvelles se limite aux zones pro-régime dans le but de «documenter le travail de l’armée». Elle affirme néanmoins que «les journalistes arrivent à relater les choses avec assez de transparence.»

Ali**, également journaliste syrien, mentionne que «la plupart des batailles sont couvertes par les correspondants de guerre des chaînes de l’État qui accompagnent les opérations de l’armée syrienne et qui deviennent, ainsi, une cible de la partie adverse». Il ajoute que «les sujets sont systématiquement contrôlés par les chefs de rédaction en service. Pour les évènements les plus importants, c’est le directeur de la chaîne qui effectue en personne ce contrôle. Les reportages sur le terrain sont eux gérés directement par l’organe politique responsable du média de l’armée qui supervise le contenu et jouit de tous les droits pour refuser ou accepter telle ou telle séquence».

Une femme se tient das les débris de sa maison qui a été détruite par l'Armée syrienne à Al-Qsair. Auteur: freedonhouse (CC BY 2.0)

Une femme se tient das les débris de sa maison qui a été détruite par l’Armée syrienne à Al-Qsair. Auteur: freedonmhouse (CC BY 2.0)

Pour les zones sous le contrôle de l’opposition et des rebelles, il est difficile pour les chaînes de l’État d’y accéder, de couvrir les évènements sur le terrain et de s’y documenter. «Le travail des médias d’État reste, par conséquent, concentré sur ce qui pourrait ternir l’image de l’opposition et des résistants aux yeux de l’opinion publique».

Selon Bothaina «Il y a toujours une certaine liberté et les massacres perpétrés dans les zones pro-régime sont assez bien couvertes avec une très bonne documentation. Cela diffère beaucoup avec les zones de l’opposition. Pour les médias syriens, les attaques de l’armée visent uniquement les rebelles et non pas les civils. C’est une des lignes rouges qu’il ne faut pas dépasser!» précise-t-elle. Elle mentionne également que les pertes de l’armée ne sont pas du tout relatées dans les médias. La raison étant d’éviter de saper le moral de l’opinion publique et d’augmenter ainsi la crainte de la population. Pour elle, cette réticence à couvrir objectivement les différents évènements dans le pays fait perdre les médias en crédibilité «On ne parle pas du tout des défaites de l’armée ni des territoires tombés dans les mains des rebelles. On ne parle même pas des difficultés rencontrées au quotidien par les citoyens par peur de remonter l’opinion publique face à l’incapacité du gouvernement» martèle-t-elle.

Des membres des rebelles syriens en février 2012 à al-Qsair. Auteur: Freedom House (CC BY 2.0)

Des membres des rebelles syriens en février 2012 à al-Qsair. Auteur: Freedom House (CC BY 2.0)

«Des vidéos appellent à notre assassinat»

Selon Bothaina, la douleur pour les correspondants de guerre travaillant pour les médias syriens est double: voir, d’un côté, leur propre pays vivre de tels évènements et vivre, de l’autre, un manque immense de reconnaissance à leur égard en voyant, par exemple, leur propre média accorder davantage d’importance aux correspondants étrangers pour la couverture des événements sur le terrain, ce qui les démotive considérablement. Au début de la crise, «l’enthousiasme était le premier motif pour aller sur le terrain sans aucune idée du danger qui nous attendait» précise Bothaina, qui pense que les journalistes syriens «ont pu, quand même, acquérir de l’expérience sur le tas et bénéficier de l’expérience des correspondants étrangers présents sur le terrain». Elle souligne que les journalistes sont «exposés, sur le terrain, à deux types de risques : le manque de formation et la médiocrité des équipements techniques et de protections comme le casque et le gilet pare-balles». Elle ajoute que «malgré tous les obstacles et les sérieuses menaces qui les guettent, les journalistes arrivent à produire une bonne qualité d’information».

Dans les zones contrôlées par les groupes extrémistes, les correspondants de guerre deviennent malheureusement le sujet des nouvelles à la place d’en être la source. Ils se transforment donc après leur capture en un butin précieux.

Bothaina a à plusieurs reprises failli compter parmi les victimes du conflit syrien. En octobre 2012, elle était en mission pour couvrir la visite d’observateurs étrangers dans un territoire sous contrôle des rebelles. Cette mission aurait pu tourner au vinaigre lorsque les rebelles avaient appris que Bothaina et son équipe appartenaient à une chaîne pro-régime: «insultes, accusations et appels pour nous tuer ont alors fusé». Une manifestation s’est vite constituée réclamant notre condamnation ! Heureusement, un homme armé faisant partie des leurs est intervenu et a pu convaincre ses camarades de respecter les visiteurs et de montrer ainsi une meilleure image devant les médias internationaux ; geste qui nous a permis, ce jour-là, de sortir sains et saufs de la foule». Elle ajoute que «les menaces sont devenues presque quotidiennes et se propagent à travers divers moyens de communication comme: les mails, les appels et les SMS. Même des pages Internet annonçant l’arrivée de notre dernière heure existent! À tel point que l’on peut même facilement visionner sur Youtube des séquences vidéo appelant à votre assassinat!» s’exclame-t-elle.

Des rebelles syriens observent les positons ennemies en octobre 2012 à proximité d'Alep. Auteur: Freedom House (CC BY 2.0)

Des rebelles syriens observent les positons ennemies en octobre 2012 à proximité d’Alep. Auteur: Freedom House (CC BY 2.0)

«Notre mission est très dangereuse» affirme Bothaina, qui précise que «la chance joue, parfois, un grand rôle». C’est ainsi qu’elle a failli laisser sa peau lors de la couverture d’événements se déroulant à proximité de Homs: «j’ai couru 50 mètres sous les tirs des snipers. Les éclats frappaient ma tête et mon corps. Je saignais de partout comme si je baignais dans mon sang de la tête aux pieds. Deux militaires m’accompagnaient et assuraient ma protection. J’ai commencé à crier lorsque l’un d’eux a été blessé. Heureusement, nous avons pu nous en tirer». Elle enchaîne en ajoutant que «lorsque nous avons terminé notre mission, je me suis installée dans une autre voiture que mon véhicule professionnel et, à ma grande surprise, j’ai vu le siège que j’utilisais habituellement soudainement criblé de balles tirées par les snipers. Ce jour-là, la chance était avec moi une deuxième fois» soupire-t-elle.

Pour résumer son propos, Bothaina compare son quotidien de correspondante de guerre en Syrie à une personne morte à la recherche d’une preuve qu’elle est encore en vie. Une course permanente avec la mort!

*Le déroulement de certains événements a été légèrement modifié afin de protéger nos sources d’informations

** Noms d’emprunts

Amra

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Bilan des journalistes victimes du conflit syrien depuis 2011

43 journalistes assassinés

13 journalistes emprisonnés

17 net-citoyens emprisonnés

130 net-citoyens et citoyens-journalistes tués

Source: Reporters sans frontières

Une liste exhaustive des journalistes assassinés en Syrie peut être consultée en cliquant ici




Pourquoi on s’exprime sur Voix d’Exils?

Voici les réponses des blogueurs de Voix d’Exils:

Il est dur de supporter une vie sans perspectives d’avenir.

Cela fait longtemps que je vis dans le provisoire et comme moi, nombreuses sont les personnes dans ce monde qui vivent dans le temporaire.

Ils portent  parfois l’horreur de ce qu’ils ont subi. La rupture avec leur passé est souvent violente et ils sont en état de deuil par rapport à tout ce qu’ils ont abandonné. C’est comme s’ils vivaient à côté de la vie.

Depuis que je me suis installé dans le provisoire, j’ai cherché le refuge dans les mots. J’avais un souffle de plongeur malgré le sentiment d’enfermement, d’impuissance, de peur et de perte de dignité.

Un homme submergé par les malheurs et penché sur ses feuilles s’accroche avec ses dernières forces pour essayer de changer n’importe quoi.

On peut parler, crier, mais les paroles s’en vont et il ne reste que les écrits.

L’écriture est notre moyen d’aller au fond de nous-mêmes, au plus profond de notre âme pour soulager nos chagrins.

L’écriture nous libère, car elle nous permet de remporter une victoire sur le moment.

Chaouki DARAOUI

@@@@@@@@@@@@@@@@@

Après une longue et interminable bataille, je n’avais pas d’autre choix que de partir en catastrophe de mon pays pour sauver ma vie, laissant derrière moi toutes les personnes que j’aime profondément, et tout ce que j’avais mis des décennies à construire. Je fuyais dans l’espoir de trouver un refuge, la paix de l’esprit et une vie nouvelle sur le vieux continent.

Suite à un voyage périlleux et difficile, dont je ne souhaite plus jamais me rappeler, je débarque en Suisse dans le CEP (Centre d’ Enregistrement et de Procédure) de Vallorbe. C’est là que débute pour moi un nouveau combat ; mais un combat qui sera cette fois-ci psychologiquement et mentalement difficile et bien différent du précédent car ici, le système hostile mis en place par le législateur fait plus de victimes que les stupéfiants et les malades d’Alzheimer. Une véritable machine à tuer. Voici la raison qui me pousse à vouloir communiquer à propos de cette situation, afin de mettre en lumière ce que vivent les migrants en général, et les requérants d’asile en particulier, qui ont besoin de se faire entendre.

La question qui se posait à l’époque était précisément comment m’exprimer ?

Me lever le matin et me faire entendre sur la place publique ? Non, car je craignais d’être assimilé à un agitateur.

Aller dans les églises et les mosquées ? Non, car tout le monde n’est pas croyant.

Collaborer avec les médias ? Non, car le chemin était long et complexe.

Une seule réponse s’offre à moi aujourd’hui: m’exprimer en urgence sur le blog de Voix d’Exils, afin d’en faire une plaque tournante, un canal d’échanges entre les migrants et la population suisse.

C’est ainsi que j’espère que mes écrits ne sombreront pas dans l’oubli et pourront changer quelque chose à notre situation.

Gervais NJIONGO DONGMO

@@@@@@@@@@@@@@@@@

Vous savez que le monde est grand ; mais grâce aux nouvelles technologies il est devenu tout petit !

Les gens passent maintenant le plus clair de leur temps sur internet. Sur la toile, on peu écrire quantité de choses, exprimer nos idées. Via un site internet, on peut informer les gens et comprendre les différents modes de vie. Parfois, les informations produites peuvent s’avérer très utiles.

Aujourd’hui, le blog voixdexils.ch, qui est réalisé par notre équipe, ouvre un angle de 360 degrés de possibilités pour la création d’informations nouvelles qui traitent de migration.

Peace

@@@@@@@@@@@@@@@@@

Si j’écris dans un blog, c’est d’abord pour me faire plaisir ! Cela me permet de communiquer avec des gens de différentes cultures.

Je peux également leur transmettre de l’information sur l’actualité, ce qui leur donne l’occasion de réagir et de pouvoir partager leurs opinions.

Le blog m’offre aussi la possibilité d’échanger des idées, et le fait de dialoguer avec les gens me donne l’impression de voyager à travers le monde.

Jean KAMUNGA SHEBA MULUNDA

@@@@@@@@@@@@@@@@@

Je dessine et j’écris ici…

Car l’art et l’information sont la fenêtre qui me permet de voir la réalité; je continue ici ce que j’ai commencé ailleurs.

Nashwan HASHIM BAMARNI

@@@@@@@@@@@@@@@@@

Étant un défenseur invétéré des droits de l’homme dans mon pays activité qui, dans le monde moderne ne peut évoluer sans la technologie de pointe, est un des facteurs principaux qui m’a poussé à devenir un blogueur chevronné.

Je passe 30% de mes journées à manier deux outils issus de deux époques différents, mais qui poursuivent néanmoins la même finalité: la plume et le clavier.

Au moyen de ces outils, je nourris de supports de partage et de diffusion d’informations, afin de faire bénéficier les lecteurs de mon expérience et ma maigre connaissances du domaine de la justice humaine.

Ce blog est ainsi un support de plus à nourrir.

Hassan Cher, d’origine Djiboutien