1

Ainsi l’obscurité se dissipe

Kristine Kostava / Voix d’Exils.

 Entre réalité et fiction

Notre rédacteur Rachid Boukhamis vous propose dans cette nouvelle de découvrir le fabuleux destin de Bilal, l’enfant orphelin.

Suite à un glissement de terrain de son village natal, situé dans le gouvernorat de Mila en Algérie, Bilal perdit ses deux parents et devint orphelin à l’âge de trois ans. Ce fût sa grand-mère paternelle qui le recueillit alors qu’elle avait cinquante-cinq ans. Par pitié pour lui, elle le laissa faire ce qu’il voulait. Ainsi, il quitta l’école à un âge précoce et erra dans la rue avec ses pairs. Il fréquenta des tanières où il apprit tous les arts de la perversion et des dérives sociales. Les voisins commencèrent à se plaindre de son comportement imprudent et l’appelèrent « le méchant ». Sa grand-mère le défendit par tous les moyens ; elle haussa la voix jusqu’à en venir aux mains.

Bilal, l’enfant orphelin, tendit d’abord la main aux cigarettes, après quoi il devint accro à tout ce qui lui faisait perdre la raison. Menaçant sa grand-mère par divers moyens, il obtenait tout ce qu’il voulait. Il rêvait de voyager en Europe afin de profiter de tout ce qui lui était interdit dans son pays conservateur. Il voulait être loin des yeux de ses proches et des lois coutumières qui condamnaient son comportement hors du commun et contraire à la loi de la communauté musulmane.

 

En route pour la France

Bilal connaissait Mona, une jeune française d’origine algérienne qui venait passer ses vacances d’été dans l’une des villes proche de la côte. Leur relation évolua vers un accord de mariage. À l’annonce des fiançailles, la famille de Mona dénonça cette décision rapide et lui conseilla de revenir en arrière avant qu’il ne soit trop tard. Mais Mona était déterminée à se marier le plus rapidement possible. Elle s’imagina qu’elle était tombée sur une occasion en or comme on n’en trouve jamais sur terre, et qu’elle devait la saisir avant qu’il ne soit trop tard.

En France, Bilal trouva la liberté totale dont il avait tant rêvé durant sa jeunesse et il se souvint des privations qui lui avaient été imposées dans son pays d’origine. Ainsi, il changea de disque et laissa se déchaîner ses refoulements enfantins. Il partit nager dans ses fantasmes et commença à passer le plus clair de son temps avec des mauvais compagnons dans une atmosphère pleine de gaieté. Il oublia le devoir pour lequel il avait migré, laissant derrière lui sa vieille grand-mère seule pleurant leur séparation, et oubliant aussi sa femme qui avait fait de lui un être humain.

Les soupçons commencèrent à s’infiltrer dans le nid conjugal. Comme un coup de foudre, la nouvelle tomba sur la mère de Mona qui rassembla ses forces et rassura sa fille. Petit à petit, elle réussit à convaincre son gendre de s’asseoir avec un psychiatre qui par la suite lui proposa des activités pour occuper son temps libre. De son côté, la belle-mère n’avait pas baissé les bras et avait conservé un lien fort avec son gendre en lui accordant beaucoup d’attention et de bienveillance. Ainsi, il commença à rester à l’écart des mauvais compagnons jusqu’à ce qu’il en soit complètement coupé.

 

Un nouveau départ

Quelques jours plus tard, il obtint un poste dans une usine de voitures de tourisme en tant qu’agent de sécurité de nuit. Conformément au règlement interne de l’entreprise, il s’abstint de fumer, puis il arrêta de boire de l’alcool et de consommer de la drogue. Avec l’aide de sa femme qui contribua avec ce qu’elle pouvait, ils ouvrirent un garage de lavage de voiture. Ainsi, il découvrit, le secret du bonheur et la beauté de la vie au travail.

Un jour, alors que Bilal tournait les pages de son livre, il se souvint de sa grand-mère qui l’avait élevé et défendu dans toutes les situations. Il se résolut à lui rendre visite avec sa femme et ses deux filles qui n’avaient vu leur grand-mère que sur les photos que leur maman avait gardées depuis le jour de son mariage.

Oh, comme la surprise fut agréable quand il frappa à sa porte, qu’elle sortit en s’appuyant sur sa canne et que ses deux petites-filles la saluèrent. Sa langue fut nouée d’étonnement lorsque Bilal se précipita vers elle et la serra dans ses bras, en pleurant avec des larmes de joie !

 

Rachid Boukhamis

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils