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Le peuple iranien se rebelle

Déjà 300 morts en 3 mois de manifestations contre le régime iranien

Les manifestations pour dénoncer le meurtre de Mahsa Amini par la « police des mœurs » ne montrent aucun signe d’apaisement, malgré une réaction violente des autorités iraniennes, ce qui constitue un défi pour la République islamique depuis sa fondation en 1979. Rencontre avec Marjane*, une femme iranienne réfugiée en Suisse, qui partage son point de vue sur les raisons de l’intensité des manifestations en cours en Iran.

L’oppression des femmes en Iran a commencé suite à la révolution islamique il y a 43 ans et n’a fait que s’intensifier durant tout ce temps. La situation des femmes en Iran est donc difficile car cela fait une quarantaine d’années que l’État exerce un contrôle strict sur leur corps. D’une part, elles sont tenues à porter le voile, d’autre part, elles sont persécutées par les « gardiens de la révolution », ainsi que par la « police des mœurs »:  une unité des forces de sécurité du pays dont la mission est de les harceler dans la rue afin qu’elles respectent les lois islamique du code vestimentaire en public, c’est-à-dire porter le voile correctement, de manière à ce que leurs cheveux ne soient pas visibles, ne pas porter de vêtements moulants ou colorés et bien couvrir leurs bras et leurs jambes.

La punition pour s’être dévoilée en public peut être la détention, l’emprisonnement, une amende ou des coups de fouet. Ainsi, les femmes du pays de la soi-disant « révolution » sont soumises quotidiennement à des hommes inconnus qui les poursuivent, les battent, les aspergent avec des sprays au poivre et les traitent même de « putes ».

Les plus grandes manifestations contre le régime

Les manifestations les plus récentes ont commencé parce qu’en septembre dernier, la police des mœurs est allée trop loin, étant accusée d’avoir battu à mort une jeune femme. Sa mort a suscité de vives protestations rejetant la violence religieuse machiste. Par solidarité, de nombreuses femmes sont descendues dans les rues sans voile et d’autres, dans un geste symbolique, ont mis sur les réseaux sociaux des vidéos où elles se coupent les cheveux.

Mais les personnes qui défendent les droits des femmes sont réprimées parce qu’elles s’opposent à ce système patriarcal et oppressif et la conséquence de l’opposition à la République islamique est l’exécution, souligne Marjane.

Cependant, après les manifestations de novembre 2019, qui ont une origine socio-économique, il s’agit, en ce moment, de la plus grande manifestation contre le régime et personne ne peut garantir qu’elle se terminera. C’est pourquoi, le régime encourage les marches pour « protéger l’Islam » et pointe du doigt les « fauteurs de troubles », tout en accusant les États-Unis de soutenir les révoltes.

La vague de violence a fait des centaines de morts, pour la plupart des manifestants, et a conduit à de nombreuses arrestations par les forces de sécurité. Mahsa Amini n’était pas seulement une femme, mais aussi une Kurde, c’est-à-dire qu’elle appartenait au peuple kurde, qui constitue la plus grande minorité ethnique du Moyen-Orient et qui ne vit dans aucune forme d’État-nation.

Ce peuple est victime d’actes cruels de discrimination et c’est pourquoi la jeune femme s’appelait en réalité Jina, mais Jina en kurde signifie « femme » et, en Iran, il est interdit de parler cette langue. C’est pourquoi Jina a été rebaptisée Mahsa. Or, dans les médias de tout le Kurdistan, elle est appelée Jina Mahsa: son nom kurde.

300 morts parmi les manifestant.e.s

C’est ainsi que dans le Kurdistan iranien, dans certaines régions d’Iran, on entend depuis lors des cris avec des slogans comme : « Jin, Jiyan, Azadî » ce qui signifie « Femme, vie, liberté » et « Bimre Dîktator », soit « Mort au dictateur ». Ces phrases d’indignation sont dites dans la langue interdite : le kurde.

En outre, « Jina a été violée et torturée physiquement et mentalement par la police des mœurs. De nombreuses personnes ont été tuées, emprisonnées et exécutées également. En effet, le régime utilise des armes à feu pour réprimer les révolutionnaires », s’indigne la jeune Iranienne Marjane.

Finalement, Marjane estime que pour le moment, rien n’est clair, « cette révolution a commencé il y a presque trois mois » explique-t-elle. De plus, elle espère qu’elle se terminera en faveur du peuple iranien qui se bat pour sa liberté. malgré environ 300 morts dus à la répression de la République islamique, les manifestations se poursuivent et aujourd’hui il semble impossible d’en connaître l’issue. La seule certitude est que la révolution gardera un fort caractère féministe selon la plupart des mouvements féministes qui se battent pour cette cause.

*Nom d’emprunt.

Propos recueillis par:

Renata Cabrales

Membre de la rédaction de Voix d’Exils




FLASH INFO #128

Sous la loupe: le Prix Diaspora & Développement / l’Allemagne hausse le ton / Le statut S maintenu jusqu’en mars 2024

Le Prix Diaspora & Développement

Albinfo.ch, le 03.11.2022

Un prix récompense les meilleurs projets menés par des personnes migrantes en faveur de leur pays d’origine. La fédération vaudoise de coopération et ses partenaires, dont Albinfo, ont remis le Prix Diaspora et Développement à quatre projets portés par des associations de diasporas. L’objectif est de valoriser l’impact des personnes migrantes dont le rôle gagne en reconnaissance dans le domaine de la coopération internationale.

Charles Williams Soumah

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

L’Allemagne hausse le ton face aux migrants qui traversent librement le territoire suisse

RTS Info, le 01.11.2022

L’Allemagne accuse la Suisse de ne pas respecter les accords de Dublin. En effet, de nombreuses personnes en quête de protection traversent la Suisse pour se rendre dans un autre pays sans être retenues par les autorités helvétiques. Pourtant, selon Berne, il n’y a rien d’inhabituel à cela.

Charles Williams Soumah

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Le statut de protection « S » pour les Ukrainiens en Suisse est maintenu au moins jusqu’en mars 2024

RTS info, le 09.11.2022

Le statut de protection « S » accordé aux personnes réfugiées ukrainiennes continuera d’être maintenu. Le Conseil fédéral a indiqué qu’il n’était pas question de l’abolir avant mars 2024. La conseillère fédérale Karin Keller-Sutter précise toutefois qu’il s’agit d’un statut provisoire et orienté vers le retour dans le pays d’origine. A ce jour, plus de 67’000 personnes originaires d’Ukraine ont obtenu la protection en Suisse depuis l’introduction du permis S.

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Tout travail mérite le respect

Mohamed Shadan. Rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Merci et bravo aux femmes de ménage !

Il est de coutume dans les médias d’écrire sur les célébrités et les personnes qui ont « réussi » . J’aimerais parler, aujourd’hui, des femmes exilées en Suisse qui effectuent un travail non qualifié qui n’est pourtant pas à la portée de tout le monde.

Ce métier attire peu de candidates, beaucoup de femmes le considèrent comme l’un des domaines d’activité des plus désagréables. Je parle du métier de nettoyeur.

L’idée d’écrire cet article m’a été donnée par un collègue de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils qui a relevé la diligence des femmes de ménage du Centre de formation Le Botza, à Vétroz en Valais. Il me confie: « Ces femmes exécutent un travail difficile, peu reconnu et, malgré tout, elles ont toujours le sourire aux lèvres ».

Les raisons pour lesquelles des personnes quittent leur pays sont très diverses : chacun.e a sa propre histoire mais, souvent, c’est à cause d’une guerre. L’adaptation à un nouveau pays, avec une culture et une langue différentes, n’est pas facile. Le travail représente l’un des principaux facteur d’intégration et, à contrario, c’est le manque de travail qui est le principal problème sur la voie de l’adaptation sociale.

Roman Mekonen. Photo: Rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Ma première interlocutrice s’appelle Roman Mekonen. Ethiopienne de 38 ans, elle a une posture  modeste et timide. Elle est arrivée en Suisse en 2016. Cela n’a pas été facile pour elle au début… Trois mois après son arrivée, sa mère est décédée. En cette heure difficile, Roman a été soutenue par des amis qui l’ont aidée à faire face au chagrin. Mais on dit que les difficultés ne viennent pas seules, et bientôt Roman a divorcé de son mari et a reçu plusieurs réponses négatives à sa demande d’asile. 

Roman a refusé le découragement; elle a pris sa volonté dans son poing et a commencé à étudier le français et s’est inscrite à des cours de coiffure. Très vite, elle a réalisé que le meilleur remède contre la dépression est le travail. En Ethiopie, elle n’avait pas eu l’occasion d’étudier ni de travailler, donc le choix à sa disposition était limité. Elle a ainsi accepté de travailler comme femme de ménage, d’abord dans un bureau à Martigny, puis au Centre de formation du Botza.

Lorsqu’on lui demande pourquoi elle a choisi ce métier, Roman répond avec le sourire :

« Je sais comment nettoyer – ma mère me l’a appris depuis l’enfance. C’est très difficile de trouver un emploi dans notre canton, alors je suis satisfaite de ce que Dieu m’a donné ». Elle ajoute: « J’aime mon travail, malgré le fait qu’il soit pénible, non seulement parce que je dois travailler huit heures par jour mais, psychologiquement, ce n’est pas toujours facile, quand on nettoie les toilettes, par exemple. Malgré tout, je fais bien mon travail, car j’aime la propreté. »

 

Shadan Mohamed. Photo: rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Ma deuxième interlocutrice s’appelle Shadan Mohamed. Elle est Kurde d’Irak et a des yeux bruns pleins de bonne humeur. Elle est arrivée en Suisse en 2016. Shadan a 35 ans, elle est mariée et habite à Monthey. Elle travaille comme femme de ménage au Centre du Botza depuis 2018. Lorsqu’on lui demande pourquoi elle a choisi le métier de femme de ménage, elle répond : « Ce qu’on m’a proposé, je l’ai accepté. Je n’avais pas d’autre choix, parce que ma demande d’asile a été rejetée et que je n’ai pas accès à un véritable emploi ». Elle précise: « Dans mon métier, c’est le repassage que je préfère. Cette activité m’apaise. Nous avons une très bonne cheffe, très gentille, prévenante et réactive. Travailler sous sa direction est facile. En cas de problème, elle vous aidera et vous guidera toujours ». Et d’ajouter:  « Aussi je suis heureuse en Suisse. C’est un pays magnifique avec une nature incroyable, où les gens sont gentils. Mon mari et moi allons souvent nous promener à la montagne. Ma seule tristesse est notre situation administrative. »  A ces mots, son sourire s’efface. Shadan espère malgré tout qu’un jour son dossier soit accepté. Ce jour-là, elle respirera l’air alpin la poitrine grande ouverte.

Peu importe votre profession, il est important d’aimer ce que vous faites, tout comme Roman et Shadan. Le principal avantage de la profession de nettoyeur est la possibilité de travailler sans expérience de travail ni formation professionnelle. Ce métier a aussi des inconvénients : c’est le manque d’évolution de carrière et le bas salaire.

J’espère qu’un jour le travail des nettoyeurs et nettoyeuses sera mieux reconnu et mieux payé, car tout travail doit être tenu en haute estime et celui de nettoyeur ne fait pas exception.

Tamara Akhtaeva

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

 




Le silence est dangereux

Illustration: Harith Ekneligoda / rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Libérer la parole pour s’émanciper de l’oppression

En opposition à de nombreux proverbes ou phrases bibliques qui invitent au silence, déclarant qu’il est sage de se taire, aujourd’hui nous devons clamer haut et fort que le silence est aussi dangereux!

Selon Clint Smith, professeur et écrivain américain, « le silence est le résultat de la peur et peut parfois être si nocif qu’il peut causer de graves problèmes sociaux tels que l’oppression, la discrimination, la violence et même les guerres. »

Combattre la peur seul nous mène à une défaite certaine mais, lorsque nous racontons notre peur à d’autres, cette peur s’estompe.

Pendant de nombreuses années, le silence a été utilisé comme une arme de soumission : au temps de l’esclavage, les esclaves devaient garder le silence face à l’humiliation et aux mauvais traitements de leur maître. Dire quelque chose, se plaindre ou ne pas se soumettre aux ordres du maître signifiait l’immédiate violence des coups de fouet et même la mort, non seulement pour celles et ceux qui osaient rompre le silence, mais aussi pour toute leur famille.

Dans le passé, les femmes ont été victimes de soumission : elles devaient se taire face aux abus de leur mari, de leurs parents, de leurs frères ; elles devaient se taire devant la société. On pourrait dire que le silence était l’allié de la peur, de la soumission et du manque de droits des femmes, jusqu’au jour où certaines d’entre elles, dont l’histoire a retenu les noms, ont décidé de briser ce silence et d’affronter leur peur. Elles ont alors commencé à écrire, parler, raconter ce qui se passait et à revendiquer les droits qui leur revenaient en tant que membres à part entière de la société.

Des peurs qui durent longtemps et qui finissent par être destructrices

Mais ne regardons pas seulement le passé : aujourd’hui encore, combien de femmes sont maltraitées et n’osent pas dénoncer leur agresseur, situations qui se terminent régulièrement par un féminicide ? Combien de filles et de garçons sont victimes d’abus sexuels commis par leurs proches, sans oser les dénoncer ? Combien d’enfants qui subissent du harcèlement à l’école n’osent pas dire ce qui leur arrive et finissent par se suicider ?

Les personnes qui demandent l’asile, elles aussi, souffrent du silence. Elles ont déjà essayé d’échapper à des traumatismes en fuyant leur pays et se retrouvent pourtant en dépression ou en clinique psychiatrique à cause de la pression et de nombreuses injustices, discriminations, abus d’autorité, racisme… provenance parfois des autorités d’asile qui les accueillent.

Un silence qui n’est plus que peur et totale soumission permet de perpétuer les abus et les mauvais traitements. Et à la fin, tous les abus cachés à la connaissance du public remplissent une boîte à secrets appelée « Silence » dans laquelle sont conservés les larmes, les cris, la rage et la souffrance.

Martha Campo

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils.




FLASH INFOS #111

Illustration: Kristine Kostava / Voix d’Exils

Sous la loupe: 100 millions de personnes déplacées de force dans le monde / Parlement européen : une pétition pour la protection des femmes migrantes / Une nouvelle stratégie pour immigrer aux États-Unis



100 millions de personnes déplacées de force dans le monde

Tribune de Genève, le 03.05.2022

Le nombre de personnes déracinées dans le monde à cause des guerres et des conflits sociaux a franchi pour la première fois la barre des 100 millions. Cette hausse est notamment liée à la guerre en Ukraine, selon l’agence des Nations Unies.

Vendredi dernier, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi a déclaré que ce chiffre est inquiétant. Il souligne que ce phénomène doit être vu comme une alarme pour prévenir les conflits et faire attention aux causes qui poussent certaines personnes à se déplacer. Le HCR précise également que la situation s’est aggravée particulièrement à partir de la fin de l’année 2021. Le nombre de personnes déplacées dans le monde avait alors atteint 90 millions, en raison des conflits qui avaient lieu dans différents pays africains, ainsi qu’en Afghanistan.

Le Haut-Commissaire a également manifesté son désaccord avec les pays qui, sous prétexte de la pandémie de COVID-19, maintiennent toujours leurs frontières fermées aux personnes issues de la migration.

Renata Cabrales

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Parlement européen : une pétition pour la protection des femmes migrantes

InfoMigrants, le 19.05.2022

Mercredi 18 mai dernier, des représentantes de mouvements militants féministes européens ont déposé une pétition au Parlement européen. Cette pétition a été signée par 39’000 personnes dans plus de 18 pays, afin que les violences subies par les femmes sur la route de l’exil vers l’Europe soient prises en considération lors du traitement de leurs demandes d’asile.

De manière générale, la situation des femmes migrantes est plus compliquée que celles des hommes, et moins documentée.

L. B.

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Une nouvelle stratégie pour immigrer aux États-Unis

TV5 MONDE, le 21.05.2022

De nombreuses personnes migrantes d’Amérique du Sud tentent de rejoindre les Etats-Unis en raison des difficultés en lien avec la situation économique qui sévit dans leur pays, où les salaires ne permettent pas d’acheter quoique ce soit.

Toutefois, alors que depuis 2018 les exilé·e·s traversaient le Guatemala en groupes de centaines ou de milliers pour rejoindre l’Amérique du Nord, aujourd’hui, ils sont désormais divisés en plusieurs petits groupes pour se déplacer vers le Mexique afin d’éviter d’attirer l’attention de la police guatémaltèque. Le but de ces petits groupes est de se rendre aux Etats-Unis et d’y trouver un travail pour envoyer de l’argent à leur famille afin que ces derniers puissent ensuite les rejoindre. C’est notamment le cas de Gilberto Rodriguez qui a traversé des montagnes, des fleuves et des canyons accompagné uniquement de son chien.

Zahra Ahmadiyan

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils