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Réaliser ses rêves

 

Sans en connaître le prix…

En route pour la réalisation de mes rêves, je ne savais pas qu’il y aurait un prix à payer et à quel point celui-ci serait élevé. Je ne m’en préoccupais pas. J’ai travaillé dur pour concrétiser mes rêves, avec de belles couleurs roses, des éclats brillants et des surprises. 

Quand j’étais jeune, tout le monde décrivait son rêve personnel de vie. Moi, je rêvais d’une belle maison, entourée d’un beau jardin que je cultiverai en silence, avec ma femme commentant l’actualité de notre quartier, avec nos enfants qui joueraient autour de nous. En route vers la réalisation de mon rêve, j’ai payé mon aller simple en dollars. Maintenant, je paie le double du prix avec de la culpabilité, de l’anxiété et de l’angoisse.

Je vis le rêve suisse : ma maison donne sur une rue animée qui bourdonne de tambours pendant les festivals. Mon esprit, lui aussi plein du bourdonnement de mes pensées, est rempli de confusion. Je rembourse le prix de la réalisation de mon rêve. Ce prix comprend le sentiment du vide, la solitude et le silence avec, en plus, la souffrance de l’éloignement de ma famille et le mal du pays.

Je suis confus et inquiet. J’ai quatre enfants dans mon cœur, ils me manquent et je paie le prix d’être loin d’eux ; je me sens coupable quand ils font des cauchemars et que je ne suis pas là pour les rassurer. Quand on est un père, on ne rêve pas pour soi, on rêve plutôt pour ses enfants. Mon angoisse augmente à chaque conflit qui éclate dans mon pays et je regrette l’insistance avec laquelle j’ai tenu à réaliser mon rêve, sans en connaître le prix. 

Wael Afana

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

D’autres articles de l’auteur:

SHAIMA, publié le 30.03.2023

POUR CHAQUE DÉBUT, IL Y A UNE FIN, publié le 21.02.2023

DES RÊVES DE FOOTBALLEUR AUX RÉALITÉS DE LA GUERRE, publié le 07.02.2023

L’INSOUCIANCE DES PAPILLONS, publié le 03.01.2023

 




Lettre ouverte à ma mère, mon héroïne.

Photo: Kokob, membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

De Kokob, membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Désolée, je ne t’ai jamais dit tout ce que je voulais te dire…

Maintenant, il est trop tard pour te prendre dans mes bras

Parce que tu es loin, si loin…

Jamais je n’aurais imaginé vivre sans ton sourire

Source: Mariah Carey Ft. Boys 2 Men

Parfois, je reste silencieuse dans un environnement calme pour ne penser qu’aux moments précieux que nous avons passés ensemble, Maman. Tu es si loin de moi maintenant. J’aimerais que tu puisses voir mon bonheur en Suisse, afin que tu arrêtes de t’inquiéter pour moi. Parce qu’à chaque fois que je t’appelle, tu te soucies de moi, tu me demandes si j’ai faim ou si j’ai besoin de quelque chose. Maman, comment puis-je te rendre toute cette gentillesse et tout cet amour que tu m’as donnés ?

Enceinte, j’avais besoin de toi près de moi pour mon accouchement, mais je l’ai fait, Maman, avec l’aide des médecins et des infirmières ! Ensuite, j’ai eu peur de ne pas pouvoir être aussi forte que toi pour ma fille. Maintenant, mon seul souhait est de te revoir bientôt. Tu sais, ce jour-là, tout contre toi, je me blottirai. Et je m’endormirai, bercée par les battements de ton coeur. Oui, moi, ta grande fille, reconnaissante pour la vie que tu m’as donnée.

Je ne t’ai pas dit au revoir quand j’ai quitté le pays ; tu as connu la prison à cause de moi ; ta vie a été un combat pour me protéger. Tu es forte, Maman. Peux-tu me dire ton secret, maintenant que j’ai ma fille à protéger ? Parfois, l’argent ne peut pas tout résoudre, mais tu m’as montré que l’amour, la sagesse et la grâce suffisent. Tu n’es pas allée à l’université mais tu as fait tous les sacrifices pour que je puisse y aller. La photo du jour de mon diplôme, où tu te tiens si fière près de moi, est mon trésor, ici en Suisse.

Maintenant que je suis mère, je voudrais réussir aussi bien que toi, mon héroïne. Mon souhait, c’est de te voir ici avec nous au milieu de tes petits-enfants. J’aimerais qu’il existe une loi dans tous les pays du monde qui autorise les mamans à voir leurs enfants, où qu’ils soient sur la planète, une fois par année. C’est un beau rêve, il se réalisera peut-être un jour.

Maman, je m’arrête ici pour aujourd’hui. Le reste, je te le dirai quand je te reverrai. N’oublie pas que je t’aime du fond du cœur.

Kokob

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils