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FLASH INFOS #92

Photo: Wikilmages / Pixabay.com

Sous la loupe : Joe Biden contre le programme « Rester au Mexique » / Suisse : vers une augmentation des demandes d’asile ? / Le problème des centres pour migrant.e.s en Lituanie

Joe Biden contre le programme « Rester au Mexique »

Tribune de Genève, le 30.12.2021

L’actuel président des États-Unis Joe Biden s’est récemment positionné en faveur d’une interruption du programme d’immigration « Rester au Mexique », officiellement nommé « Protocoles de protection de l’immigration » (PPM).

Cette politique d’immigration controversée, mise en œuvre en 2019 par l’administration de l’ancien président Donald Trump, permet de renvoyer les demandeurs et demandeuses d’asile au Mexique pendant que leur dossier est en cours de traitement.

Zahra Ahmadiyan

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Suisse : vers une augmentation des demandes d’asile ?

Tribune de Genève, le 30.12.2021

Dans une interview parue jeudi 30 décembre dans le journal alémanique « le Blick », le chef du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) Mario Gattiker a annoncé s’attendre à une hausse des demandes d’asile en Suisse pour l’année à venir. Il l’estime à environ 15’000 pour 2022, contre 14’500 en 2021.

L’augmentation de ces demandes serait liée à l’instabilité politique dans plusieurs pays d’Afrique, où la pandémie a aggravé la détresse économique.

L. B.

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

Le problème des centres pour migrants en Lituanie

infomigrants.net, le 24.12.2021

En raison de la multiplication des flux migratoires passant par la Biélorussie, le nombre de personnes en situation d’exil tentant de rejoindre la Lituanie de manière irrégulière a connu une hausse sans précédent. Pour y faire face, ce pays voisin de la Biélorussie a mis en place en urgence des centres pour exilé·e·s où les conditions de vie s’avèrent problématiques.

C’est le cas du centre de Medininkai qui est divisé en cinq parties, séparées par des clôtures bâchées dont deux sont réservées aux hommes et trois autres aux femmes, aux familles et aux personnes homosexuelles. Au total, le centre compte environ 800 personnes. Les exilé·e·s dorment dans des containers installés à la hâte et manquent de tout, principalement de savon. Il arrive également que l’eau dans les douches reste froide une journée complète, ce même lorsqu’il fait moins -10 °C. Les personnes dans le centre s’irritent facilement car les garde-frontières lituaniens ont tendance à leur manquer de respect sans raison, en les traitant de « criminels » ou de « voyous ».

De nombreuses personnes dans cette situation ont fait appel après avoir vu leur demande d’asile rejetée. Le Parlement lituanien a d’ailleurs approuvé des amendements sur le statut juridique des personnes étrangères, autorisant à les garder en détention jusqu’à 12 mois lorsque le pays est en situation d’urgence, comme c’est le cas actuellement. Leur détention peut dorénavant être prolongée de six mois si leur demande est refusée.

L. B. et Z. A.

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




L’EXIL

Illustration: LANDO

Ce mot est peut être très facile à prononcer, mais il qualifie l’une des conditions les plus dures à vivre. Seuls les exilés en savent quelque chose, car ce n’est pas comme on le pense, c’est une maison avec plusieurs portes; certaines peuvent nous envoyer en enfer, certaines peuvent nous ramener au bercail et d’autres s’entrouvrir sur une terre d’accueil.

Nous, les exilés, sommes aujourd’hui prisonniers de nos propres âmes et de nos parents laissés derrière nous.

Mécontents de notre patrie, soit à cause d’un problème économique, politique, ou bien à cause d’une situation familiale amère, nous avons renoncé à vivre chez nous.

À la recherche d’une vie meilleure, nous avons pris le risque de partir, de tout laisser et de venir affronter l’inconnu.

Nous nous sommes coupés de nos racines, de notre famille, de nos repères, des codes sociaux de notre culture, de notre langue, celle qui nous vient de notre mère, de la mère notre mère et de sa mère avant elle.

Nous avons préféré rompre les liens avec nos frères de sang pour adopter une nouvelle façon d’entendre, de comprendre, de s’exprimer, bref, une nouvelle façon de vivre.

Se fixer de nouveaux objectifs et de nouvelles règles nous fait souvent oublier qui nous sommes, d’où nous venons et même ce que l’on est venu chercher.

Certains d’entre nous retourneront au bercail une fois la situation calmée, car ils avaient jurés de partir mais aussi de revenir un jour.

D’autres rentreront à peine arrivés car leurs rêves de libertés se seront écroulés devant les dures réalités de l’Eldorado.

D’aucuns jureront de rester, de ne jamais retourner, même si les recours sont épuisés, l’assistance inexistante, l’espoir étouffé par des procédures marécageuses.

Malgré le poids du regard que porte sur eux le policier qui peut les menotter à tout moment même devant leurs enfants.

Cet agent qui les pousse dans une fourgonnette pour les cracher comme des microbes dans un centre de rétention.

Centre carcéral où ils seront éloignés de tout ce qui les attachait à la vie au point de leur faire perdre la mémoire d’eux-mêmes et le goût des autres.

Il ne leur restera alors que leurs corps et, parfois, le choix de l’hôpital, s’ils ont le courage de se faire du mal ; de la prison s’ils ont l’audace de se débattre ou de l’avion s’ils abandonnent et décident enfin de retourner sur la terre de leurs ancêtres; celle qui les a vu naître, grandir et qui aura toujours besoin de ses enfants.

Pita

Membre de la rédaction valaisanne




La fin des 42 années de règne du Guide suprême annonce-t-elle enfin une ère de paix en Libye ?

Kadhafi

La mort de Muammar Muhammad Al-Gaddafi, intervenue le jeudi 20 octobre 2011, représente une étape cruciale pour la Libye. Le pays tourne ainsi une page de son histoire en mettant fin à 42 années d’un règne sans partage.

Al Kadhafi, 69 ans, a été tué plus de huit mois après le début de la campagne de bombardement de l’OTAN en Libye. Pendant cette période agitée, des milliers de Libyens ont perdu la vie et plusieurs villes du pays ont connu des crises humanitaires. La mort de Kadhafi mettrait fin une fois pour toute au conflit interne libyen, et permettrait au pays de se stabiliser.

Mais une question subsiste : pourquoi un conflit entre Libyens incite la communauté internationale à investir autant de moyens – tant financiers que matériels – alors que la crise économique secoue en ce moment plusieurs pays, tels que la France, qui a dépensé près de 300 millions d’euros dans ce conflit ?

Mansour Daw, chef de la sécurité du colonel Kadhafi, un de ses plus fidèle compagnon, a accordé une interview à la chaîne de télé Al Arabiya. Ce dernier a été blessé par des fragments d’obus lors du bombardement du convoi du colonel Kadhafi. Il a affirmé, au cours de son interview, qu’il était en compagnie du Guide suprême depuis le 20 août 2011 jusqu’à sa mort à Syrte en Lybie, contrairement à ce que prétendaient les médias quant à sa fuite au Niger. Mais est-ce la seule propagande médiatique occidentale ? Existerait-il d’autres vérités qui nous sont cachées concernant la capture et la mort de el Kadhafi ? La question reste donc posée.

Bref, la mort du soi-disant tyran prive ses loyalistes politiques et militaires d’un leader ainsi que des raisons de poursuivre la confrontation avec les autorités de transition libyennes. A partir de maintenant, le Conseil national de transition (CNT) doit employer tous ses efforts à la réconciliation nationale ainsi qu’à la reconstruction politique, économique et sociale. Ayant survécu aux agitations, les Libyens doivent désormais rechercher la paix, panser les blessures causées par la guerre et relancer la construction économique. La communauté internationale, quant à elle, doit maintenant réfléchir au rôle qu’elle devra jouer pour aider la Libye à se remettre sur les rails après avoir contribué à sa destruction.

Alors que la vie de Kadhafi a pris fin dans les flammes de la guerre, la Libye est sur le point d’ouvrir une nouvelle page de son histoire. On espère que le pays réussira à émerger de la violence et des conflits et pourra se développer en paix. Néanmoins, la mort de Kadhafi ne signifie pas nécessairement que tout ira comme il le faudrait pour le pays à l’avenir. Le reste des forces armées de Kadhafi, les conflits entre les régions, les tribus et les partis politiques, la prolifération d’armes au sein de la population civile, l’intervention des puissances étrangères et les attaques des extrémistes et des terroristes viendront s’ajouter à la complexité et à l’imprévisibilité de la situation dans le pays. En ce sens, la mort du Guide suprême signifie peut-être le début d’un nouveau cycle de conflits et de disputes dans une ère post-Kadhafi.

MAK

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




La Côte d’Ivoire peine à installer la démocratie

 

Bingu wa Muthaika rencontre Laurent Gbagbo

Bingu wa Muthaika, président de l’Union Africaine rencontre Laurent Gbagbo. Photo: Abidjan.net

Après les élections présidentielles de 2010, le pays est divisé entre pro Gbagbo et pro Ouattara. Entre partition et chaos, l’avenir des Ivoiriens s’annonce très incertain.

Depuis les élections du 28 novembre dernier, la situation en Côte d’Ivoire défraie la chronique. Les medias du monde entier se font l’écho de la crise qui frappe ce pays depuis la victoire dans les urnes d’Alassane Ouattara. Une victoire contestée par le président sortant, Laurent Gbagbo, qui s’autoproclame vainqueur. Comment a-t-on pu en arriver là dans un pays qui, hier encore, était perçu comme la vitrine de l’Afrique de l’Ouest ? Il faut savoir que la Côte d’Ivoire a connu le régime du parti unique depuis les années 60 jusqu’en 1990 qui voit la naissance du multipartisme. Le parti le plus influent sera le Front Populaire Ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo. Ce dernier, après une lutte acharnée contre ses adversaires politiques une décennie durant, accède à la magistrature suprême en 2000. Il promet monts et merveilles au peuple ivoirien.

Laurent Gbagbo et l’esprit nationaliste

 Très futé, Laurent Gbagbo met la jeunesse de son côté et installe un pouvoir aux relents dictatoriaux. Il commence par endoctriner la population en distillant un esprit nationaliste. Sa cible sera l’Occident et principalement la France, qu’il traite d’impérialiste. Il réussit à inculquer cette vision du monde dans l’esprit d’une partie des ivoiriens et surtout dans les milieux estudiantins. En 2002, commence la rébellion armée qui aura des conséquences désastreuses, aussi bien pour la Côte d’Ivoire que pour le Mali, le Burkina, le Ghana et la Guinée qui sont les pays frontaliers. La population ivoirienne, lassée de vivre au quotidien le calvaire de la guerre, appellera de tous ses vœux le retour de la paix. Une paix qui ne sera possible que par l’expression de la souveraineté du peuple, c’est-à-dire l’organisation d’élections transparentes. C’est ainsi, après maints reports, qu’ont enfin lieu les élections, qui verront s’affronter deux candidats, en la personne de Laurent Gbagbo du FPI et d’Alassane Ouattara du Rassemblement Démocratique Républicain (RDR), opposés lors du deuxième tour, le 28 novembre 2010.

La confiscation du pouvoir et le peuple pris en otage

Il faut rappeler ici que, pour éviter tout dérapage et toute contestation de résultat, le pays, en collaboration avec la Communauté internationale, s’est doté de tous les moyens nécessaires pour aboutir à des élections irréprochables. Après trois jours de dépouillement, les résultats donnent Alassane Ouattara en tête. Les Ivoiriens ont enfin un président de la République et se réjouissent de pouvoir profiter d’une paix retrouvée. Mais que constate-on dans le camp de Laurent Gbagbo ? Après dix années de gestion calamiteuse des affaires de la nation, le candidat déchu n’entend remettre sa place à personne d’autre, encore moins à Laurent Ouattara, auquel il conteste la victoire. Voilà le peuple ivoirien à nouveau pris en otage. L’espoir de réunification d’une nation longtemps divisée s’effondre. Toutes les tentatives de médiation se soldent par un échec. La partition de la Côte d’Ivoire est plus que jamais une éventualité préoccupante avec, au nord, les pro Ouattara et, au sud, les pro Gbagbo. Le pays est devenu l’arène de sanglants affrontements quotidiens entre les partisans des deux leaders, à quoi s’ajoutent encore les répressions abusives de la part des forces de l’ordre.

Eviter de faire couler le sang

Faisant fi des accords et des engagements préalables pris auprès des Ivoiriens et des membres de la Commission Electorale Indépendante (CEI) au cours du processus électoral, Laurent Gbagbo s’accroche au pouvoir coûte que coûte en prétendant respecter la légalité constitutionnelle. Une question reste sans réponse : Pourquoi Laurent Gbagbo a-t.il accepté la certification des résultats du premier tour faite par les représentants de la Communauté internationale et conteste-t-il celle faite par eux au deuxième tour ? Il continue de vouloir faire vibrer la corde patriotique, en jetant l’anathème sur la France, les soldats de l’ONUCI (Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire) et les représentants de la CEDEAO (Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest). Pour le ramener à la raison, plusieurs solutions se présentent dont celle militaire, mais avec le risque de faire couler le sang. Si on considère les conséquences tragiques de l’intervention américaine en Irak et en Afghanistan, on comprend que cette option ne serait pas la bienvenue pour ce petit pays d’Afrique de l’Ouest.

L’inaction coupable du peuple ivoirien

Aussi, ce qui étonne, c’est le mutisme des Ivoiriens. Aujourd’hui les peuples africains en général et celui de Côte d’Ivoire en particulier feraient bien de s’inspirer de l’exemple tunisien. Voilà un peuple qui a subi les dictats d’un chef d’état durant vingt trois ans et dont le soulèvement à partir d’une petite localité a provoqué la libération. Les Ivoiriens se souviennent comme si c’était hier, qu’en 2000, le général Guéi Robert s’était autoproclamé président de la république au lendemain des élections. Une marée humaine s’était alors rassemblée dans les rues d’Abidjan pour lui arracher le pouvoir qui revenait de droit à Laurent Gbagbo. Aujourd’hui, cependant, on ne ressent pas de vigueur dans les réactions du peuple, que ce soit dans le nord où il semble acquis à la cause d’Alassane Ouattara ou dans le sud. C’est pourtant au peuple qu’il appartient d’aller chercher le pouvoir là où il se trouve et non à quelqu’un d’autre de le faire à sa place. Actuellement, les divisions ethniques sont le résultat des discours discriminatoires des politiques dont la devise pourrait être : diviser pour régner. Or, aucune nation ne peut se construire sur cette base. Un état moderne est un état dont l’appareil gouvernemental repose sur l’alternance démocratique. Il est donc impérieux que le peuple ivoirien impose ses choix à ses gouvernants pour recouvrer enfin la stabilité et une paix durable.

Clément AKE

 Membre de la rédaction lausannoise de Voix d’Exils