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Revue de presse #17

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur: Damon / Voix d’Exils.

Sous la loupe : France – la convergence des luttes / Portugal – une nouvelle destination pour les migrants marocains / Suisse – les demandes d’asile en chute libre

La manif réunit sans-papiers, antiracistes et gilets jaunes

franceinfo.fr, le 20.06.2020

Lors de la journée mondiale des réfugiés du 20 juin dernier, plusieurs milliers de personnes ont défilé dans les grandes villes françaises à l’appel de plusieurs collectifs. Les sans-papiers sont descendus dans la rue pour réclamer leur régularisation et un accès au logement.

A Paris, Franceinfo tend son micro à Babacar Sall qui survit depuis 3 ans en faisant des déménagements ou des petits travaux en plomberie, au noir. Les meilleurs mois, ce Sénégalais en exil parvient à envoyer 20 à 30 euros à sa femme et à sa fille, toutes deux restées au pays.

A Lyon, des « gilets jaunes », des syndicalistes de la CGT et d’autres groupes militants se sont joints au cortège pour dénoncer le racisme et les violences policières.

Sur les banderoles et les pancartes brandies par les manifestants, des slogans choc : « De l’air, de l’air, ouvrons les frontières ! », « Liberté, égalité, régularisez ! », « Des papiers pour toutes et tous », « Stop à la précarité », « Droit de vivre = droit au travail ! »

A Grenoble, Franceinfo recueille le témoignage d’un jeune Malien de 20 ans, Chérif Cheik, qui espère finir son Bac Pro de technicien du bâtiment l’année prochaine, et qui n’a pour l’heure ni logement, ni papiers.

 

Du Maroc au Portugal, une nouvelle route migratoire

infomigrants.net, le 16.06.2020

Une nouvelle route migratoire est en train de s’ouvrir avec comme point de départ les côtes ouest-marocaines et point d’arrivée le sud du Portugal.

Ainsi, 48 migrants ont débarqué dans la région de l’Algarve ces six derniers mois, dont 22 à la mi-juin, après avoir été interceptés en mer au large des côtes portugaises. Âgés de 20 à 30 ans, les migrants étaient tous originaires de la côte ouest du Maroc.

Le confinement très strict imposé pour lutter contre la pandémie de coronavirus a encore aggravé la situation économique de la jeunesse marocaine. Le manque de perspectives d’avenir explique que certains choisissent l’exil malgré tous les dangers à surmonter.

Certes, le chiffre des arrivées au Portugal est encore faible, mais les autorités redoutent un changement d’itinéraire des migrants qui empruntaient généralement la route « classique », partant des côtes du nord du Maroc pour rallier le sud de l’Espagne ou les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla avant de rejoindre l’Europe.

Selon les spécialistes des migrations, ce changement de route n’a rien d’étonnant, dans la mesure où les contrôles dans le nord du Maroc se sont renforcés ces dernières années et ont poussé les migrants à trouver d’autres itinéraires comme ceux passant par les Canaries ou le Portugal. Comme toujours, quand on bloque une route, les réseaux s’adaptent et d’autres routes s’ouvrent ailleurs.

 

70% de baisse des demandes d’asile en Suisse

24 Heures, le 11.06.2020

Les migrations ont nettement diminué dans toute l’Europe en raison des mesures de lutte contre la pandémie de coronavirus, tels que les contrôles aux frontières ou les interdictions de voyager à l’intérieur de certains pays.

Un exemple ? 376 demandes d’asile ont été enregistrées en Suisse au mois de mai dernier, soit 850 de moins par rapport à mai 2019. Une chute de presque 70%.

Dans le cadre des mesures de prévention de l’épidémie de Covid-19, la Suisse applique, depuis le 25 mars, des restrictions d’entrée depuis tous les États Schengen, à l’exception du Liechtenstein. Ces restrictions ont aussi pour conséquence la suspension des transferts Dublin.

En mai toujours, le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) a traité 1274 demandes d’asile en première instance. Parmi elles, 157 ont abouti à une décision de non-entrée en matière, 367 à l’octroi de l’asile, et 371 à l’admission provisoire (permis F).

Par ailleurs, 150 personnes ont quitté la Suisse sous le contrôle des autorités ou ont été rapatriées.

Les principaux pays de provenance des requérants sont: l’Érythrée, l’Afghanistan, la Syrie, l’Algérie et la Turquie.

Oumalkaire / Voix d’Exils




Revue de presse #15

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils.

Sous la loupe : L’Albanie peine à nourrir les migrants / La Grèce vide les camps situés sur ses îles / La Suisse étudie la possibilité d’accéder aux portables des requérants

Albanie: les migrants crient famine

Infomigrants.net, le 29.05.2020

Toujours plus de migrants séjournant dans des structures d’accueil albanaises gérées par l’État sont réduits à faire la manche pour trouver de quoi manger. Le magazine Balkan Insight, qui a mené l’enquête, cite le cas de Khaled, originaire de Palestine. Hébergé dans le centre de Babrru, près de la capitale, le jeune homme témoigne de la galère vécue au quotidien par lui-même et ses compagnons d’infortune confrontés à une grave pénurie alimentaire.

Surpopulation, nourriture rare et de mauvaise qualité, assistance médicale défaillante… le camp de Babrru manque de tout. Ce printemps, il a refoulé des migrants, malgré le froid, sous prétexte de mesures de confinement dues à la pandémie de Covid-19.

L’agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) décrit l’Albanie comme un pays de transit pour beaucoup de migrants qui espèrent rejoindre l’Italie ou les pays riches du nord de l’Europe. Mais, avec la fermeture progressive de la route des Balkans, de plus en plus de migrants ont fini par se retrouver bloqués en Albanie.

Le HCR, qui soutient les initiatives du gouvernement albanais pour aider les migrants, relève que le centre de Babrru a été construit à l’origine pour 180 personnes avant d’augmenter sa capacité de 200 places en 2018 sous la pression des arrivées. Mais, d’après des témoignages, le centre serait gravement surpeuplé et échapperait au contrôle des autorités. Certains migrants affirment que ce sont des gangs qui font la loi, volent de la nourriture et agressent les résidents. L’identité de ces gangs reste floue, mais il pourrait s’agir de migrants qui vivent depuis un certain temps dans le centre, plutôt que de gangs qui viendraient de l’extérieur.

Grèce : transfert de 14 000 migrants des îles vers le continent

Rtbf, le 04.06.2020

Depuis le début de l’année, les autorités grecques ont transféré près de 14’000 personnes des camps de migrants surpeuplés situés sur les îles vers la Grèce continentale. De source officielle, ces transferts ont permis de réduire la population migrante des îles de la mer Égée – Lesbos, Chios, Samos, Leros et Kos -, de 42 000 à 32 247 personnes au mois de mars dernier. Malgré ces départs, le nombre de migrants encore hébergés dans les camps situés sur les îles dépasse largement leur capacité d’accueil.

Les autorités grecques ont, par ailleurs, accéléré le traitement des demandes d’asile, faisant passer le nombre de dossiers en cours de 126’000 en début d’année, à moins de 100’000.

Le pays a également renforcé la sécurité le long de ses frontières terrestres et maritimes avec la Turquie. Depuis le début de la pandémie Covid-19, des centaines de migrants embarquées dans des bateaux ont été refoulés par les garde-côtes et la marine et seulement 125 traversées ont été enregistrées.

Le fait que la Grèce autorise le passage à un nombre fortement réduit de migrants a été vertement critiqué par les organisations internationales de protection des droits de l’Homme.

 

Suisse : est-il légitime de fouiller les téléphones des requérants ?

Le Matin, 04.06.2020

Un projet de loi prévoit de permettre aux autorités d’accéder aux smartphones, tablettes ou ordinateurs portables des requérants d’asile, dans le but d’établir leur identité et/ou leur nationalité.

Pour l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), ce projet est contestable tant du point de vue de l’État de droit que de la protection des données. Les requérants ont déjà l’obligation légale de collaborer à la procédure et peuvent – s’ils y consentent – mettre à disposition leurs données à des fins de preuves. Les y obliger est disproportionné.

Sans compter qu’une telle disposition laisserait supposer que les demandeurs d’asile sont des criminels potentiels. À l’inverse, les contrôles des autorités qui consultent les données privées de ces personnes ne seraient, quant à eux, soumis à aucun contrôle judiciaire.

La plateforme d’information asile.ch rappelle qu’une expérience menée en Allemagne durant 18 mois sur les téléphones des requérant a montré peu d’efficacité. Les données récoltées n’ont apporté aucune information utilisable dans 64% des situations. Elles ont permis de confirmer l’identité des personnes dans 34% des cas et de la réfuter dans 2% des cas seulement.

De manière générale, les cantons se montrent divisés sur le projet de loi : Genève le soutient du bout des lèvres ; Neuchâtel s’y oppose et Fribourg l’approuve.

Du côté des partis, le PS et les Verts rejettent catégoriquement ce développement du droit d’asile. A droite, le PLR reconnaît une atteinte à la sphère privée « acceptable et proportionnée ». Il salue une facilitation et une crédibilité renforcée de l’asile dans son ensemble. Un avis partagé par le PDC.

Oumalkaire / Voix d‘Exils




Revue de presse #13

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : Les Tunisiennes exigent l’égalité dans le déconfinement / Les lenteurs administratives grecques embrasent un camp de requérants / Les migrants mineurs prennent tous les risques pour traverser la Manche

Tollé en Tunisie : un déconfinement jugé « sexiste »

Jeuneafrique.com 03.05.2020

La Tunisie, qui avait mis en place un confinement très strict depuis le 22 mars dernier, en a annoncé la levée partielle début mai, avec une reprise de l’activité à 50% des effectifs dans de nombreux secteurs de l’économie. Pas très inspiré, le gouvernement avait demandé par décret que certaines personnes continuent de rester confinées, dont les retraités de plus de 65 ans, les personnes atteintes de maladies chroniques, les femmes enceintes et « les mères dont l’âge des enfants ne dépasse pas 15 ans ».

Ce dernier point a aussitôt déclenché la colère de nombreuses associations de défense des droits des femmes, qui ont dénoncé dans un communiqué « cette exception outrageante traduisant une vision machiste et patriarcale des rôles et des attributs sociaux de sexe qui fait porter aux seules femmes la responsabilité des enfants ».

Les militantes ont rappelé à leur gouvernement que l’égalité hommes-femmes était inscrite dans la Constitution tunisienne adoptée en 2014. « Au-delà des droits des femmes, le gouvernement devrait savoir qu’il y a des pères qui veulent s’occuper de leurs enfants et d’autres qui devraient le faire », a martelé Bochra Bel Haj Hmida, ex-présidente de la Commission pour les libertés individuelles et l’égalité.

Assaillies par les critiques, mises en demeure de faire respecter l’égalité, les autorités ont finalement publié un communiqué sur les réseaux sociaux évoquant « une erreur dans la rédaction finale du texte ».

Selon l’Institut national tunisien de la statistique, la participation des femmes au monde du travail n’a rien de marginal, puisqu’elles représentent officiellement 30% de la population active. Un chiffre qui serait sous-évalué selon certaines associations.

Asile en Grèce : la lenteur du traitement des demandes met le feu aux poudres

Infomigrants.net, 13.05.2020

Fortes tensions dans le centre de Fylakio où des demandeurs d’asile se sont rebellés le 12 mai dernier contre la lenteur du traitement de leurs dossiers. A bout de nerfs, les manifestants ont mis le feu à des matelas et lancé des pierres contre les policiers.

Situé à la frontière gréco-turque, Fylakio est un centre de passage qui héberge une centaine de personnes, dont des mineurs non accompagnés, le temps que leur demande d’asile soit traitée. Certains d’entre eux y végètent depuis plus de six mois sans avoir de nouvelles. Interpellés, les responsables grecs invoquent les problèmes de fonctionnement des services d’asile dus à la pandémie de coronavirus qui aggrave encore les retards préexistants.

Un rapport du Conseil de l’Europe publié l’année dernière avait déjà alerté sur les conditions de vie des migrants dans les camps grecs, notamment dans celui de Fylakio. « Maintenir des personnes pendant plusieurs mois dans des conditions aussi épouvantables est une violation de l’interdiction de mauvais traitement. »

Inquiètes, les ONG observent que le gouvernement conservateur grec a restreint dernièrement les droits des migrants. Une loi adoptée début mai permet notamment la détention automatique des demandeurs d’asile dont les appels ont été rejetés et ceux soumis à des procédures de retour. Considérée comme « dangereuse pour la santé des personnes détenues », cette loi va également à l’encontre du droit international en vertu duquel la détention pour migrants ne doit être utilisée « qu’en dernier recours ».

Migrants mineurs : toujours plus nombreux à traverser la Manche

Rtbf.be, 21.05.2020

Malgré les dangers liés à la densité du trafic maritime, aux forts courants et à la faible température de l’eau, les tentatives de traversée de la Manche sont en expansion. En 2019, 2758 migrants ont été secourus par les autorités françaises et britanniques, soit quatre fois plus qu’en 2018.

Et la pandémie n’a pas infléchi la tendance. Seul le mode de transport a changé. Ce ne sont plus les poids lourds – immobilisés pour cause de Covid-19 – qui sont pris comme moyen de transport, mais de petites embarcations à la sécurité douteuse.

Côté anglais, à Douvres, principal port d’entrée depuis le continent, on a recensé plus de 200 jeunes migrants venus demander l’asile en Grande-Bretagne il y a un an, et ce chiffre a presque doublé en 2020. Les arrivants sont essentiellement des garçons de 16-17 ans, originaires d’Iran, d’Irak, ou d’Afghanistan.

Le comté anglais qui n’avait qu’un seul centre d’accueil pour migrants, en a désormais trois. Outre la charge de 469 mineurs, il a aussi la responsabilité de soutenir 932 migrants âgés de 18 à 25 ans qui ont quitté le système de prise en charge.

En 2019, la police a procédé à 418 arrestations pour des infractions liées à l’immigration clandestine et 111 passeurs ont été condamnés à des peines de prison. Depuis le début de l’année 2020, plus de dix passeurs ont été condamnés et emprisonnés.

Pour dissuader les candidats à la traversée de la Manche, la Grande-Bretagne travaille avec la France pour renvoyer davantage de migrants qui tentent la traversée.

 

Oumalkaire / Voix d’Exils




Revue de presse #11

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils.

Sous la loupe : Demandes d’asile : attention aux mauvaises traductions /A Genève, les sans-papiers ont le ventre creux / En Afrique, le Covid-19 n’arrête pas les migrations

Une mauvaise traduction peut faire basculer la vie d’un demandeur d’asile

Asile.ch 08.05.2020

En Suisse, des problèmes de traduction lors des auditions impliquant des requérants iraniens, afghans, yézidis, érythréens et kurdes ont été dénoncés. Les interprètes seraient mal formés, mal aiguillés et souvent mal surveillés. Les apartés durant les auditions et les contacts lors des pauses sont formellement interdits mais seraient pourtant fréquents. Il n’est pas rare que des tensions entre requérants et interprètes dégradent le cours d’une audition.

Le Tribunal administratif fédéral (TAF) est régulièrement appelé à se prononcer sur ce problème. Dans un arrêt du 17 février 2020, il précise qu’une mauvaise traduction conduit à un établissement incomplet, voire inexact de l’état de fait, viole gravement le droit d’être entendu du recourant et doit conduire à l’annulation de la décision du Secrétariat d’État aux migrations (SEM).

Dans une lettre adressée fin janvier à Mario Gattiker, le directeur du SEM, soixante-six experts en droit d’asile, dont des juristes, avocats et professeurs de droit, ont demandé l’instauration d’un enregistrement audio des auditions d’asile et l’organisation d’une formation spécifique pour les interprètes.

Plusieurs pays d’Europe ont déjà mis en place le dispositif d’enregistrement. C’est le cas de la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Finlande, la Suède, la Pologne, la Slovénie et Malte. D’autres comme l’Italie, Chypre et les Pays-Bas sont en voie de suivre leurs voisins. Son adoption par la Suisse, lui permettrait d’améliorer la qualité de la procédure et contribuerait à l’harmonisation du droit d’asile en Europe.

Pour l’heure, le SEM assure qu’en matière de traduction il est l’un des meilleurs dans le domaine, mais reconnaît néanmoins l’existence de bavures et s’est dit ouvert à l’enregistrement audio des auditions d’asile. A suivre.

 

Affamés, les travailleurs précaires sortent de l’ombre

ATS, 10.05.2020

A Genève, la crise du Coronavirus touche durement les travailleurs précaires, parmi lesquels une majorité de sans-papiers. Plus forte que la peur de s’exposer à découvert, la faim pousse cette population jusque-là très discrète à sortir de l’ombre. Et la Suisse découvre effarée des images de files interminables qui se forment depuis deux semaines les samedis devant la patinoire des Vernets.

Après des heures d’attente, hommes et femmes parfois accompagnés d’enfants repartent avec un colis de produits alimentaires. De quoi tenir jusqu’à la semaine suivante. Les partenaires sociaux, parmi lesquels la Ville de Genève qui coordonne l’opération, s’inquiètent face à l’augmentation croissante du nombre de personnes fragilisées.

Alors qu’en Suisse romande, et en particulier à Genève, cette population cachée prend le risque de se montrer pour chercher à manger, il n’en va pas de même en Outre-Sarine. Dans les villes de Zurich, Berne et Bâle, les sans-papiers évitent de s’exposer par crainte de se faire arrêter par la police puis expulser. Les distributions de nourriture ont donc lieu dans la plus grande discrétion, loin des caméras des médias.

A noter que l’opération Papyrus qui avait permis en 2017-2018 la régularisation de plusieurs milliers de clandestins à Genève, n’a pour l’heure pas trouvé d’équivalent du côté alémanique.

 

Malgré la pandémie, les flux migratoires continuent

RTBF, 09.05.2020

Malgré la pandémie, des milliers d’Africains continuent de tenter la périlleuse traversée du Sahara via le nord du Niger et la Libye dans le but d’atteindre les côtes méditerranéennes puis l’Europe. Selon des témoignages recueillis, ils préfèrent pour beaucoup mourir du coronavirus que de vivre dans la misère.

Depuis 2015, un plan anti-migrants a été mis en place à la frontière entre le Niger et la Libye. Tout au long de la crise sanitaire, les forces de sécurité ont intensifié leur surveillance pour que les mesures de fermeture des frontières soient respectées. Les mesures anti-coronavirus ont encore aggravé encore la situation puisque les routes elles aussi sont complètement bloquées.

Malgré la solidité du dispositif mis en place, les mouvements migratoires se sont poursuivis. En moins de deux mois, plus de 300 migrants ont été interceptés par l’armée nigérienne du côté de sa frontière avec la Libye.

D’autres migrants interceptés dans le Sahara ont été placés en quarantaine durant 14 jours sur des sites temporaires nigérians où l’Office International pour les Migrations (OIN) a accueilli environ 1600 personnes bloquées dans le désert depuis la fermeture des frontières à fin mars.

 

Oumalkaire / Voix d’Exils

 

 




Un confinement aux visages multiples

Mème réalisé par Hajar, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Des rédacteurs et rédactrices de Voix d’Exils s’expriment sans fard sur leur vécu

A quoi ressemble le quotidien des migrants et des migrantes en ces temps de Covid-19 ? Trois rédacteurs de Voix d’Exils, deux hommes et une femme, ont accepté de lever le voile sur leur vie de « reclus » pour répondre à cette question. Entre joies créatives et domestiques, peur du regard d’autrui et réflexions désabusées, le moins que l’on puisse dire c’est que le confinement recouvre des réalités très contrastées.

 

« Un choc bénéfique pour la réflexion »

Damon, 28 ans, Iran, confiné dans un petit appartement

« Ma fragilité a été cassée il y a 6 ans, entre les quatre murs d’une cellule de prison. Aujourd’hui, je ne veux pas me plaindre d’être obligé de rester à la maison. Je me rappelle ces moments où toucher les cordes de mon violon, prendre une photo avec mon appareil, entendre une seule note de musique n’étaient que des rêves. J’avais perdu ma liberté en raison de mes activités politiques et artistiques. Paradoxalement, c’est en prison que j’ai appris comment vivre et comment apprécier le moment présent. Dès que j’ai été libéré, je me suis promis de ne plus perdre un seul instant.

En tant qu’artiste – mais en suis-je vraiment un ? -, je dois admettre que les 24 heures que compte chaque journée passent trop rapidement. C’est un vrai défi pour moi de comprendre pourquoi les gens se plaignent d’être confinés…

Chez moi, il y a tout le temps quelque chose à faire. Jouer du violon ou de la guitare, prendre et développer des photos-montage surréalistes, finaliser mon projet de film, écrire, cuisiner, faire le ménage, prendre soin de moi et de mes fleurs… Sans compter internet qui me connecte aux autres et efface la distance entre les personnes.

Pour moi, le confinement représente aussi une opportunité pour planifier mon avenir. Je crois que ce type de choc est bénéfique pour que chacun puisse prendre le temps de réfléchir sur son quotidien. »

 

« Le port du masque est une épreuve »

Oumalkaire, 24 ans, Djibouti, confinée avec une colocataire

« Durant cette crise sanitaire causée par le Covid-19, tout le monde a le mot confinement à la bouche. Ce qui est étrange, c’est de voir comment la majorité des activités se sont arrêtées d’un coup. Ça fait peur de voir des routes quasiment vides, des rues calmes, des endroits publics désertés ou fermés. Rien ne bouge, on a l’impression de vivre dans un cauchemar ou dans un film d’horreur.

Ce qui est intéressant, c’est la manière dont les gens suivent les informations concernant le Covid-19. En peu de temps, ils sont devenus accros à l’actualité, et rien de ce qui est dit sur la pandémie ne leur échappe.

Alors que nous sommes confinés dans nos maisons, l’évolution de ce virus qui s’est propagé partout à travers le monde nous fait réviser la géographie et découvrir de nouveaux pays, de nouveaux lieux.

Pour moi, le port du masque est une épreuve. Normalement, il est porté pour se protéger soi-même d’une contamination ainsi que pour en protéger les autres et non pas pour faire peur. En réalité, lorsqu’on le porte, les personnes que l’on croise font un détour de plusieurs mètres par peur d’être contaminées ! Et ce, non sans nous avoir jeté un mauvais regard… Elles pensent probablement que si on porte un masque, c’est forcément qu’on est malade et qu’il faut nous éviter.

Certes, être confiné chez soi n’est pas agréable, mais chaque situation est différente. Le confinement peut aussi représenter une opportunité ou une chance à saisir pour achever les travaux qui traînent depuis longtemps faute de temps.

En ce qui concerne les requérants d’asile, c’est une bonne période car il semble que le SEM (Secrétariat d’État aux migrations) traite les demandes et donne ses décisions plus rapidement qu’avant le confinement. »

 

« Rien n’a changé ! »

Hajar, 23 ans, Irak, confiné dans un foyer EVAM

« Le confinement n’a rien changé à ma vie! Un réfugié qui doit toujours rester dans sa boîte ne connaît peut-être pas toujours la différence entre la vie sans confinement et la vie avec le confinement. Pour moi, c’est du pareil au même! »

 

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils