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Petit guide pour vous intégrer facilement où que vous soyez

Photo: rédaction valaisanne de Voix d'Exils

Photo: rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Les conseils avisés de Mostafa

Avez-vous déjà déménagé dans un nouveau lieu ou dans un nouveau pays ? Avez-vous connu le sentiment inconfortable d’être séparé des autres à cause d’une langue, d’une culture ou d’un mode de vie différent? Si oui, vous êtes au bon endroit, car j’ai réfléchi aux mesures qui permettent d’atteindre un bon niveau d’intégration. Suivez le guide !

En sociologie, on appelle intégration le processus ethnologique qui permet à une personne ou à un groupe de personnes de se rapprocher et de devenir membre d’un autre groupe plus vaste par l’adoption de ses valeurs et des normes de son système social. Voici quelques paramètres qui peuvent influer sur la capacité d’intégration d’une personne.

La langue

La langue est l’une des composantes les plus importantes de l’intégration; c’est la langue qui vous aidera à réaliser beaucoup d’autres projets liés à une intégration réussie ; sans elle, vous n’êtes pas en mesure d’entrer en contact avec les gens, vous ne pouvez pas prendre connaissance de la culture et vous aurez de grandes difficultés à trouver du travail. Apprendre la langue de son pays d’accueil est un défi des plus difficiles à relever ; il faut consentir du temps et des efforts mais on peut y parvenir si on fait preuve de volonté ; il suffit de consacrer quelques heures par jour à apprendre de nouveaux mots et un peu de grammaire.

L’information

Obtenez autant d’informations que vous le pouvez sur la culture, les personnes, leurs goûts et dégoûts, car certaines choses peuvent être considérées comme bonnes dans votre pays alors qu’elles sont comptées comme mauvaises dans la nouvelle société ou vice versa. Adressez-vous, pour réunir ces informations, à des personnes elles-mêmes intégrées avec succès dans la société. Les professeurs qui enseignent la langue du pays d’accueil aux réfugiés sont des personnes très bien placées pour transmettre des informations-clés à leurs élèves, leur montrer comment communiquer et ainsi les aider à s’intégrer. Les élèves apprendront la langue beaucoup plus rapidement s’ils parlent avec les gens.

Le permis de séjour

 Il est vrai qu’il existe des limites sur le marché du travail si l’on ne dispose que d’un permis N ou F, ce qui peut être vu comme un obstacle à l’intégration. La première chose à faire, c’est de l’accepter au lieu de se demander sans fin pourquoi ? Concentrez-vous sur ce que vous pouvez faire et vous trouverez une bonne solution. Personnellement, j’ai même pris ces limites comme un encouragement à apprendre la langue, connaître la culture et trouver des amis. En outre, il existe de nombreuses possibilités de formations auxquelles vous pouvez vous inscrire pour vous préparer à accéder au marché du travail, le moment venu, dans les meilleures conditions. Et pourquoi ne pas travailler comme bénévole ? Cela vous permettra de gagner une expérience très utile.

Le plan

Une carte géographique nous permet de trouver notre chemin. Pour l’intégration, c’est la même chose : si vous n’avez pas de plan, vous pouvez vous perdre très facilement. Réfléchissez à des objectifs : décidez, par exemple, où vous voulez être dans une année, à quel niveau devrait être votre français, combien d’amis vous voulez, etc. Ensuite, décidez d’un plan mensuel et enfin d’un plan quotidien et mettez-le en œuvre. J’en ai fait l’expérience moi-même; ne pas avoir de plan peut être néfaste pour le processus d’intégration, car sans savoir quand commencer et quoi faire, vous serez toujours perdant.

Le réseau social

Les éléments mentionnés ci-dessus sont essentiels pour une intégration réussie. Je connais des personnes qui ne parlent pas bien le français, qui n’ont aucun ami (hors de leur communauté) et pas de travail après vingt ans de séjour. J’en connais d’autres qui ont achevé leur intégration en moins d’un an. Décidez de la catégorie à laquelle vous voulez appartenir.

Je vous recommande aussi vivement de trouver au moins un bon ami, car vous rencontrerez bientôt ses amis et les amis de ses amis et, avant de le réaliser, vous aurez beaucoup plus d’amis que vous ne pouvez l’imaginer.

Une dernière chose que j’aime conseiller, si vous aimez le sport, c’est de chercher dans votre quartier une équipe de football, une équipe de volley ou d’autres sports ; si vous demandez à participer, il y a de grandes chances qu’on vous accepte, comme je l’ai fait : je suis maintenant membre de l’équipe d’aviron de ma région. C’est amusant et j’ai trouvé beaucoup de bons amis parmi mes équipiers.

Beaucoup d’autres l’ont fait, alors pourquoi pas vous? Mettez-vous en route sur le chemin de l’intégration. Vous constaterez rapidement des progrès et je suis sûr que vous serez surpris de l’efficacité de ces simples suggestions.

Mostafa

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




«On ne quitte jamais son pays de gaieté de cœur»

Mouhamed Basse. Photo: Voix d'Exils
Mouhamed Basse. Photo: Voix d’Exils.

Portrait

Suisse d’origine sénégalaise, Mouhamed Basse est installé dans le canton de Neuchâtel depuis 25 ans. Venu en Suisse comme étudiant, il s’est marié à une Suissesse et est père de deux enfants de 19 ans et 16 ans. Professeur de mathématiques et de sciences, il est le représentant des Africains qui vivent dans la partie basse du canton, par opposition aux villes de La Chaux-de-Fonds et du Locle, situées sur les montagnes neuchâteloises. Avec Voix d’Exils, il parle de son intégration dans son canton d’adoption et de son engagement en faveur de la communauté africaine. Interview.

Voix d’Exils: Que faites-vous concrètement pour les Africains du bas du canton de Neuchâtel?

Mouhamed Basse: C’est toujours complexe de dire ce que je fais concrètement. Je dirais que j’ai été nommé, il y a une année seulement, comme représentant des Africains du bas. Concrètement, on se réunit avec le bureau du Service de la cohésion multiculturelle (le COSM) quatre fois dans l’année et on discute des sujets qui concernent les communautés migrantes d’origine africaine et, suivant ce que l’on dit, je prends position sur certains thèmes. Dans la rue, il m’arrive d’avoir des discussions avec des migrants et de donner des conseils sur différents sujets.

Y a-t-il des problèmes qui sont spécifiques aux Africains?

Ce sont des problèmes qui, de manière générale, concernent l’ensemble des migrants. Ça peut être des problèmes liés à l’intégration, à l’emploi, à la xénophobie et au racisme. Ce sont des obstacles qu’un migrant peut rencontrer en arrivant en Suisse.

Parmi ces Africains, il y a aussi des requérants d’asile. Leur rendez-vous visite ou parlez-vous avec eux?

Pas du tout. On a un représentant des requérants d’asile, M. Luul Sebhatu, et c’est lui qui est en contact avec les requérants d’asile. Moi, je suis plutôt en contact avec des Africains établis à Neuchâtel et qui ont une autorisation de séjour de longue durée. Malgré tout, je suis très à l’écoute et surtout je suis très vigilant à ce qui se passe dans le milieu des requérants d’asile.

Vous disiez, il y a quelques années de cela, que «Neuchâtel est exemplaire dans sa politique d’ouverture envers les étrangers». Sur quoi fondez-vous cette affirmation?

Avec la présence du bureau du délégué aux étrangers, qui est le premier bureau du genre en Suisse, je dirais que ce n’est pas moi qui ai inventé ces propos. D’autres l’ont dit avant moi et d’autres le diront après moi aussi. Dans les années 90, quand on a mis en place ce bureau du délégué aux étrangers, d’autres cantons n’y pensaient pas. Beaucoup d’efforts sont faits pour aider les étrangers qui vivent ici à se sentir bien, comme s’ils étaient chez eux. Avec ce bureau, il y a une certaine écoute. Comme représentant des communautés africaines, c’est claire que s’il n’y avait pas ce service de la cohésion multiculturelle, il y aurait eu plutôt des regroupements purement informels et mon rôle ne serait pas officiel.

Vous disiez aussi que «quand on vous croise dans la rue, rien ne vous distingue de l’immigré fraîchement débarqué et que dans votre for intérieur, vous vous considérez comme un immigré qui a su s’intégrer sans difficultés». Peut-on savoir ce qui a facilité votre intégration?

Je pense que le fait de suivre des études m’a permis d’avoir du recul par rapport à certains aspects de l’immigration. Je suis fier d’être ce que je suis : Africain. Je me suis toujours déplacé en été avec des boubous sénégalais et des gens me regardaient souvent dans la rue comme ça. Et puis, je me suis rendu compte que ce n’était pas des regards de méfiance, mais plutôt des regards d’admiration par rapport à ce que je portais. Le fait de montrer que j’avais cette identité-là et que je n’avais pas le complexe de m’habiller en Africain dans les rues de Neuchâtel, pour moi, c’est quelque chose d’hyper important.

25 ans de vie en Suisse, comptez-vous un jour retourner au Sénégal pour finir vos jours?

Le rêve de tout immigré, c’est ça. Moi, je ne sais pas si on doit en faire un rêve. Pourquoi on décide qu’il faut retourner? Retourner, c’est revivre sur une longue durée dans son pays d’origine. Je suis marié à une Européenne, une Suissesse. Ayant des enfants métis, est-ce que je vais prendre mes cliques et mes claques et décider un jour de m’établir définitivement au Sénégal ? Je dirais plutôt que le jour ou j’arrive à la retraite et que je peux vivre entre la Suisse et le Sénégal, je n’hésiterai pas, parce qu’à ce moment-là, mes enfants auront probablement à leur tour des enfants. Je ne dirai pas que la Suisse est le pays où je vais vivre toute ma vie, mais quand j’aurai la possibilité d’avoir des séjours beaucoup plus longs au Sénégal, je n’hésiterai pas. Actuellement, chaque année, je pars à Dakar un mois pendant l’été.

Avec le recul, 25 ans après, si votre chemin était à refaire, le referiez-vous?

Le fait d’avoir quitté le Sénégal et de décider de vivre en Suisse n’a jamais été mon objectif de départ. Quand on vient en tant qu’étudiant, on laisse toute sa famille. Pour moi, les choses ont  toujours été claires : étudier et repartir. Mais, la situation a fait que je suis resté dans le pays. Je n’ai aucun regret. S’il fallait refaire la même chose, je l’aurai refait parce qu’à présent, je vis cet exil très bien. J’ai gardé mes racines et le fait de revoir chaque année ma famille ou quand c’est la famille qui vient me voir en Suisse, c’est quand même réjouissant.

Vous vous considérez Suisse, Sénégalais, ou les deux à la fois?

Je me considère d’abord Sénégalais et si je devais renoncer à la nationalité sénégalaise pour devenir Suisse, j’aurais gardé ma nationalité sénégalaise. Pour moi, c’est logique. Même si je me déplace avec le passeport suisse pour des raisons de commodités, mais j’ai encore mes papiers sénégalais sur moi. Au Sénégal, la double nationalité est acceptée.

On vous attribue ces propos: «je n’aime pas subir les décisions des autres». Pourquoi?

Ne pas subir les décisions des autres, je veux dire que, pour moi, il faut participer là où les décisions se prennent. C’est par un concours de circonstances que je me suis retrouvé au Parti socialiste. Je me reconnais comme étant de gauche, raison pour laquelle, je suis fier d’être dans le Parti socialiste. J’entre ces prochains jours au Conseil général de la ville de Neuchâtel.

Votre parcours peut être considéré de modèle, avez-vous un mot à dire aux requérants d’asile?

Être requérant d’asile, c’est quelque chose d’extrêmement difficile. J’ai regardé le film Vol spécial de Fernand Melgar et c’est vraiment difficile. On ne quitte jamais son pays de gaieté de cœur pour arriver dans un autre pays. Quand on est requérant d’asile, il faut tout faire pour qu’on ne colle pas à votre étiquette quelqu’un qui est là pour créer la pagaille. La plupart des requérants d’asile vivent une situation difficile, de par ce statut-là. Ce sont des gens qui vivent avec dignité et qui espèrent un jour avoir les papiers en ordre pour pouvoir rester ici et je pense que, parmi les requérants d’asile, il y en a beaucoup qui, demain, si dans leurs pays d’origine la situation redevient tout à fait normale, voudraient repartir. J’encourage les requérants d’asile à rester vigilants et, surtout, à ne pas fréquenter les milieux où ils peuvent se retrouver dans les ennuis.

Que pensez-vous de Voix d’Exils?

J’ai découvert Voix d’Exils récemment, j’ai jeté un coup d’œil et il y a des articles intéressants et très diversifiés. C’est toujours difficile d’entretenir  un journal en ligne, mais j’espère que ce blog va continuer à toucher le maximum de personnes au niveau de la population, parce que quand je vois des requérants d’asile écrire dans ce blog et dire qu’ils sont bien et se sentent utiles et qu’on voit qu’ils ont des compétences, je vous dis chapeau! En espérant que ce blog sera de plus en plus connu et que ça serve d’exemple, surtout pour donner une image positive de la présence des migrants d’origine africaine sur le sol neuchâtelois et sur le sol suisse.

Paul Kiesse

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils

Informations

lire à ce sujet un autre article de Voix d’Exils: «Au COSM, nous offrons un service d’accompagnement et de soutien aux requérants d’asile»




Les permanences Accueil-Info: un service inédit dédié aux nouveaux arrivants dans le canton de Vaud


Dans le cadre de la politique cantonale d’accueil des nouvelles personnes migrantes et de lutte contre les discriminations, le Bureau cantonal pour l’intégration des étrangers et la prévention du racisme (BCI) développe actuellement un projet pilote: les Permanences Accueil-Info.

Les principaux buts poursuivis par ces nouvelles structures sont d’améliorer l’accueil et l’intégration des personnes nouvellement arrivées dans le canton de Vaud et de renforcer leur protection contre les discriminations.

Par le biais des Permanences Accueil-Info, elles pourront bénéficier de conseils, trouver les informations nécessaires pour accomplir les activités du quotidien pour ainsi améliorer leur insertion ainsi que leur autonomie dans leur nouvel environnement. L’équipe du BCI leur garantit une entière confidentialité et la protection des données.

Les permanences ont lieu deux fois par mois dans trois villes du canton de Vaud. Elles ont débuté leurs activités au mois de juin à Yverdon-les-Bains et celles-ci se poursuivent actuellement à Nyon et à Aigle.

Les consultations sont gratuites et sans inscription préalable. Un service d’interprétariat est proposé sur place en cas de besoin.

Vous pouvez obtenir davantage d’informations à propos de cette initiative sur le lien suivant : www.vd.ch/integration. Une permanence téléphonique est également à votre disposition les jeudis de 14h-20h aux numéros suivants : 079/101.27.67 et 079/303.28.23.

Javkhlan TUMURBAATAR

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils