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Revue de presse #8

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : Ramadan impacté par le Covid-19 / Famine annoncée en Afrique de l’Ouest / Secours Catholique français en mode combat / Migrations fatales en Méditerranée

Ramadan 2020, les lieux saints désertés

Jeune Afrique avec AFP, 21 avril 2020

Alors que le 23 avril a commencé la période de ramadan si chère à la religion musulmane, les fidèles d’Afrique et du Moyen-Orient pleurent leurs lieux saints fermés et leurs rituels bousculés.

Pour contenir la propagation du virus, les autorités saoudiennes ont suspendu la omra, le petit pèlerinage à la Mecque et à Médine. A Jérusalem, troisième lieu saint de l’islam qui abrite la mosquée d’Al-Aqsa, le Grand Mufti a annoncé des restrictions similaires.

Covid-19 oblige, cette année le mois sacré se déroulera dans une ambiance inédite : pas de voyages dans les villes saintes, pas de prière nocturne à la mosquée, pas de grands rassemblements pour les grands repas du soir et pas de veillées jusque tard dans la nuit rassemblant familles élargies, amis et voisins.

La pandémie ne se contente pas de toucher les rites religieux et sociaux, elle affecte également les échanges commerciaux qui sont normalement florissants en période de ramadan. Cette année, les commerçants vont souffrir de la frilosité des acheteurs qui veulent avant tout se procurer des masques, des gants et du désinfectant.

Les nombreux fidèles (2,5 millions en 2019) qui s’étaient organisés pour le hadj, le grand pèlerinage de juillet prochain, doivent aussi déchanter. Riyad leur a demandé de suspendre leurs préparatifs de voyage à La Mecque.

 

L’Afrique de l’Ouest affamée

Le Temps, 21 avril


Les ONG tirent la sonnette d’alarme. Selon leurs prévisions, 50 millions de personnes sont menacées par la faim en Afrique de l’Ouest.

La combinaison de l’insécurité dans certaines zones, la fermeture des frontières, la sécheresse, le couvre-feu et le confinement dû à la pandémie du coronavirus, engendre d’une part la pénurie de certains produits alimentaires et la hausse du prix des denrées disponibles.

D’autre part, alors que débute la saison agricole, l’accès aux semences et aux engrais nécessaires est devenu un casse tête pour les agriculteurs dont les produits contribuent à 30,5% de l’économie des États et constitue la plus grande source de revenus et de moyens d’existence pour 70% à 80% de la population, principalement pour les femmes.

 

Le Secours Catholique mobilisé à Calais

Vatican News, 17 avril 2020

En France, 92 associations et collectifs ont saisi les Nations Unies pour plaider la cause des sans-abris et des plus précarisés en ces temps de pandémie.

Parmi elles, le Secours Catholique qui depuis 20 ans vient en aide aux plus nécessiteux, a dû fermer les portes de ses refuges de jour et limiter ses activités. Ses membres sont néanmoins restés en « contact distancié » avec eux, et leur procurent des couvertures collectées auprès de la population, des chèques services pour répondre aux besoins de première nécessité ainsi que des possibilités de recharger les téléphones portables, pour leur permettre de garder le contact avec leurs familles restées au pays ou d’appeler les urgences en cas de besoin.

Les équipes du Secours Catholique sont particulièrement mobilisées dans les villes de Calais et de Grande-Synthe qui comptent, à elles seules, plus de 1700 migrants originaires essentiellement du Soudan, d’Érythrée ou de Syrie et qui survivent dans des conditions inacceptables.

 

Morts en Méditerranée, à Pâques

Le Monde avec AFP, 13 avril 2020

Sea-Watch International et United4Rescue, deux ONG allemandes, ont dénoncé l’indifférence et la passivité de l’Europe face aux signaux d’alerte lancés en Méditerranée le week-end de Pâques par une embarcation pneumatique en difficulté. Faute de secours, l’embarcation a chaviré, emportant des dizaines de vie au large de l’île de Malte.

Bien que les ports de Malte et d’Italie soient fermés aux migrants en raison de la pandémie, les autorités maltaises ont tout de même secouru un bateau avec 67 migrants et une centaine d’autres ont été accueillis au sud de la Sicile.

Dans un contexte de crise sanitaire, l’autorité de la protection civile italienne a annoncé la création d’une structure de mise en quarantaine des migrants, soit sur la terre ferme soit sur des bateaux, avant que « les procédures habituelles » ne soient appliquées. 156 passagers sauvés par le navire humanitaire Alan-Kurdi seront les premiers bénéficiaires du processus habituel après être passés dans cette nouvelle structure.

Marie-Cécile / Voix d’Exils




Suspecté d’être qui je suis

Auteur: Voix d'Exils
Auteur: Voix d’Exils.

Les premiers pas d’un requérant d’asile en Suisse

Je suis venu en Europe en septembre 2013, dans le but de demander une protection contre les persécutions politiques que je subissais dans mon pays. J’étais alors à mille lieues d’imaginer ma nouvelle vie de requérant d’asile en Suisse.

En juin 2014, au Centre d’Enregistrement et de Procédure (CEP) de Vallorbe, aux environs de 18 ou 19 heures, je suis fouillé par la sécurité de la tête aux pieds. Mon sac à dos est également inspecté. J’ai pu ensuite rentrer dans le centre où j’ai été logé.

Bienvenue à Vallorbe

Au début, j’ai cru que ça allait être facile. Mais tout a basculé dans le sens inverse. Je ne m’attendais pas à voir une telle foule dans le centre d’enregistrement et de procédure d’asile. Les personnes sont superposées sur des lits, on dirait des sardines. Elles font la queue pour chercher à manger, comme des prisonniers.

Dans ce centre, j’ai rencontré diverses ethnies, cultures et religions venues d’un peu partout dans le monde mais, le plus souvent, de pays comme la Syrie ou l’Érythrée. Tous demandent une protection contre les persécutions, contre les guerres. Nous avions tous des mentalités différentes.

Au bout de quelques jours, je commence à tisser des relations, à sortir du centre pour prendre l’air chez Mama Africa, et à me balader. Mais, à chaque fois que nous, requérants d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale, rentrons après les balades, nous sommes contrôlés et fouillés par la sécurité. Nous étions en particulier la cible de ces contrôles. Pourquoi est-ce que l’on nous pose tant de questions ? On ne comprenait pas ce qu’il se passait et pourquoi on nous fouillait tout le temps ? A chaque retour au centre, même si les gardiens nous avaient vu entrer et sortir à dix reprises durant la journée, ils nous enlevaient nos chaussures et nous déshabillent presque. Pour mieux comprendre ce qui nous arrivait, nous, les nouveaux arrivants, avons questionné les anciens Africains du centre. Ils nous ont répondu alors que ceux qui viennent d’Afrique de l’Ouest et du centre sont considérés comme des dealers. Comment pouvons-nous donc avoir notre chance alors, ici en Suisse ?

Auteur: Keepps (CC BY-NC-SA 2.0) "The Orbe flowling through town"

Auteur: Keepps (CC BY-NC-SA 2.0) « The Orbe flowling through town »

Ma nouvelle vie

Après deux semaines à Vallorbe, j’ai été transféré à Lausanne et j’ai été logé dans un bunker ouvert de 18 à 9 heures du matin. Le matin à 9 heures, tout le monde sortait pour rejoindre la structure de jour. Là, encore, j’ai été confronté à une vie complétement différente de celle que je connaissais : dormir dans un bunker et passer toute une journée à errer dehors, sans rien faire. Un exemple de cette « nouvelle vie » se déroula quelques semaines plus tard. J’étais contrôlé par la police qui me demande mon permis. Le policier me lance : « Ah! Tu es d’Afrique de l’Ouest ! Vous êtes parmi les plus grands dealeurs de ce pays. » Je me suis alors rappelé ce que mon compatriote m’avait dit à Vallorbe. Une deuxième anecdote : un policier me demande ce qui m’a amené ici, en Suisse, et pourquoi je ne rentre pas chez moi. Je réponds que je suis en danger chez moi. Finalement, troisième exemple : un policier me demande mon permis. Il regarde la date d’expiration et constate que je suis en séjour légal (il me reste deux mois encore de validité). Puis il le jette à terre et me balance un « merde ». Il me dit de rentrer chez moi, dans mon bunker. J’ai l’informe que « Je ne peux pas rentrer à cette heure car c’est le week-end ». Il me répond, alors, que s’il me revoit, « ça va mal tourner ».

Changer les mentalités

Je me vois comme une personne haïe, bousculée de part et d’autre, une personne vue par autrui comme « suspecte », qui n’a pas de place dans cette société dans laquelle j’ai demandé refuge. Il faut que le monde change de mentalité! Il ne faut jamais juger tout le monde et penser qu’ils ont le même caractère, le même comportement… Il suffit juste de savoir qui est qui et de donner une chance à chacun et chacune, au lieu de mettre tout le monde dans le même panier. Chaque personne a sa propre éducation, sa propre vision de l’avenir. Et donc, pour tout ce qui précède, je suggère :

– De juger chacun séparément en fonction de son caractère et de sa manière d’agir.

– De donner une véritable chance à ceux qui font preuve de volonté d’intégration dans cette société.

Mahibra

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Guerre au Mali : le dessous des cartes

Le peuple malien fuit les affrontements. Photo: Ferdinand Reus (CC BY-NC-ND 2.0)

Le Mali. Photo: Ferdinand Reus (CC BY-NC-ND 2.0)

Il n’y a pas si longtemps, le Pays Dogon, région du Mali, était un paradis pour les marcheurs. On n’y croisait aucune voiture, on avait envie d’y passer toute sa vie. Mais, il y a deux ou trois ans, on a senti que quelque chose était en train de changer. Par exemple, on croisait de plus en plus de femmes voilées de la tête aux pieds, on sentait que ce paradis était condamné à disparaître  assez rapidement… Aujourd’hui, la situation est dramatique.

La région où se joue le conflit actuel se nomme l’Azawad. Elle regroupe les zones de Gao, Tombouctou et Kidal, dans le nord du Mali. Elle se situe intégralement dans le Sahara et échappe au contrôle de l’État malien, car désertique et peu densément peuplée.

Le théâtre et les acteurs

Les forces en présence sont multiples. Il y a, d’une part, le gouvernement malien, instable car très récemment formé, en août 2012. Son but est de préserver l’unité du Mali. Et d’autre part, nous trouvons: le Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA), touareg et laïc qui a pour but de faire de l’Azawad, un nouvel État indépendant; l’organisation terroriste AQMI, bras africain d’Al Quaida qui se bat pour faire appliquer la Charia dans le nord du Mali; Ansar Edine – «défenseurs de l’islam» en langue arabe – qui est un groupe islamiste touareg cherchant également à appliquer la Charia dans la région. Nous trouvons également d’autres groupes armés qui interviennent dans le nord Mali, parmi lesquels les islamistes du Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO ) et les autonomistes du Mouvement arabe de l’Azawad (MAA).

Les racines du conflit

Les velléités indépendantistes des Touaregs X1 ne sont pas récentes. La première rébellion touareg advient en 1963, seulement 3 ans après l’indépendance du Mali, puis est dissoute dans le sang par l’armée. En 1990, de nouveaux soulèvements donnent lieu aux accords de Tamanrasset. En mars 2012, le président Amadou Toumani Toure (appelé familièrement ATT) est renversé par un coup d’État militaire à peine deux mois avant la prochaine élection présidentielle à laquelle il ne se représentait pas. Allié à plusieurs groupes islamistes, le MNLA profite alors de la situation politique confuse pour  prendre le contrôle des trois grandes villes du nord. Début avril, il déclare l’indépendance  de l’Azawad, qui est immédiatement rejetée par l’Union africaine comme par l’Union européenne. Fin mai, le MNLA et l’Ansar Edine, qui s’étaient alliés, se séparent, ne parvenant pas à trouver un accord au sujet de  l’administration de la région. Le MNLA se fait peu à peu écarter du territoire par les différents groupes islamistes.

Une zone clé

Mais pourquoi donc tout le monde s’intéresse au nord du Mali ? Les réserves pétrolières et gazières sont assez importantes. Elle sont pour l’instant inexploitées et convoitées. C’est également une région stratégique, frontalière de la Mauritanie et de l’Algérie, proche de la Libye et de la Tunisie. C’est donc une zone clé pour le contrôle de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel. Par exemple, les armes venues de Libye et passées par le Nord Mali pourraient demain déstabiliser l’Algérie et même, pourquoi pas, le Sénégal. En effet, après l’intervention  occidentale les Touaregs, qui se battaient aux côtés de feu Khadafi, ont quitté la Libye et sont revenus dans la région avec des stocks d’armes importants. A ce moment-là, ils proposèrent le deal suivant au président ATT : « On t’assure la paix si tu nous donnes de l’argent. ». Le  président  a refusé leur proposition et le conflit a débuté.

L’intervention militaire: une solution inadéquate

La poussée islamiste dans la région s’explique par le fait que, pendant dix ans, tout le monde a parlé du miracle de la démocratie malienne, mais ce n’était en réalité qu’une façade. Les hommes politiques achetaient leurs élections. Les pauvres, déçus, faisaient remarquer que la démocratie ne se mange pas, car ils ne voyaient pas d’amélioration dans leurs conditions de vie. Les populations du nord étaient particulièrement déshéritées et elles se sont détournées de la démocratie pour épouser l’islam radical. D’un idéal à un autre, en somme.

L’intervention armée en cours n’est pas la meilleure solution. Paul Collier X2 affirme ainsi que  « les données sur les causes de conflit indiquent que les facteurs économiques en sont les principaux moteurs. La combinaison d’importantes exportations de matières premières, d’un bas niveau d’enseignement, d’un pourcentage élevé d’hommes jeunes et d’un déclin économique augmentent énormément les risques. L’inefficacité militaire et politique est révélatrice d’une évolution plus vaste quant aux capacités et à l’organisation des insurrections cherchant à renverser les dirigeants d’États faillis (failed states). Ces insurrections exploitent des ressources – « diamants de guerre », négoces avec des réseaux clandestins, pillages, nouveaux circuits de trafic d’armes – qui contribuent à leur survie. C’est un fait maintenant bien connu, qui a été médiatisé par des campagnes comme celle menée contre les « diamants du sang ».

Ces exemples malheureux ne sont pas très encourageants pour l’avenir, et ceux qui placent leurs espoirs dans les mains des « sauveteurs » français ont bien des chances de perdre rapidement leurs illusions.

X1 : Les Touaregs  sont des tribus nomades  qui vivent entre cinq (5) pays : l’Algérie, la Libye, le Niger, le Mali et le Burkina Faso.

X2 :  P. Collier, « Doing well out of war : an economic perspective », in M. Berdal et D. Malone, Greed and Grievance. Economic Agendas in Civil Wars, Boulder, Co., Lynne Rienner, 2000, p. 110.

Yembering

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Collaboration renforcée entre les autorités suisses et celles des pays d’Afrique de l’Ouest

Photo: Daniels Danyels CC BY-NC-SA 2.0

Les requérants d’asile déboutés en provenance d’Afrique de l’Ouest vivent dans des conditions difficiles sur le territoire suisse. Parmi ceux qui sont à l’aide d’urgence, certains sont convoqués par l’Office fédéral des migrations (ODM) pour localiser leur pays d’origine et tenter de les renvoyer. Ceux qui refusent de s’y rendre disparaissent parfois dans la nature.

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Auparavant, la procédure de renvoi était la suivante : des policiers arrivaient vers trois 3-4 heures du matin au foyer dans lequel vivait le débouté concerné. Puis, ils l’emmenaient au centre de détention administrative de Frambois, où il restait jusqu’à son expulsion.

A présent, l’on observe de nouvelles pratiques qui s’ajoutent aux précédentes: les autorités suisses collaborent avec certains pays d’Afrique de l’Ouest dans la procédure d’expulsion. Ces pays sont la Guinée Konakri, la Guinée Bissau, la Guinée Equatoriale, la Sierra Leone, la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Sur demande de l’ODM, des spécialistes africains font le voyage en Suisse pour enquêter sur l’origine de certains déboutés supposés appartenir à l’ethnie peule – ethnie majoritaire en Afrique de l’Ouest. Ensuite, avec l’aide de l’ambassadeur du pays concerné, ils délivrent un laisser-passer afin que les déboutés soient rapatriés vers leur pays d’origine.

« Savez-vous pourquoi ces rapatriements se focalisent sur la Guinée Konakri ? Parce que, si l’on trouve des Peuls dans tous les pays frontaliers, la majorité d’entre eux vivent en Guinée Konakri. Donc, leur retour ne se fera que vers ce pays », affirme Jeckson, 31 ans, requérant de Sierra-Leone, arrivé en Suisse en 2001 et vivant depuis 2007 dans un foyer d’aide d’urgence lausannois. «Personnellement, on m’a convoqué trois fois. Comme je parle le peul, ils en ont déduit que j’étais Guinéen. En fait, je suis le fils d’un père Bambara d’origine sierra leonaise et d’une mère Peule d’origine guinéenne qui se sont mariés en Sierra Leone. On m’a adressé plusieurs fois des documents à signer afin que je rentre en Guinée Konakri alors que moi, je demande de pouvoir rentrer en Sierra Leone, mais cela n’est pas pris en considération ». Selon Jeckson, ses origines sierra leonaises auraient été confirmées par l’ambassade de Sierra Leone en Allemagne. « Hélas, j’ai souffert de tuberculose et je présente des problèmes psychiques pour lesquels je suis traité ici, alors qu’en Afrique je n’aurais pas les moyens de me soigner. Je ne suis pas aujourd’hui en état de retourner dans mon pays mais je garde l’espoir ».

Dans l’impasse

Quand les spécialistes africains sont arrivés en Suisse, en février dernier, plusieurs requérants à l’aide d’urgence ont été convoqués à Berne par l’Office des migrations. Par peur d’être rapatriés de force, certains ont quitté les foyers où ils vivaient et se sont retrouvés sans savoir où se loger et quoi manger. «Pour éviter un renvoi qui mettrait en péril notre vie », confie un Guinéen de 28 ans. Certains ont même quitté le territoire suisse pour tenter leur chance dans d’autres pays.

A ceux qui refusent de répondre à la convocation de l’ODM, le Service de la population (SPOP) confisque le « papier blanc » (document d’identité qui précise le statut à l’aide d’urgence) qui leur permet de bénéficier du droit au logement et à la nourriture. Ceux qui n’ont plus leur papier blanc s’évanouissent généralement dans la nature. «J’ai perdu mon toit dans un pays où la valeur de l’humanité devrait être protégée », regrette un Sénégalais débouté.

Parmi ceux qui ont été convoqués, une minorité n’a pas eu d’autre choix que de se présenter à Berne auprès des délégués guinéens. «  Il est quand même difficile humainement d’aller se rendre alors qu’on s’est enfui, relève un débouté. Dans un monde où la vie est toujours plus difficile, il y a peu de gens qui te tendent la main. Si nous quittons les foyers d’aide d’urgence, nous ne trouverons pas où nous loger et de quoi manger d’une façon régulière. Si nous allons dans un autre pays d’Europe, on nous renverra en Suisse à cause des accords Dublin…»

Kidha, 27 ans, fait partie de ceux qui ont rencontré les délégués. Ce Guinéen a quitté son pays pour éviter le mariage forcé avec la veuve de son frère aîné. Après un voyage très risqué, il est arrivé en Suisse en 2010 et a déposé sa demande d’asile. Il y a quelques mois, sa demande a été rejetée et il est maintenant à l’aide d’urgence. « Je me suis rendu à Berne car c’était pour moi la seule option pour ne pas perdre la place que j’occupe dans un centre d’aide d’urgence actuellement. A l’ODM, j’ai dit que j’étais Guinéen et fier de l’être. Mais tant que la raison pour laquelle je suis ici existe, je ne retournerai pas dans mon pays. En fait, les délégués savent très bien ce qui se passe dans mon pays. Malgré tout ça, ils masquent les problèmes de la société, car ce qui les intéresse c’est que le pouvoir reste aux mains de la communauté mandingue et d’assurer sa pérennité. C’est vraiment inadmissible !».

Hodan-Bilan

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils