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Un cœur entre deux terres

Un cœur entre deux terres

Le parcours d’une mère exilée 1/3

Cette narration poétique présente les réalités physiques, sociales, émotionnelles et géographiques d’une jeune mère camerounaise en exil. Exilée en Suisse, elle fait face à une série de défis quotidiens qui transforment les simples difficultés d’adaptation en épreuves complexes. Son parcours est un mélange délicat entre ses états d’âme et ses luttes intérieures lors duquel la narratrice livre ses réflexions profondes concernant l’exil et la perte d’identité. Ces poèmes deviennent le miroir de ses pensées les plus intimes, offrant aux lecteurs et lectrices, un accès privilégié à ses émotions et à ses questionnements personnels. Initialement rédigés en anglais, ces trois textes ont été traduits en français. Nous vous présentons ici le premier poème. 

Nulle part où aller

Je n’ai nulle part où aller,
Une âme perdue portée par des vents inconnus,
D’Algérie, de Libye, de Turquie, de Tunisie,
La Méditerranée m’appelle, personne ne répond.
Je viens d’une terre dont le nom est à peine dit,
Un endroit mystérieux et triste,
Où mes rêves d’enfance ont grandi,
Désormais dispersés comme poussière au vent

Je suis née là où la terre touchait le ciel,
Où la paix chantait chaque jour,
Mais la cupidité a brisé son cœur,
Et me voilà, perdue,
Une réfugiée dans ma propre peau.
Je n’ai jamais voulu quitter mon pays,
Mais le destin m’a poussé loin,
Une voyageuse sans but,
Une errante qui ne peut revenir.

Ô mon pays bien-aimé,
Mon vrai pays,
Là où l’amour et les souvenirs devraient vivre,
Devenu un endroit sans retour.
Terre de ma jeunesse, maintenant cimetière de mes rêves,
Et moi, un fantôme cherchant un endroit qui n’existe plus.

J’ai tout perdu,
Ma famille, mes amis, mes biens,
Pris par la cupidité des hommes,
Et maintenant je dérive,
Un bateau sans rivage,
Une ombre sans forme.

Ô jeune génération, que deviendras-tu ?
Brisée par l’avidité des hommes,
Jetée dans un monde qui ne peut s’occuper de toi
Je cherche refuge, sans le trouver,
Je marche, aucun endroit n’est ma maison
Car aucune terre ne sera ma terre natale

Où vais-je maintenant ?
Dans un monde libre mais vide,
Où personne ne possède la terre,

Je reste là, en silence,
Entendant seulement ma propre question :
Où aller, quand je n’ai nulle part où aller ?

 

Nowhere to go 

I have nowhere to go,
A lost soul on unknown winds.
From Algeria, Libya, Turkey, Tunisia,
The Mediterranean calls, but no home is there.
I come from a land whose name is barely spoken,
A place full of mystery and sorrow,
Where my childhood dreams once grew,
Now scattered like dust in the wind.

I was born where the earth touched the sky,
Where peace was once the song of every day,
But greed has broken her heart,
And now I stand, lost
A refugee in my own skin.
I never wanted to leave my home,
But fate has pushed me away,
A traveller with no place to go,
A wanderer who cannot return.

O my beloved country,
My true home,
Where love and memories should thrive,
Now turned into a place of no return.
The land of my youth is now a graveyard of hopes,
And I, a ghost searching for a place that no longer exists.

I have lost everything,
My family, my friends, my belongings,
Taken by the greed of men,
And now I am drifting,
A ship with no shore,
A shadow with no form.

O young generation, what happens to you?
Broken by the weight of human greed,
Thrown into a world that cannot care for you.
I search for refuge, but none is found,
I wander, but no place feels like home,
For no land will ever be home again.

Where do I go from here?
In a world that is free but empty,
Where no man owns the land,

I stand in silence,
Hearing only my own question:
Where do I go, when I have nowhere to go?

Kebei Raimatou

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

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