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Personnes réfugiées d’Ukraine : Bilan et Perspectives

Invitation à la Table Ronde d’Expert.e.s : Personnes Réfugiées d’Ukraine en Suisse // nccr – on the move ; UNHCR

Les enjeux qui entourent les titulaires d’un permis S à la lumière de trois thématiques

En mars 2022, après l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe, un instrument de protection temporaire – le statut S – a été activé pour la première fois en Suisse. Plus de deux ans après, 66’000 personnes réfugiées venant d’Ukraine bénéficient toujours de ce statut de protection. Aujourd’hui, il est temps de dresser un bilan. Comment s’est passée l’intégration de ces personnes dans le marché du travail ? Comment s’est déroulé leur hébergement en famille d‘accueil ? Et plus généralement, quel bilan peut-on tirer de l’activation du statut S ?

Pour répondre à ces questions, Le Pôle de Recherche National (PRN) consacré aux études sur la migration et la mobilité « nccr – on the move » et le Bureau du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR) pour la Suisse et le Liechtenstein, ont organisé le vendredi 15 mars à Berne un dialogue autour du thème des personnes réfugiées en Suisse ayant fui l’Ukraine.

Des expertes et experts issus du Parlement fédéral, de l‘administration fédérale, de gouvernements cantonaux, d‘œuvres d‘entraide, de la communauté ukrainienne, d’associations patronales, d’organisations internationales, ainsi que des chercheurs et des milieux intéressés ont échangé leurs points de vue sur les différents aspects de ce sujet. Nous vous présentons ci-dessous un compte-rendu de cette journée riche en propositions concernant les enjeux actuels et futurs du permis S. Voix d’Exils était présent à la conférence et les propos ont été rapportés par Liana Grybanova rédactrice, titulaire d’un permis S et Malcolm Bohnet, civiliste à la rédaction. 

 

L’intégration dans le marché du travail

Isabelle Moret, Conseillère d’Etat vaudoise, cheffe du Département de l‘économie, de l‘innovation, de l‘emploi et du patrimoine a souligné l’importance de l’intégration professionnelle des Ukrainiens et Ukrainiennes. Toutefois, elle a déploré que l’objectif visant à ce que 40% des personnes détentrices d’un permis S en Suisse soient insérées sur le marché du travail ait été fixé par le Conseil fédéral sans consulter plus d’experts du domaine.

Selon elle, il est nécessaire de continuer à collecter des informations sur les compétences professionnelles de ces personnes. Elle souhaite également être fixée sur le nombre d’Ukrainiens et d’Ukrainiennes qui sont actuellement occupés à apprendre une langue nationale et qui commenceront donc à travailler plus tard, qui élèvent des enfants en bas âge ou qui ont des problèmes de santé.

Finalement, Madame Moret a noté qu’il fallait faciliter la reconnaissance des diplômes, de médecine notamment. Rien que dans le canton de Vaud, alors qu’il y a d’importants besoins dans le domaine de la santé, ce sont près de 80 médecins qui ne peuvent pas travailler en Suisse malgré leurs compétences. A ses yeux, il est nécessaire de trouver une solution à ce problème. Pour la Conseillère d’Etat vaudoise, il est impératif d’inciter les employeurs à engager ces personnes ukrainiennes.

Andrej Lushnycky, Consul honoraire d‘Ukraine en Suisse, a lui aussi appuyé l’idée de reconnaissance des diplômes et proposé la mise en place d’un système de validation des acquis. Cela permettrait de faciliter le lien entre les employeurs et les personnes en recherche de travail. Monsieur Lushnycky rappelle l’importance que les détenteurs et détentrices d’un permis S s’intègrent et a souligné qu’il est dommageable si après deux ans, certains ne fassent pas d’efforts pour s’intégrer.

Il a également souligné l’idée d’avoir une sorte d’incubateur avec un système de formation clair. Les compétences alors acquises seront de toute manières utiles même si les Ukrainiens et les Ukrainiennes finissent par rentrer au pays. D’après Monsieur Lushnycky, il faut également voir tous les aspects positifs et bénéfiques à ce que des liens entre la Suisse, les Suisses et les Ukrainiens se créent.

Selon Daniella Lützelschwab, Responsable du secteur Marché du travail au sein de l’Union Patronale Suisse, il  existe un manque d’informations dans la manière dont les employeurs peuvent trouver les personnes dont ils ont besoin. Madame Lützelschwab propose donc le développement d’un système de « matching ».

Philipp Berger, Responsable de la division d’admission au marché de travail auprès du Secrétariat d‘État aux Migrations (SEM) a également évoqué l’importance du « matching ». La communication est centrale dans le but que les Ukrainiens soient joignables. Monsieur Berger a aussi partagé l’idée que se développent aussi des médias ukrainiens pour faciliter la communication.

 

L’hébergement privé

Bianca Schenk, Responsable du domaine de direction « Familles d‘Accueil » auprès de l’Organisation Suisse d’Aide aux Réfugiés (OSAR), a noté que l’hébergement est une relation qui permet d’établir un lien.  L’Etat et les institutions peuvent vraiment jouer un rôle clé dans ce processus.

Selon Madame Schenk, l’hébergement privé doit être vu comme un outil d’intégration et non seulement comme une offre de logement. Malheureusement, cette vision n’est pas partagée par plusieurs établissements ainsi que beaucoup de cantons et de communes. Il faudrait donc changer notre perception des choses.

A Genève, Caritas propose un programme d’accompagnement des personnes et familles hébergeant des réfugiés à domicile. Selon Sophie Buchs, Directrice de Caritas Genève, le « matching » entre personnes ukrainiennes et familles d’accueil se faisait au départ à travers la plateforme de l’OSAR, qui prenait en compte les chambres disponibles, le temps disponible et la situation géographique des personnes. Puis le système a été affiné avec des informations plus précises comme les langues parlées, les domaines d’intérêts, l’âge et plus encore. Désormais, le matching est directement effectué par l’équipe de Caritas en collaboration avec l’Hospice général, une fois les réfugiés arrivés à Genève. Cette méthode fonctionne mieux et débouche sur un hébergement plus durable.

De surcroit, Madame Buchs a exprimé le besoin que redémarre « l’élan de générosité » présent au début de la guerre lors de l’accueil en hébergement privé des Ukrainiens et Ukrainiennes. Malheureusement, au fil du temps, le nombre de volontaires a beaucoup diminué. Caritas Genève propose une période d’hébergement minimale de trois mois, qui peut déboucher sur l’accueil d’une personne à plus long terme.

Dominik Hangartner, Co-directeur de l’Immigration Policy Lab à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich a relevé que dans l’élaboration de leur projet de « matching », le but est de trouver un algorithme efficace qui aligne les besoins d’employeurs et les compétences de personnes réfugiées.

Oleksandra Tarkhanova, chercheuse à l’Institut de sociologie à l’Université de Neuchâtel a pointé que l’accueil de personnes Ukrainiennes peut présenter certaines complexités, particulièrement les premières semaines. Pour remédier à cela, elle propose l’établissement d’une forme de médiation. Madame Tarkhanova a rappelé que l’hébergement est un acte de solidarité, qu’il est un geste important qui permet de créer des relations et des liens précieux dans la société.

 

Liana Grybanova. Photo prise par Malcolm Bohnet lors de la conférence. / Voix d’Exils.

 

L’activation du statut S

Le permis S qui a été créé en 1998 dans le contexte de la guerre des Balkans n’a en réalité jamais été utilisé avant mars 2022 qui marque le début de l’invasion Russe en Ukraine.

Selon Claudio Martelli, Directeur suppléant du Secrétariat d’Etat aux migrations, au moment où les chiffres des flux migratoires ont commencé à se profiler il n’y avait, selon lui, pas vraiment le choix. La situation dépassait toute proportion imaginable et le permis S permettait de ne pas surcharger le domaine de l’asile.

Anja Klug, Cheffe du Bureau du Haut-Commissariat pour les réfugiés pour la Suisse et le Liechtenstein a aussi rappelé le moment de tensions que représentait le début de la guerre pour son organisation. En effet, dans plusieurs pays qui comptaient que peu de bureaux du HCR, comme la Pologne par exemple, les effectifs ont dû être rapidement augmentés pour répondre à la situation. En Suisse également, les effectifs du bureau du HCR ont été augmentés.

Cesla Amarelle, Professeure à la Faculté de droit à l’Université de Neuchâtel a rappelé que le permis S est un statut hybride qui a des zones d’ombre au niveau juridique et qui pose la question de la discrimination par rapport à d’autres statuts. Par ailleurs, elle a également souligné le fait que les outils de crise comme le statut S ne doivent pas péjorer les instruments de protection durables. Au contraire, il faut que des ponts se créent entre ces outils de crise et de protection durable et que ces derniers soient même consolidés.

Madame Amarelle a encore avancé l’idée qu’il faut voir une cohérence entre l’intégration dans la société d’accueil et l’idée de retour dans le pays d’origine. Ces dimensions sont complémentaires et, selon elle, freinent les processus d’intégration sous prétexte qu’un éventuel retour peut être vraiment négatif pour la Suisse à long terme. Surtout qu’il y a aujourd’hui une part non négligeable de personnes détentrices d’un permis S pensant s’établir en Suisse même si la situation en Ukraine se stabilise. Pour Madame Amarelle, le statut S rentre donc dans une nouvelle phase qui demande à penser l’intégration et éventuellement des alternatives à ce statut dans la perspective d’un établissement en Suisse.

 

Liana Grybanova

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




L’inauguration de la Recyclerie

Inauguration de la Recyclerie. Photo: Voix d’Exils

Un nouveau lieu à Lausanne dédié à la mixité sociale, à l’interculturalité et au contact avec la société d’accueil

La Recylerie est un nouvel espace à Lausanne qui regroupe plusieurs associations qui œuvrent autour du recyclage et de la récupération d’objets. Pour inaugurer le lieu, l’atelier couture de l’EVAM a organisé un défilé de mode’récup le 14 mars 2024. 

Dédié au partage, aux rencontres, à la formation et à la récupération des objets de notre quotidien, la Recyclerie se trouve à la rue St-Martin 38 bis à Lausanne. Elle regroupe la bibliothèque d’objets la Manivelle; l’association Ramptogo  qui promeut  l’accessibilité universelle en créant des rampes d’accès à base de LEGO; l’association PAIRES qui est un projet d’Aide à l’Inclusion des personnes réfugié·e·s en Suisse ; ainsi que les ateliers vélo et créatif de l’EVAM.

Le 14 mars dernier, un grand défilé de mode’récup a été organisé par l’atelier couture de l’EVAM qui a présenté plus de 50 pièces confectionnées à partir de tissus récupérés. La rédaction de Voix d’Exils était de la partie!

Carton d’invitation. Auteure: Kristine Kostava / Voix d’Exils.

Film sur le défilé de mode’récup

Réalisation: Vishnuvaran Nagalingam et Firat Kil / Voix d’Exils.

Interview des organisatrices du défilé de mode’récup

De gauche à droite: Céline Christen et Susana Tobias. Photo: Voix d’Exils.

Susanna Tobias, coordinatrice de l’atelier couture de l’EVAM et Céline Christen, adjointe du Pôle formation pratique de l’EVAM. Réalisation: Liana Grybanova et Omar Odermatt / Voix d’Exils.

Interview des créatrices du défilé de mode’récup

De gauche à droite: Sara Mohammadi, Gulbahar Rezaie, Susana Tobias et Maryam Soleymani. Photo: Voix d’Exils.

Interview de Gulbahar et Maryam Rezaie. Réalisation: Zana Mohammed et Zoé Maître / Voix d’Exils.

 

Des broderies pour préserver la mémoire d’un temple Antique de Palmyre

L’Atelier de Couture de l’EVAM s’est associé au projet Collart-Palmyre. Ce projet initié par l’Institut d’archéologie et des sciences de l’Antiquité de l’Université de Lausanne vise à préserver la mémoire du temple antique de Baalshamîn à Palmyre en Syrie qui a été détruit par l’Etat Islamique en 2015.

Cette préservation de la mémoire de ce patrimoine mondial se fait à travers la numérisation de l’ensemble des documents liés au temple.

L’atelier de couture de l’EVAM a contribué ainsi à conserver la mémoire de la beauté du temple de Baalshamîn en proposant des ateliers d’échanges et de broderie et en brodant des motifs issus de ces décors sur les créations qui ont été présentées lors du défilé de mode’récup.

 

Photos du défilé de mode’récup

 

La rédaction de Voix d’Exils 

L’équipe de Voix d’Exils qui a couvert le défilé de mode’récup. De gauche à droite: Liana Grybanova, Vishnuvaran Nagalingam, Zoé Maître, Zana Mohammed, Omar Odermatt.

C’est grâce aux multiples compétences de l’ensemble des membres de la rédaction de Voix d’Exils que ce reportage a pu être réalisé. Bravo à toute l’équipe!

Omar Odermatt

Responsable de la rédaction de Voix d’Exils




Le Salon du livre de Genève 2024

Le Salon du livre de Genève 2024 / Photo: Voix d’Exils.

Une île de bonheur pour les lecteurs et les écrivains

Le dernier Salon du Livre de Genève, qui s’est tenu du 6 au 10 mars 2024 à Palexpo, a été un événement remarquable, célébrant la diversité et la richesse de la littérature mondiale. Avec une large gamme d’auteurs, d’éditeurs et de passionnés de livres venant du monde entier, ce salon a offert une expérience unique aux amateurs et amatrices de lecture.

Les visiteurs ont eu l’opportunité de découvrir des milliers d’œuvres littéraires de différentes langues et cultures. Des dernières nouveautés aux classiques intemporels, il y en avait pour tous les goûts et intérêts.

De plus, le salon a accueilli une série d’événements spéciaux, notamment des présentations de livres, des rencontres avec les auteurs, des tables rondes et des séances de dédicaces. Ces occasions ont permis aux participants d’interagir directement avec leurs auteurs préférés et d’approfondir leur compréhension des œuvres présentées.

Du roman contemporain à la littérature jeunesse, de la poésie au polar, de la BD à la philo, du bien-être à la cuisine, le Salon du Livre 2024 s’est affiché comme un espace d’exploration inclusif. Que ce soit pour les lecteurs de tous âges ou les écrivains, toutes et tous ont pu trouver leur place.

Parmi les auteurs présents durant les cinq jours du salon, il y avait notamment trois invité.e.s d’honneur : Joël Dicker, Léonie Bischoff et Elisa Shua Dusapin : un trio suisse qui a consacré des heures pour rencontrer leurs publics et réaliser des dédicaces.

En l’honneur de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars, les onze scènes de la manifestation ont accueilli des rencontres menées exclusivement par des femmes : modératrices, intervenantes et autrices.

Salon africain du Salon du Livre de Genève 2024. Photo: Elvana Tufa / Voix d’Exils.

Littérature et migrations au Salon du Livre

Comme on peut le lire dans le dossier de presse de Salon du Livre, la question des migrations, les défis et conséquences qui en découlent, étaient au rendez-vous des discussions de cette édition 2024 : « Au cœur des défis et des opportunités que notre monde contemporain doit relever, les questions d’identité et de migrations s’entremêlent dans des débats complexes et pourtant essentiels. Alors que les mouvements de masse questionnent, préoccupent, inquiètent, est-ce que la science-fiction nous permettait d’y voir plus clair ? ». Les trois auteurs Michel Juste, Elisa Beiram et Bernard Fischli ont débattu de la question. Pour interroger le rapport aux origines et le besoin de repères, l’autrice belge Julia Galaski et la romancière française Claire Ferçak se sont également rencontrées à Genève. Au salon africain, la chercheuse Asma Ben Hadj Hassen est revenue sur « les violences contre les migrant·es subsaharien·nes en Tunisie qui questionnent l’identité tunisienne, son appartenance à l’Afrique et la présence ancienne d’une communauté noire dans ce pays. » La réalité de la migration était aussi incarnée « par la présence de Mamadou Sow et du poète Falmarès qui ont tous deux quitté la Guinée respectivement à 15 et 14 ans pour rejoindre l’Europe et la France. » Ces voyages ont été discutés en présence d’Azouz Begag.

En tant que bénévole également, j’ai eu la possibilité de vivre cette expérience au Salon du Livre de Genève et je me suis rendue compte que j’avais besoin de ce milieu pour me rappeler mon lien avec les livres, les auteurs et autrices et l’ambiance de ce type de salon. Cette édition du Salon du Livre de Genève a été une expérience inoubliable célébrant le pouvoir des livres, la connexion entre les personnes et l’enrichissement de leurs vies à travers la connaissance et l’imagination.

Elvana TUFA

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Le salon du livre de Genève fait le bonheur d’Elvana Tufa, rédactrice de Voix d’Exils / Photo : Voix d’Exils




Toutes et tous contre le racisme!

La semaine lausannoise d’actions contre le racisme 2024 se déroulera du 18 au 24 mars à Lausanne

La journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale célébrée chaque année le 21 mars dans le monde entier. Elle invite à la réflexion et à l’action collective pour lutter contre les préjugés et les discriminations. A Lausanne, l’événement se déroule sur une semaine. Cette année, le racisme dans le domaine de la santé sera le thème de la journée qui se déroulera du 18 au 24 mars 2024 et qui sera ponctuée par plusieurs activités.

Depuis sa création, la Semaine lausannoise d’actions contre le racisme cherche à sensibiliser et à susciter la réflexion et l’action contre toutes les formes de discriminations et de racisme à Lausanne.

« Le racisme dans le domaine de la santé »

Le Bureau lausannois pour les immigrés (le BLI) organise depuis 2007 la Semaine d’actions contre le racisme. Chaque année, un thème en lien avec le racisme est traité. Cette année marquera la 18ème édition qui se déroulera du 18 au 24 mars 2024. Son thème est le racisme dans le domaine de la santé et son message est de rappeler que « Lausanne c’est chacun et chacune d’entre nous, quelles que soient nos origines, notre couleur de peau, notre religion ou notre genre ». Au programme, il y aura des courts-métrages, des activités ludiques, des témoignages, des performances de rue et de l’improvisation théâtrale. Certaines activités proposées sont sur inscription.



Zoom sur deux activités durant l’événement

Colloque « Racisme et santé, comment agir ? »

Un colloque intitulé « Racisme et santé, comment agir ? » ouvrira la semaine d’actions contre le racisme le 18 mars. Organisé conjointement par le BLI et le Département vulnérabilités et médecine sociale d’Unisanté, il vise à mettre en lumière cette thématique essentielle mais peu abordée en réunissant patientes et patients, membres du personnel soignant, associations et institutions afin d’échanger et de réfléchir à la manière dont il est possible d’agir contre le racisme. Cliquez ici pour accéder au programme du colloque. Vous pouvez vous inscrire jusqu’au 14 mars ici . Les places sont limitées.

Les voi·es·x de résistance

l’Association Reliefs a initié Voi·es·x de résistance en 2019. Ce projet vise à donner la parole à des personnes qui vivent les procédures d’asile et à partager leurs témoignages avec un public large. Vous pourrez écouter ces témoignages du 18 au 30 mars dans les Bibliothèques de la Ville de Lausanne. Activité sans inscription préalable. Pour plus d’informations cliquez ici.

Zana Mohammed

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Aux origines de la semaine d’actions contre le racisme

La semaine d’actions contre le racisme a été initiée en 1999 au Québec, afin de célébrer la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale. Cette dernière a été proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1966, suite à la répression sanglante d’une manifestation pacifique à Sharpeville en Afrique du Sud, en 1960 durant l’Apartheid. En proclamant la Journée internationale en 1966, l’Assemblée générale a engagé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour éliminer toutes les formes de discrimination raciale. En 1979, l’Assemblée générale a adopté un Programme d’activités à entreprendre au cours de la seconde moitié de la Décennie de la lutte contre le racisme et la discrimination raciale (A/RES/34/24). À cette occasion, l’Assemblée générale a décidé qu’une semaine de solidarité avec les peuples en lutte contre le racisme et la discrimination raciale, commençant le 21 mars, sera organisée chaque année par l’ensemble des États.

Z.M.




Fragments du début de la guerre en Ukraine

Arrivée des troupes russes dans Kharkiv, le 27 février 2022. Capture d’écran réalisée à partir d’une vidéo extraite du photoreportage ci-dessous de Natalia Rafalska.

Deux ans de guerre en Ukraine #3

Le 24 février 2022, la Russie envahit l’Ukraine. Cela fait donc deux ans que la guerre a éclaté. Voix d’Exils a décidé de publier une série d’articles autour de cet événement marquant. Dans cette nouvelle publication, Liana Grybanova, rédactrice à Voix d’Exils originaire d’Ukraine, revient sur les premiers jours de la guerre à travers des témoignages de personnes ayant vécu ces événements et un photoreportage de Natalia Rafalska.

Le 24 février 2022, j’ai été réveillée à 5 heures du matin par un appel de ma voisine. D’habitude, elle ne se réveille pas avant l’heure du petit-déjeuner. Elle m’a dit que trois mots : « Ils bombardent Kharkiv ! ». En un instant, c’était clair: ce que nous ne voulions pas croire était en train d’arriver! En effet, nous ne pouvions pas imaginer que nous pourrions être attaqués un jour par nos frères et sœurs Russes, celles et ceux que nous considérions comme les plus proches par la culture, par l’esprit, par notre passé soviétique commun. C’est ainsi que malgré tous les avertissements que nous ne voulions pas entendre, la guerre avait soudainement commencé. Et le choc était accentué par l’incrédulité et l’incompréhension de ce qui se passait. Mais il fallait néanmoins réagir très vite!

J’ai donc décidé d’appeler ma mère. J’ai essayé de trouver les mots justes pour ne pas l’inquiéter. Mais ce n’était pas la peine: la liaison téléphonique était défaillante car elle ne pouvait pas supporter la vague d’appels qui étaient passés en même temps. Mon mari et moi on vivait alors dans la banlieue de Kiev et nous avons alors décidé de nous rendre en ville. La première chose que nous avons vu c’est une file d’attente de plusieurs kilomètres aux stations d’essence. À 8 heures du matin, il y avait également d’énormes files d’attente dans les magasins d’alimentation, les distributeurs de billets et les pharmacies. En même temps, il était surprenant de voir à quel point les gens restaient calmes, attendaient leur tour et étaient le plus souvent silencieux. Les gens achetaient de la nourriture, des médicaments, des allumettes, des bougies et du ruban adhésif pour sceller leurs fenêtres.

Le compte à rebours de la guerre s’était enclenché et il fallait dorénavant vivre avec !

Porte d’entrée de la maison Liana Grybanova. Au début de la guerre, les Ukrainiens mettaient du ruban adhésif sur les fenêtres pour faire en sorte qu’en cas de bombardements, l’onde de choc ne brise pas le verre. Photo: Liana Grybanova le 24.02.2022.

« Non seulement les événements et les modes de vie ont changé, mais nous avons nous-mêmes changé intérieurement »

Le 24 février 2022, nous avons franchi une ligne de démarcation, une ligne rouge, au-delà de laquelle il ne nous est aujourd’hui plus possible de vivre comme avant. Non seulement les événements et les modes de vie ont changé, mais nous avons nous-mêmes changé intérieurement. Beaucoup de gens ont commencé à aider davantage les autres, à les comprendre, à faire du bénévolat.  D’autres, au contraire, ont commencé à utiliser le malheur commun à des fins égoïstes. La guerre a divisé la vie entre l’avant et l’après, les gens ont été sommés de choisir leur camp et les personnes se sont concentrées sur les valeurs les plus importantes: la paix, la famille, l’amour et la vie.

Une de mes amies, écrivaine et directrice d’un théâtre à Kiev, m’a dit qu’elle n’aurait jamais imaginé qu’elle enverrait à l’un de ses acteurs non pas un scénario pour une nouvelle pièce de théâtre, mais des colis au front. Une autre de mes amies, directrice d’une clinique privée, attend, quant à elle, que sa fille de 19 ans revienne du champ de bataille.

Nous sommes devenus différents, peut-être plus forts. Mais chaque jour de cette guerre, qui dure depuis deux ans maintenant, renforce notre certitude qu’il n’y a rien qui la justifie.

Liana Grybanova

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

« Notre hôtel est situé dans un endroit magnifique au bord du lac. Mais au début, les Ukrainiens ne pouvaient pas apprécier cette beauté »

Ludmila, originaire d’Ukraine, installée à Estavayer-le-Lac en Suisse

Je vis en Suisse depuis 13 ans. Lorsque j’ai appris que les villes Ukrainiennes avaient été bombardées et attaquées par les roquettes russes le 24 février 2022, j’ai été choquée car ma sœur, sa famille ainsi que ma mère étaient sur place. Heureusement, ils ont pu quitter Kiev et venir en Suisse dès les premiers jours de l’invasion russe. Je les ai tous accueillis chez moi.

Mais j’ai réalisé que je pouvais faire plus en aidant d’autres Ukrainiens et Ukrainiennes aussi. Travaillant comme réceptionniste à l’hôtel SeePark, situé à Morat, j’ai proposé aux gérants de l’hôtel d’accueillir des réfugiés Ukrainiens. L’hôtel appartient à une société dont les propriétaires vivent en Europe occidentale et ont des origines Russes. Non seulement ils ont accepté, mais ils ont aussi mis en place toutes les conditions d’hébergement pour accueillir les réfugiés. Les responsables de l’hôtel sont allés personnellement chercher les gens à la gare. Ils ont installé une cuisine provisoire sur le toit de l’hôtel dans une pièce donnant sur le lac. Les autres chambres disposaient de lits supplémentaires pour accueillir les familles avec enfants.

Notre hôtel est situé dans un endroit magnifique au bord du lac. Mais au début, les Ukrainiens et Ukrainiennes ne pouvaient pas apprécier cette beauté. Les enfants pleuraient tout le temps et les femmes s’inquiétaient pour leurs maris restés en Ukraine.

Propos recueillis par L.G.

 

Les premiers jours de la guerre

Un photoreportage de Natalia Rafalska

Réfugiée Ukrainienne actuellement en année préparatoire à l’Université de Lausanne, Natalia Rafalska livre son témoignage qu’elle accompagne de photos qui retracent les premiers jours de la guerre telle qu’elle les a vécus.   

Nous vivions à Kharkiv. Cette ville a été l’une des premières à être bombardée par l’armée russe. Lorsqu’on a entendu les première détonations, nous avons appelé nos connaissances qui vivent en périphérie de la ville. Ils nous ont dit que des soldats russes étaient déjà dans la ville…. sous leurs fenêtres!

La prise de conscience d’un terrible désastre, d’une catastrophe, nous a fait agir rapidement et clairement. Nous avons rassemblé des documents, de l’eau et des rations sèches. Je travaillais alors dans l’un des magasins d’une grande chaîne de produits laitiers fermiers. Les rames du métro circulaient encore durant la matinée et j’ai pu me rendre au travail. Mes jambes tremblaient de peur, mais nous devions travailler car les gens avaient besoin de nourriture, de produits laitiers pour leurs familles.

La première nuit, mon mari et moi avons dormi sur le sol d’une station de métro. Les rames avaient cessé de circuler et les gens utilisaient les stations pour s’abriter des bombardements. Le matin, mon mari est rentré à la maison parce que notre chat était seul. Quant à moi, je suis retournée au travail.

Pendant les neuf jours qui ont suivi, je suis allée travailler et j’ai dormi dans l’abri antiatomique le plus proche. Je n’avais rien d’autre qu’un petit sac à dos et un tapis de yoga pour m’allonger. Il faisait terriblement froid. J’étais émue aux larmes lorsque des inconnus partageaient avec moi un bol de soupe chaude, une couverture ou un vieux manteau. Ils m’ont aidée en silence, sans attendre de remerciements.

Les habitants et habitantes de l’abri, unis par le malheur qui leur est soudainement tombé dessus – la guerre – sont devenus une grande famille. J’ai pu ensuite quitter notre refuge pour rentrer chez moi pendant une courte période et je suis finalement partie pour rejoindre la Suisse.

Vidéo envoyée à Natalia Rafalska et datée du 27.02.2022, 7 heures ou 8h du matin. Traduction des échanges: « Les gars ils réfléchissent à l’endroit où aller. Ils tournent à nouveau. Ils doivent être en train de réfléchir à l’endroit où aller. Le voilà assis dans la voiture, prêt. Il y a deux personnes sur le toit de chaque voiture. Bâtards, pourquoi, pourquoi ? Ici, ils se sont promenés le long du 335 rue Shevchenko, dans le quartier de Lower Shishkovka, Saperca. C’est une matinée amusante. Je suis rentré juste à temps ».

Un engin blindé des défenseurs de la ville touché par les forces spéciales russes lors des combats. Photo prise le 27.02.2022.


Un véhicule blindé tigré des forces spéciales russes détruit par les défenseurs de la ville. Photo prise le 27.02.2022.


L’école numéro 134 à Kharkiv après une bataille entre l’unité spéciale du MUU Kraken, les combattants de la brigade 92, l’unité de volontaires Freikor, l’unité de police de la ville et les forces spéciales russes. Photo prise le 27.02.2022.


« Peaches », le chat de Natalia, attend de monter dans un bus pour quitter Kharkiv. Photo prise le 06.03 2022.


Bus à la gare d’Oujgorod au poste de douane à la frontière entre l’Ukraine et la Slovaquie. Il est inscrit sur la bande lumineuse « Navire de guerre russe, va te faire foutre ! ». Cette phrase a été prononcée par un militaire Ukrainien sur l’île des serpents le 24.02.2022, alors qu’un navire russe le sommait de se rendre sinon il allait bombarder sa position. Au début de la guerre, tous les Ukrainiens connaissaient cette phrase qui était devenue un slogan de ralliement. Photo prise le 08.03.2022.


Natalia Rafalska, ici à un passage piétons entre Oujgorod (Ukraine) et Vyšné Nemecké (Slovaquie). Photo prise le 08.03.2022.

La guerre en quelques chiffres 

En 2 ans de guerre, plus de 14 millions d’Ukrainiens et d’Ukrainiennes ont été contraints de fuir leur foyer à un certain moment. Cela équivaut à presque un tiers de la population du pays. 

Eurostar rapporte que 4.2 millions de réfugiés en provenance d’Ukraine ont été enregistrés pour une protection temporaire ou des mécanismes similaires dans l’Union Européenne.

Selon l’agence des Nations Unies pour les Réfugiés, plus de 8 millions de réfugiés en provenance d’Ukraine ont été enregistrés à travers l’Europe.

Environ 17,6 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire d’urgence en Ukraine.

Plus de 5 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur de l’Ukraine.

La mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine a indiqué qu’à la fin du mois de novembre 2023, au moins 10’000 civils avaient été tués depuis le début de l’invasion armée de l’Ukraine par la Russie. Quelque 18’000 personnes ont été blessées selon les données disponibles. Les chiffres peuvent être considérablement plus élevés. 

L.G.

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