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La revue de presse #7

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : Le dérapage raciste de deux experts français / Les autorités sanitaires britanniques saluent le travail des étrangers / Face au Covid 19, les Algériens se montrent solidaires et créatifs

Non, les Africains ne sont pas des cobayes !

Jeune Afrique, 4 mars 2020

Invités sur le plateau de LCI le 2 avril 2020, Camille Locht, directeur de recherche de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), et Jean-Paul Mira, chef du service de réanimation de l’hôpital Cochin ont créé la polémique…

Un des experts demande : « Est-ce qu’on ne devrait pas faire une étude sur le coronavirus en Afrique, où il n’y a pas de masques, pas de traitements, pas de réanimation ? Un peu comme on l’a fait d’ailleurs pour certaines études sur le sida. Chez les prostituées, on a essayé des choses parce qu’on savait qu’elles sont hautement exposées et qu’elles ne se protègent pas. » L’autre expert lui répond : « Vous avez raison, on est d’ailleurs en train de réfléchir à une étude en parallèle en Afrique ».

Cet échange pour le moins douteux a suscité une vague d’indignation sur l’ensemble du continent africain. Petit échantillonnage des commentaires postés sur les réseaux sociaux : « Covid 19 – Nous ne sommes pas des rats de labo » – « Covid 19 – #Testez chez vous »- « Covid 19 – Faut-il rappeler que le dénuement africain n’est pas un fait de nature, mais résulte notamment d’un pillage continu ? »

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel a été saisi par l’association SOS Racisme. Un collectif d’avocats africains menace de faire de même. Quant aux deux experts incriminés, ils ont fait leur mea culpa et se sont excusés. Pas sûr que cela suffise pour éteindre l’incendie qu’ils ont allumé…

 

La Grande-Bretagne rend hommage au personnel de santé étranger

The Guardian, 6 mars 2020

Dans les hôpitaux britanniques, il aura fallu que le Covid-19 frappe des médecins nés ailleurs ou nés de parents immigrés, qui se sont portés volontaires ou officient normalement, pour que ces derniers obtiennent une certaine reconnaissance de la part des autorités.

Accusés jusqu’ici d’être «des immigrants qui n’apportent rien aux institutions et en retirent tout », les docteurs non européens du National Health Service (NHS), étaient à la merci, entre autres difficultés, d’un processus administratif complexe et onéreux pour le renouvellement de leur visa. Un seul maillon venait à manquer dans le processus et c’était la débâcle, ils se retrouvaient sans emploi.

Pourtant, les docteurs El-Hawrani, El Tayar, Alfa Saadu et Habib Zaidi, tous morts « sur le champ de bataille Covid19 » faisaient partie des 44 % du personnel médical qui est BAME (Black, Asian & Minority Ethnies – Noirs, Asiatiques et Ethnies Minoritaires). Quant à Areema Nasreen, infirmière urgentiste également décédée, elle faisait partie des infirmiers-ères et des sages-femmes dont un sur cinq est BAME, alors que dans certaines régions comme Londres, quatre sur dix le sont.

Au vu de l’apport essentiel des travailleurs étrangers dans le domaine de la santé en ces temps de pandémie, la machine administrative s’est adoucie. Le gouvernement a ainsi décidé de renouveler automatiquement le visa de tous les infirmiers, médecins, ambulanciers et professionnels de la santé, et cela pour une année et sans frais.

Le secrétaire à la santé, Matt Hancock, qui avait insinué que NHS était « le National Health Service et non le International Health Service», a salué les membres du personnel du NHS qui ont péri du coronavirus comme des «personnes venues dans ce pays pour faire la différence ». Un bel hommage, rendu malheureusement post mortem.

 

En Algérie, des actions solidaires pour résister au coronavirus

Le Monde Afrique, 6 mars 2020

Le confinement a été officiellement décrété et il n’est plus possible de travailler à moins d’être employé dans la santé ou tout autre domaine essentiel. Alors, les Algériens se mobilisent.

A Bejaïa, à 200km d’Alger. Fahim Ziani, 49 ans, propriétaire d’une salle de fête a une idée de génie : sur Facebook, il annonce qu’il met sa salle à disposition des sans abri. Élus locaux, bénévoles, protection civile, particuliers, tous relaient l’information et forment une chaîne de solidarité pour accueillir les premiers sans-abris. Sous l’avalanche de dons reçus, ils sont obligés d’en réorienter une partie vers les associations d’entraide.

A Oran, deuxième ville du pays. Plusieurs initiatives de solidarité naissent spontanément : on y fabrique des protections pour le personnel soignant, on collecte des aliments pour les ménages les plus touchés économiquement, on confectionne des repas pour les hôpitaux, on fait des spots de sensibilisation. Provisoirement, les oppositions politiques sont reléguées dans les tiroirs.

A Baba Ali, en périphérie sud de la capitale. Ryadh Brahimi, entrepreneur de 39 ans et une trentaine de ses employés sont confinés dans les locaux de la Global Algerian Technology. En réponse à un appel d’offres du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche pour un respirateur artificiel, ils se mettent « gracieusement » à l’œuvre, car dit-il « Nous avons compris que les procédures allaient nous faire perdre du temps et nous avons prévenu que nous étions prêts à commencer tout de suite. »

Avec l’aide des universitaires, des médecins et de la diaspora, les ingénieurs parviennent à sortir un prototype en deux semaines. « C’est une machine de guerre, pas un respirateur de la qualité de ceux produits par des multinationales avec des années d’expériencesMais si ça permet de sauver une vie, on aura réussi. »

Marie-Cécile / Voix d’Exils