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Le khat, obstacle à l’intégration

Le khat drogue à mâcherLe khat est une herbe qui se mâche dans tout l’Afrique de l’Est et une partie de la péninsule arabique. Quel impact a la consommation de cette drogue sur la population immigrée de ces régions en Suisse ? L’exemple de Zahra et de Tefreh est à cet égard édifiant.
Zahra*, une mère somalie, se lamente auprès de son ami et voisin Tefreh, qui est lui d’origine éthiopienne.

Elle prétend ne pas comprendre ce qui lui arrive cette année : « J’ai de plus en plus de problèmes d’argent, la situation scolaire de mes enfants chemine vers l’échec, une dette qui ne fait qu’augmenter et mon caractère qui devient insupportable pour les autres. »

Son ami lui répond : « Nous aussi, on est dans les mêmes draps. Oublions tout ça, la vie continue et fais vite ton petit plat de pâtes aux enfants, parce qu’il est déjà l’heure. »

Ils vont alors passer des coups de fil pour s’assurer de l’arrivage de la « nourriture des anges » : le khat. Il s’agit de feuilles tendres d’un arbuste qui pousse en Afrique de l’Est et dans une partie de la péninsule arabique. Le khat contient de l’alcaloïde, un stimulant qui provoque l’euphorie. Dès 1980 l’Organisation mondiale de la santé a classé le khat dans la liste des drogues du fait qu’il provoque une dépendance psychologique. Cette substance est illégale en Suisse comme dans beaucoup de pays.

Après avoir fait une dizaine de téléphones et siroté du thé pendant une heure et demie, ils réussissent à localiser la réceptrice d’aujourd’hui. Tous les jours, des personnes introduisent illégalement le khat sur le marché suisse, la marchandise étant ensuite acheminée à différentes adresses du réseau de vente : ce sont les récepteurs et les réceptrices.

Les préludes du rituel peuvent alors commencer : plusieurs va-et-vient sur l’avenue qui longe le bâtiment où réside la réceptrice pour être sûrs que la police n’a pas suivi la marchandise.

Une fois rassurés sur la sécurité du lieu, ils se présentent chez la réceptrice. N’ayant que 30 francs suisses chacun, ils ne peuvent s’acheter que deux bouquets, soit une vingtaine de petites branches d’environ 10 centimètres. Mais comme c’est le début du week-end, ils veulent consommer au minimum cinq bouquets par personne pour veiller toute la nuit du samedi, comme ils en ont l’habitude chaque semaine.

La réceptrice rejette leur demande en leur rappelant qu’ils ont déjà une ardoise sacrément débitrice qui ne fait qu’augmenter chaque jour.

Pour arriver à leurs fins, ils font la louange de la réceptrice et du « patron », le propriétaire de la marchandise, au point de brader leur âme.

De retour à la maison avec les doses espérées, ils préparent le lieu de broutage et dès qu’ils ont mis la feuille sous les dents, ils se rappellent de leurs enfants.

Zahra demande à sa fille : « A la rentrée, tu seras en 5ème ou en 6ème année? » « Mais non, lui répond sa fille, je serais en 7ème année. » Tefreh rétorque : « Ah, tu seras au même niveau que ma fille ! » La petite, exaspérée par ces propos, répliques : « Oncle Tefreh, ta fille sera en 6ème année et moi en 7ème année ! »

Le samedi et le dimanche, nos deux khateurs ont passé leur temps à résoudre tous les problèmes auquel l’ONU ne trouve pas de solution, et fait beaucoup de promesses de chercher du travail, etc.

Le lundi matin, Zahra se réveille à une lenteur qui mettrait en colère le paresseux. Les enfants, surpris, lui disent : « C’est étonnant, aujourd’hui tu t’es réveillée tôt. Tu va nous préparer des omelettes. » La réponse est à la mesure de son humeur : « Je ne m’occupe pas de vous, préparez-vous des popcorns avec du lait, moi je dois aller à l’hôpital pour une transfusion de fer, je me sens très fatiguée. »

La fille de Tefreh revient à la maison vers 15 heures avec une pénalité de 80 francs pour absence de titre de transport. Le père s’énerve, la gronde et l’accuse d’être fautive parce qu’elle a oublié d’amener son abonnement.

La petite, d’un air normal, comme si elle était habituée à ce genre d’histoire, lui répond : « Mais papa, ça fait trois mois que tu me dis chaque fois demain pour me payer l’abonnement du bus. »
Le père : « Je n’ai pas d’argent, je vais dire à Zahra de nous trouver un peu de crédit auprès des voisins pour payer les bouquets de khat d’aujourd’hui, et si possible ton abonnement bus. »

S’ensuivent la quête d’un crédit, la localisation du lieu d’arrivage de la marchandise, la mendicité auprès des vendeurs, l’évocation perpétuelle de tous les problèmes du monde et des promesses sans lendemain, tels un mécanisme infernal qui se répète jour après jour.

Hassan Cher Hared




Bienvenue sur voixdexils.ch

Bienvenue sur le nouveau média social : voixdexils.ch !

Bienvenue à toutes et à tous sur le nouveau média social en ligne www.voixdexils.ch!

Derrière vos écrans se trouve une structure interactive principalement dédiée au débat sur les questions de migration, qui prend le relais de l’édition papier du journal, du même nom, dont la dernière parution a vu le jour en janvier 2010.

La formule électronique prolonge l’une des missions essentielle du journal à savoir : permettre aux personnes migrantes de s’exprimer de manière directe sur les questions de migration. Cependant, comme vous pourrez le lire dans la Charte éditoriale, Voix d’Exils se propose également de remplir des nouvelles missions, ce notamment grâce aux possibilités offertes par le support électronique.

A nos yeux il est indispensable dans un premier temps de soumettre voixdexils.ch aux principaux usagers et usagères, afin de mieux répondre aux besoins du plus grand nombre ensuite. De ce fait, ce média va continuer à se développer et à s’améliorer ces prochaines semaines.

Nous inaugurerons officiellement voixdexils.ch les 23, 24 et 25 septembre 2010, dans le cadre de la Caravane des quartiers à Lausanne.

En attendant le mois de septembre, nous nous réjouissons de recevoir vos suggestions, remarques et propositions. De même, vous pouvez également vous tenir informer de la vie du média en envoyant un e-mail à : redaction@voixdexils.ch.

Ce média est aujourd’hui en ligne grâce à l’effort soutenu de chaque membre de la rédaction que je tiens ici à remercier chaleureusement !

Pour la rédaction de Voix d’Exils,

Omar Odermatt

Responsable de la rédaction




Charte éditoriale

Voix d’Exils est un média en ligne destiné à l’expression libre des personnes migrantes et au débat sur les questions de migration et de société. Ce projet est développé par le programme d’occupation Communication de l’Etablissement Vaudois d’Accueil des Migrants (EVAM), en collaboration avec un réseau de partenaires.

Voix d’Exils vise d’une part à mettre à disposition des personnes migrantes les informations répondant à leurs besoins, et d’autre part à stimuler un débat constructif sur tout sujet les intéressant. Privilégiant le dialogue ainsi que l’analyse et valorisant l’apport des personnes migrantes dans la société, Voix d’Exils veut permettre des éclairages pluriels, porteurs d’opinions, et s’engage à produire une information de qualité, critique, originale et indépendante.

Interactif et participatif, ce média se veut résolument ouvert à un large éventail de sujets, de modes d’expression et de publics. Il s’efforce de stimuler et de favoriser autant que possible les projets éditoriaux initiés par les personnes migrantes. En collaboration avec la rédaction, les pages de Voix d’Exils sont également ouvertes à des contributeurs en dehors des frontières cantonales et nationales, sans distinction d’origine et de statut.

Voix d’Exils gère sa structure et ses contenus de manière autonome. Ses rédacteurs sont invités à s’impliquer activement dans sa construction et son animation. La structure du média se veut souple, dynamique, avec un contenu alimenté régulièrement. En conséquence, Voix d’Exils devra savoir entretenir l’intérêt du public et pourra évoluer au gré des envies de la rédaction et de ses lecteurs.

Apolitique, sans appartenance partisane ou religieuse, Voix d’Exils entend produire des articles documentés dans le respect des principes déontologiques contenus dans la Déclaration des devoirs et des droits des journalistes de la Fédération suisse des journalistes.

A la fois terrain d’expérimentation médiatique et sociale, Voix d’Exils est une plate-forme qui a pour ambition de développer les compétences de ses rédacteurs dans le domaine des nouvelles technologies de l’information et de la communication, tout en favorisant des rencontres et des échanges de savoirs.

A vocation interculturelle, plurilingue et multimédia, ce médium de communication entend promouvoir l’intégration de ses rédacteurs et, plus largement, des personnes migrantes au sein de la société.

Lausanne, le 7 juin 2010




Qui sommes-nous?

Les blogueurs de Voix d’Exils:

Un proverbe chinois dit : «  La mémoire la plus forte est plus faible que l’encre la plus pâle ».

Jean KAMUNGA SHEBA MULUNDA, originaire de la République Démocratique du Congo.

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« Il faut parfois abattre une forêt pour construire une boîte d’allumettes ».

Chaouki DARAOUI, originaire de Tunisie.

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« N’ouvrez pas la porte que vous serez incapable de refermer » (proverbe persan).

Modaber

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« Le monde est un grand théâtre dans lequel ceux qui pigent tôt les mécanismes ont droit à leur entrée sur scène ».

Hassan CHER, originaire de Djibouti

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« Je dessine et j’écris ici… car l’art et l’information sont la fenêtre qui me permet de voir la réalité; je continue ici ce que j’ai commencé ailleurs ».

Nashwan  BAMARNI, artiste originaire du Kurdistan – Irak

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« Selon René Barre, le travail est l’exercice par lequel on lutte contre la rareté et tend à accroître les biens destinés à la satisfaction des besoins.

Selon moi, l’humilité, le respect et l’endurance sont quelques qualités dont on doit s’acquitter pour se faire une place au soleil ».

Gervais NJIONGO DONGMO, originaire du Cameroun

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Parler est un besoin, écouter est un art » Goethe.

Omar ODERMATT, responsable de rédaction, suisse d’origine syrienne.

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Pourquoi on s’exprime sur Voix d’Exils?

Voici les réponses des blogueurs de Voix d’Exils:

Il est dur de supporter une vie sans perspectives d’avenir.

Cela fait longtemps que je vis dans le provisoire et comme moi, nombreuses sont les personnes dans ce monde qui vivent dans le temporaire.

Ils portent  parfois l’horreur de ce qu’ils ont subi. La rupture avec leur passé est souvent violente et ils sont en état de deuil par rapport à tout ce qu’ils ont abandonné. C’est comme s’ils vivaient à côté de la vie.

Depuis que je me suis installé dans le provisoire, j’ai cherché le refuge dans les mots. J’avais un souffle de plongeur malgré le sentiment d’enfermement, d’impuissance, de peur et de perte de dignité.

Un homme submergé par les malheurs et penché sur ses feuilles s’accroche avec ses dernières forces pour essayer de changer n’importe quoi.

On peut parler, crier, mais les paroles s’en vont et il ne reste que les écrits.

L’écriture est notre moyen d’aller au fond de nous-mêmes, au plus profond de notre âme pour soulager nos chagrins.

L’écriture nous libère, car elle nous permet de remporter une victoire sur le moment.

Chaouki DARAOUI

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Après une longue et interminable bataille, je n’avais pas d’autre choix que de partir en catastrophe de mon pays pour sauver ma vie, laissant derrière moi toutes les personnes que j’aime profondément, et tout ce que j’avais mis des décennies à construire. Je fuyais dans l’espoir de trouver un refuge, la paix de l’esprit et une vie nouvelle sur le vieux continent.

Suite à un voyage périlleux et difficile, dont je ne souhaite plus jamais me rappeler, je débarque en Suisse dans le CEP (Centre d’ Enregistrement et de Procédure) de Vallorbe. C’est là que débute pour moi un nouveau combat ; mais un combat qui sera cette fois-ci psychologiquement et mentalement difficile et bien différent du précédent car ici, le système hostile mis en place par le législateur fait plus de victimes que les stupéfiants et les malades d’Alzheimer. Une véritable machine à tuer. Voici la raison qui me pousse à vouloir communiquer à propos de cette situation, afin de mettre en lumière ce que vivent les migrants en général, et les requérants d’asile en particulier, qui ont besoin de se faire entendre.

La question qui se posait à l’époque était précisément comment m’exprimer ?

Me lever le matin et me faire entendre sur la place publique ? Non, car je craignais d’être assimilé à un agitateur.

Aller dans les églises et les mosquées ? Non, car tout le monde n’est pas croyant.

Collaborer avec les médias ? Non, car le chemin était long et complexe.

Une seule réponse s’offre à moi aujourd’hui: m’exprimer en urgence sur le blog de Voix d’Exils, afin d’en faire une plaque tournante, un canal d’échanges entre les migrants et la population suisse.

C’est ainsi que j’espère que mes écrits ne sombreront pas dans l’oubli et pourront changer quelque chose à notre situation.

Gervais NJIONGO DONGMO

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Vous savez que le monde est grand ; mais grâce aux nouvelles technologies il est devenu tout petit !

Les gens passent maintenant le plus clair de leur temps sur internet. Sur la toile, on peu écrire quantité de choses, exprimer nos idées. Via un site internet, on peut informer les gens et comprendre les différents modes de vie. Parfois, les informations produites peuvent s’avérer très utiles.

Aujourd’hui, le blog voixdexils.ch, qui est réalisé par notre équipe, ouvre un angle de 360 degrés de possibilités pour la création d’informations nouvelles qui traitent de migration.

Peace

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Si j’écris dans un blog, c’est d’abord pour me faire plaisir ! Cela me permet de communiquer avec des gens de différentes cultures.

Je peux également leur transmettre de l’information sur l’actualité, ce qui leur donne l’occasion de réagir et de pouvoir partager leurs opinions.

Le blog m’offre aussi la possibilité d’échanger des idées, et le fait de dialoguer avec les gens me donne l’impression de voyager à travers le monde.

Jean KAMUNGA SHEBA MULUNDA

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Je dessine et j’écris ici…

Car l’art et l’information sont la fenêtre qui me permet de voir la réalité; je continue ici ce que j’ai commencé ailleurs.

Nashwan HASHIM BAMARNI

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Étant un défenseur invétéré des droits de l’homme dans mon pays activité qui, dans le monde moderne ne peut évoluer sans la technologie de pointe, est un des facteurs principaux qui m’a poussé à devenir un blogueur chevronné.

Je passe 30% de mes journées à manier deux outils issus de deux époques différents, mais qui poursuivent néanmoins la même finalité: la plume et le clavier.

Au moyen de ces outils, je nourris de supports de partage et de diffusion d’informations, afin de faire bénéficier les lecteurs de mon expérience et ma maigre connaissances du domaine de la justice humaine.

Ce blog est ainsi un support de plus à nourrir.

Hassan Cher, d’origine Djiboutien