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Revue de presse #31

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils.

Sous la loupe : l’ex-ministre de l’Intérieur italien jugé pour avoir empêché le débarquement de migrants / Manifestation contre la construction d’un centre de renvoi à Genève / Des juristes évaluent le système d’asile suisse / Une Suissesse emprisonnée en Biélorussie suite à une manifestation.

L’ex-ministre de l’Intérieur italien jugé pour avoir empêché le débarquement de migrants

La Tribune de Genève, le 03 octobre 2020

L’ex-ministre de l’Intérieur italien, Matteo Salvini, a été convoqué devant un tribunal sicilien pour avoir empêché le débarquement de migrants sauvés en mer. Il est poursuivi pour « abus de pouvoir et séquestration de personnes » car il aurait bloqué pendant l’été 2019 et durant plusieurs jours 116 migrants à bord d’un navire des garde-côtes italiens. A cet effet, les sénateurs italiens ont levé son immunité parlementaire et il encourt jusqu’à 15 ans de prison.

Sur l’île qui a vu prospérer l’organisation criminelle « Cosa Nostra » et où arrivent chaque année par la mer des milliers de migrants partis d’Afrique du Nord, le principal concerné a soutenu que la justice se substitue à la voix populaire et qu’il préférerait que les juges se consacrent à capturer les mafieux et les délinquants.

En outre, Salvini a convoqué ses troupes à Catane pour trois jours de rencontres et manifestations au cours desquels il veut démontrer avoir le soutien populaire. De nombreux élus nationaux et locaux de son parti ainsi que des alliés d’autres partis de droite ont annoncé leur présence.

L’ancien ministre de l’Intérieur risque également d’affronter un procès similaire à Palerme, où il aurait bloqué pendant plusieurs jours, à la mi-août 2019, le bateau humanitaire «Open Arms» devant l’île de Lampedusa.

 

Manifestation contre la construction d’un centre de renvoi de requérants d’asile à Genève

Radio Lac, le 5 octobre 2020.

La construction d’un centre de renvoi de requérants d’asile déboutés à Genève ne fait pas l’unanimité auprès de la population genevoise. A cet effet, 750 personnes ont défilé dans les rues de la commune du Grand-Saconnex (GE). L’appel à manifester avait été lancé par une vingtaine d’organisations.

Les autorisations pour la construction du centre de renvoi ont été données et le terrain, situé à côté de l’aéroport, a été défriché, a souligné un des manifestants. A l’endroit prévu, un bâtiment doit voir le jour en 2022. Il aura une capacité d’accueil de 250 places et disposera de 50 places destinées à de la détention administrative. Pour les manifestants, ce projet est imaginé comme un vaste complexe carcéral de renvoi. Selon eux, les règles qui seront en vigueur dans le centre seront infantilisantes. Il sera interdit d’y recevoir des visites et tout sera pensé pour que les requérants d’asile ne se mêlent pas à la population. Outre les conditions de vie dans ces établissements, les manifestants ont également dénoncé les actes de brutalité qui auraient été commis sur des requérants. D’autres centres de renvoi similaires ont déjà été ouverts ailleurs en Suisse à Fribourg, Neuchâtel, ou encore Zürich.

 

Des juristes évaluent le système d’asile suisse

Le Temps, Le 7 octobre 2020

L’afflux de requérants d’asile n’a pas été aussi modéré depuis des années. Pourtant, selon le rapport d’une coalition de juristes indépendants pour le droit de l’asile, le travail du Secrétariat d’État aux migrations (SEM) serait « médiocre ». Entrée en vigueur en mars 2019, l’accélération des procédures du nouveau système pousserait le SEM, les professionnels de la santé et les organisations d’aide aux demandeurs d’asile à bâcler leur travail, au risque de renvoyer des personnes fragiles dans les pays qu’elles avaient fui pour leur survie.

En début d’année, l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) tirait déjà la sonnette d’alarme. Selon cette dernière, les autorités mettent davantage l’accent sur la vitesse de la procédure que sur les principes de qualité et d’équité. Un constat renforcé par le rapport de la coalition de juriste.

Basée sur les chiffres relatifs à la première année depuis l’entrée en vigueur du nouveau système ainsi que sur l’analyse de 75 cas, le rapport fournit une critique sur le fonctionnement de la procédure actuelle qui contiendrait un grand nombre de problèmes. Un première problème est que le temps de recours est jugé trop bref. En effet, après une procédure accélérée, le nouveau système accorde sept jours (contre trente auparavant) pour s’opposer à la décision du SEM. Un deuxième problème réside dans le grand nombre de requérants aiguillés vers une procédure accélérée malgré la complexité de leur cas. Le rapport accuse également l’administration de ne pas toujours respecter les délais de traitement et de mettre les représentants juridiques dans des situations intenables. Finalement, le rapport dénonce la pression mise sur les médecins, qui rédigeraient régulièrement des rapports cruciaux à la hâte.

 

Une Suissesse emprisonnée en Biélorussie après avoir pris part à une manifestation

Le Matin, Le 8 octobre 2020

Le 9 août, suite à un scrutin controversé, le Président de la Biélorussie, Alexandre Loukachenko, a été réélu avec 80,2% des voix pour un sixième mandat. Depuis, le pays est plongé dans un certain chaos et des manifestations sévèrement réprimées par les forces de l’ordre se multiplient. Chaque samedi, des milliers de femmes défilent pacifiquement pour réclamer le départ de l’homme fort du pays.

Une Suissesse de Saint-Gall, originaire de Biélorussie, s’est rendue dans la capitale du pays pour rejoindre un de ces défilés. Le 19 septembre, lors d’une manifestation, des hommes cagoulés ont essayé de saisir deux manifestantes pour les mener vers un fourgon. Les autres femmes se sont mises à crier et la Suissesse a tenté de démasquer l’un des hommes cagoulés.

La quinquagénaire a ensuite été interpellée puis a disparu de la circulation. Néanmoins, grâce à une avocate qui a été sa codétenue, ses proches savent désormais qu’elle se trouve dans la prison d’Okrestina dans la capitale du pays. Selon l’avocate, les conditions de vie en prison sont inhumaines : pas d’eau chaude, une douche par semaine, nourriture et eau infectes, cellules surpeuplées, sans ventilation, puanteur abjecte, lumière jour et nuit, pas de promenade autorisée, aucune hygiène intime possible pour les femmes.

Dernièrement, un procureur a annoncé à la Suissesse qu’elle était poursuivie pour «résistance à un représentant des forces de l’ordre». Elle risque jusqu’à deux ans de prison. Compte tenu de ses origines et malgré sa nationalité suisse, la justice considère la prisonnière comme une citoyenne biélorusse.

Valéry Martseniuk / Voix d’Exils




Les disparitions forcées

Auteur: Free-Photos, CC0 Creative Commons, pixabay.com.

 Des crimes contre l’humanité!

La question des personnes dont la disparition est intentionnelle est un problème grave dans le monde et constitue une violation manifeste des droits fondamentaux d’une personne et de sa famille.

On parle de disparition forcée lorsqu’une personne disparaît suite à une intervention des forces de l’ordre, sans accusation de crime, sans procès et sans avoir été présentée devant un tribunal.

Quand les proches et les militants des droits de l’homme tentent de faire enregistrer une disparition dans un commissariat de police, la police refuse. Toutes les tentatives des familles pour obtenir des renseignements restent vaines ; elles ne reçoivent que peine et douleur.

Il est très difficile pour les familles de personne disparues de vivre dans la société ; elles subissent rumeurs et spéculations sur les raisons qui ont conduit à cet enlèvement. La situation des femmes est particulièrement sensible : sans nouvelles de son mari disparu, une femme n’est ni veuve ni mariée ; elle n’a pas légalement le droit de se remarier parce qu’elle n’est pas en mesure de fournir des papiers de divorce ou le certificat de décès de son mari. Dans la région du Cachemire, on les désigne sous l’appellation parlante de demi-veuves « half-widows ».

Des milliers de personnes, enlevées à leur domicile ou sur leur lieu de travail, sont répertoriées comme personnes disparues par diverses organisations de défense des droits de l’homme, comme Amnesty International et Human Rights Watch.

Dans les régions où certains groupes sont en conflit avec l’Etat, il y a plus de cas de disparitions forcées. C’est la raison pour laquelle on admet généralement que les organismes d’État sont impliqués ; dans de nombreux cas, des femmes figurent également parmi les personnes disparues.

On peut se demander pourquoi des agences d’État seraient impliquées dans de telles activités illégales puisqu’elles disposent de tous les mécanismes pour présenter la personne devant un tribunal du pays et la faire condamner si elle a commis un crime ou n’a pas respecté la loi.

Parfois, l’Etat a des soupçons sur les activités d’une personne mais ne dispose pas de preuves pour la présenter devant un tribunal. Dans d’autres cas, la personne est morte sous la torture au cours de l’enquête, c’est pourquoi l’État n’est pas en mesure de la présenter devant le tribunal et ne peut pas annoncer sa mort parce qu’elle a été détenue illégalement et que c’est contraire à la constitution du pays.

Il faut rappeler haut et fort que les disparitions forcées constituent un crime contre l’humanité. Il est de la responsabilité de l’État d’assurer la sécurité de tous les citoyens, conformément à la constitution du pays. C’est le droit fondamental d’un détenu d’être présenté devant un tribunal dans les 24 heures; L’Etat doit absolument restaurer les droits de toute personne disparue s’il ne veut pas que, à la recherche d’un coupable, on pointe le doigt dans sa direction.

Jamal Bugti

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils