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Des requérants d’asile participent au succès de la 12 ème édition du festival de musique Festi’Neuch

Alpha Blondy en concert à Festi’Neuch

Le 21 mai 2012, c’était le premier jour du montage de la 12ème édition de Festi’Neuch, le festival de musique qui se déroule chaque année au bord du lac de Neuchâtel. Pour la deuxième année consécutive, des requérants d’asile ont participé à la mise sur pied du troisième plus grand festival de musique de Suisse qui s’est tenu du 30 mai au 3 juin 2012.

La préparation du festival a démarré avec des techniciens, des ingénieurs et des requérants d’asile qui travaillent dans le cadre des travaux d’utilité publique. Cette mise en place de toute l’infrastructure du festival qui comprenait la

Le montage du festival

construction des scènes et des chapiteaux prévus pour accueillir 40’000 personnes sur le site d’une superficie de 35000 m2. Profitons de rappeler ici que les requérants d’asile sont rémunérés CHF 30.- par jour pour ces services rendus à la communauté.

Ce jour-là, nous avons visité le lieu du festival et nous avons regardé toutes les étapes de la construction des scènes. Notre présence sur les lieux a aussi été pour nous l’occasion de rencontrer M. Cyrille Vuillemin qui, après y avoir travaillé durant 6 ans en tant que bénévole, a pris la direction du festival depuis le mois d’octobre 2011. Malgré son agenda très chargé, il nous a accueillis dans son bureau afin de répondre à nos questions.

M. Cyrille Vuillemin, directeur du festival Festi’Neuch

Voix d’Exils : Depuis combien de temps Festi’Neuch existe-t-il ?

M. Cyrille Vuillemin : Cela fait 12 ans que le festival existe à cette place.

Combien de festivals y a-t-il en Suisse romande ? 

Il y en a beaucoup en été dans toute la Suisse. Le plus grand d’Europe est à Nyon, c’est le Paléo festival qui a lieu durant le mois de juillet depuis 35 ou 36 ans. Il y a aussi le Montreux Jazz festival qui se déroule sur deux semaines en juillet chaque année. C’est le plus prestigieux en salles fermées. Le troisième, par sa taille, c’est Festi’Neuch.

Qui décide de la programmation et de la décoration du festival?

Notre programmateur est Antonin, qui est un des fondateurs du festival. Il travaille déjà depuis le mois de septembre pour l’année suivante. C’est lui qui choisit la partie musicale. Pour la décoration et l’image du site on le fait ensemble. Nous avons une personne qui est responsable de la communication et on travaille aussi avec une agence que l’on mandate pour confectionner nos affiches.

Comment choisissez-vous les artistes qui se produisent au festival?

Il faut mélanger les grands noms et les groupes moins connus et moins chers, qui sont les futurs talents de demain. Cette année, on a en tête d’affiche Marilyn Manson qui vient des États-Unis. On a aussi les Puppetmastaz qui viennent d’Allemagne ou, encore, Morcheeba with Skye qui viennent d’Angleterre. On essaie  aussi de privilégier les groupes locaux.

Qui finance le festival ?

Principalement la billetterie. Mais aussi ses sponsors comme la Banque Cantonale Neuchâteloise, des partenaires qui

Durant le festival

sponsorisent les stands, des subventions que nous recevons du canton, de la ville de Neuchâtel et de la Loterie Romande, des mécènes et des dons.

A part la musique, que propose le festival ?

Cette année, nous avons construit une nouvelle terrasse sur l’eau. Nous avons privilégié l’encadrement des enfants et les billets pour eux sont bien moins chers. On a aussi fait de la prévention auprès des jeunes contre l’abus d’alcool. On leur dit: « attention, vous êtes ici dans un festival, c’est bien de faire la fête, mais il faut la faire avec des règles et respecter les gens, les choses autour de vous ».

Depuis quand engagez-vous des requérants d’asile et pourquoi ?

Cela fait 3 ans. On a besoin des jeunes pour nous aider sur le site et je pense que c’est très important de donner cette opportunité aux requérants d’asile. On ne se rend pas compte en Suisse de la chance qu’on a. J’ai pu voyager dans monde et j’ai vu des gens souffrir. Nous, ici, on travaille, on mange, on a un lit, on a une famille, on a un accès aux soins, on a jamais vu quelqu’un se faire tuer à côté de nous. Des Suisses pensent que les requérants sont là seulement pour voler et c’est ce qu’on voit sur certaines campagnes publicitaires. Mais moi, je vois que ces requérants savent rendre service, ils savent travailler, ils ont le sourire, ils ont la bonne humeur, ils se bougent, ils sont motivés.  Aussi, c’est bien qu’ils puissent sortir des centres, ils sont contents d’être ici. Le festival profite de ça parce qu’on a des bras et en même temps on donne la possibilité à ces jeunes requérants de rencontrer d’autres personnes, de recevoir un billet pour aller au concert.  Ils se mettent ainsi un peu dans « la vraie vie ». Pour moi, c’est vraiment une bonne chose de rencontrer des jeunes comme vous qui sont vraiment exceptionnels et qui ont une expérience de vie qui n’a rien à voir avec la mienne. Je suis né en Suisse, c’est calme, c’est bien, il n’y a pas la guerre, il n’y a pas de gros problèmes. Donc, pour moi, c’est un honneur de vous avoir ici et je vous remercie d’être là !

Les gens qui habitent autour du festival sont-ils dérangés par les concerts ?

Nous avons eu beaucoup de plaintes. Mais, maintenant, on les informe longtemps à l’avance de la date du festival et on leur dit qu’il y aura du bruit. On a même proposé de leur payer une chambre ailleurs. Donc, maintenant « ils font avec ». On leur propose des billets avec 50 % de rabais et on leur dit: « si vous êtes dérangés par le bruit et que vous n’entendez que le bruit, venez donc au festival et vous entendrez aussi le reste ».

On fait passer le message que : « pendant quatre jours durant l’année on va faire un peu bruit et c’est aussi pour animer la ville ». Je crois que maintenant, c’est vraiment un message qui est compris car il n’y a plus de problèmes.

Connaissez-vous le blog Voix d’Exils ?

Non, je ne le connais pas mais, même si j’en ai déjà entendu parler. Je me rendrai sur le blog avec plaisir !

Propos recueillis par :

Juan ALA et Sami HASSAM

Membres de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils

Retour sur une expérience « incroyable » 

L’idée de « Festi’Neuch » a germé au sein d’un groupe de quatre personnes qui souhaitait monter un nouveau un festival. Au départ, la première manifestation s’appelait « FESTIJAZZ », qui a fait faillite. Puis, un autre festival a été monté dans le jura qui s’appelait « MONT SOLEIL » et qui a aussi fait faillite entre temps. Finalement, des gens se sont mis autour d’une table pour mettre en place un nouveau festival musical à Neuchâtel et c’est comme ça qu’est partie l’idée de Festi’Neuch en 2000. Au départ, la manifestation comptait 2000 spectateurs. Aujourd’hui, 40’000 personnes fréquentent le festival chaque année en moyenne.

Le démontage du festival

Jeudi 31 mai 2012, Festi’Neuch a commencé le premier jour par la grosse tête d’affiche : Marilyn Manson. Le vendredi 1er juin, la soirée était dédiée au hip hop français avec Sexion d’Assaut, Youssoupha et les Brigittes. Samedi 2 juin : place à une soirée électro trip hop avec Thomas Fersen, Morcheeba et Yuksek. Enfin, dimanche 3 juin, pour clore les festivités, la world musique était au menu avec le duo Amadou et Mariam et Alpha Blondy. C’est précisément le jour où nous nous sommes rendus au festival. Malgré la mauvaise météo, les festivaliers étaient au rendez-vous. Le mardi 5 juin, après quatre jours de musique et de danse, le démontage a commencé avec le même groupe de requérants qui avait participé au montage. Ils ont démonté et fait les rangements en prévision des festivités de l’année prochaine.

Nous avons profité de ce moment pour prendre l’avis des requérants d’asile qui ont travaillé durant toute la semaine au festival et qui ont assisté aux concerts:

Dao ALI, 31 ans, originaire de Côte d’Ivoire: « je suis en Suisse depuis une année et quatre mois et c’est la deuxième fois que je participe au programme d’occupation de Festi’Neuch. Je suis très intéressé par ce travail, que ce soit la gestion de la circulation, le montage ou le démontage du festival. C’est une bonne occasion de parler avec les travailleurs Suisses ».

Concentin NOUMI, 39 ans, originaire du Cameroun: « je suis en Suisse depuis deux ans et quatre mois et c’est la première fois que je participe à ce programme. Je trouve que c’est très bien de venir donner un coup de main ici et d’assister le festival. J’ai reçu un pass pour deux jours, vraiment c’était incroyable ».

Rendez-vous donc l’année prochaine, du 30 mai au 2 juin 2013, pour la 13ème édition de Festi’Neuch !

J.A. et S.H.




Une équipe de migrants défriche les pâturages de Baulmes

L’équipe du TUP de Baulmes au grand complet. Photo: MAK.

Durant huit semaines, huit requérants se sont retrouvés à Baulmes, petit village situé près d’Yverdon-les-Bains, pour couper des buissons dans les pâturages, traiter des souches et brûler des branches. Retour sur une expérience très constructive à l’occasion d’un débriefing qui s’est tenu le 12 décembre dernier dans la salle communale de Baulmes.

Prévus dans un premier temps sur trois semaines, les TUP (Travaux d’utilité publique) qui se sont déroulés à Baulmes ont été prolongés et ont finalement duré huit semaines entre la mi-septembre et fin novembre 2011. Tout au long des TUP, la commune de Baulmes avait prévu une pause café à 9 h et deux autres pauses à 12 h et 15 h, elle avait également mis à disposition un chalet pour s’abriter en cas de caprices de la météo.

Lors du débriefing qui réunissait les représentants de la commune et de l’EVAM présents ont qualifié l’expérience de « positive ». Joël Delacrétaz, garde forestier en chef de Baulmes, a souligné « l’efficacité, la discipline et le courage des migrants ». Une mention particulière a été décernée aux Tibétains « qui ont affronté sans fléchir les rigueurs hivernales ». 

Côté bémols, seuls deux incidents mineurs se sont produits durant les travaux : un migrant, qui n’arrivait pas à s’intégrer au reste du groupe, a été remplacé et un autre a dû renoncer pour des raisons de santé. Les représentants de L’EVAM ont aussi reconnu qu’ils ont démarré un peu trop vite les TUP de Baulmes, ce qui a engendré un léger déficit d’encadrement des migrants sur le terrain et quelques problèmes concernant les repas.

Mais retenons globalement que les enseignements apportés par le TUP de Baulmes démontrent que cette expérience s’est avérée utile pour améliorer l’organisation des autres TUP mis en œuvre à travers le canton de Vaud.

Mouldi Epars Ben Fadhila, responsable des TUP a, quant à lui, évoqué avec satisfaction le cas d’un migrant des TUP de Payerne qui s’est fait remarquer par son employeur. Ce dernier envisage même de l’engager.

Abdel-Khader MOUSTAPHA

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

« Les TUP sont bénéfiques pour les migrants, les communes et l’EVAM »


Cécile Ehrensperger, responsable EVAM du secteur Nord-Ouest, nous a accordé une interview après l’apéritif qui a suivi le débriefing.

Voix d’Exils : Quel est le bilan de cette première expérience à Baulmes ?

Cécile Ehrensperger : Le bilan est très positif ! Le TUP était censé durer trois semaines puis il a été renouvelé deux fois, ce qui signifie que la collaboration entre l’EVAM et Baulmes a bien fonctionné. On a répondu à l’attente de la commune.

En quoi a consisté l’encadrement des migrants ?

Ils ont été doublement encadrés. En partie par le responsable des TUP de l’EVAM, Mouldi Epars Ben Fadhila et en partie par les ouvriers de la commune de Baulmes. Au début, les ouvriers étaient perplexes, puis ils se sont rendus compte que les migrants s’en sortaient très bien.

Y a-t-il des débouchés pour les migrants qui ont participé à ces TUP ?

Pas directement. Mais cette expérience leur sera très utile, car elle leur servira de référence ultérieurement. Ils pourront valoriser cette activité lors de leurs recherches d’emploi.

Combien de TUP y a-t-il dans le canton de Vaud ?

Il y en a un Payerne, un à Moudon et un dans la forêt de Lausanne. Les travaux d’utilité publique comprennent aussi le nettoyage des bus, appelé « BusNet » et la gestion des vélos, connu sous l’appellation « Lausanne Roule ». Sans oublier les TUP de la Côte, notamment à Vich, Prangins, Le Vaud, Arzier, Nyon et Gland.

Que pensez-vous des TUP ?

Ils sont utiles pour ceux qui veulent s’intégrer. La plupart des requérants d’asile qui ont participé aux TUP de Baulmes étaient dans la première phase d’intégration qui dure six mois. Mais c’est aussi utile pour ceux qui ont été déboutés, car le fait de s’occuper permet de mettre de côté ses problèmes. En conclusion, je dirais que ces TUP sont bénéfiques pour la commune, pour les migrants et pour l’EVAM.

MAK