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Une famille risque d’être démembrée par les accords de Dublin

Photo: rédaction vaudoise de Voix d'Exils

Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Vaud – le collectif R dénonce le renvoi d’une femme enceinte

Le collectif R a organisé le 22 février une conférence de presse devant le bâtiment de la Justice de Paix à Lausanne. Cette action symbolique visait à soutenir la famille Famaouda* menacée de renvoi en Italie et à dénoncer plus généralement les mesures de contrainte qui frappent les requérants d’asiles dits « Dublin ».

Le collectif R lutte depuis 2014 dans le canton de Vaud contre le durcissement de la loi sur les étrangers et les accords de Dublin et a dénoncé le 22 février dernier la décision de renvoi en Italie de la famille Famaouda comptant cinq enfants dont la mère est enceinte.  Assignée à résidence pour le moment, la mère et ses cinq enfants doivent rester dans leur structure d’accueil où la police est susceptible d’intervenir à n’importe quel moment.

Des droits fondamentaux « violés »

Des mesures de contraintes que le collectif R considère se multiplier et frapper des personnes vulnérables telles que des femmes enceintes, des mères de familles et leurs enfants. Une condamnation renforcée par le fait que dans le cas de cette famille « Leur seule demande était pourtant de pouvoir déposer une demande d’asile en Suisse, où les frères et sœurs de Monsieur, ainsi que sa mère, résident depuis plusieurs années ».

Des requérants d’asile ont ensuite pris la parole pour témoigner de leur situation et du risque imminent d’expulsion qu’ils encourent. Les renvoyer au motif qu’ils sont soumis aux accords de Dublin relèvent d’une « violation de leurs droits fondamentaux » d’après le collectif R. Tout au long de la conférence, il a appelé le Canton de Vaud « à cesser ces violations graves » et la société à « accroître la désobéissance civile ».

Des personnalités s’expriment

Plusieurs personnalités politiques vaudoises ont soutenu l’acte de dénonciation mis en place par le Collectif R. Notamment Luc Recordon, avocat et ancien Conseiller aux Etats, ou encore Manuel Donzé, député et conseiller communal PDC qui estime que « derrière le mot réfugié, il y a des hommes, des femmes et des familles qui souffrent et qu’il faut défendre tout en ayant un débat d’idées ». Le mot de la fin est revenu au collectif R qui soutient que « si les migrants perdent leurs garanties démocratiques, ce sont nous aussi citoyens qui perdons nos garanties ».

La réponse des autorités

Interviewé par le quotidien 24 heures le 22 février dernier, Stève Maucci, chef du Service de la population du canton de Vaud (SPOP), explique que « la grossesse n’est pas considérée comme une maladie, à moins qu’un certificat médical fasse état de problèmes de santé spécifiques ». Quant à l’assignation à résidence, elle « ne concerne que les heures de nuit, de 22h à 7h du matin ». Et de conclure que les personnes renvoyées « ne sont pas livrées à elle-même » car « elles peuvent bénéficier de l’assistance du Service social international (SSI) ».

 

Le Collectif R raconté par un ancien rédacteur de Voix d’Exils

 affiche« R comme Collectif », c’est le nom du film documentaire qu’a réalisé Keerthigan Sivakumar, ancien membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils et réfugié politique en Suisse qui s’intéresse aux motivations des militants et militantes qui s’engagent en faveur des réfugiés. Réalisé dans le cadre de son diplôme de designer en communication visuelle à l’Ecole romande d’art et de communication (Eracom), Keerthigan a reçu le prix du mérite de la RTS en janvier de cette année. Ce film-documentaire sera projeté le mercredi 8 mars à 18h30 au refuge Mon-Gré (Boulevard de Grancy 19, Lausanne). Mais aussi dans d’autres villes suisses dont les dates de diffusion sont disponibles sur ce lien: InfoTour_FR

 

*Nom d’emprunt

Niangu N. et Nicolas K.

Membres de la rédaction vaudoise de voix d’Exils

 

 




Aram Karim : le miraculé de Dublin ?

Renens, mardi 3 mai 2016 Portrait d'Aram Karim, photojournaliste irakien et réfugié en suisse à Renens Quotidien de La Côte / Sigfredo Haro

Renens, mardi 3 mai 2016
Portrait d’Aram Karim, photojournaliste irakien et réfugié en suisse à Renens
Quotidien de La Côte / Sigfredo Haro

Le photojournaliste kurde-irakien Aram Karim devait quitter la Suisse lundi 10 mai, pour la France. Mais son vol spécial ne l’a finalement pas emporté dans les airs. Intervention divine ou couac organisationnel ? A chacun sa réponse.

A la fin du mois de mars, Aram Karim reçoit une lettre le sommant de retourner en France : pays où il a déposé sa première demande d’asile, ce conformément aux accords de Dublin. Un plan de vol est organisé par le Service de la population du Canton de Vaud (SPOP) qui prévoit de le parachuter à Marseille avec une escale à… Bruxelles.

Retour à la case départ

Lundi 10 mai, deux policiers en civil viennent comme prévu à 4 heure 30 du matin pour embarquer Aram Karim et l’emmener à l’aéroport de Genève-Cointrin, sans toutefois le menotter. Or, une fois sur place et après une longue attente, il apprend que l’Etat Belge refuse de le laisser entrer sur son territoire. Ne pouvant embarquer dans l’avion, il est alors renvoyé seul au Service de la population du Canton de Vaud (SPOP) pour recevoir un nouveau « papier blanc » d’une validité de quelques jours et un nouveau plan de vol pour Marseille au départ de Zürich prévu demain, le jeudi 20 mai. Aram aura à peine le temps de fermer l’œil cette nuit car les agents l’embarqueront à 2 heures du matin.

Aram le miraculé de Dublin. Auteur: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d'Exils

Aram le miraculé de Dublin. Auteur: Giorgi, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

Un autre destin que Dublin ?

Aujourd’hui, Karim Aram se sent toujours dans une insécurité absolue face à son avenir. « J’ai peur, car si la Suisse me renvoie à Marseille, la France va ensuite me déporter en Irak où j’ai des gros problèmes. » Néanmoins, ce couak miraculeux lui permet de continuer nourrir le rêve d’un meilleur destin que celui qui lui a été tracé par les accords de Dublin : « J’espère toujours rester ici en Suisse, parce que j’aime ce pays et j’ai déjà des amis ici qui ne veulent pas me voir quitter la Suisse. Je souhaite que le Secrétariat d’Etat aux migrations revienne maintenant sur sa décision de m’expulser en France.»

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Aram Karim. Photo: Omar Odermatt

Aram Karim. Photo: Omar Odermatt

 

 

 

 

 

 

 

 

 




Pour le renforcement des droits humains au Sri Lanka et la protection des requérants en Suisse

Logo de la campagne d'Amnesty International

Logo de la campagne « Protection, vérité et justice pour la population sri-lankais »

Amnesty International, en collaboration avec la Société pour les peuples menacés et l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR), a lancé la campagne «Protection, vérité et justice pour la population sri-lankaise». Une pétition et un documentaire entendent sensibiliser la population suisse à la situation délicate dans laquelle se trouvent les réfugiés tamouls.

Quatre ans après la fin de la guerre civile entre les forces gouvernementales et les Tigres tamouls, la situation des droits humains au Sri Lanka reste alarmante. 26 ans de conflit armé ont laissé des traces profondes et la paix a un goût amer. Selon Amnesty International «Le gouvernement refuse toujours qu’une enquête indépendante soit menée sur les crimes de guerre commis par l’armée et les Tigres tamouls. Les voix critiques sont menacées, emprisonnées ou victimes de disparitions forcées.»

Soupçonnée d’entretenir des liens avec les Tigres tamouls, la communauté tamoule est la plus touchée par ces violences. C’est pourquoi les Tamouls de Suisse vivent dans la crainte d’être renvoyés au Sri Lanka. En 2011, un arrêt du Tribunal administratif fédéral prétendait que toutes les régions tamoules du Sri Lanka étaient en sécurité ce qui justifiait des expulsions. Entre temps, et au vu des risques encourus suite au renvoi et à l’arrestation de plusieurs personnes lors de leur arrivée sur le sol sri-lankais, la Suisse a provisoirement suspendu les renvois.

Mais cela ne suffit pas. Amnesty International, l’OSAR et la Société pour les peuples menacés dénoncent la violation des droits humains, l’absence d’enquête fiable sur les crimes de guerre et la situation des requérants d’asile en détresse. Ces organisations ont lancé une pétition afin que la Suisse s’engage pour le renforcement des droits humains au Sri Lanka et la protection des requérants.

La campagne prévoit encore la projection d’un documentaire sur les crimes de guerre commis pendant la dernière phase de la guerre civile en 2009 : « No Fire Zone : Les champs de la mort du Sri Lanka » (2013). Prévue le 4 novembre à 18:30, au Casino de Montbenon, à Lausanne, la séance est gratuite et sera précédée d’un cocktail sri-lankais, occasion d’une rencontre avec la communauté sri-lankaise de Suisse romande.

Pour mieux comprendre la situation de la grande communauté sri-lankaise, composée pour la Suisse de 50’000 personnes dont 22’000 naturalisés, Voix d’Exils a interviewé David Cornut, coordinateur de campagne d’Amnesty International, et vous propose de partager l’histoire de Vignesh qui explique comment il a évité in extremis d’être renvoyé au Sri Lanka après avoir été débouté.

Interview de David Cornut, Coordinateur de la campagne «Protection, vérité et justice pour la population sri-lankaise» d’Amnesty International

David Cornut et

Ganimete Heseti et David Cornut

Voix d’Exils : Quel est le but principal de votre campagne ?

David Cornut : Amnesty International veut dénoncer la situation qui prévaut au Sri Lanka, un pays qui viole les droits humains, est coupable de persécutions, de tortures et d’atteintes à la liberté d’expression. Pourtant, la Suisse considère le Sri Lanka comme un pays sûr. Des accords de facilitation des réadmissions entre la Suisse et le Sri Lanka sont actuellement en cours. Or, les renvois dans un pays qui n’est pas sûr sont complètement interdits par la loi suisse.

Pourtant, le gouvernement suisse a décidé de stopper l’exécution de renvois vers le Sri Lanka…

Cette mesure est provisoire et ne suffit pas. Amnesty demande que la Suisse stoppe tous les renvois sur le long terme, et pas seulement de cas en cas, tant que la situation au Sri Lanka n’est pas sûre pour tout le monde.

Comment peut-on aider la population du Sri Lanka?

Il faut faire toute la lumière sur les crimes de guerre et rendre la justice dans les deux camps : l’armée officielle et les Tigres tamouls. Grâce aux pressions politiques et économiques de la communauté internationale, qui observe en permanence le Sri Lanka, la situation de la population sri-lankaise va pouvoir changer. L’Inde, par exemple, a passé une résolution sur la violation des droits humains au Sri Lanka. Et l’inde est un partenaire important.

Quelles sont les chances de succès de votre campagne ?

L’arrêt – même provisoire – des renvois au Sri-Lanka est un premier succès. Maintenant, on a besoin que les gens signent la pétition pour la Suisse. On a besoin que les gens parlent du Sri Lanka, car le pire c’est le silence. C’est important que l’opinion publique pense au Sri Lanka autrement que comme une destination pour passer des vacances. Et aussi, pour que la population suisse sache qui sont les Tamouls.

A votre avis, quelles seront les réactions du gouvernement du Sri Lanka vis-à-vis de votre campagne ?

Il est difficile de faire des pronostics… Le gouvernement du Sri Lanka est très sensible à la critique. Il essaie de se construire une nouvelle image et il a essayé d’empêcher la projection du film «No Fire Zone : Les champs de la mort du Sri Lanka» à Genève.

Propos recueillis par Lamin et Sara Pages

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

Vignesh, débouté Sri-Lankais, évite in extremis d’être renvoyé de Suisse

Vignesh*, 25 ans, est un demandeur d’asile Sri-Lankais. Arrivé en Suisse en 2009, il a reçu une décision négative à sa demande d’asile à deux reprises, et aurait dû être renvoyé au Sri Lanka le 8 août dernier.

Mis sous pression, Vignesh appose sa signature pour l’obtention d’un passeport provisoire valide pour trois jours et, de manière inattendue, se voit remettre immédiatement un ticket de vol pour le 8 août avec l’ordre de se présenter à l’aéroport de Cointrin à Genève pour son rapatriement.

Lorsque le jour du vol arrive, il ne se présente pas à l’aéroport. Il se cache dans différents lieux : chez des amis, à la gare ferroviaire de Genève ou dans un arrêt de bus, ce par temps froid comme par temps chaud.

Durant la même période, deux familles renvoyées par le canton de Saint Gall sont arrêtées sur le sol sri-lankais. Suite à ces événements, le gouvernement suisse décide de geler immédiatement tous les rapatriements des ressortissants Sri-Lankais.

Vignesh prend connaissance de cette nouvelle, en parle à un avocat social, se rend au Service de la population du canton de Vaud (SPOP), et demande à nouveau l’aide d’urgence. Le SPOP refuse de répondre favorablement à sa demande, car il n’a pas été notifié de la décision de l’Office fédéral des migrations (ODM) et lui reproche de séjourner de manière illégale en Suisse à partir de la date arrêtée pour son renvoi.

Un jour plus tard, le SPOP prend contact avec son avocat pour l’informer qu’il entre en matière à propos de l’octroi de l’aide d’urgence. Ce retournement de situation est tout à fait exceptionnel par rapport à la situation des Sri-Lankais déboutés résidant en Suisse et témoigne de la force de la décision de l’ODM. A nouveau, Vignesh est logé dans l’abri de la protection civile où il séjournait auparavant et, de surcroît, il a obtenu un permis N.

Que lui serait-il arrivé s’il avait été renvoyé le jour prévu au Sri Lanka ? Le gouvernement suisse affirmait à l’époque être en mesure de conserver le contact avec les personnes renvoyées. Dans les faits, ce contrôle s’est avéré très difficile à mettre en œuvre, en particulier en dehors de Colombo, la capitale, à fortiori après que plusieurs mois se soient écoulés depuis la date du renvoi. Mentionnons également qu’une loi anti-terroriste promulguée par le gouvernement sri-lankais menace potentiellement quiconque appartenant à la diaspora sri-lankaise, dont les membres sont suspectés presque systématiquement de collaborer avec les Tigres tamouls. La suspicion concerne, en particulier, les personnes provenant de Suisse ; et celles-ci s’exposent à des peines d’emprisonnement de 12 ans au minimum.

Pour l’heure, Vignesh est satisfait de sa situation et espère pouvoir rester en Suisse. Il pense qu’il obtiendra un statut de réfugié ou que son autorisation de séjour temporaire sera prolongée sur le long terme, étant donné que la situation au Sri Lanka met en danger les populations tamoules. Il est également persuadé que le gouvernement et le peuple suisses comprennent aujourd’hui la dangerosité de la situation qui règne dans son pays.

L. et S.P.

*Nom d’emprunt

Informations

NO FIRE ZONE : LES CHAMPS DE LA MORT DU SRI LANKA, documentaire, 2013, Vo/St.fr, Callum Macrae

Affiche du film "No fire zone"

Affiche du film « No fire zone »

Présenté par Amnesty International, ce film braque les projecteurs sur les crimes de guerre commis pendant la dernière phase de la guerre civile, en 2009. Le documentaire, dont les réalisateurs ont été nominés au Prix Nobel de la Paix, a provoqué une vive émotion lors de sa projection en marge du Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Avec une introduction de Manon Schick, directrice d’Amnesty International Suisse  et Namasivayam Thambipillai, conseiller communal de la ville de Lausanne.

Quand      4.11.2013

                      18h30 Cocktail sri lankais, 19h00 Film

Où               Casino de Montbenon – Salle des Fêtes

                      Allée Ernest-Ansermet 3

                      1003 Lausanne

                      m1: Vigie; m2, LEB: Lausanne-Flon; tl 3, 6, 21: Cécil

Entrée      Entrée libre – inscription préalable : info@amnesty.ch

                      Scènes choquantes, destiné à un public adulte.