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Phobie du printemps

Une frappe de l’aviation israélienne menée le 10 octobre à Gaza City a détruit trois immeubles résidentiels se trouvant à 150 mètres de la « tour Palestine ». Source: TV Al Araby. Image sous licence creative commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported.

Palestine : quand l’espoir est empêché

Wael Afana est Palestinien. Ancien rédacteur de Voix d’Exils, il est aujourd’hui installé en Egypte.

Toujours en contact avec notre équipe, il nous a envoyé un poème, en mai dernier, intitulé «Phobie du printemps», dans lequel il énonce toutes les occasions qu’il a d’éprouver de la peur.

Un mois tout juste après l’embrasement de sa région d’origine, l’automne venu, son texte garde tout son sens.

 

Franchement je vous le dis :

J’ai l’audace d’admettre que je suis devenu un lâche.

J’ai peur du bulletin d’informations et du chagrin qu’il porte !

J’ai peur des dernières nouvelles sur le Liban !

J’ai peur d’un SMS sans adresse.

J’ai peur de l’odeur des fleurs.

J’ai peur du bruissement des arbres.

J’ai peur que mon téléphone sonne !

J’ai peur de me taire !

Je tremble quand la sonnette retentit !

Je suis inquiet quand personne ne frappe à ma porte!

J’ai peur de la voiture de police et de ses phares.

Des ambulances et de leurs bruits.

Si je monte dans un avion, j’ai peur qu’il ne décolle pas !

Et s’il décolle, j’ai peur qu’il tombe !

Et s’il atterrit sans encombre, j’ai peur des douaniers !

J’ai peur de dormir à cause des cauchemars !

Et si je me réveille,

J’ai peur du jour et des malheurs qu’il apportera !

J’ai peur du présent

Et j’ai encore plus peur de l’avenir.

J’ai peur de la faim et de la soif !

J’ai peur d’être sans abri et de ne pas trouver de toit pour m’abriter.

J’ai peur de tomber malade et qu’aucun hôpital ne puisse me soigner.

J’ai peur de pleurer, personne ne peut m’aider…

J’ai peur d’écrire par peur du glissement de mon stylo.

Et j’ai peur de me noyer dans la mer de mon encre !

Ils ont dit : Vous êtes une personne malade.

J’ai dit : Je suis plutôt un Palestinien avec une phobie du printemps.

 

Wael Afana,

Ancien membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

 




Une hirondelle au printemps

Loin, au-delà des frontières

La Suisse est le pays où – hormis la Géorgie – j’aurais voulu naître et je suis reconnaissante pour tout ce qu’elle m’apporte. Mais je suis ici comme une hirondelle aux ailes brisées qui s’envolera sûrement un jour vers sa Géorgie et emportera avec elle un grand amour pour la Suisse.

Je suis au bord du lac et j’ai des larmes aux yeux. Je pense à ma patrie, ma Géorgie. J’erre quelque part au loin, là où le soleil couchant épouse les rayons des vagues. Je murmure aux rayons l’amour indicible que je porte pour mon pays et ma famille.

Qu’est-ce que c’est la patrie ?

Pour moi, la patrie c’est le soleil, la mer, la lune, les étoiles, les montagnes, l’air que nous respirons, l’eau que nous buvons, l’amour que nous ressentons. C’est la joie, la douleur, le désir, c’est un mélange de tous ces sentiments.

Je suis arrivée en Suisse il y a 6 ans et depuis je n’ai même pas mis les pieds sur ma terre natale. Je vis dans un pays où j’ai tout ce dont j’ai besoin, dans un pays où beaucoup de personnes rêvent de vivre. Je devrais être très heureuse n’est-ce pas ? Je suis heureuse d’être ici mais il me manque un bout de bonheur, ce qu’on appelle la nostalgie de la patrie. Ici, c’est le paradis en enfer pour moi, et ma pauvre Géorgie est l’enfer au paradis !

Le soleil se lève ici aussi, mais il n’est pas aussi brillant et chaud que dans mon pays natal. Ce beau lac Léman ne peut pas me calmer comme ma mer Noire déchaînée là-bas. Et ces fabuleuses Alpes ne peuvent me remplir d’énergie et me donner un sentiment de liberté comme les immenses montagnes du Caucase de ma Géorgie le ferait.

Je n’avais jamais imaginé qu’après tant d’années, je ne pourrai pas y retourner au moins quelques jours pour voir ma famille, mes amis et le village où j’ai passé les plus belles années de ma vie, où j’ai beaucoup de beaux souvenirs, où était mon grand-père le plus cher qui m’attend toujours. Chaque printemps, il se réjouissait de m’accueillir avec impatience et que vole sa première hirondelle. Je passais toutes mes vacances avec lui. Cela fait déjà plusieurs printemps que je ne peux même pas me rendre au cimetière dans lequel il repose pour fêter l’arrivée du printemps.

On dit qu’il n’y a pas d’immigré plus triste sur Terre qu’un Géorgien, que les Géorgiens aiment leur patrie d’une manière fusionnelle. Je pensais c’était exagéré jusqu’à ce que je devienne moi-même une immigrée et que j’éprouve le même sentiment.

Aujourd’hui, je peux sincèrement dire que nous, les Géorgiens, nous portons l’amour de notre pays dans le cœur. Pour nous, la patrie est partout et en tout. Les Géorgiens prient, travaillent, chantent, dansent pour leur patrie. La table géorgienne commence toujours par un toast à la Géorgie et à ses racines. Pour nous, nos racines, nos ancêtres et nos traditions sont très importants et c’est probablement pourquoi les Géorgiens – peu importe où ils vont – reviennent toujours à leurs racines.

Depuis le jour où je suis arrivée ici, je peux dire que la Suisse est le pays où – hormis la Géorgie – j’aurais voulu naître. C’est un pays parfait et je suis reconnaissante pour tout ce qu’il a fait pour moi. Mais je suis ici qu’en étant une hôte temporaire, comme une hirondelle au printemps qui s’envolera sûrement un jour vers sa Géorgie et emportera avec elle le plus grand amour pour la Suisse.

Kristine Kostava

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Le printemps arrive enfin

 

Le printemps. Photo: rédaction valaisanne / Voix d’Exils.

N’oubliez pas de le célébrer !

Mars annonce le renouveau

Des branches printanières colorées au sommet des Alpes

Nous souhaitons que les jours sombres du coronavirus disparaissent derrière ces fleurs épanouies

Si nous voulons ressentir l’esprit du temps, semons une graine,

Les graines des peuples

Que ce soit une fleur de Norouz!

 

Nürten Kirmizgül

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils