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Les rêves morts

Auteur: Harith Ekneligoda / Voix d’Exils.

Un poème de Khaleda Alzobi

Nous avons traversé la calamité

Connu les larmes, la nudité

Nos pieds nus

Ecorchés sur les épines de la vie

Sous les coups de la douleur

Les larmes tombent de mes yeux

Devant les décombres de destruction

Parmi les cadavres

Sous le rire des imbéciles

Ma voix étouffée

Par les cris des endeuillés

Mon cœur est lourd et oppressé

Est-ce son dernier battement ?

Il essaie de continuer

De se relever

La vie va-t-elle me donner encore une chance ?

Khaleda ALZOBI

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Déclaration d’amour à ma ville d’accueil

Photo: Omar Odermatt / Voix d’Exils.

Lausanne: son lac, son élan de jeunesse et ses trésors culturels

Lausanne

Tu t’allonges autour d’une montagne depuis plus de 8000 ans

Au bord du lac de Léman, tu es une vraie dame

Avec tes quartiers verts

Et le CHUV pour soigner les malades

Avec tes Hautes Écoles et tes bibliothèques

Tu as rempli le lit plein de jeunesse

Avec des vues étonnantes, des plantations

Avec l’ivresse du vin et de l’alcool

Avec des clubs et des restaurants pleins

Avec tes constructions modernes

Sous le chant des oiseaux et les sirènes des navires

Sous les rythmes de la musique de rue

Sous les chuchotements des amoureux

Et sous la houle des vagues du lac aux heures tardives de la nuit

Tu as enfreint les lois du temps

Les siècles passent, tu es toujours jeune

De tous côtés, tu es en plein essor, belle ville olympique

A bras ouverts tu les as étreints

Le savant, l’ouvrier, l’agriculteur, le scientifique, le visionnaire

Les fugitifs, les malades, les malheureux, les démunis

Pour eux la nuit, tu brilles comme la lune

Certains t’appellent grand-mère et d’autres mère

Combien de passagers as-tu changé ?

Chaque jour je marche dans tes rues Lausanne,

Quand la curiosité me taquine

Tes musées me donnent des réponses

Dans chaque quartier comme symbole de vie

Je me retrouve près d’une fontaine.

Masar Hoti

Ancien membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




Aujourd’hui, c’est la fête des mères

Aimez vos mères, prenez soin d’elles!

Pour chaque personne, sa mère est la plus merveilleuse du monde. Pour moi, ma mère a toujours été et la plus gentille, la plus belle, la plus attentionnée et la plus forte.

Si votre mère est en vie, vous êtes la personne la plus heureuse du monde!

Profitez de chaque jour à ses côtés. Appréciez chaque instant sans le perdre de vue. Profitez de sa compagnie. Donnez-lui de l’amour, de l’attention et des soins… Ne manquez pas les moments heureux, le temps passe inexorablement…

Aimez-la aujourd’hui pour que demain il ne soit pas trop tard.

J’ai écrit ce poème en tchétchène à ma mère il y a vingt ans. Lorsque j’étais étudiante, je vivais loin d’elle et elle me manquait beaucoup.

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Ma chère Maman

Je n’ai personne de plus doux que toi, ma douce Maman

Je n’ai personne d’aussi bon que toi, ma bonne Maman

Plus belle que toi, je n’ai personne, ma jolie Maman

Vis longtemps, j’ai besoin de toi pour toujours Maman

Ne dis pas que tu es vieille, ma jeune Maman…

Sur tes joues le rose ne s’est pas estompé, Maman

Ne dis pas que ta tête est couverte de gris, ma belle Maman,

C’est juste la tristesse qui a saupoudré tes boucles, ma chère Maman

Souris plus souvent, ma gentille Maman,

Tresse la tristesse dans ta longue tresse, Maman…

Depuis l’enfance, entourée de chagrin,

Ton destin n’a pas été facile, mа courageuse Maman

Je suis heureuse tant que tu respires, Maman

Ta santé est ma richesse, Maman

Ne pas te voir est une épreuve terrible, Maman

Mon cœur est rempli d’amour pour toi, Maman

Mon cœur bat pour cet amour, ma chère Maman…

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A propos de ma mère

Son nom était Napsat (l’orthographe correcte de Nafisat). Un nom qui a des racines arabes et qui signifie dans de nombreuses langues du Caucase: « gracieux », « sophistiqué », « précieux ».

Elle n’était pas grande, elle était mince, avec de longs cheveux épais et bouclés, des yeux bruns et une peau blanche.

Depuis l’enfance, elle avait un esprit extraordinaire. Les gens plus âgés lui demandaient des conseils parce qu’elle était sage.

Ce ne sont pas de petites épreuves qui tombèrent sur ses fragiles épaules.  Sa vie fut pleine de chagrin et de souffrance.

Cependant, derrière ses fragiles épaules, elle cachait un courage et une résilience indescriptibles avec lesquels elle a résisté aux coups du destin.

Expulsion de la patrie vers les steppes froides du Kazakhstan

Ma mère a eu une enfance très difficile. Elle avait quatre ans lorsqu’elle et sa famille ont été expulsés de leur pays d’origine avec tous les Tchétchènes sur ordre de Joseph Staline (alors secrétaire général de L’URSS) vers l’Asie centrale et le Kazakhstan.

Le matin glacial du 23 février 1944 a laissé dans sa mémoire toute sa tragédie:

« C’était une matinée terrible » m’a raconté ma mère.

« Tout le monde paniquait… De la rue venaient les cris des voisins. Des soldats armés de mitrailleuses et accompagnés de chiens étaient partout, ils chassaient tout le monde hors des maisons à la hâte .

Nos parents, moi, mes deux sœurs aînées et mon petit frère nouveau-né avons commencé à nous habiller dans la précipitation. Maman essayait de calmer le bébé qui pleurait, les sœurs aînées ont rassemblé de la nourriture dans un paquet et moi, j’ai regardé le soldat qui se tenait dans l’embrasure de la porte avec un gros chien. Les soldats ont dit quelque chose en russe, ils exigeaient d’une voix imposante, mais peu de Tchétchènes comprenaient le russe et ce que les soldats attendaient d’eux…

Papa a essayé de découvrir ce qu’il se passait et a compris que, sur ordre de Staline, tous les Tchétchènes seraient expulsés pour trahison.

Comment peut-on nous expulser pour trahison? demanda-t-il.

Comment est-ce possible alors que tous les hommes en bonne santé – jeunes et vieux – sont au front depuis les premiers jours du début de la Seconde Guerre mondiale? Quand tant de personnes sont mortes en défendant la patrie… Il répétait encore et encore : « Comment est-il possible de nous expulser? »

Un malentendu… une erreur ?

Beaucoup se posaient la même question ; ils finissaient par penser qu’il devait s’agir d’un malentend… d’une erreur.

De nombreux Tchétchènes ont pensé que les autorités soviétiques voulaient leur annoncer des nouvelles importantes et qu’ensuite tout le monde rentrerait à la maison. Mais personne ne pouvait penser que tout le peuple, y compris les femmes, les enfants, les personnes âgées et même les malades, seraient expulsés de leur maison et de leur patrie.

Ils ont tous été forcés de quitter leurs richesses, leur bétail, leur maison – tout ce qui avait été acquis par un travail éreintant pendant de nombreuses années – pour repartir les mains vides. On ne pouvait prendre qu’un peu de nourriture. Les enfants et les personnes âgées pleuraient. Les familles étaient divisées. Certains enfants étaient à moitié nus et sans parents. Un père était allé rendre visite à des proches, une mère était allée au magasin. Après tout, personne ne savait que ce matin-là allait être si fatal…

Tous les habitants et toutes les habitantes ont été chassés des rues, conduits à la gare et forcés de monter dans des wagons froids qui étaient destinés au bétail.

Quiconque refusait de se conformer aux ordres était abattu sur place.

C’était un cauchemar.

Tamara Akhtaeva

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Dans le sillage d’Orphée

 

Voix d’Exils participe à l’édition 2021 du Printemps de la poésie

Partis du Kosovo, d’Albanie et de Colombie, Masar Hoti, Elvana Tufa et Martha Campo sont des poètes et poétesses migrant.e.s. Leurs œuvres ont été traduites de l’albanais et du castillan. Photographe et cinéaste à Voix d’Exils, Ahmed Mohammed a réalisé des ciné-poèmes sur les rives lausannoises du Léman avec les auteur.e.s. Ces six créations sont réalisées à l’occasion de la 6ème édition du Printemps de la poésie par Voix d’Exils en collaboration avec l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (l’EVAM).

La sixième édition du Printemps de la poésie, qui se déroule cette année du 20 mars au 3 avril, mute en un vaccin: le PrimaPoetica® : « un festival de poésie qui a pris un format covido-compatible certes, mais pas seulement. Nous voulons montrer ce que la résilience d’un écosystème culturel peut amener : des nouvelles idées, des formats originaux, la prise en main d’outils quotidiens pour y faire de la poésie ». 

Découvrez sans attendre les 6 ciné-poèmes de nos trois poètes et poétesses de la série intitulée:  Dans le sillage d’Orphée :

« Miracle / Mrekulli » et « Pour la Paix  / Për Paqe » de Masar Hoti, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Masar Hoti. Ahmed Mohammed / Voix d’Exils.

« Cherche-moi / Búscame » et « Hier / Ayer » de Martha Campo, membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Martha Campo. Ahmed Mohammed / Voix d’Exils.

« L’âme / Shpirti » et « Orphée / Orfeu » d’Agron Tufa, interprétés par Elvana Tufa, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Elvana Tufa. Ahmed Mohammed / Voix d’Exils.

La rédaction de Voix d’Exils

Le Printemps de la poésie

Une 6ème édition covido-compatible du 20 mars au 3 avril 2021

L’Ouest de la Suisse possède désormais un formidable réseau Poésie qui se mobilise pour faire vibrer les villes et les plaines. Pendant une quinzaine de jours, une centaine de partenaires proposent généralement plus de 120 événements sur ce territoire, qui devient une scène ouverte de la poésie contemporaine. Derrière ces chiffres impressionnants se cachent des personnes passionnées, sensibles, engagées. Qui aurait pu croire en 2015 que plus de 500 acteurs uniraient leurs forces et leurs compétences chaque printemps, pour que la poésie devienne accessible à un large public ? Les plus grandes institutions académiques ou culturelles, comme les petites associations, joignent leurs événements dans un même élan. Propulsé par l’Université de Lausanne et une petite équipe dynamique, le Printemps de la poésie est plus qu’un festival, c’est un symbole de vitalité et du rayonnement de la Suisse ouverte, plurielle, numérique, démocratique. Et on le redit encore : la poésie, c’est maintenant, partout et pour tous.

Depuis le début de la pandémie, le festival a pris une modalité de résilience. Faire le dos rond face aux difficultés et s’adapter en apportant un sens de l’innovation et de la convivialité par l’alliance du livre et du numérique.

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Antonio Rodriguez
Directeur artistique et scientifique du festival

 




Le printemps arrive enfin

 

Le printemps. Photo: rédaction valaisanne / Voix d’Exils.

N’oubliez pas de le célébrer !

Mars annonce le renouveau

Des branches printanières colorées au sommet des Alpes

Nous souhaitons que les jours sombres du coronavirus disparaissent derrière ces fleurs épanouies

Si nous voulons ressentir l’esprit du temps, semons une graine,

Les graines des peuples

Que ce soit une fleur de Norouz!

 

Nürten Kirmizgül

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils