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FLASH INFOS #110

Illustration: Kristine Kostava / Rédaction vaudoise

Sous la loupe: L’arrivée massive de réfugié·e·s dans le sud de l’Italie inquiète / France : un jeune exilé retrouvé pendu dans une remorque de camion / Les gendarmes interceptent un fourgon transportant 23 personnes migrantes près de la frontière franco-italienne



L’arrivée massive de réfugié·e·s dans le sud de l’Italie inquiète

InfoMigrants, le 17.05.2022

Mardi 17 mai dernier, un petit bateau de pêche transportant 450 personnes migrantes a accosté à Pozzallo en Sicile. Cet événement est représentatif d’une augmentation massive de la migration sur les côtes italiennes.

Cette augmentation inquiète le gouvernement italien qui a d’ailleurs demandé un renfort militaire européen aux frontières. En effet, les autorités craignent l’augmentation des débarquements en Italie. Le point d’arrivée principal dans le district d’Imbriacola accueille actuellement environ 1’000 personnes alors qu’il dispose d’une capacité d’accueil de seulement 250 places.

De manière générale, les réfugié·e·s arrivent en Italie via la Sicile et Lampedusa, mais aussi via les Pouilles et la Calabre, dans le sud du pays. Selon les chiffres, 14’764 personnes ont débarqué en Italie depuis le début de l’année, contre 13’168 à la même période l’an dernier. Par ailleurs, plus de 4’000 demandeurs et demandeuses d’asile sont arrivé·e·s durant le mois de mai. Environ 17% viennent d’Egypte, 15% du Bangladesh, 11% de Tunisie, 8% d’Afghanistan et 6% de Syrie.

Renata Cabrales

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

France : un jeune exilé retrouvé pendu dans une remorque de camion

RTL INFO, le 11.05.2022

Le 11 mai dernier, une jeune personne exilée a été retrouvée pendu dans une remorque de camion qui se trouvait sur un parking d’une zone industrielle à Marck dans le Pas-de-Calais. Selon le procureur de la région, il est possible qu’il s’agisse d’un suicide.

L’alerte aurait été donnée par d’autres personnes migrantes, après qu’elles ont découvert le corps. Plusieurs décès de personnes en situation d’exil ont été recensés ces derniers mois dans la région, celle-ci étant une zone de transit pour les camions qui se dirigent vers l’Angleterre.

Zahra Ahmadiyan

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Les gendarmes interceptent un fourgon transportant 23 personnes migrantes près de la frontière franco-italienne

InfoMigrants, le 18.05.2022

Le 15 mai dernier, près de Sospel, dans la Vallée de la Roya, la gendarmerie française a contrôlé un fourgon qui transportait au moins 23 personnes migrantes. Le véhicule était guidé par une autre voiture avec deux passeurs à l’intérieur.

Les deux individus ont été arrêtés pour avoir fait traverser illégalement des personnes migrantes par la frontière. Toutes les personnes enlevées venaient de pays tels que le Nigeria, la Turquie ou encore l’Irak. Elles ont été placées sous la responsabilité de la police des frontières.

La Vallée de la Roya est l’un des points d’entrée principaux sur le territoire français pour les personnes migrantes en provenance d’Italie. De très nombreux effectifs policiers y sont mobilisés et les refoulements à la frontière sont fréquents, notamment en raison de l’intensification récente du contrôle aux frontières engagée par la France.

Karthik Neelamagen

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




La fabrication d’un dealer

Daniel Lofredo Rotta "Drug dealer from Golden Gate Park" (CC BY-NC-SA 2.0)

Daniel Lofredo Rotta
« Drug dealer from Golden Gate Park »
(CC BY-NC-SA 2.0)

Le trafic de drogues obnubile les médias et la figure du dealer hante aujourd’hui la population suisse. Qui se cache derrière le dealer posté au coin de la rue ? Quelles sont les raisons qui peuvent pousser à dealer? Comment se sortir de la spirale du trafic de drogues ?

Témoignage exclusif d’un ex-dealer – également rescapé d’un massacre perpétré par les djihadistes de Boko Haram – qui a réussi à s’extraire des tentacules du deal.

Né au sud du Nigeria, plus précisément dans la région de Calabar de parents chrétiens, Edouard a aujourd’hui 40 ans et a suivi dans son pays des brillantes études universitaires couronnées par un diplôme d’ingénieur. Par la suite, il est engagé par une importante société basée au nord du Nigeria. Il s’installe alors dans la ville de Kano et mène une vie très paisible et confortable. Marié et père de trois enfants, il est parmi les membres influents d’une église locale qu’il fréquente chaque dimanche accompagné de sa famille. Jusqu’à ce fameux jour en printemps 2004 où, en plein culte, l’église est attaquée par la secte islamiste nigériane Boko Haram. Le bilan est lourd : l’église est brulée, plusieurs fidèles sont assassinés, des femmes et des enfants sont massacrés, et sur la liste des victimes figure sa belle-sœur !

La route vers l’exil forcé

Édouard, qui ne comprend pas encore les raisons de cette attaque, et encore moins qui sont les assaillants (comme la quasi-totalité des Nigérians à l’époque) réussit à se mettre à l’abri avec sa femme et ses trois enfants. Il se faufile dans la brousse pour regagner son domicile et se rend compte que sa maison a été pillée et brulée, comme la majorité des maisons appartenant aux chrétiens de cette ville à majorité musulmane. Pris de panique, il profite de la nuit et de l’obscurité pour fuir avec sa famille. Il juge alors plus prudent de rejoindre le Niger – pays voisin limitrophe, accessible à pieds et dont le trajet est moins exposé à d’éventuelles embuscades des assaillants – que de se rendre dans sa ville d’origine qui se trouve au sud du Nigeria, ce qui nécessiterait, pour l’atteindre, de traverser tout le nord avec les risques que cela entraîne.

 Talatu Carmen (CC BY-NC-SA 2.0)

Talatu Carmen
(CC BY-NC-SA 2.0)

Traverser le désert et la mer

Ainsi, Édouard se retrouve du jour au lendemain avec sa famille au Niger, et pose ses valises à Agadez, une ville connue comme une véritable plaque tournante de l’immigration vers l’Europe par le désert. Édouard n’a plus assez d’argent pour continuer la route avec sa famille et, surtout, il ne veut pas risquer la vie de ses enfants dans le désert. Il se confie au prêtre de l’unique Eglise catholique de la ville et ce dernier accepte d’héberger ses enfants et sa femme pour «le temps qu’il faudra». Edouard affronte alors le Sahara dans un pick-up 4×4 dans lequel les passagers sont «entassés comme des bagages», avec la peur au ventre d’y laisser sa peau, mais aussi avec l’espoir de se retrouver sur un continent qui, selon lui, respecte les droits de l’homme et où règne la paix. Après une semaine passée dans le désert, le convoi arrive en Libye. Édouard se débrouille pour regagner Tripoli dans un autre pick-up, toujours par le Sahara, pour déjouer les contrôles de police car il est à présent un clandestin. Une fois à Tripoli avec ses compagnons de fortune, ils sont conduits dans des ghettos où habitent d’autres Africains tous dans l’attente de traverser la mer pour l’Europe… «l’Eldorado».

Six mois plus tard, à Tripoli, Édouard a déjà réussi à rassembler la somme d’argent exigée par le passeur, lui qui n’avait plus rien à son arrivée, notamment en travaillant dans des chantiers. Il embarque en pleine nuit dans une pirogue de fortune avec une centaine d’autres immigrés clandestins venus des quatre coins du monde (dont l’Afrique de l’ouest, le Maghreb et l’Asie). Après avoir passé toute une nuit d’angoisse en pleine mer, ils arrivent enfin à l’île italienne de Lampedusa. Ils sont arrêtés par les garde-côtes italiens et transportés dans un camp de réfugiés. Certains sont emmenés à l’hôpital. Il décide alors de quitter l’Italie car, dit-il, «je voulais aller au cœur de l’Europe, là où je raconterai mon histoire sans peur d’être rejeté, au pays connu de par le monde pour son hospitalité légendaire, au pays connu pour son respect des droits de l’homme, le pays qui symbolise le respect des droits des réfugiés : la Suisse!»

L’Eldorado Suisse…

Il arrive en Suisse et dépose une demande d’asile dans le centre d’enregistrement basé à Vallorbe. Il est ensuite transféré dans un centre pour demandeurs d’asile du Canton de Vaud. Là-bas, le jeune ingénieur africain sombre dans la dépression ou presque. Après toutes ses tentatives pour décrocher un emploi il baisse les bras. Il s’ennuie à longueur de journées et fait la rencontre de quelques compatriotes. Tous ou presque ne travaillent pas en raison de leur statut. On lui explique que sa demande d’asile ne va pas aboutir, comme la majorité d’entre eux, «car il est Nigérian». Il n’arrive pas à en croire ses oreilles. Il se dit qu’avec ce qu’il a vécu, il mérite la protection de la Suisse: «et puis, c’est mon histoire qui compte et non mes origines» se dit-il en y croyant dur comme fer. Ses compatriotes tentent de lui expliquer qu’ici, ils sont tous «associés à des dealers, à de vulgaires vendeurs de drogues». Quel que soit son parcours académique en Afrique, ici il n’est plus rien. Des propos qui ont le mérite de le choquer. Il met ces allégations sur le compte du fait que la plupart des compatriotes qu’il a rencontré au centre n’ont pas son niveau d’éducation et donc ont peu de chances de s’en sortir. Lui croit avoir plus de ressources… Mais il n’arrive toujours pas à décrocher un travail pour envoyer de quoi vivre à sa famille restée à Agadez à cause de son statut de demandeur d’asile.

(CC BY-NC-SA 2.0) Drugs Elle Kay "Drugs" (CC BY-NC-SA 2.0)

Elle Kay
« Drugs »
(CC BY-NC-SA 2.0)

La tentation

Chaque matin, certains de ses compatriotes sortent du centre et ne rentrent que le soir. Ceux-ci ont de l’argent. Certains envoient «de grosses sommes» pour soutenir leurs familles restées au pays. Edouard reste toute la journée couché. Un matin, il reçoit un coup de fil de sa femme depuis le Niger qui lui annonce une terrible nouvelle : sa fille est tombée gravement malade. Il lui faut urgemment de l’argent pour la soigner, mais il n’a rien pour lui venir en aide. Il essaie de faire un emprunt auprès de certains de ses compatriotes qui sont toujours «bourrés de fric», mais personne ne veut lui donner un coup de main. Ils lui reprochent d’être «un peureux qui ne veut pas prendre de risques, un saint». Un seul lui propose de lui venir en aide, mais avec…cinq grammes de cocaïne. Faudra-t-il «mettre de côté ses valeurs, risquer de perdre sa liberté pour avoir de quoi soigner sa fille?» Cette question taraude son esprit toute une nuit. Le matin suivant, il décide d’accepter l’offre et entre alors dans l’engrenage du deal. Il se retrouve dans le centre-ville de Lausanne pour «tacler» (ndlr : tacler signifie dans le jargon des dealers «accoster les clients de différentes manières»). Avec «une peur olympique au ventre», il réussit à écouler la fameuse marchandise. Lui qui méprisait auparavant les dealers, bizarrement, il prend goût  au «métier». Édouard sent alors qu’il est «transformé par le système».

«Je n’avais jamais imaginé qu’un jour je vendrai de la drogue. Je ne savais même pas à quoi ça ressemblait. A force de chercher du travail en Suisse j’étais prêt à faire n’importe quoi et à laisser tomber ma profession d’ingénieur. J’ai vraiment fait tout ce qui était possible. A force de recevoir des réponses négatives à cause de mon statut temporaire en Suisse, je me suis retrouvé le dos au mur».

Marco Gomes "Crack” (CC BY-NC-SA 2.0)

Marco Gomes
« Crack”
(CC BY-NC-SA 2.0)

La rédemption par la foi

Mais, après des mois de «taclage» sous le soleil, la pluie et la neige; à courir devant les gendarmes en civil, Édouard est fatigué de cette vie gagnée dans l’illégalité. Dans son cœur, il sait que cette vie ne lui convient pas et qu’elle ne reflète pas ses valeurs. Malgré le fait qu’il parvienne maintenant à envoyer régulièrement de l’argent à sa famille, il décide de couper court avec sa vie de dealer ! Il dit être aidé dans cette «difficile décision» par «sa foi en Dieu». Il «s’est rapproché de Dieu», il prie beaucoup et croit fermement que «Dieu à un plan plus propre, plus juste pour lui». Aujourd’hui, Edouard n’a toujours pas une situation stable, il ne vit qu’avec l’aide donnée aux demandeurs d’asile, il a des problèmes pour subvenir aux besoins de sa famille restée en Afrique, mais il vit au moins dans la légalité !

*Nom d’emprunt

FBradley Roland

Journaliste-éditorialiste, contributeur externe de Voix d’Exils




«L’objet de l’exil»

Françoise Kury, initiatrice du projet "L'objet de l'exil". Photo: Voix d'Exils.

Françoise Kury, initiatrice du projet « L’objet de l’exil ». Photo: Voix d’Exils.

Bracelet en or, chaussures, habit traditionnel, Bible, chapelet, guitare sont quelques objets précieux – parmi d’autres – que les requérants d’asile emmènent avec eux dans leur périple jusqu’en Suisse. Dans le cadre du projet «l’objet de l’exil», initié par Françoise Kury, Suissesse d’origine rwandaise, ces objets, ainsi que les photos de leurs propriétaires avec leurs valises, tous requérants d’asile résidant dans le centre d’accueil de Perreux dans le canton de Neuchâtel ont été exposés. L’exposition s’est déroulée le samedi 7 septembre à la salle paroissiale Notre-Dame de la Paix, à La Chaux-de-Fonds.

Françoise Kury, 43 ans, dont 18 passés en Suisse, fait part des motivations qui l’ont poussée à initier le projet «L’objet de l’exil» : «ll y a 18 ans, j’étais à la place des requérants d’asile. L’idée de ce projet m’est venue car je voulais savoir ce qu’une personne, en quittant son pays, amène dans sa valise. Alors j’ai choisi dix personnes de différents pays (Guinée, Somalie, Érythrée, Nigeria, Syrie, Ghana et Kosovo) pour parler de leur parcours. J’ai travaillé sur quelque chose qui leur tenait à cœur: l’objet. Spontanément, avec beaucoup d’émotions, chacun a apporté son objet. Quand on en parle, il leur évoque beaucoup de souvenirs qu’ils ont de leur pays. Ces objets sont attachés à eux et à leur famille – bref à leur vie – et ce sont des choses dont ils ne peuvent pas se séparer».

A travers un objet, estime l’initiatrice du projet «l’objet de l’exil», on peut évoquer beaucoup de détails dans la vie d’un requérant d’asile, doucement, sans brusquer les choses. «J’ai vu que les gens arrivaient à s’ouvrir facilement et à parler de leur parcours et même avec beaucoup d’émotion, beaucoup de sentiments parce qu’avant de venir en Suisse, ils ont passé une vie quelque part. Cela, on ne l’oublie pas et il ne faut justement pas le gommer. C’est une façon de montrer à des gens que chaque personne qui immigre a sa propre histoire qu’il faut respecter et c’est à travers son histoire qu’elle va pouvoir partager et s’intégrer facilement», conclut Françoise Kury.

Témoignages de participants

La guitare de Peter Otubuar. Photo: Voix d'Exils.

La guitare de Peter Otubuar. Photo: Voix d’Exils.

Peter Otubuar, Ghanéen: «Mon objet précieux, qui me rappelle mon pays, c’est ma guitare. J’en joue depuis bientôt 25 ans. La musique, c’est ma passion. Sans ma guitare, je me sentirais perdu et malheureux. Je joue souvent les morceaux qui me rappellent les jours heureux quand j’étais chez moi.»

Adan Ducaale Hajna, Somalien: «J’ai 16 ans et j’ai quitté mon pays très jeune. Je n’ai ni photo de ma famille ni objets. J’ai quitté mon pays sans affaires, donc mes souvenirs sont dans ma tête et dans mon cœur.»

Le chapelet de Rosnaassan Hussein. Photo: Voix d'Exils.

Le chapelet de Rosnaassan Hussein. Photo: Voix d’Exils.

Rosnaassan Hussein, Syrien: «Mon seul objet de souvenir, c’est un chapelet donné par un ami et un short acheté avant de quitter mon pays. Le chapelet est un objet très précieux pour moi, parce que je suis croyant. Donc ce chapelet est devenu un objet qui m’a accompagné pendant mon passage dans ce pays.

James Emma, Nigérian: «Mon seul objet précieux, c’est ma Bible. Ce livre est très important pour moi pendant cette période de ma vie. Je suis attaché à elle, car elle me permet de trouver la force pour continuer à me battre».

Abraham Genet, Erythréen: «J’ai décidé de montrer mon habit traditionnel, car c’est le seul élément qui me tient à cœur. Il me rappelle les plus belles cérémonies que j’ai passées avec ma famille avant de quitter le pays. Cet habit évoque mes beaux souvenirs.»

Les chaussures de Skates de Dragan. Photo: Voix d'Exils.

Les chaussures de Skates de Dragan. Photo: Voix d’Exils.

Skates de Dragan, Somalien: «Le seul objet que j’ai et qui me rappelle mon pays, ce sont mes chaussures avec lesquelles j’ai traversé le désert. Mes chaussures, j’y tiens beaucoup, car je les ai achetées avant de prendre la route, elles ont protégé mes pieds tout au long de mon voyage.»

le braclet en or de Diallo Mamadou. Photo: Voix d'Exils.

Le braclet en or de Diallo Mamadou. Photo: Voix d’Exils.

Diallo Mamadou, Guinéen: «J’ai 21 ans et je vis en Suisse depuis 4 ans. L’objet que j’ai choisi de montrer est un bracelet en or donné par un ami. Il tient une place importante dans ma vie, car chaque fois que je me sens mal, ce bijou me donne de la force.»

Famille Przic Zvonto, Kosovare: «La seule chose que nous avons de très précieuse, ce sont nos enfants. On ne possède pas d’objets amenés de chez nous. Notre fils est notre meilleur souvenir de notre pays, car il est né là-bas. L’objet le plus important pour lui, c’est sa planche à roulettes. Il passe son temps à jouer avec, car il est souvent tout seul pour jouer.»

Paul Kiesse

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Une Miss Diaspora africaine élue en Suisse pour lutter contre l’excision

De gauche à droite:  2ème dauphine, Miss Diaspora africaine, 1ère dauphine

De gauche à droite: 2ème dauphine, Miss Diaspora africaine, 1ère dauphine. Photo: Voix d’Exils.

Le samedi 24 août a été la soirée de la beauté africaine à La Chaux-de-Fonds, dans le canton de Neuchâtel. En effet, dans le cadre de Neuchatoi 2013, un vaste programme d’activités culturelles et sportives organisé dans le but de permettre une meilleure connaissance et une meilleure compréhension entre Suisses et personnes issues de la migration, l’association ivoirienne «Loucha», qui lutte contre l’excision, a organisé la première édition de l’élection de Miss Diaspora africaine en Suisse.

Douze candidates originaires de sept pays africains (Tchad, Cameroun, Mali, République Démocratique du Congo, Guinée, Côte d’Ivoire et Nigeria) ont participé à ce concours de beauté et l’élue est la Congolaise Vanessa Katambayi, une assistante en soins de santé communautaire de 20 ans dont huit passés en Suisse. La 1ère dauphine et la 2ème dauphine sont la tchadienne Ketsia Manitha et la malienne-camerounaise Fatima Fadimatou Sow Linda.

Sensibiliser le public au problème de l’excision

Devant un parterre composé de spectateurs et spectatrices africains et suisses, qui ont rempli aux trois-quarts la grande salle de la Maison du peuple, le jury a désigné la Congolaise Vanessa Katambayi qui s’est distinguée de ses onze concurrentes par son expression orale, les tenues traditionnelles et modernes qu’elle a portées et la maîtrise de la danse traditionnelle congolaise, a précisé l’informaticien togolais Stephane Tora, président du jury. Les candidates ont défilé en tenue traditionnelle africaine, en maillot de bain et en tenue de soirée et ont exprimé leurs ambitions au cas où elles seraient élues. Émue, la Miss Diaspora africaine en Suisse n’a pas manqué d’exprimer ses sentiments : «Ça me fait plaisir d’avoir participé à ce concours. La lutte contre l’excision me touche et je voudrais soutenir les femmes dans ce combat. »

L’association «Loucha», qui signifie «lève-toi» en yacouba, une langue parlée en Côte d’Ivoire et au Liberia, existe depuis avril 2009. Sa présidente-fondatrice – Odile Parel – explique le motif de l’organisation d’un concours de beauté par la communauté africaine vivant en Suisse: «L’idée est de faire passer le message de la lutte contre l’excision en organisant ce concours».  «On n’a pas besoin d’être excisée pour lutter contre l’excision», soutient-elle. En plus de la couronne et d’autres avantages attachés à son sacre, la Miss africaine en Suisse aura droit notamment à un séjour d’une semaine en Côte d’Ivoire.

L’excision en Afrique

L’excision est une mutilation génitale féminine pratiquée couramment en Afrique et qui touche 125 millions de femmes à travers le monde selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF). L’excision est illégale dans presque tous les pays du monde et des ONG luttent pour son abolition. «L’ONG Loucha lutte contre l’excision parce que j’ai été moi-même excisée à l’âge de 9 ans. Aujourd’hui, en Côte d’Ivoire, 42% de femmes sont excisées et continuent de l’être. La Miss Diaspora africaine élue en Suisse sera notre ambassadrice et rencontrera en décembre de cette année la première dame ivoirienne qui préside aussi une association qui s’occupe d’enfants et la Miss Côte d’Ivoire parce que je suis moi-même membre du comité d’élection de Miss Côte d’Ivoire. En tant qu’ambassadrice, la Miss élue en Suisse parlera de l’excision partout où elle sera, même là où elle administre des soins de santé», déclare Odile Parel.

Quid de l’excision en Suisse?

Selon l’UNICEF, l’excision est aussi pratiquée en Suisse et affectait, en 2008, 7000 fillettes et femmes. Depuis le 1er juillet 2012, l’interdiction explicite de l’excision est entrée en vigueur en Suisse. L’article 124 du code pénal suisse condamne «Celui qui aura mutilé des organes génitaux féminins, aura compromis gravement et durablement leur fonction naturelle ou leur aura porté toute autre atteinte sera puni d’une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d’une peine pécuniaire de 180 jours-amende au moins. Quiconque se trouve en Suisse et n’est pas extradé et commet la mutilation à l’étranger est punissable.»

Paul Kiesse

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Un défilé de mode haut en couleurs au Botza

Photo: David Crittin, Voix d'Exils

Photo: David Crittin, Voix d’Exils.

Le 11 juin 2013 fut une journée spéciale pour la communauté du Botza, le principal centre de formation et d’occupation du Valais. Le bruit habituel des outils et des machines a cessé pour laisser la place à d’autres sons comme de la musique, des rires et le claquement des talons hauts: c’était le jour de la mode.

Les femmes qui ont participé aux ateliers de couture de Rarogne, Ardon, Martigny et Saint-Gingolph

Photo: David Crittin, Voix d'Exils.

Photo: David Crittin, Voix d’Exils.

étaient fières de présenter leurs productions lors d’un véritable défilé. Pour une journée – leur journée – elles ont toutes été transformées en top modèles, avec de lumineux maquillages, des coiffures sophistiquées et des robes incroyables.

Les origines de ces femmes, qui viennent de pays tels que la Somalie, l’Erythrée, le Sri Lanka, le Nigeria, le Soudan, la Russie, le Kosovo, la Turquie et le Tibet ont donné une diversité unique aux œuvres présentées. Par ailleurs, une petite fille et deux mannequins hommes ont pris part au spectacle et ont reçu, plus particulièrement la petite fille, bien sûr, de grands applaudissements.

Le programme était un enchantement autant pour les tops modèles d’un jour que pour le public. «C’était merveilleux de voir ces costumes et le style des femmes qui défilaient sur le podium», a déclaré un spectateur érythréen. Un autre observateur provenant du Gabon s’est exclamé: «je voudrais voir un événement aussi surprenant encore et encore ! Cela m’a fait plaisir et je me suis souvenu des robes traditionnelles de mon pays. »

Photo: David Crittin, Voix d'Exils.

Photo: David Crittin, Voix d’Exils.

De même, deux travailleuses sociales, Marylin Duc et Sarah Kesteloot, ont déclaré que le spectacle était une bonne initiative et un moyen d’intégrer les gens dans la société.
Victoria, un modèle nigérian, a souligné que «depuis toute jeune, j’avais le souhait de travailler dans la mode. Étonnamment, mon rêve a commencé à devenir réalité aujourd’hui. C’est la première fois que je faisais face au public dans un défilé de mode et, pourtant, je crois avoir réalisé une bonne performance. J’ai surtout appris que j’avais encore une vie en attendant le résultat de ma procédure de demande d’asile. Je suis vraiment heureuse de cela. »

La top modèle érythréenne Ayesha nous a fièrement dit que: «C’était très stimulant. J’ai passé un bon moment. Je n’oublierai jamais cet événement et le sentiment que j’ai ressenti pendant la manifestation. » Selamawit, une autre top model  érythréenne, a confié que: «C’était une première et cela a changé quelque chose en moi. Je suis maintenant plus confiante et la couture va être mon hobby. Ce fut une bonne expérience pour moi. »

Tous les mannequins d’un jour ont réalisé leurs robes lors des cours de formation dans les ateliers de

Photo: David Crittin, Voix d'Exils.

Photo: David Crittin, Voix d’Exils.

couture. Les styles et les inspirations sont très variés: certaines robes étaient absolument modernes et le public a eu le plaisir d’apprécier des robes traditionnelles africaines ainsi que tibétaines.

Cette journée spéciale laissera une impression lumineuse derrière elle. Vous vous demandez peut-être quand aura lieu le prochain défilé? Si c’est le cas, vous devrez être patient car la réponse est : en 2015 seulement! Le temps nécessaire pour les couturières de renouveler leurs inspirations.

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils