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Silences de l’exil

Photo: rédaction neuchâteloise de Voix d'Exils

Photo: rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils.

Un projet artistique qui interroge la migration par la langue et l´image

Silences de l´exil est un projet artistique qui interroge la migration par la langue et l´image. En juillet et en août 2016, Marina Skalova, écrivain, et Nadège Abadie, photographe, ont proposé des ateliers d´écriture et de photographie auprès de requérants d´asile dans différentes villes suisses. De nombreux textes et images sont nés de cet échange: voici les écrits des participants du centre d´accueil de Fontainemelon, nés d´un exercice d´écriture inspiré par l´écrivain français George Pérec. Une exposition de ce travail aura lieu à C-FAL Genève du 21 octobre au 4 novembre. Un livre est en préparation pour l’année 2017.

Textes collectifs

J’aimerais vivre en Suisse mais pas pour toujours. J’aimerais vivre en Suisse mais avec les papiers. J’aime vivre en Suisse mais j’aimerais avoir des ailes pour aller dans tous les pays et aider les gens qui sont dans des situations difficiles. J’aimerais vivre ici, aller à l’école et travailler comme maçon.

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Je dis NON au racisme et aux racistes.

Je dis NON pour la mort.

Je dis NON pour la guerre.

Je dis NON pour la dictature.

Je dis NON pour l’absence de liberté.

Je dis NON pour acheter un nouveau téléphone.

Je dis NON à la religion.

Je dis NON pour le désespoir.

Je dis NON aux différences de niveau entre les gens.

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Je me souviens, en Libye, je dormais sur une petite route à l’intérieur de la montagne. J’étais très peur. Les gens me disaient, ici, il y a des loups.

Je me souviens avoir dormi dans un camp de réfugiés. Et c’était bizarre pour moi, parce que c’était la première fois. On a quitté la maison le soir et on est arrivés, la nuit, dans un endroit inconnu. Il n’y avait pas de matelas, il n’y avait rien. Tout le monde était par terre. Il y avait des crépitements d’armes partout, les gens couraient dans tous les sens. J’avais la peur de mourir.

Je me souviens, dormir avec mon père et ma mère et mon frère en Afghanistan, et aussi en Iran.

Je me souviens, quand j’étais dans mon village, il y avait des maisons qui étaient construites avec la terre. Tous les frères et sœurs sont ensemble, tous. Il y a un grand rocher près de notre maison et chaque nuit, je vois le même rêve : je m’envole sur le rocher. Je suis content et je me sens comme un oiseau.

Je me souviens, la nuit, j’ai voyagé en Afghanistan. J’ai pris le train. Dans le train, j’ai dormi, j’ai dormi, j’ai dormi. J’ai rêvé que j’arrivais en Suisse. Et après, je me réveille, je suis à Kaboul. Tout le temps que j’étais en Suisse, c’était en rêve.

Je me souviens, il y a deux mois, à Neuchâtel, il y a eu la fête. J’arrive à la gare pour prendre le train et là, deux minutes après, le train était parti. Il est minuit, il n’y a plus le train. J’ai pas dormi et j’ai marché dans la gare, dans la rue, dans la ville, toute la nuit. Jusqu’à matin.

Rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils et étudiants de Fontainemelon