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FLASH INFOS #83

Kristine Kostava / Voix d’Exils

Sous la loupe : Enquête sur l’ouverture à la diversité au sein de la société suisse / Atteinte aux droits fondamentaux des migrant.e.s en Suisse / Sauvetage de migrant.e.s au large de Dunkerque

Enquête sur l’ouverture à la diversité au sein de la société suisse

24 heures, le 28.10.2021

L’Office fédéral de la statistique (OFS) a mené une enquête entre 2016 et 2020 sur la place des personnes migrantes dans la société suisse et l’ouverture de la population à la diversité. Alors que la population croît et se diversifie de plus en plus, l’enquête mentionne que les Suissesses et les Suisses seraient plutôt ouverts d’esprit ; 1,5% de la population adopterait des comportements racistes contre 70% qui les condamnerait. Les parcours de vie individuels seraient le principal facteur de discrimination, de racisme et de xénophobie.

Cependant, des tensions et des hostilités restent présentes, notamment autour de la communauté musulmane. Dans ce rapport, l’OFS mentionne que « c’est moins la personne elle-même que sa religion qui est la cible [des hostilités] ». La diversité au sein de la société suisse représente alors tant une richesse qu’un défi pour le vivre ensemble.

Zoé

Contributrice externe de Voix d’Exils

 

Atteinte aux droits fondamentaux des migrant.e.s en Suisse

Le Temps, le 25.10.2021

Tandis que la Suisse se prépare à la votation du 28 novembre 2021 concernant entre autres l’instauration durable du pass sanitaire et que les manifestations visant à garantir l’égalité de traitement se multiplient, le Parlement a récemment approuvé une mesure « agressive » à l’égard des personnes migrantes. Ces derniers ont l’obligation de se soumettre à un test Covid-19 sous contrainte policière afin de garantir leur renvoi vers le pays dans lequel ils ont transité.

Une politique de deux poids deux mesures qui remet en cause l’application du principe constitutionnel d’égalité faisant partie des droits fondamentaux universels pour toute personne vivant en Suisse.

Hawa Moussa

Contributrice externe de Voix d’Exils

 

Sauvetage de migrant.e.s au large de Dunkerque

24 heures, le 26.10.2021

Dans la nuit du 25 au 26 octobre 2021, deux opérations de sauvetage menées par un remorqueur français ont permis de secourir 71 personnes migrantes en France au large de Dunkerque, dans la Manche, alors qu’elles tentaient de rejoindre l’Angleterre. Tous les naufragé.e.s ont été confié.e.s aux autorités locales.

Entre janvier et août 2021, quelques 15’400 personnes migrantes ont tenté de se rendre en Angleterre par cette voie maritime dangereuse, contre seulement 9’500 en 2020 et 2’300 en 2019. L’augmentation du phénomène de migration par la Manche est significative et démontre la détermination des personnes migrantes, ce malgré les mises en garde des autorités quant aux dangers encourus durant la traversée.

Rachel Blaser

Contributrice externe de Voix d’Exils

Nous remercions chaleureusement les étudiant.e.s de la Haute école de travail social et de la santé Lausanne (HETSL) pour leurs contributions à cette édition n°83 du Flash INFOS qui ont été réalisées à l’occasion d’un atelier dispensé par la rédaction vaudoise de Voix d’Exils entre octobre et novembre 2021.

 




Les transformations de la structure familiale en Europe : un défi pour l’adaptation des familles migrantes

Photo: rédaction valaisanne de Voix d'Exils

Photo: rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Compte-rendu du séminaire sur la transformation de la famille en contextes européen et musulman contemporains de l’Université de Fribourg

L’Institut de recherche et de conseil dans le domaine de la famille (IFF) de l’Université de Fribourg a organisé dernièrement un séminaire* sur la transformation de la famille en contextes européen et musulman contemporains. Objectif numéro 1 : soutenir les familles migrantes parfois déstabilisées par les changements sociaux qui traversent leur société d’accueil.

Le séminaire s’adressait principalement à des réfugiés ayant engagé ou complété un cycle d’études supérieures dans leurs pays d’origine et pouvant jouer un rôle de transmission auprès de leurs communautés. Plusieurs membres de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils figuraient parmi les 25 participants de 17 nationalités différentes issues des cantons de Bienne, Berne, Fribourg, Vaud, Zurich et du Valais. Voici leurs échos ramenés de Fribourg.

La fin de la famille traditionnelle ?

L’évolution culturelle en Europe a complètement bouleversé la structure et l’image de la famille traditionnelle, qui a longtemps été basée sur la formation du couple, suivie de la célébration du mariage, puis de la mise au monde des enfants. Ce n’est plus le cas aujourd’hui car plus d’un enfant sur deux naît hors mariage. Certains enfants assistent même au mariage de leurs père et mère, ce qui constitue un choc culturel pour les familles migrantes provenant des pays où le poids des coutumes est encore important.

La mère au foyer : une figure sur le déclin 

Le modèle de la femme au foyer – caractéristique de la famille traditionnelle – devient plus marginal en Europe. Aujourd’hui, la femme mène de front une vie professionnelle tout en assurant ses responsabilités familiales. Par contre, la mère au foyer, principalement en charge des tâches ménagères, reste le modèle général de la famille migrante.

De nouvelles formes de vie familiale

Alors que la famille traditionnelle est sur le déclin, de nouvelles formes de vie conjugale et familiale voient le jour : les familles monoparentales et recomposées. Le divorce ou la séparation sont devenus aujourd’hui le mode de constitution le plus commun de la famille, alors qu’au début des années 1960, en Europe, une famille monoparentale sur deux résultait du décès d’un des conjoints. Les familles recomposées, c’est-à-dire comprenant un couple et au moins un enfant issu d’une autre union se multiplient sous l’effet des séparations et des remises en ménage. Ces nouveaux modèles familiaux augmentent également au sein de la communauté migrante, ce qui laisse de nombreux points d’interrogation sur l’évolution de cette tendance.

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Commentaire

Les besoins sont clairs : il est nécessaire de préparer le terrain de l’intégration des familles migrantes dans leur nouvelle société. Ce type de séminaire propose une approche intéressante : en effet, une fois formés, les participants ont en mains les outils nécessaires pour faire le pont entre leurs communautés et le pays d’accueil. Un rôle de conseil et d’accompagnement qui portera certainement ses fruits.

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils

*Transformations sociologiques et psychologiques de la famille en Europe organisé par les professeurs Dominik Schobi, Edouard Conte et Meinrad Perrez à l’Institut de recherche et de conseil dans le domaine de la famille à l’Université de Fribourg.

 

 

 

 

 

 

 




« Je suis Charlie » : stop mobilization!

Auteur: nadassfoto "Je suis Charlie" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: nadassfoto « Je suis Charlie », manifestation suite au massacre de la rédaction du journal Charlie Hebdo » (CC BY-NC-SA 2.0)

Is Charlie Hebdo attack new to social phenomena? What are the reasons behind Islamic terrorism? Is freedom of speech a western value? This article attempts to handle these tough questions by giving way to thinking outside the box into which mobilizers are forcefully pushing us.

What shocked me in Paris terror attacks was different from what afflicted a large part of the Occident. Even though much of what I experienced in my life as a free writer would make me identify with humanists and free artists in general, I see in social identification a great part of the problem.

I was stunned by the speed western society mobilized after the 7th of January attacks. This difference in attitudes is due to the fact that I had my secular upbringing in a widely religious society, and I learnt how to deliver, pass and code my messages and my divergent views in an environment that does not acknowledge individuality, human rights, and the freedom of expression. In contrast, Europeans and Americans, generally, think of human rights and freedom of speech as part of their cultural heritage rather than universal values, and tend to think of terrorism as rooted in another culture or other cultures. However, by thinking like that, they are likely to marginalize and exclude a considerable percentage of western citizens who come from oriental origins whether well integrated or not.

I wonder why all those muslims in France feel the need to defend themselves against putative accusation of terrorism as the French law does not convict people of terrorism unless they are complicit in it. In other words, if I were a French Muslim and I trusted the rule of law in France, why would I feel threatened if five million French Muslims turned to be terrorists?

Auteur: Bernard Blanc "Pau est Charlie, Béarn, Pyrénées Atlantiques, Aquitaine, France" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Bernard Blanc « Pau est Charlie, Béarn, Pyrénées Atlantiques, Aquitaine, France » (CC BY-NC-SA 2.0)

I wonder also why a parallel mobilization is taking place in the USA where more extremist reactions are coming out. Paris attacks are being excessively exploited by Obama’s opponents to denounce his policy regarding the Middle East and the Muslim world in general. Moreover, the talk about pausing Muslim immigration is witnessing a renewal. Such reaction is excessive when we realize that France has proportionately a much larger Muslim population than North America. I wonder also why a terrorist attack conducted by a small number of people triggers off such controversy in the American medias about a menacing third world war unless there is a desire to declare it. If we exclude the notion that this kind of mobilization is part of the preparations for this war (which is the worst possible scenario) and tend to think that occidentals are responding to the threat by highlighting a principal emblem of their culture (freedom of expression), then it is also not the best thing to do.

Auteur: Quentin Chandelier "Je suis Charlie" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Quentin Chandelier « Je suis Charlie » (CC BY-NC-SA 2.0)

Occidentals should be very careful with matters of identity and should not overuse the slogan « I am Charlie » for the risk of becoming an alienating slogan as well as paving the way for a rivaling slogan « I am not Charlie » as long as they actually care about stability in and out of the Western world. I would like to bring the attention to the frustration Muslims might feel as a result of finding themselves constantly stigmatized as perpetrators of terrorism. Moreover, the reluctance or the failure at integrating Muslims is liable to lead the frustrated ones to succumb to the call of terrorists. Personally, I think of Islamic terrorism as a natural aggregate result of the failure of integration programs in the west, and the obvious unwillingness of the global powers to make peace in the Middle East.

I would like to direct the attention of those who are involved in the movement of mobilization that stressing certain values is actually a symptom of an imminent crisis because all the human values are consequently reduced to one highlighted value − in this case it is « freedom of expression ». Hitler relied heavily on two values (dignity and pride) to mobilize Germans. Likewise, Islamic terrorists prioritize the value of « martyrdom » to mobilize their recruits. Needless to mention also that to create a crisis is much easier than to solve it. Social identification is a capacity of our minds and a method to defend our identity against the outside world, but also a risky rejection and by extension, knowledge of the « other ». In fact, a Muslim who identifies with his prophet Mohammed is going through the same mental process by which a professor identifies with his/her titles and certificates and gets mad because a student addresses him/her without this title. Both Mohammed and the title work as sources of values. An original problem arises when this Muslim or that professor has no other sources of values to safeguard his/her self-image, and the second problem comes when individuals or the society shakes their self image constantly and pushes them to eliminate the sources of their trouble by murdering or rejecting their « offenders ». I do not pretend that I know all the details or the motives for the Charlie Hebdo massacre, but what I am sure about is that it is not new to social phenomena and if we broaden the scope of our social identification, we will find out that it is not more horrific than what is taking place all over the world.

Auteur: Franck Mée "Hommage" (CC BY-NC-SA 2.0)

Auteur: Franck Mée « Hommage » (CC BY-NC-SA 2.0)

I think it is not reasonable to say that all of France or the western world has been attacked, and those who do so, are actually using the same logic that Islamists use when they say that Islam has been attacked. Really, by adopting this exaggeration for either assessing threats or evading them, occidentals give a justification for Islamists who would have more reason to talk about anti-Muslim attacks after all that chaos in the Muslim world and the overt intervention of different western powers.

If occidentals care about stability and freedom of expression inside their borders they have to work for stability, democracy and human rights outside their borders. By doing so, they would help Muslims and others criticize their own values, broaden their vision of their humanity and bolster their intolerance. By doing the opposite along with an insistent association between Islam and terrorism, they just push them towards radicalism.

Ibrahim Rami

Membre de la rédaction Neuchâteloise de Voix d’Exils

« Je suis Charlie » : arrêtez la mobilisation !

Est-ce que l’attaque contre Charlie Hebdo est un nouveau phénomène social? Quelles sont les raisons qui animent le terrorisme Islamique? Est-ce que la liberté d’expression est une valeur occidentale? Cet article tente de traiter ces questions difficiles en proposant un point de vue qui sort du carcan dans lequel les protestataires du mouvement «Je suis Charlie» nous enferment forcément.

Ce qui m’a choqué dans les attaques terroristes à Paris était différent de ce qui a affligé à une grande partie de l’Occident. Même si une grande partie de ce que j’ai vécu dans ma vie en tant qu’écrivain libre me conduirait à m’identifier aux humanistes et artistes libres, en général, je vois dans l’identification sociale une grande partie du problème de cette mobilisation.

J’ai été stupéfait par la vitesse avec laquelle la société occidentale s’est mobilisée suite aux attaques de janvier 2015 à Paris. Cette différence d’attitude est due au fait que j’ai une éducation laïque dans une société largement religieuse et j’ai appris comment livrer, passer et coder mes messages et mes points de vue divergents dans un environnement qui ne reconnaît pas l’individualité, les droits de l’homme, et la liberté d’expression.

En revanche, les européens et les américains, en général, considèrent les droits de l’homme et la liberté d’expression comme étant l’héritage de leur patrimoine culturel plutôt que des valeurs universelles et tendent à penser que le terrorisme est enraciné dans une autre culture ou d’autres cultures. Toutefois, en pensant de la sorte, ils sont susceptibles de marginaliser et d’exclure une partie considérable des citoyens occidentaux qui sont d’origine orientale, bien intégrés ou non.

Je me demande aussi pourquoi tous ces musulmans en France sentent la nécessité de se défendre contre l’accusation présumée de terrorisme, étant donné que la loi française ne reconnaît pas les gens comme terroristes, à moins d’y être directement impliqué. En d’autres termes, si j’étais un musulman français et que je faisais confiance à la primauté du droit en France, pourquoi devrais-je me sentir menacé si cinq millions de musulmans français se sont tournés vers les terroristes ?

Je me demande aussi pourquoi une mobilisation parallèle se déroule aux États-Unis, où davantage de réactions extrémistes se manifestent. Les attentats de Paris sont excessivement exploités par les adversaires d’Obama pour dénoncer sa politique au Moyen-Orient et dans le monde musulman en général.

En outre, le discours sur la suspension de l’immigration musulmane témoigne d’un renouveau. Cette réaction est excessive, lorsque nous nous rendons compte que la France a une population musulmane proportionnellement beaucoup plus grande que l’Amérique du Nord. Je me demande aussi pourquoi une attaque terroriste menée par un petit nombre de personnes déclenche une telle controverse dans les médias américains qui parlent d’une troisième guerre mondiale menaçante si ce n’est un désir de la déclarer.

Si l’on exclut l’idée d’une telle mobilisation en guise de préparatifs pour cette guerre (ce qui serait le pire scénario possible) et tendons plutôt à penser que les occidentaux font face à la menace en mettant en évidence l’emblème principal de leur culture (liberté d’expression) alors ce n’est également pas la meilleure chose à faire….

Les occidentaux devraient être très prudents avec les questions d’identité et ne doivent pas abuser du slogan «je suis Charlie» qui risque de devenir un slogan aliénant ouvrant la voie à un slogan rivalisant «je ne suis pas Charlie». Ce, bien entendu, pour autant qu’ils se préoccupent vraiment de la stabilité à l’intérieur et en dehors du monde occidental.

Je voudrais aussi attirer l’attention sur la frustration des musulmans qui pourraient se sentir par la suite en étant constamment stigmatisés comme auteurs potentiels d’actes terroristes. Personnellement, je pense que le terrorisme islamique est le résultat naturel de l’échec des programmes d’intégration dans l’Ouest, de la réticence évidente des grandes puissances mondiales à faire la paix aux Moyen-Orient et de la réticence ou l’incapacité à intégrer les musulmans, ce qui est susceptible d’amener les frustrés à succomber à l’appel des terroristes.

Discutons à présent des personnes qui sont impliquées dans le mouvement de mobilisation «Stop Charlie» et qui, en soulignant certaines valeurs, en font le symptôme d’une crise imminente où toutes les valeurs humaines sont réduites à une valeur mise en évidence. Dans ce cas: « la liberté d’expression ». Hitler s’était fortement appuyé sur deux valeurs : la dignité et la fierté pour mobiliser les Allemands… De même, les terroristes islamiques mettent la priorité sur la valeur de « martyrs » pour mobiliser leurs recrues. Inutile de mentionner également que créer une crise est beaucoup plus facile que de la résoudre…

L’identification sociale est une capacité de notre esprit et une méthode pour défendre notre identité contre le monde extérieur, mais aussi, par extension, un rejet risqué de la connaissance de « l’autre ».

En fait, un musulman qui s’identifie à son prophète Mahomed passe par le même processus mental que par lequel un professeur s’identifie avec ses titres et se met en colère parce qu’un élève l’aborde sans faire appel à ses titres. Comme le titre de professeur, le prophète Mohamed est une source de valeurs. Un problème initial se pose lorsque ce musulman ou ce professeur n’a pas d’autres sources de valeurs pour sauvegarder son image et le second problème vient quand les individus ou la société bouscule leur image en permanence en les poussant à éliminer les sources de leur détresse en assassinant ou rejetant leurs « délinquants ».

Je ne prétends pas connaître tous les détails ou les motifs du massacre de Charlie Hebdo, mais ce dont je suis sûr, c’est que ce n’est pas nouveau en tant que phénomène social et que si nous élargissons la portée de notre identification sociale, nous allons découvrir qu’elle n’est pas plus horrible que ce qui se passe partout ailleurs dans le monde.

Je pense que ce n’est pas raisonnable de dire que toute la France ou le monde occidental a été attaqué, et ceux qui le font effectivement utilisent la même logique que les islamistes quand ils disent que l’islam à été attaqué.

Vraiment, en adoptant cette exagération soit pour évaluer les menaces ou les élucider, les occidentaux donnent une justification pour les islamistes qui auraient plus de raisons de parler d’attaques anti-musulmanes après tout le chaos dans le monde musulman généré par l’intervention manifeste de plusieurs puissances occidentales dans cette région…

Si les occidentaux se soucient réellement de la stabilité et de la liberté d’expression à l’intérieur de leurs frontières, ils doivent aussi travailler pour la stabilité, le respect de la démocratie et des droits humains en dehors de leurs frontières.

En faisant de la sorte ils aideraient les musulmans et tous ceux qui critiquent leurs valeurs à élargir leur vision de l’humanité et à renforcer leur tolérance. En faisant le contraire et en associant de manière insistante l’islam au terrorisme, ils ne font que pousser les musulmans  vers le radicalisme.

Ibrahim Rami

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Grandir spirituellement en faisant le Ramadan

Photo: Tim Abbott (CC BY-NC-ND 2.0)

Photo: Tim Abbott (CC BY-NC-ND 2.0)

Pendant le mois du Ramadan, qui se déroule cette année du 9 juillet au 8 août, les musulmans pratiquants s’abstiendront de boire, de manger et d’avoir des rapports sexuels du lever au coucher du soleil. Par cette pratique, les fidèles entendent se purifier, se rapprocher d’Allah et gagner le paradis. Deux rédacteurs musulmans de Voix d’Exils ont souhaité partager la signification de ce rituel.

Ramadan – qui signifie le neuvième mois du calendrier islamique – est un mois sacré qui commémore un événement fondamental de l’histoire des musulmans : c’est en effet lors de ce mois que le Coran a été révélé par l’ange Gabriel au Prophète Mohammed au cours de la Nuit du Destin. Le jeûne du Ramadan est aussi le quatrième des cinq piliers de l’islam, à savoir : la profession de foi selon laquelle il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah, la prière à cinq reprises par jour, l’aumône à faire aux pauvres et le pèlerinage à la Mecque.

Durant le mois de Ramadan, le jeûne ne concerne pas que l’estomac. Tout le corps se met au diapason. La langue ne doit pas proférer de médisances, les yeux ne doivent pas regarder des choses interdites par la religion, les mains ne doivent pas toucher ou prendre ce qui ne lui appartient pas, les oreilles ne doivent pas écouter des futilités, et les pieds ne doivent pas aller dans des endroits où les gens s’amusent, sont dévêtus ou font la fête. Plus largement, les musulmans contrôlent leurs passions et prennent leurs distances avec tout ce qui est interdit par l’islam comme l’hypocrisie, le mensonge, la tricherie, l’adultère et le vol.

Les croyants effectuent leurs cinq prières obligatoires au lever du soleil, à midi, l’après-midi, au coucher du soleil et le soir. La prière leur sert de rempart contre les passions qui détournent du droit chemin et met à distance les vices tels que le tabac et l’alcool. Tout au long de leur jeûne, les musulmans pensent à leur santé et à celle des personnes de leur entourage, ils ressentent la douleur de ceux qui ont faim et ils prennent conscience de la valeur des biens que Dieu leur offre tel que la nourriture. Mais tout le monde ne peut pas faire Ramadan et dans le Coran, il est indiqué que le jeûne est une obligation pour tout musulman en âge et en capacité de le faire. Mais certains peuvent en être exemptés, comme les personnes âgées, les malades et les femmes enceintes ou allaitant un nouveau-né. Après s’être abstenus de boire, de manger, de fumer et d’avoir des relations sexuelles du lever jusqu’au coucher du soleil, les musulmans se réunissent la nuit tombée à la maison ou à la mosquée pour prier, briser le jeûne en mangeant quelques dattes puis partager le repas.

Tout au long du Ramadan, les musulmans mettent leur patience, leur humilité et leur spiritualité à l’épreuve. Le jeûne est pour eux la marque de l’obéissance à Dieu, et les fidèles s’inscrivent ainsi dans la tradition des prophètes de l’islam. Certaines personnes prennent leurs vacances en période de Ramadan pour pouvoir prier jusque tard dans la nuit et se rapprocher ainsi de Dieu et du paradis. Car Ramadan est la période privilégiée pour demander le pardon de ses péchés et capitaliser les bonnes actions car, en cette période particulière dans la vie des croyants, les bonnes actions comptent double.

A la fin du Ramadan, les musulmans organisent une grande fête, l’«Eid al Fitr» ou «fête de la rupture du jeûne », qui peut durer trois jours. Lors de cette fête, ils visitent leur famille et se rendent à la mosquée pour célébrer la fin de ce mois consacré à Dieu.

Lamin et Samir,

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Edito. Clash entre l’islam et l’Occident : à qui profite le crime ?

www.voixdexils.ch

L’agitation et les violences récentes provoquées par la diffusion d’un film qui ridiculise le prophète Mahomet ont encore aggravé les malentendus et les mauvaises interprétations entre l’Occident et le monde islamique. Les grands médias s’en sont donnés à cœur de joie, en soulignant au passage l’ignorance mutuelle des deux camps, le peu de connaissances que détiennent les Occidentaux de l’islam et vice-versa et la narration fausse de l’Islam contre l’Occident. Tant et si bien que, pour beaucoup d’entre nous, il est devenu courant de penser que la seule relation possible entre le monde islamique et l’Occident s’insère dans un cycle de conflits politiques et culturels.

Sans doute, depuis des siècles, les extrémistes des deux camps ont cultivé cet « esprit caricatural » en réduisant à des stéréotypes, musulmans et Occidentaux chacun à sa manière. Mais toute personne assez ouverte à étudier l’islam et  l’Occident comprend que la principale source d’erreurs n’est pas religieuse ou culturelle mais bien politique. La friction engendrée par la politique étrangère américaine au Moyen-Orient, les enjeux géopolitiques du Golfe Persique, le conflit israélo-palestinien, la montée de l’extrême droite en Europe et la politique de prosélytisme islamique en Asie occidentale ont envahi le terrain culturel et produit une polarisation des identités dans laquelle les valeurs de base et les croyances des « autres » sont considérées comme problématiques et menaçantes. En conséquence, dans la relation troublée entre certains occidentaux et certains musulmans, il y a la conviction de plus en plus répandue de la futilité et de l’absence de dialogue entre l’Occident et l’Islam.

La généralisation de la thèse bien connue du «choc des civilisations» du politologue américain Samuel P. Huntington peut mieux expliquer les raisons de cette confrontation, car elle légitime les stéréotypes provocateurs et sensationnalistes popularisés par les tenants de « la guerre contre le terrorisme islamique » et du slogan « A bas l’Occident blasphématoire». George W Bush et ses faucons en savent quelque chose, mais les Ayatollahs aussi !

Il existe de nombreuses preuves qui démontrent que, pour attaquer l’islam, ou l’Occident, les fanatiques des deux côtés sont prêts à utiliser n’importe quel mensonge. Les fanatiques Occidentaux ne connaissant pas l’islam, n’ont aucun désir de comprendre ou de tolérer les musulmans parce qu’ils imaginent l’islam comme une religion de violence qui veut envahir, voire détruire et dévorer l’Europe.

Voilà qu’aujourd’hui l’l’islam et l’Occident souffrent d’un grave déficit de tolérance. En Occident, de nombreux stéréotypes et la désinformation qui contribuent à l’islamophobie sont enracinés dans la peur de l’islam. Certains présentent cette religion comme un bloc monolithique, statique, sauvage, irrationnel, menaçant et résistant au changement. La peur de l’islam est devenue un phénomène social en Occident, et les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, sont devenus pour beaucoup d’Occidentaux l’image de l’envahisseur musulman, le symbole selon lequel musulman est égal à terroriste.

Mais la fausse représentation de l’islam est parallèle à la fausse représentation de l’Occident. Autrement dit, «l’islamophobie», ou la peur de la marée islamique, a un contrepoids …«l’occidentophobie», soit la peur de l’Occident et de ses valeurs. La mondialisation est devenue synonyme d’occidentalisation et les musulmans radicaux sont préoccupés par la culture occidentale, qu’ils n’hésitent pas à classer comme impure et satanique.

Bien que les versions apocalyptiques, violentes et d’un autre âge, qui glorifient la mort ne sont portées que par une petite minorité de musulmans, l’opinion publique mondiale semble considérer ces attitudes hostiles comme représentatives de l’ensemble du discours islamique, créant un climat qui conduit à l’absence de dialogue et à la violence extrême.

Peut-être un bon point de départ est de reconnaître que de nombreux musulmans du monde entier se sont prononcés en faveur de solutions spirituelles et non-violentes, du dialogue et de la paix. Mais force est de constater que ces paroles n’ont pas réussi à endiguer le flot des stéréotypes. Et nous avons besoin d’apprendre davantage au sujet des musulmans et de leur culture dans les écoles européennes, pour mettre fin à cette crainte injustifié et injustifiable pour tout ce qui vient d’ailleurs. En outre, il devrait y avoir plus de musulmans pluralistes et non-violents visibles dans l’espace public et surtout dans les médias en Occident, afin de trouver une troisième voie pour résoudre les conflits entre les interprétations occidentales de la liberté individuelle et les interprétations islamistes des droits et des devoirs des musulmans.

Peut-être qu’il est temps que les Occidentaux comprennent que ce qui importe le plus, ce n’est pas seulement de trouver le juste équilibre entre les expressions de l’identité musulmane et l’idée de laïcité occidentale et républicaine, mais de prendre des mesures concrètes pour éliminer les malentendus et les interprétations erronés qui ont contribué à donner une image négative des musulmans comme des gens violents, hostiles culturellement et inaptes à la démocratie.

Qu’est qui est vraiment difficile à comprendre ?

Y a-t-il un sens dans le fait qu’un pasteur, peut-être timbré, brûle un Coran dans le fin fond des Etats-Unis, ce qui incite à des milliers de kilomètres de là des musulmans du quartier de Haoussa (quartier à forte concentration musulmane dans une ville à majorité chrétienne) à Douala, à brûler les églises situées dans ce même quartier ?

Y aurait-il un sens si mon ami Chamarke, musulman très pratiquant, décidait subitement de ne plus me rendre visite parce que ma nouvelle petite amie suissesse s’habille en mini-jupe hyper sexy, si l’imam de la mosquée que Chamarke fréquente chaque vendredi venait à un jour à prêcher contre ce genre d’habillement ?

A vous de voir !

FBradley Roland

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils