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Revue de presse #37

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : La Suisse condamnée pour le renvoie d’un gambien homosexuel / En matière d’asile, il n’existe aucune solution qui satisfasse tout le monde / L’Europe tire la sonnette d’alarme sur le sort des migrants en Grèce / Le big data pour mieux comprendre les migrations en Europe

La Suisse condamnée pour le renvoi d’un Gambien homosexuel

Le 24 heure, le 17 novembre 2020

La Suisse a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) car elle a voulu renvoyer un ressortissant gambien homosexuel dans son pays. Dans un arrêt rendu le mardi 17 novembre 2020, la CEDH a considéré à l’unanimité qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention qui traite de l’interdiction des traitements inhumains et dégradants. Rappelant que l’existence d’une loi réprimant les actes homosexuels ne suffit pas à exclure un renvoi, la Cour européenne a souligné que l’orientation du recourant pourrait être découverte s’il revenait en Gambie. Le Tribunal fédéral avait considéré en 2018 que le réseau familial de l’intéressé suffirait à le protéger et que la situation des homosexuels s’était améliorée dans ce pays. Les juges de Strasbourg ne partagent pas cet avis. Ils estiment que la Suisse aurait dû s’assurer que les autorités locales auraient la capacité et la volonté de protéger leur ressortissant contre les mauvais traitements qu’il pourrait subir du fait d’acteurs non-étatiques.

Ursula von der Leyen : en matière d’asile, il n’existe aucune solution qui satisfasse tout le monde

Euroactiv, le 19 novembre 2020

Organisée par le Parlement européen et le Bundestag allemand, avec la collaboration des parlements portugais et slovène, la conférence interparlementaire sur la migration et l’asile a eu lieu le 19 novembre 2020. Durant la conférence, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen a mis en lumière à quel point l’immigration de travailleurs qualifiés est importante, car elle contribue au développement des entreprises européennes. Néanmoins, le système qui ne fonctionne plus selon ses dires inquiète les pays qui se trouvent aux frontières extérieures de l’UE (l’Italie, la Grèce et l’Espagne) et qui ont besoin de la solidarité des autres États membres.

Selon elle, les points cruciaux qu’il faudrait traiter sont au nombre de trois. Le premier se rattache aux raisons qui poussent les gens à partir. Le second correspond à la nécessité de mettre en place un système de retours commun. Le troisième point concerne les voies légales d’entrées en Europe. Néanmoins, « une solution qui satisfasse tout le monde n’existe pas » conclut la présidente. Il faudrait par conséquent œuvrer à la recherche d’un compromis, sans oublier les préoccupations des pays qui craignent de ne pas réussir à gérer l’accueil des migrants.

L’Europe tire la sonnette d’alarme sur le sort des migrants en Grèce  

La Tribune de Genève, le 19 novembre 2020

Dans le cadre d’un rapport publié le jeudi 19 novembre 2020, le comité anti-torture du Conseil de l’Europe (CPT) a fortement dénoncé le sort réservé aux migrants placés en rétention en Grèce. Conscient que le nombre important de migrants entrant dans le pays place les autorités grecques face à un « défi important », le CPT prône pour une « approche européenne coordonnée ». En regrettant l’approche considérée comme punitive menée par les autorités, le CPT rappelle que la situation migratoire face à laquelle se trouve le pays ne lui permet pas d’être dispensé de ses obligations en matière de droits de l’homme. Concrètement, les auteurs du rapport dénoncent les conditions de rétention des migrants, tout particulièrement à la frontière terrestre avec la Turquie ainsi que sur l’île de Samos. Les observateurs soulignent leur incompréhension face à la rétention de bébés et de jeunes enfants dans des conditions décrites comme traumatisantes. Ils dénoncent également les conditions dans les cellules où sont logés les migrants. Le rapport qualifie ces dernières comme étant inhumaines et dégradantes. En outre, tout en questionnant l’implication de l’agence européenne Frontex dans des cas de refoulements de migrants, les auteurs se disent inquiets des actes commis par les garde-côtes grecs pour empêcher les bateaux transportant des migrants d’atteindre les îles grecques et demandent aux autorités grecques de prendre les mesures nécessaires.

Du côté d’Athènes, on invoque la saturation des centres de rétention afin d’expliquer la situation sur l’île de Samos. La police grecque, quant à elle, considère que les présumées pratiques inhumaines et dégradantes de refoulement à la frontière sont sans fondement.

Le big data pour mieux comprendre les migrations en Europe

Euronews, le 16 novembre 2020

Le Centre de connaissances sur la migration et la démographie (KCMD) envisage la migration à travers le prisme du Big Data. L’objectif de leur travail est d’établir des modélisations pour mieux comprendre la migration et contribuer au développement de programmes d’intégration plus efficaces et plus cohérents. Les données disponibles sur le marché du travail européen permettent d’identifier les secteurs qui font face à une pénurie de main-d’œuvre. Ces données montrent également dans quels secteurs les migrants contribuent à l’atténuation des pénuries de main-d’œuvre. Une étude menée lors de la première vague de la pandémie de Covid-19 a montré qu’en moyenne, 13% des travailleurs des secteurs essentiels – en matière de réponse au coronavirus dans l’Union européenne – étaient des migrants. Les cinq catégories les plus représentées sont les professionnels de l’enseignement, les travailleurs agricoles qualifiés, les professions intermédiaires dans la science et l’ingénierie, les préposés aux soins personnels et enfin, les personnels d’entretien et aidants.

Masar Hoti

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Un ex-ministre Dublin en Suisse

L'ancien ministre de l'intérieur gambien Ousman Sonko. Aucune licence retrouvée pour cette image.

L’ancien ministre de l’intérieur gambien Ousman Sonko.

L’ex-ministre gambien de l’intérieur suspecté de crimes contre l’humanité a été arrêté en Suisse  

Soupçonné de crimes contre l’humanité ; présenté comme le bras droit de Yahya Jammeh, l’ancien président de la Gambie, Ousman Sonko, a été arrêté dans le canton de Berne le 26 janvier dernier. Il avait, en novembre 2016, déposé une demande d’asile en Suisse.

D’après le procès-verbal de sa première audition de procédure d’asile, Ousman Sonko aurait été Ministre de l’intérieur de la Gambie entre 2006 et 2016 avant d’être limogé par l’ex-président Yahya Jammeh et fuir son pays. Il a présenté son passeport de diplomate lors de son interview avec le Secrétariat d’Etat aux Migrations (SEM), avant d’être attribué au canton de Berne, puis placé dans un centre de transit où il a été arrêté sur ordre de la justice bernoise. Il était, auparavant, passé par l’Espagne et la Suède avant de venir en Suisse .

Une arrestation controversée

Son arrestation, survenue deux mois après son passage au SEM, a suscité la consternation du fait qu’il n’avait pas été appréhendé plus tôt. Notamment de la part d’Hans-Jürg Käser, Conseiller d’Etat en charge de la police et des affaires militaires bernois, qui estime que le SEM a traité la demande d’Ousman Sonko comme celle de n’importe quel autre demandeur d’asile, alors que, selon lui, l’instance connaissait l’importance de ce dossier. Cette arrestation survient quelques jours seulement après le départ de l’ex-président de la Gambie, Yahya Jammeh, à propos duquel nous avons consacré un article il y a quelques jours.

Lamine et Nicolas Kalbfuss

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Commentaire

La Cour Pénale Internationale (CPI) doit redoubler ses efforts pour prendre des mesures fermes face aux atrocités commises par certains dirigeants, afin d’en finir avec. Les problèmes tels que la corruption ou la dictature, très présents en Afrique, posent toutefois des questions sur le rôle et la crédibilité des nombreuses organisations qui promeuvent la démocratie, la paix et les droits de l’homme sur le continent africain. De même, des questions subsistent autour du rôle du SEM dans ce genre de cas qui concerne un politicien suspecté de crimes graves. Une question d’ordre moral et éthique se pose : doit-on octroyer l’asile et protéger des cas comme celui d’Ousman Sonko, qui encourt peut-être des risques dans son pays, mais qui est soupçonné par l’ONG Trial International d’avoir commis des crimes contre l’humanité ?

Yaya

 

Infos:

La situation en Gambie se dénoue, article paru dans Voix d’Exils le 24.01.2017

 




La situation en Gambie se dénoue

Auteure: Amanda Lucidon / White House. Domaine public.

Auteure: Amanda Lucidon / White House.
Domaine public.

 Yahya Jammeh accepte de quitter le pouvoir et s’exile en Guinée Equatoriale

Après plusieurs tractations entre la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), certains présidents de l’Afrique de l’Ouest et le désormais ancien président gambien Yahya Jammeh, ce dernier a enfin mis les voiles en direction de la Guinée-Equatoriale qui a accepté son exil.

L’Assemblée nationale avait, le 17 janvier 2017 dernier, accepté l’état d’urgence demandé par Jammeh permettant à l’homme fort de Gambie de rester encore 3 mois au pouvoir en tant que Président. Mais, cette résolution n’a eu aucun succès. En effet, l’Union Africaine, l’Union Européenne et l’ONU ont demandé au Président sortant d’accepter sa défaite à la présidentielle de décembre 2016 qui a consacré son rival, Adama Barrow. La CEDEAO lui a dès lors donné un ultimatum le vendredi 20 janvier, faute de quoi, des forces armées issues de cinq pays de la région, déjà positionnées sur le territoire gambien, passeraient à l’action.

Jammeh cède le pouvoir

Après une longue journée de médiation le vendredi 20 janvier avec les chefs d’Etats mauritanien et guinéen, Yahya Jammeh marqué par la peur d’être isolé, a finalement accepté de quitter le pouvoir sous certaines conditions. Il a émis le souhait de rester dans son pays : option qui a été refusée. À cela s’ajoute une demande de garantie de sécurité pour lui, sa famille et son entourage composé de cadres et de fonctionnaires qui l’ont accompagné durant son mandat, mais aussi de soldats qui lui sont restés fidèles.

L’exile de Yahya Jammeh

Yahya Jammeh a finalement quitté la Gambie le samedi 21 janvier 2017 au soir en direction de la Guinée-Conakry pour s’exiler en Guinée Equatoriale. Quant au nouveau Président gambien Adama Barrow, nouvellement élu, il a fait son investiture et prêté serment depuis l’ambassade de Gambie à Dakar au Sénégal.

Lamine, Niangu et Désiré

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Commentaire

Le tableau actuel de l’Afrique n’est pas totalement sombre. En effet, les actions de la CEDEAO ont permis ces dernières années d’y résoudre des crises politiques, à l’image de l’intervention d’une de ses missions pour le maintien de la paix: l’ECOMOG au Libéria. Les évènements en Gambie posent toutefois des questions quant à la situation en Afrique de l’Est, dans les pays des Grands Lacs, en Afrique centrale, mais aussi en Afrique de l’Ouest. En se référant à ce qui est arrivé au Burkina Faso pour Blaise Compaoré ou en Côte d’Ivoire pour Laurent Gbagbo, il est légitime de s’interroger sur le rôle de l’Unité africaine,  dont l’objectif et de promouvoir la démocratie, la paix et les droits de l‘homme sur le continent africain.

Lamine et Niangu

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

Principales sources :

http://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/01/17/le-president-sortant-decrete-l-etat-d-urgence-en-gambie_5064336_3212.html

http://www.rfi.fr/afrique/20170123-gambie-yahya-jammeh-demenage-palais-quittant-banjul