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Immigration et prospérité

Source: pixabay.com. Pixabay Licence.

Ces personnes immigrées qui contribuent à la prospérité de l’économie helvétique

Parole à des hommes et des femmes d’origine étrangère qui mouillent tous les jours leur chemise pour contribuer à la prospérité de l’économie de leur pays d’accueil : la Suisse.

« A force de courage, de volonté et de détermination, j’ai obtenu une promesse d’embauche » Delphine

Delphine est Camerounaise et titulaire d’un permis C : « Je suis en Suisse depuis 25 ans. Sans papiers au départ, j’ai dû galérer. A force de courage, de volonté et de détermination j’ai obtenu une promesse d’embauche dans une entreprise de nettoyage que j’ai déposé au Service de la population du canton de Vaud. Quelques semaines après, j’ai reçu une lettre qui me demandait de fournir certains documents pour la promesse d’embauche: mon bail à loyer, mon passeport. Puis, deux à trois mois après, j’ai obtenu mon permis B et c’était le plus beau jour de ma vie.

Tout de suite après, j’ai commencé le travail et, en même temps, je faisais des études d’infirmière: un métier que j’aime depuis toute petite. C’était ma vocation. Après l’obtention de mon diplôme, j’ai eu un contrat dans un EMS et depuis des années je travaille comme une folle. Je suis mariée et mère de 3 enfants. J’aime ce pays qui m’a tout donné, les Suisses et les Suissesses sont gentils, polis et accueillant.e.s. Je paie mes cotisations sociales, mes impôts et j’en suis très fière! »                                             

« J’ai ouvert mon entreprise de maçonnerie, ça marche bien et je viens d’engager deux jeunes Suisses » Antonio

Antonio est un ressortissant d’Equateur. Il est titulaire d’un permis C. « Je suis en Suisse depuis 20 ans. Maçon de métier, je travaille depuis 18 ans et je n’ai jamais eu de problèmes. Aujourd’hui, j’ai ouvert mon entreprise de maçonnerie, ça marche bien et je viens d’engager deux jeunes Suisses. Je paie mes impôts et c’est ma façon de redonner ce que ce beau pays m’a offert. »                                               

« Je paie mes cotisations sociales, mes impôts et j’en suis fière ! » Maria

Maria est Angolaise et travaille comme serveuse. « Je suis africaine fière et bien intégrée. J’ai obtenu mon permis B, je travaille et je n’ai jamais touché l’aide sociale. J’ai fait des petits boulots: nettoyeuse et aide cuisinière avec des salaires vraiment dérisoires. Aujourd’hui, j’ai un contrat fixe dans un restaurant. Je paie mes cotisations sociales, mes impôts et j’en suis fière ! Merci à ce pays et à ses habitant.e.s qui m’ont permis de réaliser mon rêve, d’être stable, d’avoir un permis et un travail fixe. »

« Après avoir bien économisé, j’ai acheté ce petit commerce » Rangulant

Rangulant est originaire du Sri Lanka et tient un petit commerce d’alimentation à Lausanne. « Je vis en Suisse depuis 18 ans et je suis un réfugié politique. J’ai quitté mon pays à cause de la guerre. Après j’ai obtenu mon statut de réfugié. Avant l’obtention du permis B, j’ai fait des petits boulots dans des restaurants. Et après avoir bien économisé, j’ai obtenu un prêt bancaire et j’ai acheté ce petit commerce. Depuis, ça marche bien et j’ai toujours payé mes impôts. »    

Propos recueillis par:

Charles Williams Soumah

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Commentaire

De grâce, arrêtons la haine de l’étranger, les jugements à la hâte et de faciès. Prônons la fraternité, la tolérance et le vivre ensemble car c’est dans la concorde et la paix que le monde sortira plus grand.    

C.S.     

Sur le même sujet:

Tout travail mérite le respect. Article publié dans Voix d’Exils le 26.09.2022

Travailleur en Suisse ou pas. Article publié dans Voix d’Exils le 29.04.2019

Pour ouvrir son commerce, il faut vite apprendre le français. Article publié dans Voix d’Exils le 01.05.2019

 

 




« Être papier blanc »

Illustration: Kristine Kostava / Voix d’Exils

Vivre au jour le jour avec une attestation d’aide d’urgence

Les requérant.e.s d’asile déboutée.e.s reçoivent une attestation d’aide d’urgence qui leur donne accès à 10 francs par jour environ et une aide d’urgence ne couvrant que le strict minimum vital (généralement la nourriture, les vêtements, l’hygiène, le logement et les soins médicaux d’urgence). Comment vit-on l’aide d’urgence?

Afin de mieux comprendre le mode sous le régime de l’aide d’urgence, nous avons échangé avec trois personnes qui sont dans cette situation et qui sont membres de la rédaction de Voix d’Exils: Kristine, Géorgienne arrivée en Suisse en 2017; Zahra, Kurde, en Suisse depuis 2015 et Karthik, Sri-Lankais, qui vit en Suisse également depuis 2015.

Comment tombe-t-on dans l’aide d’urgence?

Qu’est-ce que l’aide d’urgence? Le site asile.ch donne la définition suivante: « Les personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière (NEM) ou de renvoi (« débouté-e-s ») perdent le droit de travailler et sont exclues de l’aide sociale, y compris lorsque leur besoin de protection n’est pas nié (NEM Dublin). Elles sont réduites à demander l’« aide d’urgence », octroyée en vertu de l’art. 12 de la Constitution fédérale. Cette aide consiste en une prestation de survie, remise la plupart du temps sous forme de bons ou en nature (barquettes de nourriture déjà préparées, etc.), rarement en espèces (environ 10 francs par jour, voire moins). Imposant un contrôle administratif intense, parfois quotidien, l’aide d’urgence est conçue comme un dispositif d’incitation au départ ».

Impact psychologique et matériel

La vie à l’aide d’urgence peut durer indéfiniment et la peur d’un renvoi forcé est constante. Les personnes à l’aide d’urgence sont souvent livré.e.s à elles-mêmes. Seules face à leur désespoir, le sentiment d’être dans une impasse, de vivre une incertitude et une angoisse est permanent. Etant un dispositif d’incitation au départ, les conditions de vie qu’impose ce statut a des effets nuisibles sur la santé physique et psychique des personnes qui le subissent.

  • Quels sont selon vous les obstacles du papier blanc ?

Kristine

« Il y a trop d’obstacles, nous sommes limités en tout. On ne peut ni étudier, ni travailler, ni voyager. Il est difficile de se développer et de vivre normalement. »

Zahra

« On ne peut pas étudier dans le domaine de notre choix. Nous ne pouvons ni voyager, ni pratiquer un loisir par manque d’argent ou acheter le nécessaire pour du matériel de bureau. De plus, il est généralement difficile de communiquer avec les personnes qui nous entourent. »

Karthik

« Sans autorisation, nous ne pouvons pas voyager ni travailler. Nous n’avons même pas l’autorisation de nous inscrire pour suivre un cours de français afin de ne plus avoir un problème avec la barrière de la langue. »

Une situation sans fin

Pour diverses raisons, le renvoi n’est pas réalisable et pour d’autres raisons encore, certaines personnes ne veulent ou ne peuvent pas rentrer dans leur pays d’origine. Ainsi, « être papier blanc », comme on dit dans le milieu de l’asile, implique souvent de vivre dans des conditions difficiles et ce pendant plusieurs mois; voire pendant plusieurs années.

  • Peut-on envisager un avenir avec le papier blanc ?

Kristine

« Il est très difficile d’envisager un avenir avec le papier blanc, parce que nous sommes très limités. On ne peut pas apprendre et travailler sans contrat, mais je garde espoir qu’un jour j’obtiendrai une autorisation de séjour. Je me suis toujours battue pour atteindre mes objectifs car se battre pour une chose importante à toujours un sens! »

Zahra

« Jamais! On ne peut pas envisager un avenir avec un papier blanc. C’est un frein pour avancer et construire notre vie. »

Karthik

« Non, c’est impossible! Nous sommes complètement bloqués. Nous ne pouvons rien faire, nous pouvons seulement espérer et attendre que notre situation s’améliore le plus tôt possible. »

Possibilités de changement

Il arrive que certaines personnes obtiennent un statut de séjour qui apporte une certaine stabilité à leur condition de vie. Cela constitue alors un grand changement qui affecte progressivement leur mode de vie et qui peut être déstabilisant.

  • Quels types de changement imaginez-vous une fois l’autorisation de séjour obtenue ?

Kristine

« Cela changerait toute ma vie. J’étudierais, je travaillerais sous contrat, je voyagerais. Cela me donnerait plus de liberté et me permettrait de m’améliorer personnellement. De plus, avec mes progrès et mon indépendance, je profiterais à nouveau de la Suisse. »

Zahra

« Une vie dans laquelle nous serions considéré.e.s comme des citoyen.ne.s ordinaires, dans laquelle on pourrait travailler et étudier sans ce problème de papier d’aide d’urgence. »

Karthik

« Je souhaiterais obtenir le permis B afin de me sentir libre de trouver du travail et de voyager. »

Pourquoi vous ?

La situation à l’aide d’urgence complique la vie de chaque personne détentrice du papier blanc. Beaucoup ont étudié, travaillé, construit leur vie dans leur pays d’origine, puis ont dû tout recommencer à zéro et surtout s’adapter à leur arrivée en Suisse.

  • Pourquoi mériteriez-vous une autorisation de séjour en Suisse ?

Kristine

« Après avoir terminé mes onze années d’école obligatoire, j’ai commencé mes études de graphisme qui ont duré un an au collège. Par la suite, j’ai effectué trois mois de stage et j’ai commencé à travailler comme graphiste chez MBM Polygraph. Parallèlement, j’ai suivi de nombreuses formations sur divers sujets et l’une d’elles était de créer un environnement adapté pour les personnes handicapées. J’ai travaillé pendant plus d’un an, puis j’ai dû quitter mon emploi et la Géorgie en raison de ma santé qui se détériorait. Je suis venue en Suisse et j’ai commencé à travailler en tant que bénévole. Actuellement, je contribue à Voix d’Exils comme rédactrice et graphiste. Je suis productive, je suis capable de travailler avec un contrat, mais malheureusement je ne peux pas travailler avec le papier blanc. »

Zahra

« Après avoir terminé l’école obligatoire, j’ai débuté mes quatre années d’études à l’université et je suis partie d’Iran pour des raisons politiques. Arrivée en Suisse, j’ai débuté les cours de français à l’EVAM et par la suite une formation en cuisine dans cet établissement. J’ai effectué un stage à la fondation « Mère Sofia » et j’ai continué à travailler en tant que bénévole dans la même fondation. J’ai commencé à travailler dans un programme d’activité de l’EVAM et aujourd’hui, cela fait un an et demi que je suis rédactrice à Voix d’Exils. Je souhaite avoir une autorisation de séjour car je voudrais travailler afin de construire et stabiliser ma vie pour devenir indépendante. »

Karthik

« Je viens du Sri Lanka où je n’ai pas la liberté de vivre comme en Suisse car il n’y a aucune sécurité et stabilité pour construire une vie. Après avoir terminé l’école obligatoire, j’ai commencé à travailler dans l’entreprise familiale et trois ans après j’ai quitté le Sri Lanka. À mon arrivée en Suisse, j’ai pu obtenir un permis N et ceci m’a permis de travailler pendant trois ans. Je considère la Suisse comme étant un pays ouvert et tolérant envers les cultures de toutes et tous. »

Propos recueillis par:

L.B.

Membre de la rédaction de Voix d’Exils

Pour approfondir le sujet:

LE QUOTIDIEN AVEC UN « PAPIER BLANC », article paru dans Voix d’Exils le 26.11.2018

LE QUOTIDIEN AVEC UN « PAPIER BLANC » II, article paru dans Voix d’Exils le 07.01.2019




Tout travail mérite le respect

Mohamed Shadan. Rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Merci et bravo aux femmes de ménage !

Il est de coutume dans les médias d’écrire sur les célébrités et les personnes qui ont « réussi » . J’aimerais parler, aujourd’hui, des femmes exilées en Suisse qui effectuent un travail non qualifié qui n’est pourtant pas à la portée de tout le monde.

Ce métier attire peu de candidates, beaucoup de femmes le considèrent comme l’un des domaines d’activité des plus désagréables. Je parle du métier de nettoyeur.

L’idée d’écrire cet article m’a été donnée par un collègue de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils qui a relevé la diligence des femmes de ménage du Centre de formation Le Botza, à Vétroz en Valais. Il me confie: « Ces femmes exécutent un travail difficile, peu reconnu et, malgré tout, elles ont toujours le sourire aux lèvres ».

Les raisons pour lesquelles des personnes quittent leur pays sont très diverses : chacun.e a sa propre histoire mais, souvent, c’est à cause d’une guerre. L’adaptation à un nouveau pays, avec une culture et une langue différentes, n’est pas facile. Le travail représente l’un des principaux facteur d’intégration et, à contrario, c’est le manque de travail qui est le principal problème sur la voie de l’adaptation sociale.

Roman Mekonen. Photo: Rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Ma première interlocutrice s’appelle Roman Mekonen. Ethiopienne de 38 ans, elle a une posture  modeste et timide. Elle est arrivée en Suisse en 2016. Cela n’a pas été facile pour elle au début… Trois mois après son arrivée, sa mère est décédée. En cette heure difficile, Roman a été soutenue par des amis qui l’ont aidée à faire face au chagrin. Mais on dit que les difficultés ne viennent pas seules, et bientôt Roman a divorcé de son mari et a reçu plusieurs réponses négatives à sa demande d’asile. 

Roman a refusé le découragement; elle a pris sa volonté dans son poing et a commencé à étudier le français et s’est inscrite à des cours de coiffure. Très vite, elle a réalisé que le meilleur remède contre la dépression est le travail. En Ethiopie, elle n’avait pas eu l’occasion d’étudier ni de travailler, donc le choix à sa disposition était limité. Elle a ainsi accepté de travailler comme femme de ménage, d’abord dans un bureau à Martigny, puis au Centre de formation du Botza.

Lorsqu’on lui demande pourquoi elle a choisi ce métier, Roman répond avec le sourire :

« Je sais comment nettoyer – ma mère me l’a appris depuis l’enfance. C’est très difficile de trouver un emploi dans notre canton, alors je suis satisfaite de ce que Dieu m’a donné ». Elle ajoute: « J’aime mon travail, malgré le fait qu’il soit pénible, non seulement parce que je dois travailler huit heures par jour mais, psychologiquement, ce n’est pas toujours facile, quand on nettoie les toilettes, par exemple. Malgré tout, je fais bien mon travail, car j’aime la propreté. »

 

Shadan Mohamed. Photo: rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Ma deuxième interlocutrice s’appelle Shadan Mohamed. Elle est Kurde d’Irak et a des yeux bruns pleins de bonne humeur. Elle est arrivée en Suisse en 2016. Shadan a 35 ans, elle est mariée et habite à Monthey. Elle travaille comme femme de ménage au Centre du Botza depuis 2018. Lorsqu’on lui demande pourquoi elle a choisi le métier de femme de ménage, elle répond : « Ce qu’on m’a proposé, je l’ai accepté. Je n’avais pas d’autre choix, parce que ma demande d’asile a été rejetée et que je n’ai pas accès à un véritable emploi ». Elle précise: « Dans mon métier, c’est le repassage que je préfère. Cette activité m’apaise. Nous avons une très bonne cheffe, très gentille, prévenante et réactive. Travailler sous sa direction est facile. En cas de problème, elle vous aidera et vous guidera toujours ». Et d’ajouter:  « Aussi je suis heureuse en Suisse. C’est un pays magnifique avec une nature incroyable, où les gens sont gentils. Mon mari et moi allons souvent nous promener à la montagne. Ma seule tristesse est notre situation administrative. »  A ces mots, son sourire s’efface. Shadan espère malgré tout qu’un jour son dossier soit accepté. Ce jour-là, elle respirera l’air alpin la poitrine grande ouverte.

Peu importe votre profession, il est important d’aimer ce que vous faites, tout comme Roman et Shadan. Le principal avantage de la profession de nettoyeur est la possibilité de travailler sans expérience de travail ni formation professionnelle. Ce métier a aussi des inconvénients : c’est le manque d’évolution de carrière et le bas salaire.

J’espère qu’un jour le travail des nettoyeurs et nettoyeuses sera mieux reconnu et mieux payé, car tout travail doit être tenu en haute estime et celui de nettoyeur ne fait pas exception.

Tamara Akhtaeva

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

 




«Diver’cité»

Photo: Elvana Tufa / Voix d’Exils.

Une fête qui renforce les liens humains depuis 1983

«Diver’cité » est une belle collaboration entre l’EVAM et le groupe d’appui aux réfugiés de Bex (GAR), dont l’édition 2022 s’est tenue à Bex le 19 août dernier. En organisant une journée festive et rassembleuse, le GAR continue de soutenir les habitants et les habitantes du Foyer EVAM de Bex, et ce depuis 1983 !

De nos jours, la vie est difficile pour tout le monde. Mais elle peut être encore plus difficile lorsque vous êtes une personne exilée, et encore davantage lorsque vous n’avez pas de permis et que vous attendez que votre statut soit décidé. C’est presque insupportable. C’est ce que doivent ressentir la plupart des personnes exilées comme moi : exerçant momentanément leur patience, ils et elles doivent faire face à la vie, aux dilemmes et à la stagnation dans un pays étranger, faisant face à des sentiments et des approches différentes. Nous prenons pour acquis la haine, l’indifférence et le mépris de certains et certaines, de beaucoup, en fait, mais nous nous réjouissons du soutien, des sourires et de l’attention de beaucoup d’autres.

Nous venons peut-être, à coup sûr, de milieux, de cultures, de traditions, de pays ou même de continents différents. Mais nous sommes là, une multitude de tout cela dans un petit pays auquel nous avons demandé de la protection et du soutien, une protection et un soutien qui souvent ne viennent pas de l’État, mais des personnes que nous avons en face de nous, à nos côtés. Les vrais qui se mettent à notre place, qui essaient de voir la réalité de notre point de vue et vous pouvez dire qu’il n’y a que de la bonté et de la sympathie dans leur regard et leur approche – au maximum même quelques blagues -, juste comme le dit Raymond Queneau; et je suis entièrement d’accord avec lui, des exercices de style, mais pas de bureaucratie, pas la moindre trace de celle-ci.

Il y a quelques semaines, j’ai croisé Madame Christine Blatti, responsable du foyer EVAM de Bex, qui m’a invité à la fête annuelle de la Fête des Réfugiés  « Diver’cité ». J’étais heureuse d’y aller et de faire la fête avec eux d’une part, mais d’autre part, j’avais un peu de retenue de retourner dans le foyer où moi et ma famille avons vécu pendant quelques mois. Surtout à cause des tristes souvenirs et du sentiment d’être perdu et de n’appartenir à rien : à cela s’ajoutent la pandémie, le confinement et les restrictions que non seulement nous, mais aussi tous les gens, avons dû affronter pendant ces temps difficiles.

Une fête créée en 1983

J’ai eu l’occasion de rencontrer Madame Christine Blatti lors des célébrations où elle s’occupait des derniers arrangements et de la coordination, alors que dans le jardin un très beau concert avait déjà commencé. Elle a été très gentille de prendre un peu de temps pour me raconter les origines de cette fête et comment elle s’est développée et transformée au fil des années.

« Au départ, c’était la fête des réfugiés qui a eu lieu pour la première fois en 1983, au mois de juin. Mais, au fil des années, le concept a changé, s’est développé et s’est transformé. Elle s’est d’abord tenue dans le centre-ville, mais avec le temps, le lieu a également changé ». Cette fête, qui s’appelle désormais Diver’cité, s’organise en étroite collaboration avec le Groupe d’appui aux réfugiés de Bex (GAR). Ce groupe existe depuis 1983 et son but est d’offrir réconfort et aisance aux personnes exilées établies au Foyer de Bex. Grâce à l’engagement des deux organisations, elle est devenue depuis plusieurs années une tradition. « Le but de cette fête est en effet de rassembler les gens, de les amener à se connaître. Manger ensemble, échanger leurs histoires et leurs expériences entre eux, leur donner la chance de venir s’exprimer, de partager que ce soit la nourriture, les cultures et les traditions ou leur expérience et leur parcours en tant que personnes exilées. Beaucoup d’entre eux ne connaissent pas très bien le français, mais cela ne les empêche pas d’interagir. Le but est de se sentir bien, de créer de la confiance et d’abandonner tout jugement et toute peur », conclut Madame Blatti.

J’entends en fond sonore une musique énergique et je m’approche du jardin où les musiciens jouent pour les personnes qui se sont déjà rassemblées. Il y a des enfants qui dansent et chantent, une playlist de belles chansons dont certaines que j’ai pu chantonner en compagnie de Monsieur Pierre Ryter, un des bénévoles présent, mais aussi pour les randonnées et les autres activités que le GAR organise pendant les vacances d’été pour les personnes du foyer. Plus tard, pendant le dîner, nous sommes venus écouter de la musique érythréenne jouée par un habitant du foyer. Juste au-dessus de l’endroit où se tenaient les musiciens, je pouvais voir le balcon des chambres où ma famille et moi avons séjourné il y a deux ans : je me souviens, comme dans un film, de mon mari écrivant dans un cahier quelques poèmes après de nombreux mois traumatisants dans les camps. Mais juste après ces quelques poèmes, il a arrêté d’un coup. « Je suis plus dans un voyage épique maintenant », dit-il, faisant référence à son long roman qu’il est en train d’écrire.

Une main pour vous aider à vous relever

Anne Catherine Rohrbach est la présidente du GAR, l’association qui fêtera l’année prochaine son quarantième anniversaire. Très humble, aimante et attentionnée, c’est dans sa nature d’aider, de réconforter et de s’intéresser à tous les nouveaux arrivants et, en fait, à toutes les personnes exilées. Elle m’explique un peu le but du GAR qui est de mettre les gens en contact, de faire et de réaliser des activités liées aux personnes exilées avec les personnes séjournant ou ayant séjourné au Foyer EVAM de Bex en favorisant leurs relations avec la population de Bex et de la région, d’échanger un peu les idées, de respirer un air différent pendant leur parcours difficile. Outre le soutien moral et psychologique, ils proposent aussi d’autres activités, comme les cours de français, le vestiaire – vêtements et jouets distribués aux personnes exilées -, l’atelier de couture pour les adultes, l’atelier de peinture pour les enfants, et aussi les casse-croûtes, c’est-à-dire que toutes les deux semaines, des bénévoles viennent dans le hall de l’EVAM pour parler aux personnes du foyer et répondre à leurs questions, ou leur donner un coup de main.

A part Anne Catherine, dont j’ai appris à connaître l’aide et le soutien affectueux, je rencontre beaucoup d’autres personnes que j’ai connues lors de mon attribution au canton de Vaud. J’ai eu le plaisir d’être présentée à Monsieur le syndic, Alberto Cherubini, qui est également président de la Commission culturelle communale (culture, un mot que j’affectionne beaucoup), le secrétaire général de la commune, Monsieur Alain Michel, dont l’humour et l’attention dans l’écoute étaient très impressionnants, d’autres bénévoles, tels que Messieurs Pierre Ryter et René-Luc Thévoz, professeur d’accueil de certains de mes enfants (grand professeur, grand bénévole motivant), Tamara, employée auparavant au bureau des finances du foyer Bex et à qui je faisais appel pour toutes sortes de questions et des problèmes que je n’arrivais pas à résoudre moi-même et, enfin, ma chère première assistante sociale Amélie Pistorius. En tant que famille, nous avons été assistés par elle pendant notre séjour au foyer et je n’ai que les meilleures impressions et les meilleurs souvenirs d’elle : en tant que professionnelle – faisant son travail au mieux et se surpassant parfois – en tant que personne, emphatique avec les personnes traversant un chemin difficile, des choix difficiles et ayant moins de possibilités et de chances d’être et de se sentir inclues. Nous célébrons ici le fait d’être différents, mais égaux, d’être des personnes exilées, mais de rester des humains quand même. Ce qui, on nous le rappelle, n’est pas vrai du tout quand on se trouve devant un bureau ou un guichet d’une quelconque autorité étatique.

J’ai tellement apprécié mon après-midi ici que je ne me suis pas rendu compte qu’il était honteusement tard, après de longues conversations avec Amélie, Tamara, Pierre et d’autres invités. Pour moi, Diver’cité est une offre complète : prendre un cours de français dans la nature (une fois que je lance mon mécanisme parlant, c’est comme le courant de la conscience, mais avec beaucoup de fautes grammaticales), la cuisine traditionnelle du monde entier (et comment la raclette suisse pourrait-elle manquer ?), faire la connaissance de nouvelles personnes (dans une nuit d’été pluvieuse pas si romantique que ça).

Oui, j’ai définitivement passé une très belle journée qui s’est terminée de la manière la plus parfaite qui soit ; ma sœur m’avait fait une énorme surprise : elle avait fait un long chemin avec sa famille pour nous rendre visite. Je ne pouvais pas mieux terminer une belle après-midi comme ça.

 

Elvana Zaimi Tufa

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




FLASH INFOS #117

Sous la loupe: Allemagne: une marche pour la communication entre réfugié.e.s et employeurs / 85 migrant.e.s secourus en France / L’indifférence à la vie des migrant.e.s dans le nord de la France

Allemagne: « Walk into the light », une marche pour la communication entre réfugiés et employeurs

InfoMigrants, le 05.08.2022

En Allemagne, une tournée d’une nuit a été organisée en juillet réunissant habitant.e.s et personnes réfugiées.  L’objectif : mettre en relation des personnes réfugiées à la recherche d’un emploi avec des employeurs potentiels.  Mais aussi, surmonter les terreurs nocturnes, héritées par de nombreuses personnes migrantes pendant l’exil.

Une centaine de personnes ont participé à cet événement. Après les présentations et le dîner, environ la moitié des participant.e.s ont parcouru 31 km à pied en plein nuit.

Pour certain.e.s, l’expérience de la randonnée de nuit est une façon d’aborder la nuit autrement, en en faisant quelque chose de positif.

Zahra AHMADIYAN

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

85 migrants secourus en France

InfoMigrants, le 05.08.2022

Les services de secours français ont porté assistance à 85 personnes migrantes dans le détroit du Pas-de-Calais la semaine dernière. Lors de la dernière opération de sauvetage, 40 personnes ont été secourues, selon la Préfecture Maritime. Informés de la présence d’un bateau en détresse au large des côtes, les services de secours se sont immédiatement rendus sur les lieux et ont trouvé plusieurs personnes migrantes dans l’eau. Les sauveteurs ont indiqué que toutes et tous ont été récupérés sains et saufs, tout comme les personnes restées dans le bateau qui a coulé peu après.

En été, ces traversées augmentent. Donc, la semaine dernière, 388 personnes migrantes dans huit bateaux ont été renvoyés à Douvres, en Angleterre. Dans la semaine du 25 au 31 juillet, 1’045 personnes ont réussi à atteindre les eaux britanniques, selon les autorités britanniques.

Enfin, à l’heure actuelle, environ 16’000 personnes ont réussi à rejoindre le Royaume-Uni après avoir traversé la Manche depuis le début de l’année 2022. Ce chiffre est en augmentation depuis 2021.

Renata Cabrales

Membre de la rédaction de Voix d’Exils

L’indifférence à la vie des migrants dans le nord de la France

Infomigrants, le 11.08.2022

Des dizaines de migrants perdent la vie à la frontière franco-britannique, de différentes manières. Un problème qui pourrait être évité si les autorités n’étaient pas indifférentes.

Connue dans le monde entier pour être une zone de transit des migrants vers le Royaume-Uni, dans le nord de la France, de nombreuses personnes meurent chaque année en tentant de traverser de l’autre côté de la Manche.

Ces jours-ci, des cas tragiques ont été connus, par exemple, de Le 30 juin, Osman, le jeune Somalien de 25 ans, qui s’a suicidé; Un mois plus tôt, le 29 mai, Meretse, un Éthiopien de 28 ans, est mort percuté par un train de marchandises, à Calais et le 10 mars, Omar Ismaïl, originaire du Soudan, est mort, comme Osman, percuté par un véhicule, près de Calais.

Selon les défenseurs-es de droits humaines, ces décès sont dans tous les cas les conséquences directes et dramatiques « de la politique de non-accueil de la France, donc, ils exposent que “si les personnes étaient accueillies de manière correcte, s’il n’y avait pas cette pression policière permanente sur eux, nous n’en serions pas là. »

De même, ils pensent que le fait de faire du nord de la France un enfer pour les personnes qui veulent migrer, les choses ne seront pas différentes, car un migrant se battra pour arriver à son but.

Renata Cabrales

Membre de la rédaction de Voix d’Exils