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FLASH INFOS #137

Sous la loupe : Tremblement de terre en Turquie et Syrie / Demande d’asile en hausse en Suisse / Le préapprentissage d’intégration

 

Tremblement de terre en Turquie et Syrie

Info migrants, le 13 février 2023

 

Demande en hausse, Berne pointe du doigt la Turquie et la Serbie

20min, le 13 février 2023

 

Préapprentissage d’intégration : niveau de satisfaction élevé et légère baisse du nombre de participants

admin.ch, le 02 février 2023

 

 La rédaction vaudoise de Voix d’Exils




FLASH INFOS #136

Sous la loupe : La politique migratoire suisse est « un véritable fiasco » / Immigration : le patronat divisé au sujet du titre de séjour métiers en tension / Royaume-Uni, 76 mineurs disparaissent mystérieusement

 

 

 

Voici nos sources pour creuser les sujets:

La politique migratoire suisse est un véritable fiasco

Le Matin, le 28 janvier 2023

 

Immigration : le patronat divisé au sujet du titre de séjour métiers en tension

Le Monde, le 27 janvier 2023

 

Royaume-Uni, 76 mineurs disparaissent mystérieusement

France Info, le 25 janvier 2023




La légende de la reine du Meran, Shahmeran

Illustration: Lia / Voix d’Exils

Une légende kurde #2

Voici la deuxième « histoire du monde de Voix d’Exils ». A chaque publication de la série: une légende, un mythe ou une fable du pays d’origine d’un rédacteur ou d’une rédactrice. 

Shahmeran est une créature mythologique que l’on trouve en Anatolie, en Iran et en Irak. Elle a une tête de femme et un corps de serpent.

Il y a des milliers d’années, des serpents appelés Meran vivaient en paix sous terre. Ils étaient intelligents, compatissants et discrets. Parmi eux vivait une jeune et belle femme, Shahmeran, la reine des Meran.

Un jour, le fils d’une famille pauvre qui vendait du bois pour gagner sa vie, Cemşab (Djemşab), découvrit une grotte sombre pleine de miel. Pour extraire le miel, Cemşab resta dans la grotte pour en recueillir le plus possible.

Peu après, il s’est rendu compte que de la lumière sortait d’un trou. Lorsqu’il agrandit le trou avec son couteau de poche, il vit un jardin plus beau qu’il n’en avait jamais vu de sa vie, dans lequel il y avait des fleurs uniques, un grand lac et de nombreux serpents. Après avoir rencontré et gagné la confiance de Shahmeran, il décida de vivre dans ce jardin pendant de nombreuses années.

Des années plus tard, sa famille lui manqua tellement qu’il supplia Shahmeran de rentrer auprès des siens. La reine de Meran accepta à une condition: qu’il promette de ne dire à personne où il était durant tout ce temps. Cemşab promit à Shahmeran de garder le secret puis est partit ensuite rejoindre sa famille.

Cemşab respecta sa promesse pendant de nombreuses années, jusqu’au jour où le sultan du pays tomba malade. Les médecins lui dirent que le seul remède était la chair de Shahmeran et la nouvelle se répandit partout. 

Ils appelèrent donc tous les hommes du pays et les obligèrent à se rendre au hammam pour voir celui qui avait des écailles sur le dos, preuve qu’il avait rencontré Shahmeran. Cemşab fut alors reconnu.

Forcé de révéler l’emplacement du puits, Shahmeran a été retrouvée puis emmenée au palais où elle fut donnée à manger au sultan. Après la mort de Shahmeran, Cemşab se sentant coupable du sort qui lui avait été réservé décida de se rendre dans la grotte où il l’avait rencontrée pour demander au peuple des serpents de le punir.

À l’entrée de la grotte, Cemşab tomba nez à nez avec un vieux sage. Il expliqua son intention, mais le sage lui demanda d’y renoncer : « Si le peuple des serpents apprend la mort de Shahmeran, ce serait la fin de l’humanité. Personne ne pourrait arrêter les serpents. »

Cemşab accepta de garder alors le silence et partit. Mais avant qu’il ne reparte, le vieux serpent sage lui chuchota : « Shahmeran s’est sacrifiée pour toi, son âme, son pouvoir de guérison et son savoir seront en toi. Va, pars sur les chemins, toute la nature, les fleurs, les buissons, les plantes, même la plus petite herbe t’aideront et te donneront leurs secrets. Tu rendras ces secrets aux hommes en les guérissant. »

Cemşab appela alors deux serpents et leur dit : « Vous avez devant vous Lokman Hekim, cet homme sera guérisseur et vous l’accompagnerez dans toutes ses recherches pour comprendre ce que la terre et les plantes ont à lui apprendre. » Devenu Lokman Hekim, (hekim : médecin), Cemşab partit sur les routes pour apporter guérison et depuis ce jour, les deux serpents sont le symbole de la pharmacie et de la médecine.

Selon la légende, les serpents ne savent pas jusqu’à aujourd’hui que Shahmeran a été tuée. On dit que le jour où les serpents apprendront que Shahmeran a été tuée, ils envahiront la terre des hommes.

L.B

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Les Golems de l’asile

Illustration : Harith Ekneligoda

Ou l’expérience corrosive du permis F

C’est l’automne et le soleil tardif illumine de mille couleurs la nature en pleine métamorphose. Mes yeux contemplent, mon cœur se tourne vers lui-même et dans cet espace de silence, il devient mon seul interlocuteur. La belle mosaïque du paysage suisse comporte une grosse tache de peur, un petit point de joie et un grand rectangle de souffrances.

J’avais reçu un avis négatif du SEM à ma demande de protection. L’injonction de quitter le territoire m’avait été signifiée quelques jours après. Je me souviens même que je m’étais rapproché de service d’aide au départ volontaire et réfléchissais encore sur la pertinence de la décision finale à prendre car, entre temps, j’avais été diagnostiqué d’une maladie grave et incurable.

Des policiers à ma porte

Il était neuf heures du matin ce jour-là quand j’entendis frapper à ma porte. C’était la police valaisanne.

« Habillez-vous » me dit l’agent qui se tenait devant la porte « Nous avons pour mission de vous conduire à Berne ».

Aucun recours n’était possible.

En bas de l’immeuble, deux autres policiers en civil attendaient près d’un bus ; ils se présentèrent et me lurent leur ordre de mission. Le chef me demanda si j’avais auparavant reçu une convocation directe du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM), je lui répondis tranquillement « non » . Il s’interrogea :

« Alors pourquoi réquisitionner la force ? Il n’y a manifestement pas refus d’obtempérer ». Ce détail sera important pour la suite des événements ce jour-là.

Arrivés à Berne et après la fouille au corps usuelle, l’agent bernois voulut me mettre en cellule et décharger l’ordre de mission de mon escorte en attendant mon audition.

Le policier valaisan, qui était resté silencieux jusque-là, opposa un refus ferme et dit :

« Vous n’avez jamais adressé de convocation à ce Monsieur. Vous ne pouvez donc pas le traiter comme s’il avait refusé de collaborer. Nous attendrons ensemble l’heure de l’audition et nous repartirons en Valais avec lui ». Et il en fut ainsi.

Un policier qui me soutient contre son collègue? Je n’en revenais pas.

La suite fut plus facile à assumer: même quand la délégation de l’ambassade de mon pays tenta de m’humilier, je restais attentif à mon combat. Le fonctionnaire du SEM mit fin à l’entretien en ces termes :

« Ce n’est pas à moi que reviens le mot final, mais laissez-moi vous dire que vous avez tout au plus un pour cent de chances de rester en Suisse ».

Je répondis « merci de ne pas m’avoir complètement fermé la porte ». Il fut très surpris par ma réaction.

Le permis F, oui mais…

Moins de deux semaines après, je reçois un courrier qui m’annonce que la Suisse m’a accordé un permis F. Une joie immense inonda alors mon cœur et que de projets…

Tout ceci fut de courte durée, quand on m’expliqua exactement quels étaient les contours du permis F (admission provisoire). Entre autres limites, je ne peux pas voyager hors de Suisse et n’ai pas la possibilité de faire venir ma famille en Suisse dans le cadre d’un regroupement familial.

Ainsi, depuis environ sept ans, je suis enfermé dans les limites de mon document de résidence en Suisse.

– Oui je suis reconnaissant à la Suisse.

– Oui je suis en vie.

– Oui j’ai un soutien pour vivre.

La Suisse est un très beau pays et sa population est globalement accueillante. Tout ceci fait sens, quand le système d’accueil ne transforme pas le contexte de notre existence en prison.

Depuis huit ans, j’ai quitté les miens: mon épouse et ma fille.

Aujourd’hui, les conditions de vie que m’accorde mon permis ont fait de moi un mari et un père indigne. J’ai déserté le foyer conjugal, laissant derrière moi une épouse éplorée et une jeune adolescente qui se sent abandonnée. Quels mots puis-je trouver face aux questions de mon enfant qui veut me faire comprendre sa douleur ? Que puis-je lui expliquer de la douleur et du mal qui me ronge la chair et l’âme ? Comment lui faire comprendre qu’elle n’est pas mon dernier choix, malgré les apparences ? Comment expliquer à chaque téléphone à mon épouse que mon absence n’est pas un divorce ?

Le permis F jour après jour fait son œuvre corrosive dans les liens sociaux.

L’alchimie du système d’asile en Suisse a ainsi fabriqué des centaines de milliers de Golems: espèces d’individus, apparemment vivants, qui traînent autour d’eux une tristesse qui tue et qui déshumanise.

On n’en parle pas assez, mais la société est-elle vraiment prête à assumer ce gâchis ? Comment peut-on offrir du miel avec un arrière-goût si amer ?

Jima

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Genève élargit les droits politiques des personnes étrangères

 

Photo: Lia / Voix d’Exils.

Interview du politologue Antoine Chollet

Dans le podcast d’aujourd’hui nous allons parler du droit de vote des personnes étrangères en nous intéressant à l’initiative « Une vie ici, une voix : renforçons la démocratie », qui a été adoptée par la population genevoise le 2 octobre dernier. Cette initiative permet à toute personne qui réside depuis au moins huit ans sur le territoire du canton de voter, d’élire ou d’être élue au niveau communal et cantonal. Son originalité est qu’elle ne fait aucune distinction entre les permis de séjour. Pour en parler, nous avons invité Antoine Chollet, politologue et maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Lausanne.

« Nous n’avons jamais eu la chance de voter »

À titre personnel, en tant que réfugié politique, je viens d’un pays où nous n’avons jamais eu la chance de voter.

C’est pourquoi, je pense que c’est un droit essentiel et aussi une grande responsabilité.

Il est donc nécessaire de permettre aux personnes étrangères, quel que soit leur permis, de voter en Suisse pour autant qu’elles résident sur le territoire depuis au moins 5 ans, au niveau communal ou cantonal.

Ainsi, nous avons la possibilité d’exercer nos droits politiques afin de nous sentir intégré.e.s et de participer aux décisions qui nous concernent toutes et tous.

En effet, il faut rappeler qu’un réfugié politique fuit son pays d’origine pour plusieurs raisons. Ce pays peut être par exemple abusif ou dictatorial. Par conséquent, ces personnes réfugiées n’ont jamais eu la chance de voter.

Dans ce contexte, le droit de vote est un bon outil d’expression qui n’existe dans aucun autre système politique que la démocratie. Je suis convaincu que le droit de vote dans le système démocratique helvétique permet de faire entendre la voix de la population tant suisse qu’étrangère.

Tsering Banjetsang

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils