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Un lapin sauve la vie d’un pèlerin

Illustration: Kristine Kostava – Voix d’Exils

Une légende tibétaine #6

Voici la sixième « histoire du monde de Voix d’Exils ». A chaque publication de la série: une légende, un mythe ou une fable du pays d’origine d’un rédacteur ou d’une rédactrice. 

C’est l’une des histoires courtes de mon grand-père dont j’ai su plus tard qu’elle était assez connue dans notre communauté tibétaine. À l’époque où il n’y avait ni internet ni tablettes, ces histoires nous divertissaient tout en nous transmettant des messages profonds.

Il y a longtemps, un pèlerin qui faisait la circumambulation sur le mont sacré Kailash a trouvé un loup pris dans un piège. Par pitié, il l’en libéra. Le loup grogna : « J’ai très faim et très soif ! Cela fait trois jours que je suis dans ce piège. J’ai besoin que tu me donnes ta chair et ton sang pour me nourrir ! » et il bondit sur le pèlerin.

Le pèlerin très effrayé s’écria : « Tu veux me manger alors que je t’ai sauvé ! Tu es une créature qui n’a pas le même sens de l’honneur que moi. »

« Je n’ai jamais entendu parler d’un humain ayant de l’honneur » répondit le loup. « Tout le monde mange lorsqu’il a faim », et il s’approcha à nouveau du pèlerin tremblant de peur.

« Avant de me manger, demandons à d’autres animaux si les humains ont de l’honneur. S’ils répondent que oui, tu ne pourras pas me manger. S’ils répondent que non, alors tu pourras me manger », déclara le pèlerin d’une voix saccadée. Le loup accepta.

Ils partirent à travers la prairie à la recherche d’animaux et rencontrèrent d’abord un vieux cheval. Le pèlerin lui demanda : « Les humains ont-ils de l’honneur ? »

« Les humains n’ont pas d’honneur » répondit le vieux cheval. « Quand j’étais jeune, ils m’ont mis un mors entre les dents et une selle sur le dos. Ils me montaient partout. Mais maintenant, ils ne s’intéressent plus à moi. Ils m’ont jeté. Je suis vieux et blessé et je ne les intéresse plus », raconta-t-il.

En entendant cela, le loup ouvrit grand sa gueule et montra ses crocs au pèlerin. « Nous devons encore demander à deux autres animaux » s’écria l’homme. « S’ils disent que les humains n’ont pas d’honneur, alors tu pourras me manger ». Le Loup accepta et ils poursuivirent leur marche.

Ils rencontrèrent une vieille femelle yak et le pèlerin lui posa la même question.

« Les humains n’ont pas d’honneur » dit-elle. « Quand j’étais jeune, ils me trayaient et buvaient mon lait, sans en donner à mon enfant. Désormais je suis vieille, je ne les intéresse plus. Ils se sont débarrassés de moi. »

Le loup s’exclama gaiement : « Tu vois, tout le monde dit que les humains n’ont pas d’honneur. Alors maintenant, je vais te manger », et il s’approcha du pèlerin. Ce dernier balbutia : « Posons la question à un autre animal ». Ils reprirent alors leur chemin et rencontrèrent un lapin à qui ils posèrent la même question.

Le lapin réfléchit longtemps et annonça : « Je ne suis pas sûr. Il faut que j’aille voir où est le piège ». Arrivés devant le piège, le lapin dit au loup : « Maintenant, montre-moi comment tu t’es fait prendre. » Le loup replaça alors sa patte dans le piège qui se referma aussitôt.

Le lapin s’approcha et dit joyeusement au pèlerin : « A partir de maintenant, ne fais plus jamais preuve de pitié envers un loup cruel. »

Le pèlerin et le lapin s’en allèrent chacun de leur côté, laissant le loup dans le piège où il mourut bientôt.

Moralité : Cette histoire comporte deux morales, une pour chacun: le loup et l’homme.

Le loup n’a pas d’honneur car il a essayé de manger la personne qui a eu pitié de lui et qui l’a sauvé. Il n’est donc pas digne de confiance et, tôt ou tard, il finira seul puisque personne ne lui fera confiance pour quoique ce soit. Deuxièmement, lorsque d’autres animaux décrivent leurs expériences de vie avec les humains, ils racontent comment ils ont été exploités pendant leur jeunesse et laissés à l’abandon pendant leur vieillesse. On ne peut échapper à son karma, quelle que soit la distance parcourue. Par conséquent, traitez toujours les autres comme vous aimeriez qu’ils vous traitent, même s’il s’agit d’animaux, car vous ne savez jamais ce que le karma vous réserve à l’avenir.

Dhondup Tsering Banjetsang

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Les deux loups

L.B. / Voix d’Exils

Histoire du monde de Voix d’Exils #7 Une légende amérindienne 

Voici la septième histoire du monde de Voix d’Exils. A chaque publication de la série: une légende, un mythe ou une fable du pays d’origine d’un rédacteur ou d’une rédactrice. 

D’après une légende amérindienne, nous aurions toutes et tous deux loups cachés au fond de nous qui se battent. Une bataille qui se déroulerait en permanence en notre for intérieur sans que nous en ayons forcément conscience.

Un soir, un vieil indien Cherokee raconte à sa petite fille l’histoire de cette bataille intérieure qui se déroule en chacun de nous et lui dit :

« Ma fille, il y a une bataille qui se déroule entre deux loups à l’intérieur de nous tous:

L’un est le Mal : renfermant la colère, l’envie, la jalousie, la tristesse, le regret, l’avidité, l’arrogance, la honte, le rejet, l’infériorité, le mensonge, la fierté, la supériorité et l’égo.

L’autre est le Bien : renfermant la joie, la paix, l’amour, l’espoir, la sérénité, l’humilité, la gentillesse, la bienveillance, l’empathie, la générosité, la vérité, la compassion et la foi. »

La petite fille songea à cette histoire pendant un petit moment et lui demanda :

« Grand père, lequel des deux loups finit par remporter la bataille ? »

Le vieux Cherokee répondit simplement :

« Celui que tu nourris. »

L.B.

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Deux lapins et leur demi-amitié

Dessin: Dhondup Tsering Banjetsang / Voix d’Exils.

Une fable tibétaine #4

Voici la quatrième « histoire du monde de Voix d’Exils ». A chaque publication de la série: une légende, un mythe ou une fable du pays d’origine d’un rédacteur ou d’une rédactrice. 

Il était une fois deux lapins: Kari et Nari qui vivaient dans les hautes vallées de l’Himalaya. La forêt leur fournissait des aliments délicieux à manger et un abri pour vivre, mais ils risquaient aussi d’être attaqués par les prédateurs de la jungle.

Un jour ensoleillé, les deux jeunes lapins sautillaient dans la forêt. L’un d’eux dit à l’autre : « Nous sommes de bons amis. Nous devons nous entraider. Si une bête s’en prend à toi, je resterai pour t’aider. » L’autre lapin répondit : « Je t’aiderai aussi si une bête s’en prend à toi. »

Après un moment, ils entendirent un bruit fracassant. C’était un grand ours des montagnes. L’un des deux lapins grimpa dans un arbre tandis que l’autre, étant trop dodu pour y grimper, se jeta au pied de l’arbre et fit semblant d’être mort. Un instant plus tard, l’ours regarda le gros lapin et le renifla. Le lapin retint son souffle. Ces 5 secondes lui parut une éternité. Pendant ce temps, l’ours se pencha sur le lapin puis partit. Le lapin qui se cachait dans l’arbre descendit puis demanda à son ami : « L’ours a mis sa bouche près de ton oreille. Que t’a-t-il dit ? » Le lapin dodu lui répondit : « Il m’a dit : ne fais pas confiance à ton ami car il s’est enfui quand tu avais le plus besoin de son aide. » 

La morale de l’histoire : Soyez très prudents lorsque vous choisissez vos amis et assurez-vous que vous partagez la même conception de l’amitié.  

Dhondup Tsering Banjetsang

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Le chien et le loup

Harith Ekneligoda / rédaction valaisanne de Voix d’Exils.

Petite critique des entreprises inutiles

Un jour, un loup attaqua un village où la plupart des habitants étaient éleveurs de moutons.

Les chiens du village se mirent à courir après le loup. Au bout d’un moment, fatigués, ils retournèrent au village, à l’exception d’un seul qui continua de pourchasser le loup.

Quand le loup fut fatigué, il s’arrêta et dit au chien :

« Es-tu le chien d’un propriétaire de moutons? »

Non…, répondit le chien

Le loup demanda : « Es-tu le chien du maire du village ? »

Non…, répondit le chien

Le loup demanda encore : « Es-tu le chien du fils du maire ? »

Non… répondit le chien

Le loup demanda : « A qui donc appartiens-tu ? »

« Je suis le chien du tailleur… »

Le loup demanda : « Est-ce que le tailleur a des moutons ? »

Non… répondit le chien

Le loup demanda encore : « Est-ce que les propriétaires des moutons te donnent de la viande ou des os quand ils cuisinent ? »

Le chien répondit : « Non, jamais. Ils ne donnent de la nourriture qu’à leurs propres chiens »

Le loup lui dit alors : « Chien fils de chien. Imbécile. Cela fait une heure que tu cours derrière moi alors que ton ami le tailleur n’a même pas de mouton, et que toi-même tu ne profites en rien des gens du village ! Tu as perdu ton souffle pour rien. Je te donne un conseil : « Occupe-toi de tes propres affaires et arrête de mettre ton nez dans celles des autres. »

Wael Afana

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils