1

Revue de presse #35

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils.

Sous la loupe : Les centres d’asile fédéraux menacés de surcharge / Macron renforce la lutte contre l’immigration clandestine / Malte accusée de « traitements inhumains » par 50 migrants

Les centres d’asile fédéraux menacés de surcharge

Le Journal du Jura, le 05 novembre 2020

En temps normal, environ 4’400 places sont disponibles dans les centres fédéraux d’hébergement pour requérants d’asile suisses. En pleine pandémie du Covid-19, des mesures d’hygiène et de distanciation ont dû être prises. Du coup, les places disponibles ont été divisées par deux a annoncé jeudi 5 novembre Mario Gattiker, le directeur du Secrétariat d’État aux migrations (SEM).

Néanmoins, les demandes d’asile sont reparties à la hausse ces dernières semaines et le taux d’occupation des centres d’asile s’élève désormais à plus de 90%. « Il n’y a pratiquement plus de marge de manœuvre. Nos structures sont menacées de surcharge » a averti Claudio Martelli, le directeur adjoint du SEM. Pour éviter les surcharges, des mesures supplémentaires ont été prises. Désormais, tous les nouveaux arrivés sont testés et doivent s’isoler jusqu’à la réception des résultats. Les personnes à risque sont séparées. Le port du masque est obligatoire dans les salles communes. La température est prise avant chaque repas et les autorisations de sortie pendant le week-end sont suspendues. En outre, des capacités supplémentaires étant nécessaires pour que les centres continuent de fonctionner conformément aux mesures sanitaires, le SEM a réaménagé les halles du service des automobiles du site de Ländi de Brugg (AG). D’autres places d’hébergement sont en préparation à Sulgen (TG) et Reinach (BL).

Emmanuel Macron annonce des renforts pour lutter contre l’immigration clandestine

Les Echos, le 5 novembre 2020

Une semaine après l’attaque de la basilique Notre-Dame de Nice, le jeudi 5 novembre, le chef de l’État français a annoncé le doublement des forces de contrôle aux frontières, qui passeront de 2’400 à 4’800 hommes pour lutter contre l’immigration clandestine. Évoquant une « intensification de la menace », le président français a déclaré que « lutter efficacement contre ce terrorisme islamiste, c’est lutter également contre des réseaux de trafiquants qui ont des liens avec ces terroristes, qui parfois sont des terroristes eux-mêmes, qui utilisent le trafic de stupéfiants et le trafic d’êtres humains pour renforcer leur action et parfois agir directement ».

En outre, le chef d’État français a soutenu que « faire le lien [entre terrorisme et immigration ndlr.] ne veut pas dire qu’on doit tout confondre. Il ne faut pas tout confondre. Nous ne sommes pas une île et nous vivons dans un continent qui est fait de migrations ». A cet effet, il a évoqué « une refonte en profondeur de l’Espace Schengen » dont il souhaite repenser l’organisation et intensifier la protection commune aux frontières avec une véritable police de sécurité aux frontières extérieures.

Le gouvernement maltais accusé de « traitements inhumains » par 50 migrants

InfoMigrants, le 06 novembre 2020

En avril dernier, le Dar As Salam 1, un canot transportant une cinquantaine de personnes migrantes a été intercepté en mer par un navire marchand alors qu’il naviguait dans les eaux maltaises. Le bateau commercial a ensuite remis les personnes migrantes aux garde-côtes libyens qui les ont acheminés au port de Tripoli (LY). Cinq cadavres se trouvaient également à bord.

Suite à cet événement, les principaux concernés ainsi que les proches des deux hommes morts en mer ont porté plainte contre le Premier ministre maltais, le ministre de l’intérieur et le chef de l’armée maltaise pour non-respect de la Constitution maltaise et de la Convention relative aux droits de l’Homme. Les plaignants accusent le gouvernement maltais de « traitements inhumains et dégradants » qu’ils ont subis après leur renvoi en Libye et leur placement en centre de détention. Ils reprochent également au gouvernement maltais d’avoir violé leur « droit à la vie » et de n’avoir pas respecté les obligations du pays qui l’obligent à examiner les demandes d’asile.

L’Organisation internationale des migrations (OIM) avait à l’époque condamné l’action menée par Malte, rappelant que « les personnes secourues en mer ne doivent pas être renvoyées dans un port dangereux ».

 

Masar Hoti

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

 




Le délit de solidarité

Clémence Demay. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils.

C’est le sujet de Voix d’Exils pour le Grand Direct de Radio Django du 18 juin

Commettre « un délit de solidarité » c’est courir le risque d’être jugé et condamné pour avoir aidé des personnes migrantes en situation irrégulière en Suisse. Il s’agira d’explorer la tension entre le respect de la loi d’une part et l’entraide solidaire de l’autre. Pour éclairer ce sujet, Mamadi de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils a reçu Clémence Demay, Assistante et doctorante au Centre de droit public de l’Université de Lausanne sur le plateau de Radio Django à l’occasion du Grand Direct du 18 juin.

Un sujet à écouter ici

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 

le délit de solidarité / Radio Django 18.06.2019. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils.




« L’enseignement supérieur et la formation professionnelle doivent être ouverts à toute-s les réfugié-e-s ! »

Colloque de l’UNES « l’intégration par la formation ». Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

 

Compte rendu du colloque de l’UNES « l’intégration par la formation »

L’Union des étudiant-e-s de Suisse (UNES) a organisé, le 26 octobre dernier, à Berne, un colloque portant sur l’intégration par la formation des migrants et réfugiés résidant en Suisse. Pour aborder ce sujet, des intervenants de plusieurs cantons ont présenté leurs projets en cours et les résultats obtenus, dont Voix d’Exils.

Tout a commencé à 9:00 par l’accueil des participants à l’entrée de la salle de conférence. Dès 9:30, les mots bienvenue à toutes et tous ont été retransmis, par haut-parleurs, aux 60 personnes présentes dans l’un des auditoires de l’Université de Berne. Les représentantes de l’UNES qui s’occupent du projet « Perspectives – Études » depuis 2015 se sont, par la suite, présentées et ont souhaité de bons échanges aux participants, dont plusieurs acteurs de l’intégration et personnes réfugiées en Suisse. Le colloque s’est déroulé en deux langues : le français et l’allemand, grâce à deux interprètes qui ont traduit en simultané toutes les interventions.

Horizon Académique, Université de Genève

La première association a présenté son grand projet d’aide aux réfugiés et requérants d’asile pour leur donner une véritable chance de reconstruction de leur vie via les études universitaires. Metin Turker, responsable et représentant d’Horizon Académique, a précisé que depuis 2016, cette organisation genevoise a pu permettre à de nombreuses personnes étrangères d’entrer à l’Université de Genève.

Pour l’immatriculation pour l’année académique 2018-2019, 63 personnes motivées à poursuivre des études supérieures sont entrées à l’Université de Genève. Parmi elles, 10 nationalités différentes et 40 % de femmes. L’association dispense des cours de français intensif pendant six semaines et accompagne par la suite les étudiants, dont les documents scolaires ne sont pas reconnus en Suisse, dans la préparation et la réussite de l’examen d’équivalence nommé ECUS. Tous ces services font partie de l’aide sociale et dépendent de l’aide financière du bureau de l’intégration du canton de Genève. Plusieurs fonds privés soutiennent aussi ce projet.

Metin Turker, responsable Horizon académique, Université de Genève. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Offener Hörsaal, Université de Berne

Ensuite, Valeria Pisani, responsable de Studentlnnenschaft Universität Bern (SUB) a pris la parole. Ce comité a été créé par des étudiants de l’Université de Berne en automne 2016, afin de faciliter l’accès à certains cours, en tant qu’auditeurs libres, à des réfugiés qui ont la volonté de faire des études supérieures et afin de les accompagner dans les démarches qui leur faciliteront leur entrée à l’Université.

Les membres de cette organisation sont des étudiants qui s’engagent bénévolement. Ils offrent aussi aux personnes intéressées l’accès à la bibliothèque de l’Université et, parfois, la possibilité d’emprunter un ordinateur. L’Université de Berne collabore aussi avec cette organisation pour la reconnaissance de ces personnes en tant qu’auditeurs libres, mais ils n’ont pas encore la possibilité de passer d’examens pour obtenir un certificat. Le SUB fournit un peu de matériel comme des stylos et des cahiers à ces réfugiés, grâce au soutien financier de quelques fonds privés et également de l’Université de Berne.

Voix d’Exils

Dans la deuxième partie de la matinée, Afif Ghanmi, coordinateur de programmes à L’Établissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), a présenté le site d’information Voix d’Exils. Ce média en ligne, spécialisé dans la migration, est aussi un programme intercantonal qui regroupe trois rédactions : Vaud (Evam), Valais (Service de l’action sociale) et Neuchâtel (Service des migrations).

Voix d’Exils accueille des participants ayant un niveau élevé de formation ou des compétences spécifiques et a pour objectifs de : porter la voix des personnes migrantes, stimuler un débat constructif sur des sujets de migration et de société, créer un pont entre les migrants et la société d’accueil, valoriser l’apport des personnes migrantes pour la société suisse et produire une information spécialisée de qualité. Du coté de ses rédacteurs, ce média vise à faciliter leur intégration socioprofessionnelle.

Ce programme est considéré comme un tremplin vers l’emploi. Il permet le développement de compétences spécifiques et transversales pour répondre aux exigences du marché du travail suisse. Ceci par le biais de l’immersion dans un environnement de travail réel, l’encadrement par des professionnels spécialisés et la dispense d’une formation multimédia en techniques journalistiques.

Une recherche qualitative et quantitative, menée sur les trajectoires et les compétences acquises par les participants de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils, montre plus de 50% d’issues favorables en terme de formation et de prise d’emploi à la sortie du programme et met en valeur les effets positifs de cette mesure sur le moral et la santé mentale des participants. Le rôle important d’un tel programme dans l’aide à l’intégration socioprofessionnelle est également souligné dans les résultats de cette recherche. Pour illustrer ses propos, Afif Ghanmi a brièvement présenté le portrait de deux anciens rédacteurs; l’un poursuit actuellement ses études supérieures à l’École cantonale d’art de Lausanne (ECAL) et l’autre termine cette année sa formation en cours d’emploi en tant qu’éducateur social.

Afif Ghanmi, coordinateur de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Mamadi Diallo, rédacteur à Voix d’Exils, a fait un témoignage au nom de la rédaction vaudoise sur les avantages de Voix d’Exils et les bénéfices d’un tel programme notamment pour se familiariser à un environnement de travail réel, collaborer au sein d’une équipe et travailler parfois en autonomie. À Ceci s’ajoute l’amélioration du français et la mise en valeur de compétences spécifiques. M. Diallo a terminé ses propos en exposant le défi qu’il a pu surmonter durant sa participation mensuelle à l’animation de la rubrique « La Rose des Vents » du Grand direct de la webradio lausannoise Radio Django.

Mamadi Diallo, rédacteur de Voix d’Exils. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Powercoders 

Hussam Allaham, Syrien arrivé en Suisse il y a trois ans, s’est concentré sur le « coding ». Hussam était d’abord un participant dans ce projet puis est devenu le responsable. Powercoders est le nom d’un projet d’intégration qui forme de jeunes réfugiés aux techniques du digital afin de leur offrir de meilleures chances dans leur vie professionnelle.

Les cours durent entre deux et trois mois. Ils ont d’abord commencé en 2017 à Berne, puis se sont ensuite étendus à Lausanne, Zurich et, dès la fin de l’année, à Bâle. Environ 20 personnes s’engagent, chaque fois, dans le projet. Et le résultat est satisfaisant pour l’instant, car 15 personnes environ trouvent une place de stage ou d’apprentissage dans des entreprises assez connues comme Swisscom.

L’apprentissage de l’allemand ou du français n’est pas un frein à l’intégration professionnelle puisque dans le monde de l’électronique et du digital, c’est l’anglais qui est le plus utilisé. Ainsi, celui qui a très envie d’entrer dans ce secteur du marché du travail, et qui parle un peu l’anglais, réussit à trouver sa place grâce à ces cours. Et une fois dans le marché de l’emploi ils apprennent une des langues du pays.

Hussam Allaham, responsable de Powercoders. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

« Politique suisse d’intégration »

Minh Son Nguyen, avocat et professeur à l’Université de Neuchâtel et de Lausanne, a partagé les résultats de ses recherches sur les textes normatifs (Déclaration des droits de l’Homme, Déclaration des droits de l’enfant Constitutions, lois, jurisprudence, directives et autres) en rapport avec la politique suisse d’intégration.

Le Professeur Nguyen a commenté le sens des mots comme « intégration » et « s’intégrer » qui, au fil du temps, ont pris d’autres sens.

Il a insisté sur la nécessité d’interpréter les articles de lois nationales et internationales sur les migrants en faveur de ces derniers. Ce, malgré la restriction historique du droit d’asile dans de nombreux Etats et la discrimination entre différents statuts de migrants et réfugiés en Suisse.

L’intégration des étrangers va, selon lui, de pair avec le principe de la non-discrimination et le respect des droits humains. On ne peut pas interpréter systématiquement les textes de loi indépendamment du contexte et de la réalité des individus concernés. D’où le besoin d’humaniser davantage le processus d’intégration.

Dans la pratique, il y a de nombreux obstacles auxquels il faut incessamment faire face. Il existe un arsenal important de textes. Mais cela demande d’effectuer des démarches juridiques conséquentes et de dépenser beaucoup de temps et d’énergie pour avoir gain de cause. Tâches qui seraient de plus en plus difficiles, notamment avec l’entrée en vigueur des nouvelles lois qui durcissent encore plus le droit d’asile et le droit à la citoyenneté.

Prof. Ninh Son Nguyen, Université de Neuchâtel et Lausanne. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Workshops

Les participants se sont retrouvés l’après-midi autour de workshops. Un atelier pour les francophones a traité de la question de l’intégration et des accès à la formation supérieure et deux ateliers germanophones ont débattu de l’intégration par la formation professionnelle.

Une mise en commun des résultats et des conclusions a eu lieu en plénière avant l’apéro de fin de journée.

Colloque de l’UNES « l’intégration par la formation ». Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Recommandations de l’UNES

L’UNES appelle, dans son communiqué à l’issu de cette journée, à la prise en compte « des parcours de formation antérieurs, les potentiels et les capacités scolaires des réfugié-e-s et personnes migrantes dans le processus d’intégration ». Aspects d’ailleurs relevés par les différents orateurs et soutenus par les expériences sur le terrain.

« L’enseignement supérieur ou la formation professionnelle doivent être ouverts à tout-e-s les réfugié-e-s en fonction de leurs intérêts et capacités ». Ceci est le message fort de l’UNES adressé aux Universités, à la Confédération, aux cantons et aux services sociaux afin de garantir une intégration durable, une grande autonomie financière et réduire ainsi le chômage.

Pour ce faire, les décideurs sont invités à faire les bons choix politiques en matière d’intégration. Du côté des professionnels et des acteurs de l’intégration, il y a un besoin urgent de coordonner les efforts et d’échanger sur les expériences afin de faciliter l’accès à la formation pour les réfugié-e-s et les personnes migrantes.

Equipe d’organisation du colloque de l’UNES. Photo: Eddietaz / Voix d’Exils

Babak Qodrati

Rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Voix d’Exils N°33

Dossier : Requérants d’asile et travail, un couple impossible ?

Pour réussir à décrocher un emploi, il faut déployer beaucoup de volonté, du flair et un sens développé de flexibilité.

Télécharger le N°33 au complet