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Le Refugee Food Festival offre la chance à des chefs cuisiniers migrants de révéler leurs talents

La Buvette des Bains sert les assiettes nigérianes. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Cuisine, découverte, partage et intégration : les leitmotivs d’un festival original et novateur

L’Association Food Sweet Food en collaboration avec le l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés (le HCR) a organisé la première édition Suisse du « Refugee Food Festival » qui s’est tenue du 11 au 15 Octobre 2017 à Genève. Ce festival a mobilisé cinq restaurants qui ont confié leurs cuisines à des chefs réfugiés migrants pour faire découvrir au public des plats traditionnels de leur pays.

Le Refugee Food Festival a débuté en France il y a maintenant trois ans et 2017 marque la première édition Européenne. Le festival s’est tenu cette année dans des grandes villes comme : Paris, Athènes, Madrid, Amsterdam, Rome, Milan. Une édition spéciale pour Noël se tiendra du 18 au 24 décembre à Strasbourg. Cet événement culinaire célèbre les saveurs des cuisines du monde. Cette initiative novatrice et originale rencontre un franc succès. Des chefs cuisiniers réfugiés sont accueillis par des restaurants locaux pour concocter et servir des repas traditionnels l’espace d’un service. Du 11 au 15 octobre, ce sont cinq adresses genevoises qui ont confié leurs cuisines à des chefs et des cheffes d’origines syrienne, érythréenne, sri lankaise, tibétaine et nigériane.

 

L’assiette nigériane proposée aux bains des Pâquis

Le jeudi 12 octobre, la rédaction vaudoise de Voix d’Exils s’est rendue à la buvette des Bains des Pâquis pour déguster les plats concoctés par le chef Nigérian Timothy Desmond Eze. Sur le coup de midi, la buvette s’est très vite remplie. « L’assiette nigériane » était ajoutée au menu et mise sur un pied d’égalité avec les autres plats. Le cuisinier invité dans le cadre du festival a proposé deux plats typiquement nigérians: l’un à base de poulet et l’autre végétarien. Les deux plats ont régalé les visiteurs, car plus de 600 assiettes ont été servies pour le plus grand plaisir du public.

La Buvette des Bains. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Promouvoir la cuisine comme moyen d’intégration professionnelle

Un des buts que poursuit le festival est de favoriser par la cuisine l’accès à l’insertion professionnelle de personnes réfugiées. Il mobilise donc des cuisiniers confirmés ou en voie de confirmation, qui ont fait le pari de la cuisine pour s’insérer dans leur pays d’accueil. Il a vocation à fédérer une communauté de volontaires et de restaurateurs qui s’engagent dans différents pays à promouvoir l’insertion professionnelle de personnes réfugiées dans le milieu de la restauration. Chaque Refugee Food Festival est ainsi un tremplin vers l’emploi pour les chefs qui ont l’opportunité de démontrer leurs talents.

Julia Dao interviewée par Lamine. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Changer le regard sur les réfugiés

Un autre objectif du festival est de contribuer à faire évoluer les regards sur le statut de réfugié, en améliorant la compréhension de leur statut, en valorisant les chefs qui y participent ainsi que le patrimoine culturel qu’ils ont à partager. Le festival vise à montrer que derrière la « crise des réfugiés », il y a des femmes et des hommes qui ont des talents, des métiers, des savoir-faire qui ne demandent qu’à être révélés pour contribuer à enrichir leur pays d’accueil. Cette initiative citoyenne défend un état d’esprit positif, valorisant, vertueux, allant à l’encontre de discours parfois misérabiliste ou de perceptions anxiogènes de l’arrivée de réfugiés.

Timothy Desmond Eze en cuisine. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Rencontres culturelles, culinaires et humaines

Le Refugee Food Festival est également un moment convivial et fédérateur, car la cuisine est une formidable porte d’entrée sur le monde et sur l’autre. Elle permet de rassembler des citoyens de tous horizons autour d’un bon repas avec des menus savoureux, originaux, qui sont concoctés avec de bons produits. Ce moment convivial et fédérateur se retrouve aussi dans les cuisines, lorsque les cuisiniers réfugiés rencontrent le personnel des restaurants qui les accueillent et qu’ils mettent en commun leurs savoir-faire culinaires.

Mylène et Lamine

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

« Triomphe de l’ananas » ou « Être ou ne pas être » – commentaire

Les habitués des Bains des Pâquis ont eu l’opportunité de découvrir la cuisine nigériane. « L’assiette nigériane » était présentée sous deux

formes : pour les omnivores et pour les végétariens. Le plat végétarien a eu le plus de succès. L’ananas, exposé solennellement sur l’assiette, excitait l’imagination et incitait à aller voir le cuisinier.

Timothy Desmond Eze. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils

A première vue, c’est un homme avec un charisme digne du pirate Long John Silver, le personnage de fiction du roman de Robert Louis Stevenson « L’Île au trésor », devant lequel (pour être bien accueillis) on devait chanter :

“Fifteen men on the dead man’s chest

…Yo-ho-ho, and a bottle of rum!”

Mais, en réalité, on a découvert que Timothy Desmond Eze est un jeune homme modeste, souriant et ouvert, très loin de Long John Silver. Et si décrire la vie actuelle de Timothy revenait à poser la question « Être ou ne pas être ? » Être un cuisinier en Suisse ou ne pas l’être ? Pour ce Nigérian, c’est une question essentielle, parce qu’il ne perd pas l’espoir de pouvoir vivre de son métier en Suisse.

Mylène

Interviews des organisateurs de l’édition genevoise du Refugee Food Festival sur Radio Django

Julia Dao et Brice Ngaramba interviewés par Lamine à Radio Django. Photo: rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Le 17 octobre 2017, Voix d’Exils a invité les deux organisateurs du Refugee Food Festival de Genève : Brice Ngaramba, porteur du projet, et Julia Dao, responsable communication du bureau Suisse du HCR, pour un interview sur les ondes de la Radio Django.

Vous pouvez écouter l’interview en cliquant ici

Lamine

 

 




Accueil de requérants d’asile en Valais : bientôt trois ans pour le centre des Barges

Les jardins des Barges. Photo: Voix d'Exils

Les jardins des Barges. Photo: Voix d’Exils.

A la fin du mois de mai, la rédaction valaisanne de Voix d’Exils a eu l’occasion de visiter le centre de formation et d’hébergement pour requérants des Barges à Vouvry. Les rédacteurs ont pu découvrir ce vaste domaine utilisé par l’office valaisan de l’asile depuis 2011. Ils ont également fait la rencontre de migrants et encadrants qui font vivre le site au quotidien.

Situé au beau milieu de la plaine du Rhône, le domaine des Barges à Vouvry s’étend à perte de vue, entouré de paysages magnifiques, au cœur des Alpes et à quelques kilomètres du lac Léman. Ce domaine de 5’000 m2 appartient à l’Etat du Valais. Depuis août 2011, il est utilisé par l’office valaisan de l’asile. Il sert de structure de formation et de 2ème accueil pour requérants d’asile. « 26 migrants y séjournent actuellement, hommes et femmes, entourés par 6 encadrants », précise Claude Thomas, responsable du centre. Le nombre de pensionnaires est en baisse, conséquence des derniers durcissements de la loi sur l’asile. « Nous avons la capacité d’accueillir une quarantaine de personnes », énonce le chef des lieux.

Depuis 2011, 152 requérants d’asile sont passés par les Barges. Sans véritable problème disciplinaire, se félicite Claude Thomas : « dans 90% des cas, cela se passe bien. Les quelques difficultés que nous rencontrons sont surtout liées à des incompréhensions linguistiques et parfois à la consommation d’alcool ». Mais ces dérives alcoolisées appartiennent au passé, promettent les résidents actuels que nous avons rencontrés. Quant à la cohabitation avec la population locale, elle est plutôt réussie selon Claude Thomas : « par ignorance, certains ont peur, d’autres sont ouverts. A nous de faire passer un message positif, même si ça prend du temps ».

Claude: le responsable des Barges (au centre) accompagné des 4 membres présents ce jour-là de la rédaction de Voix d'Exils. Photo: Voix d'Exils.

Claude: le responsable des Barges (au centre) accompagné des 4 membres présents ce jour-là de la rédaction de Voix d’Exils. Photo: Voix d’Exils.

Composé de deux grandes maisons et plusieurs ateliers, le domaine des Barges compte aussi de nombreux terrains pour le jardinage. De quoi héberger les différentes formations proposées sur place : cours de français, de couture et de coiffure, atelier cuisine, service, nettoyage, coupes de bois de feu, tri de bouchons ou encore agriculture. Les produits frais cultivés au domaine des Barges sont ensuite conditionnés ou utilisés dans les cuisines des différents foyers pour migrants du canton. Dans le même ordre d’idée, les requérants contribuent eux-mêmes à la rénovation du centre, dans le cadre d’ateliers liés au bâtiment. Les requérants participent également aux projets d’utilité publique en collaboration avec les communes environnantes. Mais malgré cette offre de formation, peu de requérants parviennent à trouver un emploi sur le marché suisse. « Leurs chances sont maigres, explique Claude Thomas. Pour les détenteurs d’un permis N, les possibilités se limitent à des domaines où le personnel manque : l’agriculture, les ménages privés et collectifs, les professions de la boulangerie-boucherie et l’hôtellerie restauration. La situation se simplifie avec un permis F ».

Malgré cette réalité, Claude Thomas encourage vivement les requérants à se former : « la vie est longue, on ne peut pas savoir ce qui se passera demain. Il vaut mieux avoir un diplôme dans son CV que de rester les bras croisés. Même si le requérant retourne dans son pays natal, personne ne pourra lui enlever ce qu’il aura appris ici ».

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils

Marie-Pascale: la prof de français dans sa salle de cours. Photo: Voix d'Exils.

Marie-Pascale: la prof de français dans sa salle de cours. Photo: Voix d’Exils.

« Travailler avec les requérants : un vrai partage »

Elle est suissesse, elle a 48 ans. Elle, c’est Marie-Pascale Chambovey, qui travaille au domaine des Barges depuis 2 ans comme professeur de français. La « maman des Barges », comme la considèrent les résidents, vit sa première expérience d’enseignante auprès d’étrangers. Rencontre.

Voix d’Exils : Marie-Pascale, expliquez-nous en quoi consiste votre travail ?

Marie Pascale : Je donne des cours de français chaque matin. Ces classes sont obligatoires. Chaque élève vient une demi-journée par semaine à mon cours. A mon avis, l’intégration passe par la connaissance de la langue française. J’essaie donc de leur apprendre des choses qui leur seront utiles au quotidien. Pour moi, ce n’est pas important qu’ils sachent la différence entre l’imparfait et le passé simple. Il est par contre nécessaire qu’ils apprennent certains aspects pratiques, c’est pourquoi j’organise des sorties de groupes sur le terrain, à la gare ou dans des magasins, afin que les requérants apprennent à se débrouiller eux-mêmes dans ces lieux.

D’où viennent les élèves à qui vous enseignez ?

La plupart sont originaires d’Afrique. Les femmes viennent d’Erythrée et d’Ethiopie. Les hommes d’Algérie, de Guinée équatoriale, de Turquie, de Syrie, du Maroc, de Tunisie, de Guinée, de Mauritanie, du Niger, d’Irak, d’Israël et du Libéria.

Et quelle est votre relation avec ces migrants ?

Cela se passe bien. Certains m’appellent même « la maman des Barges ». On vit dans un esprit familial. Je suis à leur disposition pour les aider et les renseigner tout au long de la journée.

La serre qui se trouve sur le domaine. Photo: Voix d'Exils.

La serre qui se trouve sur le domaine. Photo: Voix d’Exils.

Quelles sont les principales différences entre l’enseignement à l’école obligatoire et dans un centre pour requérants ?

Le côté administratif de l’enseignement obligatoire n’existe pas : pas de réunions avec les parents, pas de notes, etc. Par contre, le niveau n’est pas homogène. Les requérants présentent des niveaux très différents. Les Erythréens, par exemple, n’ont jamais étudié le français, au contraire d’autres Africains qui le parlent bien. Il faut donc une bonne planification qui s’adapte à chacun.

Vous semblez passionnée par ce travail. On sent chez vous une véritable vocation. Est-ce que cet emploi comporte malgré tout des aspects négatifs ?

Effectivement, on peut même parler d’une vocation familiale pour l’enseignement. Mes parents exerçaient la profession, je le fais également et ma fille s’y destine. Il est vrai aussi qu’enseigner à des requérants d’asile est très différent. A moi de chercher de nouvelles méthodes afin de faciliter leur apprentissage de notre belle langue.

A travers votre travail est-ce que votre vision des migrants a évolué ?

J’apprends tous les jours au contact des migrants. C’est un vrai partage de richesses. Pour moi, travailler aux Barges est un rayon de soleil. Le parcours de vie de nos requérants est parfois lourd. A nous de les encadrer au mieux : un vrai et passionnant défi !

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils

 

 




Le « Fateh » ou « Teseaye » : un régal oriental

Samir présente le "Teaseaye"

Samir présente le « Teaseaye ». Photo: Voix d’Exils.

Une nouvelle rubrique culinaire fait son apparition sur Voix d’Exils et vous propose de découvrir des plats du monde entier. Si l’expérience vous tente, envoyez-nous votre recette préférée à redaction@voixdexils.ch en n’oubliant pas d’indiquer :

-Le contexte du plat : ses origines et son histoire.

-Les ingrédients et, le cas échéant, comment se les procurer.

  • -Les indications relatives à la préparation du plat.
  • -Votre nom pour la signature du met

Merci de joindre quelques photographies du plat en attache au mail et en format JPEG. Nous inaugurons cette nouvelle rubrique avec un plat typiquement oriental qui a fait le bonheur de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils! 

Au Liban, ce plat est appelé « Fateh », alors qu’en Syrie il est appelé « Teseaye ». C’est un plat très connu et très apprécié dans les pays orientaux. On le mange à n’importe quelle heure : le matin au petit déjeuner, à midi ou même le soir. Très nourrissant, il se mange chaud, il est facile à préparer et les ingrédients qui le composent sont bons marchés. On peut le préparer avec ou sans viande.

 

Zoom avant sur le « Teseaye ». Photo: Voix d'Exils.

Zoom avant sur le « Teseaye ». Photo: Voix d’Exils.

FATEH OU TESEAYE

Pour 4 personnes

Temps de préparation : environ 30 minutes

 

Ingrédients :

2 verres de pois chiche

4 ou 5 pains libanais

1 kilo de yoghourt nature

½ verre de crème de sésame

Jus de citron

1 gousse d’ail

½ verre d’amande grillées

½ verre de pignons grillés

300 g de viande hachée

Sel, paprika, cumin moulu

 

La rédaction vaudoise de Voix d'Exils se régale!

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils termine en beauté la séance de rédaction du lundi matin en se régalant! Photo: Voix d’Exils

Préparation :

Faire tremper les pois chiche dans de l’eau avec une petite cuillère de bicarbonate de soude pendant 8 heures, puis les laver. Faire bouillir les pois chiche dans 2 litres d’eau jusqu’à ce qu’ils soient tendres. On peut également utiliser des pois chiche en conserve déjà cuits.

Couper le pain libanais en petits morceaux carrés et tapisser le fond d’un grand plat allant au four. Humidifier le pain avec une partie de l’eau de cuisson des pois chiche, puis recouvrir avec les pois chiche.

Mélanger le yoghourt avec l’ail écrasé, le jus d’un demi-citron, un peu de sel et la crème de sésame. Verser le tout sur le pain et les pois chiche. Chauffer brièvement au four. Avant de servir, décorer avec des amandes et des pignons grillés à la poêle et saupoudrer de cumin et de paprika.

La recette varie d’un pays à l’autre, certains y ajoutent des aubergines frites, d’autres préfèrent ajouter un peu de vinaigre à la place du jus de citron. Pour une recette non végétarienne, ajouter sur le yaourt de la viande hachée (bœuf ou agneau) ou de gros morceaux de poulet.

 

Samir

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




Le foyer de Bex fête son trentième anniversaire

Chacune des 35 communautés du foyer de Bex a préparé un plat traditionnel de son pays. Photo: Najet

Le dimanche 24 juin dernier marque une double célébration : celle de la journée des réfugiés et celle du 30 ème anniversaire du foyer pour requérants d’asile de Bex. A cette occasion, une journée extraordinaire a été organisée au foyer de Bex qui était placée sous le signe de la rencontre entre la communauté des requérants d’asile et la population locale. Cette journée de fête a notamment été animée par le groupe de musique Aquavita (eau de vie), Gabidoul le clown, des démonstrations d’arts-martiaux, des danses et un somptueux repas avec des spécialités culinaires de plus de 26 pays offertes par la cuisine.

Les festivités de la journée ont été ouvertes par le mot de bienvenue de la responsable de secteur Est de l’Evam, Madame Christine Blatti, qui a rappelé la place du requérant dans la société suisse, la mission de l’Evam et celles des autorités à leur égard.

Un centre qui a une longue histoire

Le bâtiment, qui accueille aujourd’hui les demandeurs d’asile de Bex, était connu auparavant sous la dénomination de la « Pension du Crochet », qui connut l’âge d’or du tourisme thermal de Bex-les-Bains. Mentionnons aussi que ce bâtiment a joué un rôle prépondérant durant la deuxième guerre mondiale, en abritant des populations persécutées, notamment des membres de la communauté juive contraints à l’exil par les Nazis.« Il y a 30 ans, la Croix Rouge a ouvert cette maison, je dirais même pour héberger les dix premiers Africains qui arrivèrent dans la région » nous a affirmé Madame Christine Blatti. Aujourd’hui, le foyer de Bex accueille 180 requérants d’asile, dont 66 enfants. 35 nationalités sont représentées.

Le clown Gabidoul captive les enfants

Le clown Gabidoul hynotise les enfants

A cette occasion, le clown Gabidoul a fait des numéros qui ont fait rire aux éclats les enfants. Ce fut un moment inoubliable pour eux, comme en témoigne Monsieur Sébastien, qui est un habitant de Bex et qui assisté aux pitreries du clown avec sa femme et ses deux enfants : « on a vu Gabidoul le clown qui partait en vacances, les enfants ont bien rigolé, c’était magnifique pour les petits. En plus de cela, la morale était assez sympa, parce que finalement, il a conclu que l’endroit idéal où on était le mieux c’était à Bex. J’ai eu du plaisir surtout à observer les enfants rire à ce point. C’était vraiment chouette ! A cela s’ajoute qu’en tant qu’adulte, j’ai aussi bien profité de cette journée ».

Suite à cela, un groupe d’enfants a fait une impressionnante démonstration de Ju-jitsu en présence de leur maître Yenene. Ils ont démontré une grande motivation et ont été acclamés par le public pour leur travail remarquable.

Un doux mélange multiculturel

Photo: Najet

L’aspect multiculturel de l’événement était flagrant lors du partage du repas commun composé de mets traditionnels préparés et offerts par l’ensemble des requérants d’asile de Bex. Mais également lors des danses où les gens harmonisaient leurs mouvements sur des musiques du monde entier et dépassaient ainsi leurs différences culturelles. Une ambiance parfaite où les requérants d’asile, les autorités de l’Evam et les habitants de Bex étaient assis à une même table. « Je suis là, parce que je trouve que les requérants d’asile sont mal soignés dans mon pays. Des journées pareilles sont toujours de belles journées, de belles rencontres. Par contre, je regrette de ne pas avoir vu les gens qui sont contre les requérants l’asile. Ils auraient dû venir voir comment ça se passe et comment les gens vivent aussi », s’exclame avec amertume Madame Suzi  Dulex Karsa Tchasseu , qui est une habitante de Bex. De leur côté, les requérants d’asile ont dans leur ensemble beaucoup appréciés ce moment. Certains ont même affirmés qu’ils n’ont jamais connu en Suisse des échanges et des dialogues aussi riches qu’aujourd’hui. L’on pouvait aussi remarquer la présence des gens qui provenaient de régions plus lointaines, mais ayant leurs activités professionnelles à Bex et des membres du clergé de l’Eglise catholique présente dans la commune.

« Il n’y a de différences que dans les statuts qu’on leur donne »

Photo: Najet

Les scientifiques disent que le soleil ne se couche jamais, mais c’est l’homme qui s’éloigne de la lumière. De même, souvent, ce n’est pas la vérité qui est cachée, mais c’est plutôt l’être humain qui ne se donne pas la peine de la connaître. On entend souvent la cheffe de département fédérale de justice et police – Madame Simonetta Sommaruga – dire « qu’il ne faut pas oublier que derrière l’asile, il y a des être humains ». Or, on voit souvent des informations à la télévision qui attisent la haine et le rejet de l’autre : du requérant d’asile, ce qui génère la méfiance, l’inquiétude et des idées stéréotypées au sein de la population à leur égard. Madame Christine Blatti souligne à ce propos « qu’il faut les connaître pour se faire une idée fondée à leur sujet. Il ne suffit pas de se dire que les gens sont comme ceci ou comme cela. Il faut venir à leur rencontre et c’est en rencontrant ces personnes qu’on se rend compte que ce sont des gens comme vous et moi avec des envies, avec une volonté de vivre en paix de pouvoir aspirer à une vie meilleure. C’est légitime de chercher une meilleur vie ».

Nous nous rapprochons ensuite d’un requérant d’asile d’origine guinéenne et ce dernier nous confie que « l’idée que se font certaines personnes des habitants du foyer de Bex est que c’est un centre de dealers, un centre à problèmes où la police doit souvent intervenir. Mais il y a fort heureusement aussi des gens qui défendent les requérants d’asile ainsi que la valeur de l’être humain et qui parfois consacrent du temps pour les soutenir et atténuer leurs souffrances ». C’est le cas de Monsieur Emmanuel Pechin, qui est membre du groupe de musique Aquavita. « Ma représentation à moi est qu’on est tous des êtres humains, que l’on soit refugié ou de culture différente. Je sens aussi beaucoup de souffrance qui rencontre la mienne. Leur souffrance n’est pas différente de la mienne et leur joie non plus d’ailleurs. Au-delà des origines et des cultures, on vit les mêmes émotions. Il n’y a de différence que dans les statuts qu’on leur donne, mais il n’y a pas de différence au niveau du genre humain : nous sommes tous des humains à part entière » conclut-il.

Hochardan et Louvain

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Photos :

Najet

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Perspectives post-formation au Botza: entre espoirs et désillusions des requérants d’asile

Dramane k en train de souder. Photo: CDM

Animés par l’envie se prendre en charge, de nombreux requérants d’asile se forment au centre valaisan de formation le Botza. Mais, au final, ils se heurtent à des difficultés d’accès au marché du travail entraînant souvent chez eux incompréhension et déceptions ; ce que tente de dissiper, sans relâche, le personnel des foyers d’accueil.

Courbé sur une machine, lunettes de soudeur sur les yeux, Dramane k* a l’air bien concentré. « La moindre erreur de découpage des barres de fer risque de compromettre les marches d’escaliers métalliques que je fabrique », lance-t-il. Cela fait plus de huit mois que ce requérant d’asile d’origine africaine est en formation en serrurerie au Botza, centre valaisan de formation pour requérants d’asile. L’homme, d’une vingtaine d’années, accorde beaucoup d’importance à cet apprentissage car « j’espère vivement que l’attestation que je recevrai à la fin me permettra de trouver facilement un emploi et de gagner ma vie » confie-t-il.

Cette phrase semble ne pas faire l’unanimité parmi ses camarades d’atelier. « Il faut arrêter de rêver, les attestations du Botza ne sont pas reconnues par les entreprises. J’ai beaucoup d’amis qui sont passés par ici. Ils sont tous à la maison aujourd’hui », réplique le requérant d’asile Babel F*. Notre enquête nous a permis de rencontrer Lawal W*., requérant africain qui a suivi, neuf mois durant, une formation en peinture dans ce centre. « Depuis un an que j’ai fini mon apprentissage, je cherche en vain du boulot. Je suis réduit à cueillir occasionnellement de la vigne. Une activité qui n’a rien à voir avec la peinture que j’ai apprise. Ça fait mal de rester à ne rien faire alors qu’on a l’envie de travailler ». Ces propos mitigés, mêlant espoir et désillusion résume l’état d’âme de nombreux requérants qui s’interrogent sur l’opportunité que leur offrent les formations qu’ils reçoivent au Botza. A en croire leurs propos, cette interrogation s’accompagne souvent d’une dose de déception. « On ne comprend pas pourquoi on nous forme si on ne peut pas trouver du travail avec nos attestations », déclare Babel F., l’air visiblement dépité.

« Ça fait mal de rester à rien faire »

Pour Roger Fontannaz, directeur du Botza,« C’est une erreur d’assimiler l’attestation de fin de formation que nous délivrons à des diplômes reconnus par les entreprises à l’embauche ». « Nos formations », explique-t-il, « ont pour objectif d’occuper les requérants en les mettant à l’abri des effets pervers de l’inactivité. Elles visent aussi à leur permettre d’organiser leur vie en fonction de l’issue de leur demande d’asile ». Selon lui, les connaissances dispensées visent à éviter à ceux qui n’obtiendront pas l’asile de retourner dans leur pays sans aucune capacité, mais au contraire avec des connaissances qu’ils pourront développer pour vivre chez eux en travaillant pour se réinsérer. Quant à ceux qui auront l’asile, cela leur permettra une meilleure adaptation au marché suisse de l’emploi.

C’est d’ailleurs le cas de l’Irakien, Rafik D.* qui, au bénéfice d’un permis F, a pu décrocher son premier emploi d’aide-cuisinier grâce à la formation reçue au Botza. « Ce travail se déroulait en montagne et il fallait avoir, au préalable, des connaissances en cuisine », se rappelle-t-il. « J’ai pu convaincre mon employeur grâce à l’attestation que j’ai eue après mes douze mois de formation ».

Il faut souligner que la législation reste l’un des obstacles majeurs qui empêche les requérants d’asile d’accéder aisément au marché du travail. L’emploi des détenteurs de permis N (autorisation provisoire de séjour pour requérants d’asile, ndlr) étant géré par le Service des populations et des migrations, la pratique a montré que les requérants sont plus souvent autorisés à travailler en montagne qu’en plaine. Très souvent, il y a peu de possibilités de décrocher son premier emploi sans passer par le secteur de l’agriculture ou des activités ayant trait avec la montagne.

« Les requérants refusent d’accepter la réalité »

Jusque-là, le Botza dispense aux requérants une panoplie de formations allant des métiers du bâtiment à la restauration en passant par la maçonnerie, la menuiserie et la peinture. Des cours de couture, de coiffure, de langue française, d’informatique et même d’initiation au métier de journaliste y sont également disponibles. Loin de s’arrêter là, le centre envisage de diversifier davantage ses offres avec un programme d’agriculture – précisément l’horticulture – qui sera mis en route d’ici quelques mois.

Mais en même temps, il importe de prendre des mesures pour éviter aux requérants d’asile des désillusions sur les perspectives après leur formation. « Nos collègues qui administrent les foyers d’accueil ne cessent et ne cesseront de répéter aux requérants la faiblesse des possibilités d’accès au marché de l’emploi avec un permis N », déclare Roger Fontannaz. Et de conclure : « La vérité, c’est que les requérants croient tellement à un futur en Suisse qu’ils refusent d’accepter la réalité qu’on a beau leur expliquer. Néanmoins, leur faire accepter cela est l’un des défis que tente de relever au quotidien tout le personnel travaillant dans l’asile. C’est un travail de longue haleine ».

Constant Couadjio et CDM

Membres de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils

*Noms d’emprunt