1

Et si on désapprenait tout pour redevenir des enfants!

Daniel Esteban Léon Campo, fils de Marta Campo, rédactrice à Voix d’Exils/Photo prise, depuis 7 ans, au bord d’une piscine.

 Le monde sera plus juste.

À quoi ressemblerait notre monde et notre société s’ils étaient dirigés par des enfants ? C’est la question à laquelle essaye de répondre notre rédactrice Martha Campo au travers de cet article qui nous invite à la réflexion.

«Avant d’apprendre à lire aux enfants, vous devez les aider à apprendre ce que sont l’amour et la vérité» (Mahatma Gandhi).

Un peu en désaccord avec la phrase du Mahatma Gandhi, je dirais que les enfants sont amour et vérité et que ce sont les adultes qui finissent par corrompre leur esprit, leur cœur, leurs actions. Je ne sais pas quand cette simplicité, cette innocence, cette gentillesse, cette façon sincère d’agir et de parler que les enfants amènent avec eux à la naissance se perd et si les comportements des enfants changent en fonction de l’environnement qui les entoure, de ce qu’ils entendent et de ce qu’ils voient.

Suivez-moi dans un rêve : et si le monde était gouverné par des enfants, c’est-à-dire par des personnes qui auraient conservé le cœur et l’esprit d’un enfant ?

Imaginons un ministère de la santé : avec la sensibilité d’un enfant, son empathie pour les autres, on ne regarderait pas combien coûte un traitement ou si le malade y a droit ou pas en fonction de son assurance ; on ne regarderait qu’une seule chose : qui a besoin d’aide, à qui il faut sauver la vie et on ne lésinerait sur rien pour le faire.

Imaginons maintenant les ministères de l’environnement et de l’agriculture :  nous savons que les enfants aiment la nature, la terre, ils adorent jouer dans la boue, ils sèment, ils pleurent quand un petit ver ou une fourmi meurt sous une chaussure humaine. Ils ne sont pas des consommateurs, ce sont des amoureux de la récupération et du recyclage, ils transforment tout ce qu’ils trouvent, ce sont des créateurs… donc, avec eux, pas de problèmes de pollution ou de contamination !

Que diriez-vous d’un pays gouverné par le cœur d’un enfant, avec des lois justes, de la solidarité et beaucoup d’amour pour le peuple ? Il n’y aurait pas besoin de réformes puisque l’équité, l’égalité, la justice et le bien-être seraient présents depuis le début. Dans ce monde, le bonheur du peuple serait le premier objectif et l’être humain la priorité.

Dans ce monde dirigé avec le cœur d’un enfant, il pourrait y avoir des disputes mais toujours la réconciliation, les haines n’existeraient pas, le câlin serait donné sans regarder la race, la couleur, le milieu social, la nationalité, l’âge ou le genre, tout le monde se tiendrait ensemble, chacun se soucierait de l’autre, donnant et recevant tour à tour. Tout sortirait de la simplicité, de l’innocence, de la vérité, du naturel avec lequel nous sommes nés.

Nous devrions y penser pour construire un monde plus juste.

Martha Campo Millan, membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Un confinement aux visages multiples

Mème réalisé par Hajar, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils.

Des rédacteurs et rédactrices de Voix d’Exils s’expriment sans fard sur leur vécu

A quoi ressemble le quotidien des migrants et des migrantes en ces temps de Covid-19 ? Trois rédacteurs de Voix d’Exils, deux hommes et une femme, ont accepté de lever le voile sur leur vie de « reclus » pour répondre à cette question. Entre joies créatives et domestiques, peur du regard d’autrui et réflexions désabusées, le moins que l’on puisse dire c’est que le confinement recouvre des réalités très contrastées.

 

« Un choc bénéfique pour la réflexion »

Damon, 28 ans, Iran, confiné dans un petit appartement

« Ma fragilité a été cassée il y a 6 ans, entre les quatre murs d’une cellule de prison. Aujourd’hui, je ne veux pas me plaindre d’être obligé de rester à la maison. Je me rappelle ces moments où toucher les cordes de mon violon, prendre une photo avec mon appareil, entendre une seule note de musique n’étaient que des rêves. J’avais perdu ma liberté en raison de mes activités politiques et artistiques. Paradoxalement, c’est en prison que j’ai appris comment vivre et comment apprécier le moment présent. Dès que j’ai été libéré, je me suis promis de ne plus perdre un seul instant.

En tant qu’artiste – mais en suis-je vraiment un ? -, je dois admettre que les 24 heures que compte chaque journée passent trop rapidement. C’est un vrai défi pour moi de comprendre pourquoi les gens se plaignent d’être confinés…

Chez moi, il y a tout le temps quelque chose à faire. Jouer du violon ou de la guitare, prendre et développer des photos-montage surréalistes, finaliser mon projet de film, écrire, cuisiner, faire le ménage, prendre soin de moi et de mes fleurs… Sans compter internet qui me connecte aux autres et efface la distance entre les personnes.

Pour moi, le confinement représente aussi une opportunité pour planifier mon avenir. Je crois que ce type de choc est bénéfique pour que chacun puisse prendre le temps de réfléchir sur son quotidien. »

 

« Le port du masque est une épreuve »

Oumalkaire, 24 ans, Djibouti, confinée avec une colocataire

« Durant cette crise sanitaire causée par le Covid-19, tout le monde a le mot confinement à la bouche. Ce qui est étrange, c’est de voir comment la majorité des activités se sont arrêtées d’un coup. Ça fait peur de voir des routes quasiment vides, des rues calmes, des endroits publics désertés ou fermés. Rien ne bouge, on a l’impression de vivre dans un cauchemar ou dans un film d’horreur.

Ce qui est intéressant, c’est la manière dont les gens suivent les informations concernant le Covid-19. En peu de temps, ils sont devenus accros à l’actualité, et rien de ce qui est dit sur la pandémie ne leur échappe.

Alors que nous sommes confinés dans nos maisons, l’évolution de ce virus qui s’est propagé partout à travers le monde nous fait réviser la géographie et découvrir de nouveaux pays, de nouveaux lieux.

Pour moi, le port du masque est une épreuve. Normalement, il est porté pour se protéger soi-même d’une contamination ainsi que pour en protéger les autres et non pas pour faire peur. En réalité, lorsqu’on le porte, les personnes que l’on croise font un détour de plusieurs mètres par peur d’être contaminées ! Et ce, non sans nous avoir jeté un mauvais regard… Elles pensent probablement que si on porte un masque, c’est forcément qu’on est malade et qu’il faut nous éviter.

Certes, être confiné chez soi n’est pas agréable, mais chaque situation est différente. Le confinement peut aussi représenter une opportunité ou une chance à saisir pour achever les travaux qui traînent depuis longtemps faute de temps.

En ce qui concerne les requérants d’asile, c’est une bonne période car il semble que le SEM (Secrétariat d’État aux migrations) traite les demandes et donne ses décisions plus rapidement qu’avant le confinement. »

 

« Rien n’a changé ! »

Hajar, 23 ans, Irak, confiné dans un foyer EVAM

« Le confinement n’a rien changé à ma vie! Un réfugié qui doit toujours rester dans sa boîte ne connaît peut-être pas toujours la différence entre la vie sans confinement et la vie avec le confinement. Pour moi, c’est du pareil au même! »

 

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils




CORONAVIRUS

Auteur: Rudychaimg. CC-BY-SA-4.0.

Procédures d’asile suspendues ou pas?

La plupart des activités non essentielles en Suisse et un peu partout dans le monde s’arrêtent pour essayer de stopper la propagation du Covid-19. Qu’en est-il des procédures d’asile en Suisse ? Point de situation.

Les défenseurs des droits humains et/ou des droits des requérants d’asile et des étrangers, requièrent des institutions la suspension des procédures d’asile.

La Section Suisse d’Amnesty International, préoccupée par la situation des requérants d’asile dans les centres d’accueil collectifs, a appelé les autorités à « suspendre les procédures d’asile avec effet immédiat et jusqu’à nouvel ordre ». Elle soutient qu’en raison de la propagation du coronavirus, une procédure d’asile équitable ne peut plus être garantie : les conseils juridiques étant réduits ou absents, les examens médicaux impossibles à assurer, les possibilités de recours improbables, etc… Amnesty Suisse appelle les autorités à veiller à ce que les directives de l‘Office fédérale de la santé publique (l’OFSP) et des mesures de protection soient assurées dans le détail aussi bien dans les centres d’asile fédéraux que dans les centres de transit et les lieux d’hébergement d’urgence.

Stopper l’expansion du virus et protéger les plus vulnérables

Le souci majeur de la Section Suisse d’Amnesty dans le contexte actuel est de suspendre toute activité pouvant participer à l’expansion du virus et de se concentrer d’abord à éviter d’exposer les plus vulnérables, entre autres les personnes âgées et/ou souffrant d’affections préexistantes ainsi que les requérants d’asile ne bénéficiant pas de titre de séjour légal en Suisse, et pour lesquels il est plus difficile d’accéder aux soins médicaux.

A l’instar d’Amnesty Suisse, des organisations de défense des droits des requérants d’asile ont aussi réclamé d’une seule voix des mesures de protection pour tout le monde. Il s’agit notamment de Solidarité Sans Frontières, Anlaufstelle für Sans-Papiers/Basel, Droit de Rester/Neuchâtel, L’AMAR, Solibrugg Beratung und Schreibstube für Flüchtling/Asylsuchende, Suhr/Aarau, Solinetz/Zurich, Vivre Ensemble.

Pour les mêmes raisons qu’Amnesty Suisse, ces organisations exigent du Secrétariat d’État aux migrations (le SEM) et du Tribunal administratif fédéral (TAF) chacun en ce qui le concerne, de surseoir sur toute la procédure d’asile, c’est-à-dire la suspension des entretiens et des auditions, ainsi que l’arrêt de prononcer des décisions. Elles demandent également le désengorgement des centres d’accueil fédéraux.

Elles requièrent, cependant, la poursuite de l’enregistrement des nouvelles demandes d’asile, la libération des personnes en détention administrative ainsi que l’information des requérants sur leur situation, notamment sur la suspension de tous les renvois en raison des mesures de restrictions sur tous les vols conséquentes à la pandémie.

Pour les sans-papiers, les organisations demandent à ce que priorité soit donnée à leur accès aux soins en leur assurant une couverture médicale liée au Covid-19 et une confidentialité absolue dans tous les établissement d’accueil, afin de ne pas les effaroucher et qu’ils en viennent à renoncer aux soins. Elles insistent également – tout comme Amnesty Suisse – sur les mesures destinées aux plus vulnérables et mettent l’accent sur le besoin de solutions flexibles et inclusives, c’est-à-dire qui tiennent compte du fait que les bénéficiaires n’ont ni adresse fixe, ni permis de séjour valide, ni fiche de salaire, etc.

Les auditions momentanément suspendues par le SEM

Dans son interview en date du 22 mars 2020 pour le journal suisse « Blick » Mario Gattiker, le directeur du SEM,  a déclaré, entre autres, que le SEM ne suspendrai pas les procédures d’asile, mais uniquement les auditions et ce, pendant une semaine. Le temps d’équiper notamment les salles d’audition de parois en plexiglas pour protéger les participants.

D’ailleurs, la page d’accueil du SEM sous le titre « Centres fédéraux pour requérants d’asile », affirme que des cas de coronavirus ont été identifiés parmi les demandeurs et le personnel soignant des centres d’asile fédéraux «le SEM a suspendu tous les entretiens en matière d’asile et a pris des mesures de sécurité structurelles . L’objectif est d’assurer le Social Distancing (la distanciation sociale ndlr.) dans les centres d’asile fédéraux. »

Ce jusqu’à la fin des travaux en cours dans les centres d’audition pour protéger les participant.e.s, notent dans une tribune commune parue dans le quotidien Le Courrier en date du 26 mars Sophie Malka, coordinatrice et rédactrice de Vivre Ensemble, et , secrétaire générale de Solidarité sans frontières. Dans leur prise de position commune, elles questionnent si les priorités du SEM sont bien judicieuses, eu égard à la pandémie et aux instructions sanitaires qui ne cessent d’être martelées par la Confédération. « Eriger la politique migratoire au-dessus de la santé publique comme le font le directeur du SEM, les responsables du Tribunal administratif fédéral et leur supérieure hiérarchique, la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter, relève de l’irresponsabilité et du déni de réalité. », peut-on lire en conclusion.

Donc, à l’heure actuelle, seules les auditions sont interrompues momentanément. Les autres aspects des procédures d’asile se poursuivent.

Les procédures d’asile s’arrêteront-elles ou ne s’arrêteront-elles pas ? En ces temps d’incertitudes extrêmes, nul ne peut prédire ce qu’il en sera demain.

Valmar et MCI

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils