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La « taxe poubelle » grève le budget des requérants d’asile du canton de Vaud

Photo: Pastodelou, membre de la rédaction vaudoise de Voix d'Exils

Un sac taxé à 2 francs. Photo: Pastodelou, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Une grande partie de la population vaudoise s’est déjà acclimatée à la généralisation de la nouvelle mesure entrée en vigueur dans la quasi totalité du canton de Vaud le 1er janvier 2013 visant à améliorer le tri des déchets. Dorénavant, la majeure partie de la population du canton doit utiliser des sacs poubelles taxés dont le prix s’élève à 20 francs suisse le rouleau de 10 sacs de 35 litres. Or, cette nouvelle taxe est une charge supplémentaire importante pour les requérants d’asile du canton, ce compte tenu de l’indemnité de plus ou moins 400 francs par mois qu’ils perçoivent, en dehors des prestations en nature fournies par l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM), comme le logement ou les soins médicaux.

A ce jour, aucune majoration n’a été évoquée dans le guide d’assistance financière de l’EVAM – dans lequel est détaillé l’ensemble des prestations financières destinées aux requérants d’asile du canton de Vaud – pour éponger l’arrivée de la taxe poubelle qui ponctionne les requérants et requérantes d’asile vivant dans des logements mis à leur disposition par l’EVAM. De même, aucune information n’a été transmise aux requérants d’asile à ce sujet. Cependant, des interrogations persistent au sein de cette population pour savoir si le guide d’assistance a été modifié.

Joindre les deux bouts

Esther, requérante d’asile habitant la commune de Moudon, en colocation dans un appartement privé et mère d’un petit garçon en bas âge s’exclame : « Je n’arrive pas à m’en sortir, car j’utilise deux sacs de 35 litres par semaine. A cause des couches de mon bébé, je suis obligée de soustraire 20 francs de l’assistance financière que je perçois mensuellement pour acquérir des sacs poubelles taxés – ce qui équivaut à l’achat d’un rouleau de dix sacs poubelles ». Quant à Louvain, requérant d’asile habitant la commune de Grandson, ce dernier souligne : « qu’en dehors des sacs taxés que j’achète péniblement, j’ai reçu dans ma boîte à lettre une facture de 135.- francs pour la taxe forfaitaire sur les déchets qui s’applique à tous les habitants de ma commune. Heureusement que cette dernière est négociable pour les personnes ayant des difficultés financières. Mais, malgré cela, je ne sais pas comment m’en sortir ».

Qui couvrira la nouvelle charge ?

La question que se posent les requérants d’asiles est de savoir par qui cette nouvelle charge sera couverte ? Si des personnes

La commune de Renens est restée libérale. Dessin signé

La commune de Renens est restée « libérale ». Dessin signé Sara, membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

en situation régulière franchissent parfois les frontières communales pour se débarrasser de leurs déchets dans certaines communes voisines où la mesure n’est pas encore appliquée (comme la commune de Renens), afin de contourner la taxe, on peut s’imaginer le poids que cette nouvelle charge sur les requérants d’asile.

Si l’on se réfère à un document interne de l’EVAM, l’on peut lire « qu’aucune participation financière supplémentaire de l’EVAM n’est envisagée. Il s’agit du meilleur moyen d’inciter les personnes à trier leurs déchets. Aucune modification du guide d’assistance n’est nécessaire ». Il est aussi prévu dans le même document qu’un rouleau de 10 sacs de 35 litres taxés soit donné par le gérant technique, lors de l’emménagement d’une personne dans un appartement de l’EVAM. Le rouleau ainsi que les explications en lien avec le tri sont fournis au bénéficiaire une seule fois.

Aucune exception prévue

Pour approfondir la question, l’on s’est adressé à M. Yves Tschanz, responsable de la logistique de l’EVAM, pour savoir d’une part, si le guide d’assistance a été modifié pour prendre en considération la taxe poubelle et d’autre part, dans quelle mesure le guide d’assistance pourrait prévoir des exceptions pour alléger la charge de cas individuels particuliers.

A la question de savoir s’il serait possible de réviser l’article 42 du guide d’assistance de l’EVAM qui stipule que « les taxes communales individuelles d’évacuation des ordures ménagères, sous quelque forme que ce soit, sont à la charge des bénéficiaires », M. Tschanz répond que « L’article 42 a été émis dans des versions précédentes du guide d’assistance, alors que des communes pratiquaient déjà la taxe au sac, bien avant que cette dernière ne soit introduite dans la quasi-totalité du canton. C’est le cas par exemple de Villeneuve, Orbe, Payerne, Moudon, Yverdon, Champagne, Grandson, etc… Les bénéficiaires logés dans ces communes, avant le 1er janvier 2013, assumaient déjà les frais d’évacuation des ordures ménagères au moyen de sacs taxés. Il n’est donc pas prévu de révision, car cet article tient compte d’une réalité cantonale ».

A la question de savoir si des exceptions sont prévues pour les personnes ayant des enfants à charge, dont l’évacuation des couches est très gourmande en sacs poubelles, M. Tschanz rétorque « qu’il n’est pas prévu que l’EVAM se substitue aux prestations offertes ou non au bon vouloir des communes. En effet, certaines communes octroient une certaine quantité de sacs pour les familles, tandis que d’autres ne prévoient rien à ce niveau. Ce qui peut ressembler à des différences de traitement existe dans d’autres cas ne dépendant pas de l’EVAM. Par exemple, pour l’accessibilité au téléréseau : certains logements en sont pourvus, d’autres non. Cela peut impliquer des frais supplémentaires pour le bénéficiaire qui souhaiterait disposer d’un bouquet de chaînes TV. »

En bref, nous comprenons à travers cette clarification qu’il n’y aura aucune prise en charge supplémentaire par l’EVAM des frais engendrés par les déchets ménagers des requérants d’asile.

Pastodelou

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




« Le travail intergénérationnel est vraiment intéressant »

Nicolas Perelyguine, Délégué à la jeunesse de la ville de Renens (Suisse)

Le Centre de rencontre et d’animation (CRA) de la ville de Renens propose depuis 30 ans des animations socioculturelles pour les jeunes âgés de 3 à 18 ans. Dans une atmosphère conviviale, les enfants jouent et développent des compétences tout en se divertissant. Entrevue avec Nicolas Perelyguine, délégué à la jeunesse de la ville de Renens, qui s’est rendu il y a quelques mois en Tunisie dans le cadre d’un programme européen pour rencontrer les organisations de la jeunesse Tunisienne.

Le CRA existe depuis 30 ans. Avant juillet 2011, date à laquelle il a été repris par la commune de Renens, il était subventionné par la commune mais faisait partie d’une association indépendante. Une fois communalisé, le Centre a créé le secteur culture et le secteur jeunesse et sport. Avec une équipe d’animation comprenant quatre personnes, il propose différentes activités selon trois tranches d’âges : les petits de 3 à 6 ans, les enfants de 6 à 12 ans et les adolescents de 12 à 18 ans.

Photo: Pastodelou et Amina

Durant l’été dernier, le CRA a proposé un programme d’animations pour enfants « les quartiers de l’amitié » qui offrait des animations sportives telles que badminton, tir à la corde et jeux de ballon dans les quartiers de Florissant, du Simplon ainsi qu’à la Rue du Lac. Le 16 août, dans le quartier de Florissant, Maya Milany, animatrice socioculturelle, a proposé un atelier cuisine aux 18 jeunes participants. D’un commun accord, ils ont choisi de faire une salade de fruits. Il leur a fallu une heure et demie pour faire les commissions dans un supermarché puis préparer la salade. Ensuite, les jeunes ont été sensibilisés à la salubrité sous la forme d’un concours de ramassage des déchets.

Délégué à la jeunesse de la ville de Renens, Nicolas Perelyguine nous parle d’un projet qui lui tient à cœur : mettre sur pied des échanges entre les jeunes de Renens et les jeunes Tunisiens. Interview.

Voix d’Exils : Comment avez-vous eu contact avec les jeunes Tunisiens ?

Nicolas Perelyguine : nous avons eu la chance avec un collègue Suisse allemand d’avoir été choisi par le programme européen « jeunesse en action » pour représenter la Suisse dans le cadre de ce programme. Nous sommes allés étudier la situation des organisations de la jeunesse en Tunisie entre le 25 juin et le 1er juillet dans la période qui a suivi la révolution du printemps arabe. C’était vraiment intéressant de voir les animateurs Tunisiens à l’œuvre dans les villes de Sousse, Kairouan, Zaghouane et Tunis. Comme nous, ici à Renens, ils se rendent d’un quartier à un autre. Sauf que nous, nous travaillons dans trois quartiers qui sont proches les uns des autres, alors que chez eux, à Tunis par exemple, Il faut compter environ 45 minutes pour aller d’un secteur d’animation à un autre. Un secteur d’animation pouvant comprendre plusieurs quartiers.

En quoi consiste le travail des animateurs Tunisiens ?

On les appelle « les animateurs itinérants ». Ils vont dans différents endroits en proposant aux jeunes des quartiers des

Photo: Pastodelou et Amina

activités telles que des cours de judo ou l’organisation de  match de football.

Quels ont été vos contacts sur place ?

Pendant toute cette semaine mes homologues Européens, mon collègue Suisse allemand et moi-même étions invités par le Ministère de la Jeunesse et des Sports tunisien. On y a rencontré des associations, des responsables de centres de loisirs tunisiens, des formateurs de la jeunesse, des animateurs, mais également des représentants politiques. On a aussi rencontré beaucoup de jeunes, mais je regrette de n’avoir rencontré que des jeunes qui étaient aux études ou dans un processus d’études.

Avez-vous ramené des idées tunisiennes dont on pourrait s’inspirer en Suisse ?

J’ai observé quelque chose de très intéressant qu’on pourrait développer ici : le travail intergénérationnel. Dans le centre d’animation de la zone rurale que nous avons visité, il y avait des personnes du troisième âge qui jouaient aux échecs à côté des enfants et des mamans et toutes ces générations se mélangeaient. C’était vraiment intéressant et on pourrait s’en inspirer.

Constatez-vous des différences entre les jeunes de Renens et les jeunes Tunisiens?

Il n y a pas de différences. Tout comme les jeunes Suisses, les jeunes Tunisiens jouissent à présent de la liberté d’expression, c’est-à-dire de pouvoir parler librement au restaurant ou sur la voie publique sans craindre le pouvoir politique. Les jeunes Tunisiens sont heureux d’avoir cette nouvelle liberté consécutive au printemps arabe. L’expression libre n’était pas possible avant la révolution, car ils étaient écoutés ou surveillés.

Sur quoi va déboucher concrètement cette première prise de contact ?

Nous avons le projet de réaliser des échanges entre l’Europe et la Tunisie à travers une radio Internet. Au niveau plus spécifique de la Suisse, nous envisageons soit de partir avec un groupe de jeunes Suisses en Tunisie, soit qu’un groupe de jeunes Tunisiens vienne ici pour créer un échange.

Quels sont les apports récents du Service Culture-Jeunesse-Sport de la commune de Renens pour les jeunes Renanais ?

Les responsables des services se rendent souvent dans des quartiers pour discuter avec les jeunes et répertorier les différents besoins. Suite à la demande des jeunes Renanais, la commune a créé un terrain multisports qui a été inauguré le 14 septembre dernier. La commune a aussi satisfait leur demande au niveau de l’urbanisme en ce qui concerne un meilleur éclairage public.

 

Propos recueillis par :

Pastoledou et Amina

Membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Plus d’infos :

Programme européen « jeunesse en action ». Cliquez ici 

Centre de rencontre et d’animation (CRA) de la ville de Renens. Cliquez ici

Service Culture-Jeunesse-Sport de la commune de Renens. Cliquez ici

Programme d’animations pour enfants : « Les quartiers de l’amitié ». Cliquez ici

Commune de Renens. Cliquez ici