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Flash Infos #192

Pexels / Photo libre d’utilisation / Miguel Guenca

Sous la loupe : Les renvois forcés de Suisse ont triplé en 2023 / Les Haïtiens qui ont besoin d’une protection internationale doivent la recevoir, affirme le HCR / Immigration : les techniques agressives de la police française contre les embarcations dans la Manche

 

Nos sources:

Sous Elisabeth Baume-Schneider, les renvois forcés ont triplé

20 minutes, le 24 mars 2024

Les Haïtiens qui ont besoin d’une protection internationale doivent la recevoir, affirme le HCR

ONU Info, le 20 mars 2024

Immigration : les techniques agressives de la police française contre les embarcations dans la Manche

Rfi, le 24 mars 2024

Ce podcast a été réalisé par :

Firat Kil et Vishnu Nagalingam, membres de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils et Zoé Maître, stagiaire à la rédaction.




L’avenir inconnu

Deux ans de guerre en Ukraine #2

Le 24 février 2022, la Russie envahit l’Ukraine. Samedi prochain, cela fera donc deux ans que la guerre a éclaté. Voix d’Exils a décidé de publier une série d’articles autour de cet événement marquant.

Il y a deux ans, nous envisagions l’avenir avec confiance en Ukraine. Nous nous étions presque adaptés à la vie en temps de pandémie, sans nous douter que des événements soudains nous attendaient avec des conséquences dramatiques : perte d’êtres chers ou séparations, changements des conditions de vie, atteintes à la santé et instabilité politique. Dans une telle situation, il est naturel d’avoir peur de l’inconnu.

Après avoir récupéré nos « valises de secours », nous avons inconsciemment rempli nos bagages avec de la peur, du ressentiment, de la colère, de la douleur et de la nostalgie. Ainsi, nous avancions dans la vie en portant nos âmes blessées, en cherchant une lueur d’espoir et des moments de répit, mais parfois en étant confrontés à de nouveaux obstacles qui nous faisaient chavirer. Mais un manque de confiance en soi et une impréparation à de nouveaux chocs peuvent nous faire voir la réalité de manière hostile.

Surmonter nos peurs et nos inquiétudes

Chacun réagit différemment face à l’adversité. Certains et certaines restent dans une attente passive. Ils préfèrent ne rien faire et espérer le meilleur, mais ratent des opportunités. D’autres, au contraire, agissent avec précipitation et prennent des risques inconsidérés. Le déséquilibre et l’excès d’émotions nous empêchent de vivre pleinement, de communiquer efficacement avec les autres et de bénéficier de leurs conseils et de leur soutien. En quelques mots, nous avons besoin de prendre soin de nous-mêmes pour surmonter nos peurs et nos inquiétudes.

Trouver des opportunités dans l’inconnu

Bloqués et surchargés, notre désir de combler le vide et de reconstituer rapidement ce que nous avons perdu nous aveugle parfois sur l’impact que nous avons sur nous-mêmes et notre communauté. Pour sortir de ce cercle vicieux, nous devons faire appel à cette partie de notre être, souvent méconnue de nous, qui est capable d’affronter l’incertitude, de percevoir les signes du danger et d’analyser les situations sans se laisser submerger par des commentaires sentimentaux.

L’effondrement de notre ancienne vie est inévitable et chercher à revenir en arrière ne fera que freiner notre développement. Pour créer une nouvelle vie, il faut du temps et de la persévérance. Bien que cela puisse sembler impossible et déroutant, parfois, en laissant derrière nous ce qui est familier, nous ouvrons la voie à de nouvelles opportunités qui n’avaient pas leur place dans nos vies auparavant. Il est important d’apprécier chaque étape de ce parcours, de ressentir de la gratitude, de remercier celles et ceux qui nous ont soutenus, ainsi que le pays qui nous a accueillis – la Suisse – car personne n’est obligé de nous aider.

Nadiia Kutzina

Membre de la rédaction vaudoise Voix d’Exils




Ma gratitude éternelle

Auteure: Olga Kutsyna.

Une famille d’accueil pour se reconstruire

Pour une femme, quitter son pays d’origine est un pas décisif vers l’inconnu. Il n’y a pas de pays, d’origine ou de confession religieuse, quand il faut fuir une guerre, de surcroît quand vous avez des enfants. L’instinct de mère protectrice impulse une force, un courage et une détermination sans limite ou presque.

Le chemin est unique pour chacune et chacun d’entre nous, mais une femme restera toujours plus vulnérable face à la guerre. Traite des êtres humains, exploitation sexuelle et autres abus laissent des traces sur leur santé et leur avenir, aussi bien physiques que mentales. De plus, la barrière de la langue dans le pays d’accueil, les nouvelles coutumes et lois inconnues rendent la vie difficile.

Une famille d’accueil est le moyen le plus rassurant pour une bonne intégration et commencer une reconstruction. Bien sûr, il peut être difficile pour une adulte habituée à une vie autonome de se retrouver dans l’environnement d’une famille inconnue. Les différences culturelles, le sentiment de dépendance, ainsi que le sentiment de la honte de son propre « échec » peuvent mettre à mal les premiers pas vers une intégration. Mais tout cela ne dure qu’un temps. La gentillesse, la patience et le réconfort de nos familles d’accueil nous donnent la confiance et nous apaisent.

Des sacrifices inestimables

Je tiens à remercier la Confédération suisse de nous avoir accueillis en ces temps troublés ainsi que ma famille d’accueil qui a été, et qui est toujours, un immense soutien pour notre famille.

Ma gratitude restera éternelle car la famille qui nous a accueillis a sacrifié ses ressources et son temps pour nous fournir un abri, de la nourriture et d’autres choses nécessaires. Ils ont essayé de nous protéger des soucis et des problèmes, ils ont pris le temps de nous comprendre, de nous calmer, pour qu’on devienne plus forts et pour qu’on puisse recommencer à vivre d’une nouvelle manière, malgré l’effondrement des espoirs et des rêves. Ils ont aidé mes enfants dans leur formation, en douceur et très délicatement en prenant en compte la complexité de l’adolescence. Le père de famille est devenu un exemple d’homme fort et noble pour mes fils. Et la femme qui est le cœur et l’âme de cette famille est très patiente et gentille, elle m’a aidé à reconstruire ma confiance dans ce monde et m’a motivée pour mes futurs projets.

La volonté de protéger autrui, de ne pas être indifférent à ses souffrances et de lui apporter de l’espoir est une forme de gentillesse qui est donnée gratuitement. Si vous acceptez ce cadeau, vous pouvez changer et reconstruire votre vie grâce à ces personnes autour de nous qui essayent d’améliorer notre vie. Cette merveilleuse expérience restera gravée dans mon cœur et dans ma mémoire pour toujours. C’est la raison pour laquelle je souhaitais partager mon expérience avec vous et apporter mon soutien à celles et ceux qui en ont besoin.

Nadiia Kutsyna

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Les Golems de l’asile

Illustration : Harith Ekneligoda

Ou l’expérience corrosive du permis F

C’est l’automne et le soleil tardif illumine de mille couleurs la nature en pleine métamorphose. Mes yeux contemplent, mon cœur se tourne vers lui-même et dans cet espace de silence, il devient mon seul interlocuteur. La belle mosaïque du paysage suisse comporte une grosse tache de peur, un petit point de joie et un grand rectangle de souffrances.

J’avais reçu un avis négatif du SEM à ma demande de protection. L’injonction de quitter le territoire m’avait été signifiée quelques jours après. Je me souviens même que je m’étais rapproché de service d’aide au départ volontaire et réfléchissais encore sur la pertinence de la décision finale à prendre car, entre temps, j’avais été diagnostiqué d’une maladie grave et incurable.

Des policiers à ma porte

Il était neuf heures du matin ce jour-là quand j’entendis frapper à ma porte. C’était la police valaisanne.

« Habillez-vous » me dit l’agent qui se tenait devant la porte « Nous avons pour mission de vous conduire à Berne ».

Aucun recours n’était possible.

En bas de l’immeuble, deux autres policiers en civil attendaient près d’un bus ; ils se présentèrent et me lurent leur ordre de mission. Le chef me demanda si j’avais auparavant reçu une convocation directe du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM), je lui répondis tranquillement « non » . Il s’interrogea :

« Alors pourquoi réquisitionner la force ? Il n’y a manifestement pas refus d’obtempérer ». Ce détail sera important pour la suite des événements ce jour-là.

Arrivés à Berne et après la fouille au corps usuelle, l’agent bernois voulut me mettre en cellule et décharger l’ordre de mission de mon escorte en attendant mon audition.

Le policier valaisan, qui était resté silencieux jusque-là, opposa un refus ferme et dit :

« Vous n’avez jamais adressé de convocation à ce Monsieur. Vous ne pouvez donc pas le traiter comme s’il avait refusé de collaborer. Nous attendrons ensemble l’heure de l’audition et nous repartirons en Valais avec lui ». Et il en fut ainsi.

Un policier qui me soutient contre son collègue? Je n’en revenais pas.

La suite fut plus facile à assumer: même quand la délégation de l’ambassade de mon pays tenta de m’humilier, je restais attentif à mon combat. Le fonctionnaire du SEM mit fin à l’entretien en ces termes :

« Ce n’est pas à moi que reviens le mot final, mais laissez-moi vous dire que vous avez tout au plus un pour cent de chances de rester en Suisse ».

Je répondis « merci de ne pas m’avoir complètement fermé la porte ». Il fut très surpris par ma réaction.

Le permis F, oui mais…

Moins de deux semaines après, je reçois un courrier qui m’annonce que la Suisse m’a accordé un permis F. Une joie immense inonda alors mon cœur et que de projets…

Tout ceci fut de courte durée, quand on m’expliqua exactement quels étaient les contours du permis F (admission provisoire). Entre autres limites, je ne peux pas voyager hors de Suisse et n’ai pas la possibilité de faire venir ma famille en Suisse dans le cadre d’un regroupement familial.

Ainsi, depuis environ sept ans, je suis enfermé dans les limites de mon document de résidence en Suisse.

– Oui je suis reconnaissant à la Suisse.

– Oui je suis en vie.

– Oui j’ai un soutien pour vivre.

La Suisse est un très beau pays et sa population est globalement accueillante. Tout ceci fait sens, quand le système d’accueil ne transforme pas le contexte de notre existence en prison.

Depuis huit ans, j’ai quitté les miens: mon épouse et ma fille.

Aujourd’hui, les conditions de vie que m’accorde mon permis ont fait de moi un mari et un père indigne. J’ai déserté le foyer conjugal, laissant derrière moi une épouse éplorée et une jeune adolescente qui se sent abandonnée. Quels mots puis-je trouver face aux questions de mon enfant qui veut me faire comprendre sa douleur ? Que puis-je lui expliquer de la douleur et du mal qui me ronge la chair et l’âme ? Comment lui faire comprendre qu’elle n’est pas mon dernier choix, malgré les apparences ? Comment expliquer à chaque téléphone à mon épouse que mon absence n’est pas un divorce ?

Le permis F jour après jour fait son œuvre corrosive dans les liens sociaux.

L’alchimie du système d’asile en Suisse a ainsi fabriqué des centaines de milliers de Golems: espèces d’individus, apparemment vivants, qui traînent autour d’eux une tristesse qui tue et qui déshumanise.

On n’en parle pas assez, mais la société est-elle vraiment prête à assumer ce gâchis ? Comment peut-on offrir du miel avec un arrière-goût si amer ?

Jima

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




FLASH INFO #128

Sous la loupe: le Prix Diaspora & Développement / l’Allemagne hausse le ton / Le statut S maintenu jusqu’en mars 2024

Le Prix Diaspora & Développement

Albinfo.ch, le 03.11.2022

Un prix récompense les meilleurs projets menés par des personnes migrantes en faveur de leur pays d’origine. La fédération vaudoise de coopération et ses partenaires, dont Albinfo, ont remis le Prix Diaspora et Développement à quatre projets portés par des associations de diasporas. L’objectif est de valoriser l’impact des personnes migrantes dont le rôle gagne en reconnaissance dans le domaine de la coopération internationale.

Charles Williams Soumah

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

L’Allemagne hausse le ton face aux migrants qui traversent librement le territoire suisse

RTS Info, le 01.11.2022

L’Allemagne accuse la Suisse de ne pas respecter les accords de Dublin. En effet, de nombreuses personnes en quête de protection traversent la Suisse pour se rendre dans un autre pays sans être retenues par les autorités helvétiques. Pourtant, selon Berne, il n’y a rien d’inhabituel à cela.

Charles Williams Soumah

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Le statut de protection « S » pour les Ukrainiens en Suisse est maintenu au moins jusqu’en mars 2024

RTS info, le 09.11.2022

Le statut de protection « S » accordé aux personnes réfugiées ukrainiennes continuera d’être maintenu. Le Conseil fédéral a indiqué qu’il n’était pas question de l’abolir avant mars 2024. La conseillère fédérale Karin Keller-Sutter précise toutefois qu’il s’agit d’un statut provisoire et orienté vers le retour dans le pays d’origine. A ce jour, plus de 67’000 personnes originaires d’Ukraine ont obtenu la protection en Suisse depuis l’introduction du permis S.

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils