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Une équipe de migrants défriche les pâturages de Baulmes

L’équipe du TUP de Baulmes au grand complet. Photo: MAK.

Durant huit semaines, huit requérants se sont retrouvés à Baulmes, petit village situé près d’Yverdon-les-Bains, pour couper des buissons dans les pâturages, traiter des souches et brûler des branches. Retour sur une expérience très constructive à l’occasion d’un débriefing qui s’est tenu le 12 décembre dernier dans la salle communale de Baulmes.

Prévus dans un premier temps sur trois semaines, les TUP (Travaux d’utilité publique) qui se sont déroulés à Baulmes ont été prolongés et ont finalement duré huit semaines entre la mi-septembre et fin novembre 2011. Tout au long des TUP, la commune de Baulmes avait prévu une pause café à 9 h et deux autres pauses à 12 h et 15 h, elle avait également mis à disposition un chalet pour s’abriter en cas de caprices de la météo.

Lors du débriefing qui réunissait les représentants de la commune et de l’EVAM présents ont qualifié l’expérience de « positive ». Joël Delacrétaz, garde forestier en chef de Baulmes, a souligné « l’efficacité, la discipline et le courage des migrants ». Une mention particulière a été décernée aux Tibétains « qui ont affronté sans fléchir les rigueurs hivernales ». 

Côté bémols, seuls deux incidents mineurs se sont produits durant les travaux : un migrant, qui n’arrivait pas à s’intégrer au reste du groupe, a été remplacé et un autre a dû renoncer pour des raisons de santé. Les représentants de L’EVAM ont aussi reconnu qu’ils ont démarré un peu trop vite les TUP de Baulmes, ce qui a engendré un léger déficit d’encadrement des migrants sur le terrain et quelques problèmes concernant les repas.

Mais retenons globalement que les enseignements apportés par le TUP de Baulmes démontrent que cette expérience s’est avérée utile pour améliorer l’organisation des autres TUP mis en œuvre à travers le canton de Vaud.

Mouldi Epars Ben Fadhila, responsable des TUP a, quant à lui, évoqué avec satisfaction le cas d’un migrant des TUP de Payerne qui s’est fait remarquer par son employeur. Ce dernier envisage même de l’engager.

Abdel-Khader MOUSTAPHA

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

« Les TUP sont bénéfiques pour les migrants, les communes et l’EVAM »


Cécile Ehrensperger, responsable EVAM du secteur Nord-Ouest, nous a accordé une interview après l’apéritif qui a suivi le débriefing.

Voix d’Exils : Quel est le bilan de cette première expérience à Baulmes ?

Cécile Ehrensperger : Le bilan est très positif ! Le TUP était censé durer trois semaines puis il a été renouvelé deux fois, ce qui signifie que la collaboration entre l’EVAM et Baulmes a bien fonctionné. On a répondu à l’attente de la commune.

En quoi a consisté l’encadrement des migrants ?

Ils ont été doublement encadrés. En partie par le responsable des TUP de l’EVAM, Mouldi Epars Ben Fadhila et en partie par les ouvriers de la commune de Baulmes. Au début, les ouvriers étaient perplexes, puis ils se sont rendus compte que les migrants s’en sortaient très bien.

Y a-t-il des débouchés pour les migrants qui ont participé à ces TUP ?

Pas directement. Mais cette expérience leur sera très utile, car elle leur servira de référence ultérieurement. Ils pourront valoriser cette activité lors de leurs recherches d’emploi.

Combien de TUP y a-t-il dans le canton de Vaud ?

Il y en a un Payerne, un à Moudon et un dans la forêt de Lausanne. Les travaux d’utilité publique comprennent aussi le nettoyage des bus, appelé « BusNet » et la gestion des vélos, connu sous l’appellation « Lausanne Roule ». Sans oublier les TUP de la Côte, notamment à Vich, Prangins, Le Vaud, Arzier, Nyon et Gland.

Que pensez-vous des TUP ?

Ils sont utiles pour ceux qui veulent s’intégrer. La plupart des requérants d’asile qui ont participé aux TUP de Baulmes étaient dans la première phase d’intégration qui dure six mois. Mais c’est aussi utile pour ceux qui ont été déboutés, car le fait de s’occuper permet de mettre de côté ses problèmes. En conclusion, je dirais que ces TUP sont bénéfiques pour la commune, pour les migrants et pour l’EVAM.

MAK




Un arbre s’abat à proximité du foyer EVAM de Crissier

Photo: Anush OSKAN

Le vendredi 6 janvier, à proximité du foyer de Crissier, un gros arbre mesurant 15 mètres est tombé au bord du chemin du Charmeur et a bloqué le  pont qu’empruntent régulièrement les requérants d’asile pour se rendre au centre commercial Crissier.

C’est un événement un peu mystérieux, parce que personne n’a vu comment et pourquoi cet arbre est tombé. « Les arbres sont vieux » explique M. Fernandez, intendant du foyer de Crissier. « Heureusement qu’il n’y a pas eu de victime, parce qu’il y a toujours des gens qui passent par là et des enfants qui jouent dans cet endroit». Inquiétude partagée par les habitants et les habitantes du foyer. « J’ai peur de laisser mes enfants jouer à coté des arbres. A chaque instant, j’imagine un arbre tomber » s’exclame une mère de six enfants.

Le lendemain, le samedi 7 janvier,  le service communal de Crissier – averti par M. Fernandez – s’est chargé de découper et d’évacuer l’arbre en question. Notons que ce n’est pas le dernier « vieil arbre » de cette forêt et personne ne sait quel arbre tombera la prochaine fois.

Anush OSKAN
Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




Un nouveau cybercafé ouvre ses portes à Crissier

Photo: Abdel-Khader MOUSTAPHA

Le cybercafé du foyer de l’EVAM de Crissier a ouvert ses portes le 1er décembre 2011. Deux équipes composées de deux médiateurs chacune se relaient pour assurer son ouverture chaque mardi et jeudi matin de 8h30 à 12h00, ainsi que l’après-midi du lundi au vendredi de 13h30 à 17h00.

Le cybercafé de Crissier est le huitième relais internet EVAM. L’accès à ce service est gratuit comme à son habitude. L’espace est cependant un peu restreint ce qui fait que les places sont « chères ».

Le cybercafé est équipé de : quatre postes de travail ultrasophistiqués qui comprennent chacun quatre écrans plats TFT 19 pouces. Son également mis à disposition : des webcams haute performance, des logiciels de communication tels que MSN, Yahoo etc. et une imprimante pour couronner le tout.

Suite à l’ouverture du « cyber » nous, requérants de Crissier, disons un grand merci à l’EVAM en général et en particulier à M. Christian VAGO, responsable des cybercafés, pour la mise en place de ce nouvel espace. Celui-ci offre désormais à certains de ses usagers un moyen de se divertir ou pour effectuer des recherches et pour d’autres, la possibilité d’effectuer des retrouvailles virtuelles a moindre coût dans un univers où l’avenir est souvent sombre.

Abdel-Khader MOUSTAPHA

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




« Quel accès aux soins pour les plus vulnérables ? »

De gauche à droite: le Dr. P.Bodenmann, le Prof. J.B. Wasserfallen, le Dr. C. Madrid, le Prof. J. Besson et le Prof. A. Peccoud. Photo Niangu Nginamau.

La santé des personnes vulnérables est un combat permanent pour le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) et la Policlinique médicale universitaire (PMU). Le nombre de personnes précaires ne cesse d’augmenter en Suisse.

La commission CHUV-PMU Populations sociales a été mise en place par le Département de la santé et l’action sociale (DSAS) du canton de Vaud pour répondre de manière efficace aux problèmes de patients ayant des difficultés financières, parmi lesquels on peut compter les requérants d’asile, les personnes sans domicile fixe (SDF) et les sans-papiers.

Le 17 novembre dernier, elle a organisé à l’occasion de ses cinq ans une série de présentations suivies d’une table ronde entre différents partenaires de la santé à l’auditoire César Roux du CHUV autour de la question principale : « quel accès aux soins pour les plus vulnérables ? » 

Des étudiants, des médecins et plusieurs membres d’organismes du milieu social et de la santé ont répondu à l’invitation de la commission CHUV-PMU Populations sociales. Le but de cette rencontre était de discuter avec les partenaires du CHUV et de la PMU, des principes, des instruments et des collaborations qui constituent la nouvelle politique de prise en charge médicale des populations concernées. Thème d’ailleurs inscrit dans le cadre de la formation Santé et Migration organisée en collaboration avec l’Université de Lausanne.

Les orateurs du jour se sont succédés en nombre. Le Professeur Jean-Blaise Wasserfallen, de la Direction médicale du CHUV a ouvert la séance en revenant sur l’engagement du CHUV et de la PMU, en présentant les instances médicales qui forment la commission CHUV-PMU Populations sociales et en rappelant que le but de sa création était de répondre aux besoins d’une population en situation de précarité et de faire face à un afflux massif de nouveaux patients sans-papiers.

Une histoire, une mission, une longue tradition

En vidéo conférence, le Professeur Jacques Cornuz, directeur de la PMU et Président de la Commission, a rappelé l’historique de la Policlinique Médicale Universitaire. En 1887, la PMU s’est ouverte, à Lausanne, à la place Pépinet et s’appelle alors « Dispensaire central pour malades indigents ». Sa mission principale ? Venir en aide et améliorer la santé des populations en situation de précarité. Depuis lors, d’autres missions sont apparues, telles que l’enseignement, la recherche et le maintien d’un lien étroit avec la médecine générale. Mais, plus d’un siècle après sa création, sa mission d’aide humanitaire est toujours d’actualité.

Être sans-papiers n’est pas anodin

Ensuite, Mme Schaad, responsable de la communication du CHUV, a illustré le travail fait en donnant quelques exemples.

Grâce à la demande de subsides faite par l’assistante sociale de l’hôpital auprès de l’Organe Cantonal de Contrôle de l’assurance-maladie et accidents (OCC), les frais médicaux d’une famille de sans-papiers – qui n’avait pas de couverture sociale et donc pas d’assurance maladie – ont été pris en charge dans leur totalité.

Mme Béatrice Schaad a également rapporté l’histoire de ce couple non marié et sans-papiers dont le père s’est vu expulsé le jour de la naissance de son enfant, et la mère – qui ne parlait pas français – a été prise en charge par les assistantes sociales de l’hôpital et les médecins.

Un combat parmi tant d’autres. Comme celui de ce patient de nationalité algérienne, né en 1951, lui aussi sans-papiers et sans domicile fixe, qui vit à Lausanne depuis 10 ans, et dont l’état de santé a nécessité de multiples hospitalisations. Ce monsieur a été pris en charge par l’Unité des populations vulnérables de la PMU et par la commission Hébergement & vulnérabilité.

Cette commission élabore également des préavis à l’attention de l’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (l’EVAM) pour qu’il adapte, si nécessaire, les conditions d’hébergement des migrants, qui sont à l’assistance ou à l’aide d’urgence, en fonction de leur situation médicale.

Niangu NGINAMAU

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




Les requérants d’asile déboutés sont dans une impasse

Mme Christiane Jaquet-Berger, députée au Grand Conseil vaudois et Mme Christine Morerod, membre de l’église St-Paul à Lausanne. Photo: Niangu NGINAMAU

Le collectif Droit de rester et la Coordination Asile-Migration Vaud  font pression sur le canton de Vaud pour demander « plus de diligence et d’humanité » dans le traitement des demandes de régularisation des requérants d’asile déboutés. Pour l’heure, ce statut conduit généralement à une impasse.

M. Bernard Borel, ancien député au Grand Conseil vaudois et M. Jean-Michel Dolivo, député au Grand Conseil vaudois. Photo: Niangu Nginamau

Jeudi 3 novembre dernier, le collectif Droit de rester a convoqué la presse à Lausanne pour une conférence de soutien à M. Fatmir Krasniqi. Ce requérant d’asile débouté avait été interviewé par  Voix d’Exils en mai 2011. Emprisonné au Centre administratif de Frambois, à Genève, M. Fatmir Krasniqi avait été libéré en mars 2010. Plus d’une année plus tard, sa situation administrative n’a toujours pas évolué et il est actuellement menacé d’expulsion par le Service de la population du canton de Vaud. Droit de rester a dénoncé « l’arbitraire » du traitement des dossiers des requérants d’asile déboutés, et dit craindre « un effet Vol spécial » qui pousserait les autorités à multiplier les expulsions.

En juin dernier, des députés, des artistes et des intellectuels s’étaient également réunis à Lausanne à l’appel de la Coordination Asile-Migration Vaud (CAMIV) pour exprimer leur soutien en parrainant des requérants d’asile déboutés et pour demander leur régularisation. A cette occasion, ils avaient transmis un manifeste à M. Philippe Leuba, conseiller d’Etat vaudois qui était alors en charge du département de l’Intérieur. Dans ce document, il était fait mention de 35 requérants déboutés qui habitent depuis au moins cinq ans dans le canton et qui avaient fait une demande de régularisation comme les y autorise l’article 14 de la Loi sur l’asile. Mais leur demande avait pourtant été rejetée « sans autre précision ».

M. Jacques Neirynck, conseillé national PDC et Mme Graziella de Coulon, membre de Droit de Rester. Photo: Niangu Nginamau

L’un des signataires, l’avocat Christophe Tafelmacher n’avait pas mâché ses mots : « La situation faite aux personnes déboutées m’apparaît inacceptable et contraire aux droits humains. D’un côté, les autorités les confinent à l’aide d’urgence, qui représente en réalité une forme de contrainte étatique, et de l’autre côté, elles leur interdisent de travailler. Cette voie est à la fois indigne et inhumaine, mais aussi inefficace : le renvoi de nombreuses personnes ne peut être exécuté et elles restent donc des années durant dans cette voie sans issue ». Comment dès lors sortir de cette impasse ? A M. Christophe Tafelmacher d’ajouter qu’à ses yeux « la seule solution pour redonner une dignité tant à ces personnes qu’au droit d’asile en Suisse serait de les régulariser ».

M. Claude Calame, philosophe et professeur à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales à Paris. Photo: Niangu NGINAMAU

En demandant à des personnalités d’intervenir dans le débat, la Coordination Asile souhaitait relancer la question de la légitimité de la loi sur l’asile et de son application « au vu des nombreuses violations des droits humains qu’elle génère ».

De fait, la question de la régularisation des migrants qui vivent ici depuis des années, certains avec des enfants, concerne tout le monde et le soutien apporté par des personnalités en vue démontre qu’il serait temps d’ouvrir un débat public sur l’application cantonale de la Loi sur l’asile avant de le porter au niveau fédéral auprès des services de Mme Simonetta Sommaruga, Conseillère fédérale, cheffe du Département de Justice et Police.

Niangu NGINAMAU

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Commentaire

Il est plus que jamais nécessaire de repenser l’évaluation des demandes de régularisation dans une perspective constructive. Actuellement, les critères inclus dans la loi sont mal définis et constituent des obstacles le plus souvent insurmontables au vu des conditions de vie imposées aux requérants d’asile. Si un grand nombre de personnes déboutées restent dans le canton, c’est qu’elles n’ont pas la possibilité de repartir dignement et en toute sécurité. Leur vie est désormais ici et il est nécessaire de prendre acte de cette réalité en reconsidérant leur demande de régularisation  sur la base de l’article 14 de la Loi sur l’asile.

N.G.