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Période de pandémie

Martha Campo / Voix d’Exils.

2020: moment-clé de l’histoire

Le Covid-19 ne reconnaît ni l’âge, ni la couleur de peau. Il ne reconnaît pas non plus un drapeau ou un parti politique et ne fait pas de distinction entre classes sociales ou niveaux d’éducation ; il ne se soucie pas de savoir si vous portez une cravate ou des tennis ; il ne connaît pas les frontières et frappe où il veut.

Malgré la menace, nous, les humains, continuons à tisser des toiles de haine les uns envers les autres ; nous n’avons pas réussi à changer malgré les milliers de morts fauchés par cette maladie; nous nous sommes rassurés en nous disant qu’elle ne nous touchera pas directement et que c’est seulement là-bas, en Équateur, qu’il a fallu jeter les morts à la mer ou les incinérer devant leur maison parce qu’il n’y avait personne pour les recueillir et les enterrer. Beaucoup d’entre nous ont pensé ainsi, alors même qu’en Italie on a dû charger des camions pleins de cadavres et qu’aux Etats-Unis, les couloirs des hôpitaux sont devenus des morgues.

La réalité de tout ceci est que la fragilité de l’être humain a été révélée, exposée.

Ceci nous invite vraiment à nous confronter à nous-mêmes, à comprendre que nous ne sommes rien de plus qu’un soupir et que la peur est notre pire ennemie. Mais je me demande quelle peur? Si nous comprenons que nous allons tous mourir un jour, que notre vie ne dure qu’un instant et qu’ensuite tout s’éteint. Nous sommes tellement attachés à la vie, tellement attachés à la matière que le changement nous terrifie. Mais aujourd’hui, l’univers nous oblige à plier. Ce ne sont pas les humains qui ont le pouvoir : la seule option qui nous reste, c’est changer ou mourir

C’est aujourd’hui, tant que nous sommes vivants, que nous devons apprendre à réellement vivre chaque seconde, sans anticiper ce qui va se passer ; l’histoire racontera comment nous aurons réagi et ce que nous avons appris restera. C’est peut-être une leçon que nous laisse la pandémie.

Elle nous a confinés pour que l’on revienne à l’essence de l’être humain, au naturel, au noble, au simple, à la vérité ; pour que l’on se déconnecte de l’extérieur pour découvrir notre intriorité, celle que l’on abandonne, que l’on oublie, distraits par la rapidité avec laquelle la modernité nous emmène.

C’est triste, mais l’univers a un ordre et les humains ont osé le changer ; maintenant, c’est lui qui nous oblige à changer.

Martha CAMPO

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Revue de presse n°28

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : Pratiques médicales d’un autre âge dans un centre de détention américain / Des migrants prennent tous les risques pour traverser la Méditerranée / Quand le port d’un pantalon training est un obstacle à la naturalisation.

États-Unis, des détenues privées d’utérus

huffingtonpost.fr, le 15.09.2020

Suite à l’alerte lancée par une infirmière, cinq ONG (Project South, Georgia Detention Watch, Georgia Latino Alliance for Human Rights et South Georgia Immigrant Support Network) ont porté plainte auprès du gouvernement américain.

Elles dénoncent un nombre important d’hystérectomies pratiquées sur des migrantes placées dans un centre de détention privé de l’état de Géorgie.

« Quand j’ai rencontré toutes ces femmes qui ont subi cette intervention chirurgicale, je me suis dit que ça ressemblait à un camp de concentration expérimental. C’était comme s’ils faisaient des expériences sur nos corps », a témoignée une détenue interviewée par une des ONG à l’origine de la plainte. « Plusieurs détenues m’ont dit être allées voir le médecin et avoir fait l’objet d’hystérectomies sans en avoir été informées au préalable. »

L’hystérectomie n’est pas une intervention banale puisqu’elle consiste à retirer l’utérus et parfois d’autres parties de l’appareil génital féminin comme les ovaires. Cette opération aux conséquences graves, notamment la stérilité, ne se fait normalement pas sans le consentement éclairé des patientes.

Des migrants traversent la Méditerraniée en jet-skis et kayaks

infomigrants.net, le 14.09.2020

Les migrants prennent toujours plus de risques pour rejoindre les côtes espagnoles depuis le nord du Maroc. À tel point que certains tentent même de traverser la Méditerranée à bord de jet-skis et de kayaks.

Bien que rarement utilisés, ces modes de transports ont aussi été observés sur la Manche par des migrants souhaitant atteindre le Royaume-Uni depuis la côte française.

Les contrôles dans le nord du Maroc ont fait chuter en 2020 le nombre d’arrivées dans le sud de l’Espagne. Pour les huit premiers mois de l’année, on dénombre 8 200 entrées illégales, soit moins de la moitié qu’en 2019 à la même période. Les Algériens représentent les deux tiers de ces arrivées cette année et les Marocains sont la deuxième nationalité représentée.

Pour échapper aux forces de l’ordre marocaines, les candidats à la migration tentent désormais leur chance via la route des Canaries, situées au sud-ouest du pays. L’archipel volcanique de l’Océan Atlantique est redevenu une porte d’entrée de choix en Europe, comme ce fut le cas au début des années 2000.

Les arrivées de migrants y ont été presque multipliées par sept depuis le début de l’année par rapport à la même période en 2019, s’élevant à 3 933 du 1er janvier au 31 août, selon le ministère de l’Intérieur espagnol. Sur cette route maritime balayée par de forts courants, au moins 239 migrants se sont noyés entre le 1er janvier et le 19 août.

Naturalisation refusée pour port de pantalon training !

rts.ch, le 12.09.2020

L’assemblée bourgeoisiale de la commune de Bubendorf, à Bâle-Campagne, s’obstine à refuser la naturalisation d’un Kosovar, au prétexte qu’il se promène en pantalon de training dans le village. La même assemblée persiste et signe puisqu’elle vient de faire appel de l’injonction cantonale lui ordonnant de revoir sa position.

Il y a maintenant 15 ans que Hamdi Halili espère devenir un citoyen suisse à part entière. Alors que son épouse et leurs enfants ont pu être naturalisés, la demande lui a été refusée il y a quatre ans.

La raison invoquée pour justifier ce refus ? Selon les bourgeois, c’est le fait de l’avoir aperçu en pantalon de training dans les rues de la commune… Une explication répétée l’an dernier, lors d’une nouvelle demande, qui avait elle aussi été rejetée.

En août dernier, le canton a donné l’ordre à la commune de naturaliser le « Kosovar porteur de training », comme l’appellent les médias outre-Sarine. Mais la bourgeoisie de Bubendorf n’a rien voulu savoir, et elle a fait appel au Tribunal cantonal. Cette affaire rocambolesque est donc repartie pour un troisième tour !

Le fameux pantalon de training suffit-ils à expliquer ce refus ? L’affaire repose sans doute sur des motifs plus inavouables. En 2005, la famille Halili, réfugiée de guerre, était menacée d’expulsion. L’église de Bubendorf lui avait alors offert l’asile et lui avait ainsi évité le renvoi forcé. Un épisode que certains bourgeois n’ont apparemment toujours pas digéré.

Au-delà de l’aspect rancunier de cette affaire, c’est le système de naturalisation qui est en cause dans la petite commune alémanique. Les voix se multiplient pour dénoncer une procédure basée sur l’arbitraire et l’émotionnel. Plutôt que de se fier au bon vouloir d’une assemblée, pourquoi ne pas confier les naturalisations à une commission ou à un exécutif ? En tous les cas, cette délirante saga pourrait faire jurisprudence dans la campagne bâloise.

Oumalkaire / Voix d’Exils




La chanson « J’ai quitté mon pays » de Enrico Macias

ractapopulous/2998. Pixabay.com

Hier et aujourd’hui

La musique est un langage universel qui traverse toutes les frontières. Un outil pour susciter des émotions et des sentiments, ainsi que pour apporter espoir et guérison. On dit que le philosophe et musicien arabe Al-Farabi (872–950), a pu faire rire les gens puis les faire pleurer par sa merveilleuse performance sur le Oud.

Je suis né et j’ai grandi dans le nord-est rural de la Syrie, une région négligée et appauvrie, considérée comme le centre de nombreux groupes ethniques. Des gens durs et résilients, pour la plupart, des descendants de réfugiés qui ont fui les atrocités en Turquie. Très attaché à leur musique ethnique et à leur culture; peut-être à cause du soulagement qu’elles leur ont apporté après de longues années de privation et de traumatisme.

Adolescent, mon esprit était réceptif à cette musique riche et multiethnique. À cette époque, au milieu des années 70, nous n’avions pas de téléviseur. Mes parents avaient un vieux magnétophone, et je passais de longues heures à écouter les charmantes chansons de la diva de la musique arabe, Oum Kalthoum, et du jeune chanteur adoré Abdoul Halim Hafez, ainsi que celles d’Adis [1] , de M. Shekho [2] et de bien d’autres.

Cependant, ces années nous ont également apporté de la musique occidentale et des chansons enregistrées sur des cassettes audio, principalement de Beyrouth, la capitale du Liban, qui était le centre culturel du monde arabe à cette époque. Comme beaucoup de mes pairs, j’étais fasciné par Tom Jones, Aznavour, Julio Iglesias, Enrico Macias …!

J’avais une guitare à l’époque et j’essayais d’apprendre à jouer des airs simples. Alors naturellement, j’ai développé un penchant pour Enrico Macias, et en particulier pour sa chanson : « J’ai quitté mon pays »!

J’ai quitté mon pays

J’ai quitté ma maison

Ma vie, ma triste vie

Se traîne sans raison

J’ai adoré cette chanson et je ne sais pas pourquoi! Certainement pas à cause de ses paroles nostalgiques, ou du contexte historique émouvant: Enrico Macias a quitté son pays natal l’Algérie et s’est exilé en France en 1961. Ma connaissance du français était encore très sommaire à l’époque. Mais probablement, à cause de sa mélodie orientale mélancolique et de la performance touchante à la guitare! C’était à la fois tendre et relaxant, et suscitait en moi des émotions de joie et de tristesse! En fait, mon interprétation de la chanson était purement romantique et émotionnelle!

En ces jours d’insouciance, pendant mes années d’Université à Alep, mon esprit était plein de choses roses et d’attentes folles. Une partie de cela était liée à ma fascination pour cette ville magique, où l’histoire et la modernité se combinaient. Là où la Citadelle, la Grande Mosquée, les Madrasas [3] et l’arôme des épices dans les vieux souks [4] et les Khans [5] de la vieille ville d’Alep, vous emportaient avec des caravanes qui traversaient la ville depuis la Chine, Boukhara et Ispahan vers l’Ouest, à l’âge d’or des Routes de la Soie à partir du XIIe jusqu’au début du XVe siècle…

C’était le temps de l’optimisme et des rêves. Comment aurais-je pu imaginer alors ce que l’avenir réservait à la Syrie ?!

Puis, les années se sont écoulées … Et un jour, tout d’un coup, le ciel est tombé sur nos têtes et a bouleversé notre monde! Le pays a été déchiré par la guerre civile qui a ruiné tous les aspects de la vie, y compris la ville magique d’Alep!

C’est alors qu’est venu le moment de la révélation, avec toute sa force et son intensité! Déracinés de notre patrie, nous sommes devenus une diaspora! Un peuple déplacé. Jeté sur des rivages étranges et dans des camps de fortune! Nos maisons chaleureuses, nos terrains de jeux d’enfance, notre mer bleue, tout … nous a été volé!

Transféré dans une réalité complètement différente, j’en suis venu à comprendre pleinement les sentiments que le célèbre chanteur a traversé, il y a une soixantaine d’années, lorsqu’il a été contraint de dire adieu à sa ville natale bien-aimée de Constantine!

J’ai quitté mon soleil
J’ai quitté ma mer bleue
Leurs souvenirs se réveillent
Bien après mon adieu

La belle mélodie de « J’ai quitté mon pays », qui jadis me remontait le moral et suscitait des émotions de joie et d’amour, évoque désormais de multiples souvenirs et images extrêmement poignants! Extrêmement nostalgiques!

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[1] Chanteur arménien populaire

[2] Chanteur kurde populaire

[3] Établissement qui enseigne la théologie musulmane

[4] Marché, Bazar

[5] Vaste cour entourée de bâtiments où les caravanes font halte

DONO

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

 




Un ESPACE pour vivre la diversité

Neuchâtel – le projet « ESPACE » va ouvrir ses portes début 2021

Deux nouveaux lieux pour l’apprentissage de compétences de base : français, mathématique, technologie de l’information et de la communication (TIC) ouvriront en 2021 à Neuchâtel. L’une dans le haut et l’autre dans le bas du canton. ESPACE est l’une des mesures phares de l’Agenda Intégration Suisse dans le canton de Neuchâtel.

Pour qui ?

Espace sera ouvert à toute personne :

  • prioritairement issue de la migration, indépendamment de son âge et de son statut;
  • ayant besoin d’acquérir ou de renforcer des compétences de base;
  • désireuse de partager des activités en groupe, d’apprendre à connaître et comprendre la Suisse, d’acquérir des premières expériences professionnelles et de vivre des moments d’échanges avec des gens d’ici et d’ailleurs.

Et encore ?

La rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils

 

 

 




Revue de presse n°27

La revue de presse, la nouvelle rubrique de Voix d’Exils. Auteur; Damon / Voix d’Exils

Sous la loupe : Graves accusations d’Amnesty contre Malte / Malgré un énorme soutien, Sangar A. sommé de quitter la Suisse / Décision du SEM annulée par le Tribunal administratif fédéral

Malte accusée de refoulements illégaux

rts.ch, le 08.09.2020

Amnesty International s’en est pris au gouvernement maltais qu’elle accuse d’avoir «  eu recours à des mesures dangereuses et illégales pour faire face aux arrivées de réfugiés et de migrants en mer ». Dans son rapport rendu public le 8 septembre 2020, l’ONG de défense des droits de l’homme condamne la tactique adoptée par Malte, soit « l’organisation de refoulements illégaux vers la Libye, le détournement de bateaux vers l’Italie plutôt que le sauvetage de personnes en détresse et la détention illégale de centaines de personnes dans des ferries mal équipés au large des eaux maltaises ».

La signature, à la fin mai, d’un accord entre La Valette et Tripoli pour empêcher les migrants d’atteindre Malte les aurait encore plus exposés à un traitement brutal lors de leur retour dans les camps de réfugiés libyens. « Certaines des mesures prises par les autorités maltaises peuvent avoir provoqué des actes criminels, entraînant des morts évitables, des détentions arbitraires prolongées et des retours illégaux vers la Libye déchirée par la guerre », assure Amnesty.

Malgré ses nombreux soutiens, Sangar A. doit quitter la Suisse

msn.com, le 08.09.2020

Le Grand Conseil vaudois a classé début septembre une pétition qui avait recueilli plus de 10’000 signatures contre le renvoi de Sangar A., kurde irakien habitant à Vevey. Soutenu par la gauche et le centre, le texte demandait au canton d’intervenir auprès du Secrétariat d’État aux migrations (SEM) pour que Sangar A. puisse rester en Suisse. Mais cela n’a pas suffi. Au terme d’un débat à huis clos, par 69 voix contre 65 et une abstention, les députés ont refusé de transmettre la pétition au Conseil d’État.

Sangar A. était arrivé en Suisse en 2017, où il s’était rapidement intégré. Il avait collaboré bénévolement à divers festivals et travaillait depuis octobre 2019 pour une entreprise de nettoyage. Le rejet de sa demande d’asile par le SEM, en 2018, avait été confirmé en janvier dernier par le Tribunal administratif fédéral (TAF).

De confession zoroastrienne, Sangar A. avait été victime d’une fatwa et de menaces de mort proférées par des islamistes radicaux. Ce danger, qui rendait sa vie quotidienne intenable en Irak, l’avait poussé à demander l’asile en Suisse.

Les autorités fédérales n’ont pas été sensibles à ces arguments. Elles ont estimé qu’un renvoi était possible, dans la mesure où Sangar A. n’avait pas été persécuté par l’État irakien.

Refus de naturalisation : la décision du SEM annulée

tdg.ch, le 09.09.2020

La décision du Secrétariat d’État aux migrations (SEM) de rejeter la demande de naturalisation d’un couple algérien en raison des liens qu’avait eu l’homme avec un groupe islamiste a été annulée par le Tribunal administratif fédéral (TAF).

Le TAF reproche au SEM de s’être basé sur un dossier incomplet pour prendre sa décision. Outre l’ancienne appartenance du mari au Front islamique du salut (FIS), le SEM avait également invoqué un risque pour les relations entre la Suisse et l’Algérie. La demande de naturalisation était restée en suspens pendant cinq ans, avant que le SEM n’informe les requérants, en 2019, qu’ils ne remplissaient pas les conditions nécessaires.

Mais, dans un arrêt publié le 9 septembre dernier, le TAF a annulé cette décision et renvoyé le dossier au SEM avec pour instruction de le compléter avant de trancher à nouveau.

Les juges rappellent que le rôle du SEM, dans la procédure de naturalisation, consiste à vérifier que les requérants se conforment à l’ordre juridique suisse et qu’ils ne compromettent pas la sécurité intérieure du pays.

Oumalkaire / Voix d’Exils