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« Les juges étrangers » au menu des votations fédérales du 25 novembre

Auteur: Pexels / pixabay.com / CC0 Creative Commons

Edito  

Le 25 novembre prochain, le peuple suisse se prononcera sur « Le droit suisse au lieu des juges étrangers (initiative pour l’autodétermination) » portée par l’Union démocratique du centre (UDC). Une initiative qui vise à consacrer une primauté générale du droit constitutionnel suisse sur le droit international.

Comme à l’accoutumée, les grandes questions du pays finissent toujours entre les mains du grand peuple suisse qui décide en toute souveraineté et transparence de son avenir. La démocratie semi-directe : un modèle de gouvernance vieux de près de deux siècles, très imprégné dans la culture du pays et dans l’esprit des citoyens et citoyennes Helvètes.

L’UDC soumet au vote populaire le 25 novembre prochain une initiative « pour l’auto-détermination » dans le but de s’opposer « aux juges étrangers » et de choisir la primauté du droit suisse sur le droit international. L’UDC dénonce d’une part, la faiblesse du droit suisse en matière d’immigration, d’actes pédophiles ou d’expulsion des criminels étrangers. D’autre part, elle soutient la primauté de la volonté populaire et la prépondérance du peuple sur toutes les questions touchant de près ou de loin à la Confédération, ses lois et ses choix. La primauté de la Constitution suisse et l’absence d’une application directe de la démocratie sont les seuls slogans retenus lors de cette campagne par l’UDC.

Le droit Suisse face au droit international

Lors de cette votation, un parfait duel oppose donc le droit suisse au droit international. Entre les deux, le citoyen suisse, un peu désemparé, qui doit se prononcer sur la question dimanche. Cependant, la question majeure se résume comme suite : La Suisse doit elle se soumettre à la volonté politique européenne et au droit européen? L’UDC peut-elle à elle seule défendre la Constitution en dehors du peuple suisse ? Le refus par l’UDC « des juges étrangers » peut être interprété comme un dénigrement pure et simple vis à vis des lois et des institutions internationales. Relevons toutefois que deux juges Suisses siègent depuis 1974 dans une cour internationale, en l’occurrence, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

Contre vent et marée, le droit international n’est en principe qu’un complément et un prolongement des lois des Etats signataires. Le droit international ne pourra aller à l’encontre des peuples dont il a la tâche de rendre justice. Le droit international est le seul support, le seul rempart des opprimés pour retrouver leurs droits dans la société. Par excellence, le droit international est le seul point d’appui des peuples en passe de connaître des injustices et en mal de trouver de bons justiciers !

Etats unilatéralistes rebelles contre le multilatéralisme

De plus en plus d’Etats s’associent à une dynamique de rejet catégorique de la complémentarité du droit international à leurs propres lois en vigueur dans leur pays. Pour étayer au mieux cette donne, on peut citer plusieurs accords multilatéraux qui ont étés abolis ou qui sont en voie de l’être à l’image de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien (2015) ou de l’accord de Paris sur le climat (2016). C’est la nouvelle doctrine prônée par le président américain Donald Trump qui a le premier claqué la porte à plusieurs traités multilatéraux, quitte à faire « cavalier seul ». Autant aussi mentionner le premier ministre Hongrois, Viktor Orban, instigateur du groupe de Višegrad qui réunit entre autres : la Pologne, la République Tchèque et la Slovaquie, quant à leur retrait en commun de la convention migratoire européenne sur le quota des étrangers à accueillir par les pays décidé par l’Union européenne. Des Etats qui prennent du poil de la bête en basculant par favoritisme ou par faiblesse dans la rétorsion et la riposte et en s’alignant l’un après l’autre derrière la démarche en vogue lancée par le président américain. Cet état d’esprit est le fruit de la peur et de la crainte de ces Etats de voir un jour le droit international devenir le levier qui contrôle leur vie politique et économique. Des Etats de plus en plus nombreux qui promeuvent une politique de renfermement et de sclérose.

Lors de cette votation du dimanche 25 novembre, le syndrome du « chacun pour soi » pourrait gagner la Confédération et faire courir le risque au peuple suisse de se recroqueviller davantage sur lui tout en diminuant considérablement le rayonnement international du pays. La Suisse rejoindra-elle le 25 novembre le camp des Etats unilatéralistes ?

Arslan Zoheir Bouchemal

Membre de la rédaction Vaudoise de Voix d’Exils