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10 ans pour construire un nouveau chemin

Keerthigan Sikakumar à l’ECAL. Auteur: Eddietaz

10 ans de l’Evam – Le parcours de Keerthigan Sivakumar en Suisse

Voici presque 10 ans que Keerthigan Sivakumar est arrivé en Suisse. Passé par les structures de l’Evam, autonome et déterminé, il a su construire son chemin pour réaliser aujourd’hui son rêve : étudier le cinéma. Retour sur un parcours épatant.

La rédaction vaudoise de Voix d’Exils est allée à la rencontre d’un de ses anciens membres : Keerthigan. Très enthousiaste, ouvert et sympa il nous a fièrement accordé cette interview à l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL).

« J’ai suivi des études secondaires pendant six mois dans mon pays d’origine, le Sri Lanka. Ensuite j’ai fui mon pays en 2009 et je me suis réfugié en Suisse. Les premières trois années, j’ai commencé par apprendre le français et j’ai participé au programme Voix d’Exils jusqu’en 2013. Entre 2014 et 2016, j’ai suivi ma première formation professionnelle à l’Ecole cantonale d’art et de communication de Lausanne (l’éracom). En 2017, j’ai réussi à commencer une formation en cinéma à l’ECAL.

« Les cours de français m’ont permis de sortir du foyer »

Quand je suis arrivé en Suisse, j’habitais au foyer de Sainte-Croix dans une montagne isolée et c’est là que j’ai appris le français en commençant par l’alphabet pendant six mois. C’était très dur, surtout la prononciation. Les cours n’étaient pas intenses, on avait trois jours de cours par semaine. Après six mois, j’ai dépassé le niveau de français des cours qu’on donnait au foyer et on m’a alors proposé de suivre les cours à Renens. Et c’est là où j’ai eu la chance de sortir du foyer pour la première fois. Avec ça, je me suis dit que les cours de français, ce n’est pas seulement pour apprendre une langue, mais aussi pour sortir du foyer, voir, observer, écouter et intégrer la communauté suisse. Donc les cours de français m’ont donné toutes ces opportunités.

« Les cours de français m’ont permis de réaliser mes études professionnelles »

Au début, je voyais le français comme une langue très bizarre. Des gens me disaient que c’est une langue qui est un peu similaire à l’anglais et que si tu parles l’anglais, tu pourras vite l’apprendre. Comme je parle l’anglais, je pensais que ça serait facile pour moi. Mais tel n’a pas été le cas. Les professeurs de français ne parlaient pas l’anglais pendant les cours de français pour définir les mots et nous aider à comprendre. Tout se disait en français. En plus, à cette époque, on n’utilisait pas les smartphones pour chercher la définition des mots. C’est une méthode très dure et difficile pour apprendre la langue. Mais, j’apprécie beaucoup cette méthode, car aujourd’hui elle m’a permis d’être bon en français et de pouvoir faire mes études professionnelles.

« Quand les vaudois parlent, ils parlent très vite »

J’ai eu la facilité d’apprendre cette langue car j’avais l’opportunité de suivre des cours intensifs de français, une demi-journée tous les jours de la semaine à Ecublens. Ensuite, j’ai eu la chance d’être soutenu par une bourse d’études d’une association qui s’appelle ENVOL pour suivre des cours jusqu’au niveau B2. Toute langue est comme un océan, une mer. L’une des difficultés que je rencontre est de me familiariser avec l’accent vaudois. Quand les vaudois parlent, ils parlent très vite. Je me sens toujours comme un débutant dans cette langue. J’ai toujours des difficultés et des défis à relever. Maintenant à l’école, on écrit beaucoup, on rédige des textes. Alors pour faire ça, il me faut d’abord les rédiger dans ma langue maternelle, pour les traduire en français ensuite. Après, je les donne pour relecture à d’autres personnes.

« Voix d’Exils est un vrai emploi »

Je trouve que Voix d’Exils n’est pas un programme d’activités, c’est un vrai emploi. Car à travers ce programme, nous apprenons les vraies techniques du journalisme en Suisse. Alors, il nous donne beaucoup d’expérience et c’est bénéfique. Il nous permet aussi d’avoir la confiance et une grande motivation pour aller rencontrer des gens, faire des interviews et écrire des articles. Voix d’Exils m’a beaucoup aidé à développer mes compétences pour pouvoir suivre ma première formation réussie à l’Eracom. Ce programme m’a aussi appris à connaître la vie politique, sociale, culturelle et professionnelle en Suisse.

« Ce qui facilite l’intégration, c’est d’être toujours ouvert et d’avoir la persévérance d’apprendre »

L’intégration c’est le vivre ensemble des communautés différentes en respectant ces différences. Je ne me sens pas intégré en Suisse et je ne pense pas réussir à m’intégrer un jour, car l’environnement social et politique change tous les jours. Donc, avec ces changements constants, nous n’arriverons jamais à nous intégrer. Mais ce qui facilite cette intégration, c’est d’être toujours ouvert et avoir la persévérance d’apprendre.

Une saveur, un goût qui te parle ?

La crêpe au chocolat. Au Sri Lanka il y des crêpes : les Dosa, mais on ne les mélange jamais avec du chocolat.

Une expression dans ta langue qui t’es chère, qui te ressemble ?

Nous sommes tous citoyens du monde donc nous écoutons.

En tamil : யாதும் ஊரே! யாவரும் கேளீர்! »

Propos receuillis par:

Lamine

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils

Bio expresse de Keerthigan Sivakumar

1988 : naissance au Sri Lanka, âge actuel : 29 ans

Langue maternelle : Tamil

2009 : Arrivée en Suisse

2014-2016 : Ecole romande d’art et communication (éracom)

2017 : Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL)