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Des compétences trop souvent perdues

 

 CC0 Public Domain

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En tant que refugiée, ma vie dans le centre de premier accueil a été pleine d’aventures et pleine de souvenirs. J’ai rencontré des gens qui viennent des quatre coins du monde pour demander l’asile en Suisse. Ces personnes-là viennent avec des profils différents et des qualifications différentes avec quoi ils espèrent trouver un travail pour gagner leur vie.

Dans les centres de premier accueil, les requérants passent leurs premiers mois avant d’être transférés en deuxième accueil, où ils peuvent aussi parfois obtenir directement un permis B. Ce temps d’attente dans le centre m’a permis de connaître leurs profils et leurs intentions, et ce qu’ils espèrent faire ici.

Le premier obstacle pour eux, c’est la langue. Malgré qu’ils aillent à l’école pour apprendre le français (des cours sont dispensés dans les centres), ils aimeraient apprendre vite le français et, en parallèle, travailler afin de mieux assimiler la pratique du français. Hélas, la majorité des cours ne sont dispensés que le matin et l’après-midi. Découragés, ils restent sans rien faire.

La plupart de ces gens qui viennent de Syrie, d’Erythrée, de Somalie et du Sri Lanka n’ont pas fait des études supérieures, mais ont déjà travaillé dans leurs pays d’origine dans des métiers manuel comme : menuisiers, maçons, mécaniciens, serruriers, etc.

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J’ai vu une émission sur le savon d’Alep qui se fabrique en France et est distribué dans toute l’Europe. Le savon d’Alep à base de laurier et d’huile d’olive est très connu depuis plus de 3000 ans. L’idée est venue à un réfugié syrien en France qui s’appelle Hassan Harastani et qui a travaillé dans son entreprise familiale avant la guerre de Syrie. Après, il a été obligé de fuir les bombardements et il s’est installé à Paris avec sa famille. Il a monté sa fabrication de savon d’Alep made in France. Depuis cette émission, je n’arrête pas de penser aux compétences de tous les requérants que j’ai connu, car ils m’ont parlé de ce qu’ils ont fait auparavant dans leur pays ; surtout quand un sri lankais m’a parlé de son travail de serrurier d’art et son rêve de continuer son même chemin. Il y avait aussi un syrien qui était menuisier spécialisé en marqueterie traditionnelle. Ces gens ont un grand besoin de redonner une vie à ces artisanats traditionnels pour faire connaître leur identité et leur culture à travers leurs métiers, comme on a vu avec le maître savonnier qui est devenu un grand compétiteur a côté des grandes marques en Europe.

Je ne veux pas citer tous les métiers qui peu à peu se perdent, mais je suis certaine que s’ils pouvaient transmettre le savoir qu’ils ont dans leurs mains, ils pourraient trouver une place dans la société suisse, garder leur dignité, et ne pas seulement être des consommateurs de l’aide sociale. Tous seraient gagnants.

Rafika Koudri

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils