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La journée mondiale des réfugiés 2014 fait état d’une situation « des plus inquiétante jamais rencontrée »

Pour rappel, l’Assemblé Générale des Nations Uniesa fixé au 20 juin la principale journée internationale en faveur des réfugiés. Cette Journée mondiale est organisée en l’honneur des réfugiés, des demandeurs d’asile, des personnes déplacées, des apatrides et des personnes de retour dans leur pays d’origine et ce, afin de saluer leur envie et leur espoir en une vie meilleure. En Suisse, la journée nationale des réfugiés est fêtée le troisième samedi du mois de juin. Chaque édition se déroule en partenariat avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR),l’organisation suisse d’aide aux réfugiés (OSAR) etl’Office fédéral des migrations (ODM). Réflexions de deux requérants d’asile et rédacteurs neuchâtelois.

Le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) utilise ou éveille les consciences sur les conditions d’une population estimée à 51.2 millions de personnes déplacées à travers le monde. Dans son rapport Global Trends 2013, le HCR a estimé que chaque jour, 32’200 personnes doivent fuir leur pays. Chiffre en augmentation constante depuis 2000. Dans un message pour marquer cette journée, le Secrétaire Général de l’ONU – Ban Ki-moon – déclare que «les réfugiés partent car ils n’ont pas le choix, nous devons les aider».

Le Haut-Commissaire aux réfugiés de l’ONU – Antonio Guterres – et l’Ambassadrice de bonne volonté pour le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) – Angelina Jolie – étaient tous les deux en Jordanie pour attirer l’attention sur les souffrances des plus de 1,6 millions de réfugiés syriens. Lors de ce voyage, M. Guterres a déclaré : «Depuis toutes les années que je travaille pour les réfugiés, cette situation, dont j’ai été témoin, est la plus inquiétante jamais rencontrée. Les besoins de ces populations sont énormes, leur angoisse est incroyable».

Carlos Zebral et Hossein Baghban

Membres de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils

 

Commentaires
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Le mal s’épanouit quand les bonnes gens ne font rien

SOMALIA, Mogadishu: In a handout photograph provided by the African Union-United Nations Information Support Team, women rush into a feeding centre after Transitional Federal Government (TFG) soldiers could no longer contain the crowd 20 July, in Badbaado, a new camp established by the TFG for internally displaced people in the country's capital Mogadishu, who have been affected by the worsening drought in Somalia. African Union High Representative for Somalia Jerry Rawlings today implored for an urgent and significant response from the international community to the drought and now famine in the wider Horn of Africa region, which has been declared by the United Nations in two areas of southern Somalia. AU-UN IST PHOTO / STUART PRICE.

SOMALIA, Mogadishu: In a handout photograph provided by the African Union-United Nations Information Support Team, women rush into a feeding centre after Transitional Federal Government (TFG) soldiers could no longer contain the crowd 20 July, in Badbaado, a new camp established by the TFG for internally displaced people in the country’s capital Mogadishu, who have been affected by the worsening drought in Somalia. African Union High Representative for Somalia Jerry Rawlings today implored for an urgent and significant response from the international community to the drought and now famine in the wider Horn of Africa region, which has been declared by the United Nations in two areas of southern Somalia. AU-UN IST PHOTO / STUART PRICE.

Plus d’un millier de personnes sont mortes en franchissant la frontière, plusieurs milliers sont bloquées entre le diable et la mer, plusieurs autres milliers sont mortes près des côtes de Lampedusa, en Italie, en essayant de rejoindre l’Europe, d’autres milliers traversent les déserts de Libye et du Maroc prêts à prendre des risques extrêmes, bien qu’ils aient reçu des mauvaises nouvelles de la mort de leurs amis dans la mer Méditerranée. Ce sont des problèmes créés par les humains, par conséquent ils doivent être solutionnés par eux. Cependant «le mal s’épanouit quand les bonnes gens ne font rien»

 

 

 

 C.Z

 

 

Le réfugié : un acteur forcé sur une terre inconnue

Toute personne qui vit dans son pays d’origine ne sait pas ce que c’est que d’être dépaysé, itinérant et les difficultés de vivre dans un autre pays.

Qui est réfugié? Que signifie l’asile? Quels sont les problèmes rencontrés dans cette nouvelle vie? Tant de questions en suspens!

Pour moi, un réfugié c’est un être humain qui accepte la voie de l’exil, pour joindre la rive de la sérénité et qui, malgré le goût amer d’être un citoyen de second degré, doit prendre sa vie entre ses mains. Très vite, il met le pied sur la scène d’une réalité dans laquelle il devient un acteur forcé qui évolue sur une terre étrange et inconnue. Il se transforme alors en un invité imprévu aux yeux de certains locaux, une sorte de «Pinocchio» surnommé réfugié …!

 

Hossein

Clichés de la journée mondiale des réfugiés 2014 célébrée le 14 juin dernier à Neuchâtel en Suisse

 

La journée des réfugiés 2014 célébrée à Neuchâtel. Auteur: Hossein

 

La journée des réfugiés 2014 célébrée à Neuchâtel. Auteur: Hossein

 

 

La journée des réfugiés 2014 célébrée à Neuchâtel. Auteur: Hossein




Pourquoi les dictateurs des pays de tiers-monde s’accrochent tant au pouvoir ?

Congo, Ouganda, Sri Lanka et bien d’autres : nombreux sont les pays en voie de développement qui sont encore aujourd’hui dirigés par des dictateurs souvent sanglants. Comment ces régimes parviennent-ils à s’installer durablement ? A quand la démocratie dans les États du Tiers-monde ? La rédaction valaisanne de Voix d’Exils apporte son regard sur cette problématique ô combien sensible.

Mouammar Kadhafi. (CC BY-NC-SA 2.0). Auteur: Ssstto

Mouammar Kadhafi. (CC BY-NC-SA 2.0). Auteur: Ssstto

Le monde est rempli de chefs d’Etat dictatoriaux qui ne connaissent pas la valeur de la démocratie. Ils privilégient leurs intérêts personnels plutôt que ceux de leur pays et s’accrochent au pouvoir éternellement, quel qu’en soit le prix.

Un simple regard sur l’histoire des pays en voie développement permet d’observer la longue lignée de dictatures militaires qui ont prévalu dans ces régions. Cela a été la tendance ces 50 dernières années, presque à chaque fois qu’une nation colonisée a retrouvé son indépendance.

Richesses naturelles et influences internationales

Après l’indépendance, l’espoir était souvent le même : un meilleur futur en pouvant disposer des propres ressources naturelles du pays. Mais après quelques années, force est de constater que de nombreux pays se sont retrouvés coincés entre deux forces : le bloc communiste d’un côté, le bloc capitaliste de l’autre. Dans un contexte de guerre froide, ces deux rivaux ont souvent agi dans la crainte de voir une région basculer dans le camp ennemi et de perdre du même coup le contrôle de précieuses richesses naturelles. La peur d’une avancée adverse a mené à une politique sans scrupule et à des interventions militaires, notamment en Afrique. L’exemple du Congo est frappant : Patrice Lumumba, considéré comme proche du régime soviétique, a été tué par une combinaison d’agences belges et américaines au profit de Mobutu, plus « occidento-compatible », qui est par la suite devenu – entre 1965 et 1997 – l’un des plus rudes dictateurs jamais connus en Afrique.

Les richesses naturelles dont disposent bon nombre de pays en voie de développement – bien que souvent exploitées par un pays du bloc Nord – expliquent également le maintien à long terme de ces dirigeants assoiffés de pouvoir. Avec un accès presque sans surveillance à ces ressources et à l’argent qu’elles génèrent, les dictateurs en ont profité pour acheter des armes et s’enrichir.

 

Mahinda Rajapakse, Président du Sri Lanka depuis 2005. affiche de Mahinda, prise en 2009 (CC BY 2.0)

Mahinda Rajapakse, Président du Sri Lanka depuis 2005. affiche de Mahinda, prise en 2009 (CC BY 2.0)

Le népotisme au service de dynasties familiales

Au quotidien, ces dictatures érigent en norme les violations de la constitution, l’impunité, la gabegie, ou encore la torture de leurs adversaires politiques. Le népotisme devient également monnaie courante, à l’image du Sri Lanka, où le président Mahinda Rajapakse, arrivé au pouvoir en 2005, a mis en place une véritable dynastie familiale. Un de ses frères est le président du parlement, un autre est le ministre du développement économique, un troisième frère n’est autre que le puissant et redouté secrétaire d’Etat au ministère de la défense, enfin son fils, Namal Rajapakse, joue également un rôle important dans les affaires du gouvernement.

Une bonne partie des dirigeants des pays en développement foulent leur Constitution nationale (s’il y en a une) et se déclarent président à vie. Cela les pousse à un point de non-retour, prenant ainsi la direction du despotisme sans autorité légale. Ils créent tant de dégâts qu’ils ont peur de quitter le pouvoir par crainte de représailles. Ils savent que ceux qu’ils ont blessés voudront avoir leur revanche.

Quelques rares exemples de démocratie

Sous l’influence de quelques meneurs européens, comme Gorbatchev ou Mitterrand, qui prônent plus de démocratie pour le continent africain, la donne a malgré tout évolué au passage des années 80. Dès 1991, des conférences nationales se tiennent, des mutations voient le jour dans les administrations, des nouvelles constitutions sont rédigées : la démocratie est en marche. Plus récemment, l’Afrique du Nord a également semblé faire un pas vers la démocratie. Le « printemps arabe », déclenché en Tunisie en 2011, a fait tomber le régime de Ben Ali (24 ans de règne), celui de Kadhafi en Lybie (42 ans) et de Moubarak en Egypte (30 ans).

 

Denis Sassou Nguesso, President of the Republic of the Congo, addresses the general debate of the sixty-fourth session of the General Assembly. 25/Sep/2009. United Nations, New York. UN Photo/Marco Castro. www.unmultimedia.org/photo/

Denis Sassou Nguesso, President of the Republic of the Congo, addresses the general debate of the sixty-fourth session of the General Assembly.
25/Sep/2009. United Nations, New York. UN Photo/Marco Castro. www.unmultimedia.org/photo/

Mais, malgré ces bouleversements, les régimes autoritaires refont souvent surface, à l’image du pouvoir autoritaire réintroduit en Egypte durant le court passage à la présidence de Mohamed Morsi, qui est resté au pouvoir de 2012 à 2014. Ce dernier a néanmoins été élu démocratiquement. D’autres pays n’entrevoient, eux, aucun signe de changement. C’est notamment le cas du Congo Brazzaville, ou Denis Sassou, président de 1979 à 1992, règne à nouveau sur le pays depuis 1997.

Il semble donc que les valeurs traditionnelles de la démocratie mettront du temps à s’installer dans les habitudes des pays du tiers-monde, Afrique en tête. Quelques nations ont malgré tout réussi à assurer une transition présidentielle démocratique. C’est le cas de la Tanzanie, du Ghana, de l’Afrique du Sud, de la Mauritanie, ou encore du Botswana. Les autres nations doivent s’en inspirer.

La rédaction valaisanne de Voix d’Exils




Help please !




La nostalgie : une maladie de l’exil

Alors que la plupart des migrants viennent avec une valise à la main ou un sac sur le dos, d’autres arrivent sans bagage. Je suppose que l’idée de la migration ou de voyage est fermement associée à l’image d’une valise. Cependant, certains migrants viennent sans valise comme Nidal, un requérant d’asile en Suisse, à qui on a demandé de jeter ses valises pour laisser une place pour lui-même dans une voiture occupée par dix autres personnes. Outre ce qui est dans les mains, il y a ce qui est dans la tête.

Ainsi beaucoup d’immigrants viennent en Suisse avec un but clair à accomplir. Mais il y a aussi ceux qui ne savent rien ou très peu et qui n’ont pas plus d’intention ou de motivation que cet instinct inné de survie. Toutefois, aucun migrant, à l’exception probablement des petits bébés, n’arrive sans souvenirs.

Inévitablement dans la tête

La mémoire est une capacité humaine sans laquelle l’homme ne peut pas mener sa vie. En outre, elle est une clé pour la réussite et l’échec dans la vie et, probablement, les gens ont du succès dans la mesure où ils gèrent et exploitent bien leurs souvenirs.

Je pense que l’importance cruciale de la mémoire pour la vie ou pour la réussite est reconnue. Inutile de pointer du doigt la série sans fin des activités qui en dépendent: depuis, par exemple, rentrer chez soi jusqu’à composer une œuvre d’art. Néanmoins, la mémoire peut être un grand obstacle qui entrave l’intégration dans une nouvelle société et l’adaptation à son nouvel environnement, en plus d’être une source de beaucoup d’autres problèmes graves.

Parce que les souvenirs ne sont cependant pas tous associés à notre expérience collective de la migration, et parce que j’avais entendu peu de conseils sur ce qu’il faut garder ou laisser d’un esprit en regard de la quantité d’avis reçus quant à ce qu’il fallait ou non emporter dans les valises, j’ai choisi d’écrire à propos des interactions entre la mémoire et la migration.

Plus complexe que l’on peut l’imaginer

L’essentiel de la conversation d’adieu avec beaucoup de gens avant de quitter mon pays était quelque chose comme : «Ne nous oublie pas!». Seul mon père a dit quelque chose de différent: «Ne jamais regarder en arrière!». Ce qu’il a dit était très semblable à ce qu’Alfredo dit à Salvatore dans le film Cinema Paradiso en lui demandant de quitter sa ville et de poursuivre son destin de tout son cœur, sans jamais regarder en arrière et sans jamais revenir. Il semble que les deux, Alfredo et mon père, connaissaient très bien les effets négatifs de la nostalgie. En outre, Yaser, un requérant d’asile syrien que j’ai rencontré à Vallorbe et qui n’a pas vu sa famille pendant sept ans, soucieux de ne pas laisser seuls les autres demandeurs d’asile et ayant été lui-même victime de nostalgie, a mis en garde tout le monde à ce sujet et nous a encouragés à rechercher des activités et à ne jamais céder à l’attraction de la pensée nostalgique. Malgré le plein respect que je porte à Yaser pour ses appuis – qui ne se sont pas limités simplement à des conseils – je pense que le problème est plus grave et plus complexe pour être résolu par la simple recherche de compagnons et l’implication dans des activités.

«Le mal de Suisse»

Il convient de mentionner que le terme «nostalgie» a un lien particulier avec la Suisse. Il s’agit d’un concept savant issu du grec, composé de νόστος (nostos), qui signifie «retour au pays», et de ἄλγος (algos), qui signifie «douleur», inventée par un étudiant en médecine du 17ème siècle, Johannes Hofer, pour décrire les angoisses des mercenaires Suisses combattant loin de leur pays dans les plaines de la France ou de l’Italie et se languissant de leurs paysages de montagnes indigènes. Cette condition de nostalgie est connue également comme «mal de Suisse». Le dictionnaire de Musique de 1767 de Jean-Jacques Rousseau affirme que les mercenaires suisses n’ont pas été autorisés à chanter leurs chansons suisses comme le Ranz des Vaches par exemple. Cette interdiction est une reconnaissance claire des conséquences négatives de la nostalgie qui pourraient les conduire à l’abandon de l’armée, à la maladie ou à la mort. Cet aspect médical de la nostalgie correspond à l’état de nombreux réfugiés ou demandeurs d’asile en Suisse qui ont quitté leur pays pour des raisons puissantes. Par ailleurs, il y a un aspect romantique de la nostalgie, également associé à la Suisse et en particulier aux Alpes, qui correspond à la situation de ceux qui sont venus en Suisse pour satisfaire leur passion du voyage. De toute évidence, les deux différents types de nostalgie sont corrélés d’une manière ou d’une autre à la Suisse.

Besoin d’un terme plus convaincant

Malgré l’association solide entre la nostalgie et la Suisse, certains migrants nostalgiques pourraient ne pas être très convaincus que la maladie connue sous le nom de «mal de Suisse» puisse décrire leurs conditions. Par exemple, les Syriens n’ont pas perdu seulement la vision d’un certain paysage, mais le paysage lui-même; pas la vision temporaire d’une maison, d’un quartier, d’une ville, d’un monument, d’un ami ou d’un membre de la famille, mais la chose elle-même et les personnes chéries elles-mêmes. D’ailleurs, cette perte est permanente. Probablement, le mal de Syrie est plus semblable au mal de l’Irak, mal de Palestine, mal du Kurdistan; et le mal de ces pays pourrait être plus grave que le mal de Suisse.

Je me souviens encore d’un livre qui a pour titre «Mon Daghestan» par Rasul Gamzatov dans lequel il fournit des réminiscences fascinantes sur la terre de sa naissance, de ses habitants et de ses poètes. Ce qui a attiré mon attention davantage que le livre lui-même était un commentaire manuscrit de mon père sur sa première page: «chaque personne a son propre Daghestan!». Cette phrase avec cette copie de «Mon Daghestan» a disparu quand mon père a mis le feu à tous ses livres soviétiques dans un moment de désespoir. Bien que j’aie acheté un autre exemplaire de ce livre plus tard, cela n’a pas compensé la perte de cette copie spéciale avec ses plis, ses odeurs et ses commentaires. En dépit d’être finalement perdue, cette copie spéciale a encore le potentiel de déclencher en moi une grande quantité de souvenirs et beaucoup de nostalgie.

La nostalgie a ses préférences

Sans doute la vulnérabilité à la nostalgie varie en fonction de nombreux facteurs. Par exemple, les demandeurs d’asile qui viennent avec les membres de leur famille devraient être moins vulnérables à la nostalgie parce que la plus grande partie de leurs précieux souvenirs sont associés aux membres de la famille, et donc leur concept du pays pourrait ne pas être beaucoup plus large que celui de la famille. En outre, les jeunes enfants pourraient être les moins vulnérables parce qu’ils ont moins de souvenirs que d’autres, et que leurs esprits sont plus adaptables à de nouvelles circonstances puisqu’ils n’ont pas encore développé une vision claire du monde ni même le concept de pays. Au contraire, les adultes célibataires qui ont mené une vie stable et heureuse dans leur pays d’origine seraient les plus exposés à être victimes de la nostalgie. Il existe de nombreux autres facteurs, bien sûr, comme le fait d’être plutôt émotionnel ou cérébral, extraverti ou introverti, monolingue ou bilingue, etc.

Il pourrait y avoir très peu de doute ou de désaccord sur le fait que les plus vieux, les plus émotionnels, ou les plus introvertis sont les plus susceptibles d’être victimes de nostalgie. Néanmoins, le fait que les demandeurs d’asile viennent de milieux culturels différents et forment un assortiment de toutes sortes de personnalités et aptitudes fait qu’il est assez difficile de faire des généralisations. Par exemple, être âgé pourrait signifier aussi que la personne est très expérimentée, qu’elle a vécu de nombreuses expériences difficiles ou qu’elle a réussi à faire face aux chocs culturels ou aux conséquences des déplacements. De même, après avoir reçu plusieurs chocs émotionnels, une personne pourrait confronter différents types de pertes. En bref, bien qu’il y ait beaucoup de choses en commun entre eux et qu’ils vivent dans des conditions similaires, les demandeurs d’asile sont très différents dans leurs réactions au nouvel environnement et dans la manière dont ils traitent leur passé et vivent leur nostalgie.

Quels remèdes à la nostalgie?

Ceux qui pourraient être en désaccord avec l’affirmation selon laquelle il existe différents types de nostalgie et qui affirment que le mal de Suisse est quelque chose comme le mal de Syrie, le mal du Nigeria ou le mal du Maroc etc, confirmeraient sans doute au moins qu’il existe différents niveaux d’intensité nostalgique.

Pour passer aux solutions, je dirais que la participation des réfugiés dans les programmes appropriés peut les aider beaucoup, mais ce n’est pas suffisant. Les soins sociaux et psychologiques sont absolument nécessaires pour aider à minimiser le problème de nostalgie et éviter ses conséquences catastrophiques. Plus de recherche sur la violence comme syndrome nostalgique doit être effectuée; surtout que la violence est un phénomène perceptible parmi les réfugiés. Plus important encore, je pense que le temps des procédures d’asile aggrave la situation et intensifie le problème de la nostalgie dans une grande mesure. Je suis en Suisse depuis deux mois seulement mais j’ai déjà vu beaucoup de symptômes de comportements nostalgiques graves dans les deux centres pour réfugiés où j’ai séjourné. J’ai entendu récemment qu’un demandeur d’asile algérien s’était suicidé dans la chambre où je vis maintenant. Même si je sais très peu de choses sur ce cas précis, je ne suis pas surpris du tout!

Ibrahim Rami

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Je n’ai pas choisi d’être un réfugié

Le soleil se lève à l’est et se couche à l’ouest. C’est un phénomène naturel qui se répète chaque jour. Mais dans mon pays – le Tibet – le soleil s’est couché et ne s’est plus relevé depuis le 10 mars 1959, quand nous avons perdu notre indépendance. J’espère que le soleil se lèvera sur mon pays de neige une nouvelle fois.

Les Alpes couvertes par les neiges lesquels surplombent les plateaux où les animaux pâturent en harmonie avec la nature, les lacs bleus où les canards nagent gentiment, les neiges de l’hiver. Surtout, la bonté des habitants qui saluent «bonjour, bonsoir» tout le monde. Ça me donne de la confiance, de la paix et de la tranquillité dans mon cœur. Une ressemblance avec mon pays et je me sens rassuré. Ça me donne aussi une inspiration et un espoir de voir le Tibet libre.

Ça fait plus de deux ans que j’habite dans une petite ville qui s’appelle Le Locle qui se trouve dans le canton de Neuchâtel. Au début, ma vie quotidienne était toujours une répétition: manger, dormir et signer une fois par mois au bureau d’accueil de la Chaux-de-Fonds (le BACF) à l’Office social de l’asile en deuxième accueil. Nous parlons notre langue maternelle à la maison. Il n’y a aucune possibilité de m’intégrer puisque je ne sais pas le français. Nous restons seuls.

Quand je sors dehors ma tête est toujours préoccupée, avec un sentiment nerveux à cause de ma méconnaissance de la langue que les gens d’ici parlent. Je me sens comme un étranger. Même si nous avons appris la base de la langue française, comme les salutations et quelques conjugaisons comme être et avoir dans le centre d’accueil pour requérants d’asile de Fontainemelon (NE), ma tête les trouve très dures.

Pour quelqu’un qui est toujours permis N, il n’est pas facile de trouver un cours pour apprendre le français. Cependant, mon assistante sociale Mme Elisabeth Abdalla du BACF m’a trouvé un cours à l’École Mosaïque de la Chaux-de-Fonds. J’ai été très heureux d’entendre cette nouvelle. L’École Mosaïque a ouvert mes yeux et semé la confiance en moi. Je ne devrais pas oublier de remercier les professeurs et sa directrice Mme Rosemarie Fivaz. Son initiative nous a apporté énormément de bénéfices.

Actuellement, je peux ouvrir ma bouche avec un peu plus de confiance qu’avant. Donc, je ne dois pas m’inquiéter autant qu’auparavant lorsque je marche dans la rue ou que je dois aller au magasin ou au guichet pour acheter un billet.

Néanmoins, parler reste toujours un défi pour moi. Je suis un réfugié, je voudrais bien m’intégrer, trouver un boulot et devenir un contribuable. Je pense que ce rêve est dans la tête de tout réfugié. Mais ça reste toujours un rêve lorsqu’on ne connaît pas bien la langue comme moi.

Je suis conscient que les problèmes des réfugiés s’ajoutent aux coûts sociaux et économiques qu’ils engendrent. Toutefois, si les conflits restent dans le monde, la question des réfugiés se posera aussi à jamais. Le réfugié n’est pas la cause des problèmes, mais le syndrome de plus grands maux. Personne ne veut être réfugié. Séparé loin de sa famille et de ses amis. Ce n’est pas notre choix si nous sommes réfugiés.

Comme le Dalaï-Lama l’a toujours dit, le XXe siècle était un siècle de violence et nous devons créer le XXIe siècle, un siècle plus heureux. Pour réussir, le Dalaï-Lama a lancé un appel aux jeunes du monde entier à l’occasion de son 78ème anniversaire: «Pour ceux d’entre nous qui sont nés au XXe siècle, nous ne pouvons rien faire ! Mais les jeunes d’aujourd’hui peuvent créer un siècle plus heureux. Cette génération peut créer des meilleures conditions de vie et construire un monde où chacun vivra en harmonie, dans un esprit de coexistence.»

À l’avenir, j’espère que le monde deviendra plus heureux et puis qu’il y aura moins de problèmes, comme par exemple ceux des réfugiés. De tout mon cœur, je remercie toutes les personnes suisses et leur gouvernement de nous aider dans nos difficultés.

Gonch

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils