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L’histoire de Wahid venu d’Afghanistan (2/2)

Source: http://pierzo.blogspot.com/2009_11_01_archive.html

Partie 2/2 

Après avoir fui l’Afghanistan pour se rendre au Pakistan, puis en Iran, Wahid décide de continuer sa route en Europe…

 

 

 

 

 

 

Un jour, j’ai pris la décision de partir en Europe. Pour m’y rendre, il fallait rejoindre la Grèce en passant par la Turquie et ça coûtait 3000 euros ; ce qui représentait, pour moi, beaucoup d’argent. J’ai donc dû emprunter plusieurs milliers d’euros.

L’Europe

En Turquie, les passeurs étaient des voleurs. J’ai voyagé avec un groupe de 10 personnes et les passeurs exigeaient 2000 euros par tête. Ils nous ont enfermés une semaine dans une cave et ils nous frappaient. Des personnes ont payé et ont été libérées. Finalement nous avons tous été relâchés.

Trois jours plus tard nous sommes arrivés à Istanbul. Nous y sommes restés une semaine. J’ai demandé aux passeurs pour quelle raison nous attendions là sans passer la frontière pour la Grèce. La raison était qu’ils voulaient encore plus d’argent. J’ai alors contacté le frère de mon ami qui habite en Afghanistan, Hysa, et il m’a fait parvenir une somme que j’ai remise aux passeurs.

Les jours suivants on nous a regroupés, puis nous sommes partis en direction de la frontière grecque. Je me suis retrouvé avec une famille de cinq enfants. A 22 heures, nous nous sommes rendus sur une plage. Un bateau nous attendait. Il y avait beaucoup de vent et la mer était très agitée. Nous avions tous peur. Les passeurs nous ont obligés à embarquer et nous avons voyagé durant deux jours et deux nuits.

Une fois arrivés sur le sol grec, la police nous a arrêtés et nous a mis aux arrêts durant deux jours. Puis ils nous ont emmenés à Athène. Je me suis senti à ce moment-là très seul.

Après une semaine je me suis fait un ami. Il cueillait des fruits dans des îles et il m’a proposé de le rejoindre pour travailler avec lui. Le travail était très difficile et on travaillait beaucoup pour gagner 10 euros par jour. Cela faisait deux mois que je travaillais là et j’étais épuisé. Les gens avec lesquels je travaillais étaient gentils, mais je n’arrivais pas à vivre avec si peu d’argent. Alors j’ai décidé de continuer ma route en embarquant dans un navire pour l’Italie. Le voyage a été long et à peine débarqué en Italie la police italienne nous a contrôlés. Après, j’ai pris un train pour Rome.

La situation des migrants en Italie est très difficile. Ils n’ont pas de toit et vivent dans la rue. Il n’y a aucune aide et pas de travail.

Attendre, dans la peur et le doute

J’ai finalement décidé de continuer mon voyage et j’ai déposé une demande d’asile en Suisse. Cela fait deux ans que j’attends une réponse de Berne. Je suis obligé d’attendre et je ne sais pas ce qui va m’arriver par la suite.

Histoire de vie racontée par :

Fardudin

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils




Le paradoxe (2/2)

Dessin signé GéGé

Pour ceux qui sont restés sur leur faim lors de la publication de la première partie du conte « Le Paradoxe », voici la suite et fin. Bonne lecture.

Lors des discours devant la presse, les membres du premier groupe remercient cérémonieusement les membres du second groupe pour leur engagement dans la lutte contre la pauvreté et la famine ainsi que pour leur participation dans les processus démocratiques de leurs régions. Ils sollicitent une nouvelle aide au développement et une remise de la dette.

Le second groupe, lui, se réjouit des progrès économiques et politiques observés et félicite les nouveaux élus, arrivés au niveau suprême au terme d’élections libres et transparentes. Peu importe si le nouvel élu, qui avait quitté son pays à l’âge de quinze ans, est revenu à 72 ans avec une nouvelle nationalité et n’a recueilli que 18 pourcent des voix, ou si le monarque qui est resté plus de quarante ans au pouvoir est remplacé automatiquement à sa mort par son fils. Peu importe si les pays qui ont réalisé ces progrès économiques sont toujours des PPTE (Pays Pauvres Très Endettés).

Dans les coulisses, par contre, les choses sont bien différentes : tous les scénarios de conquête, d’enrichissement ou de confiscation du pouvoir se jouent sur fond de règlements de comptes et de pactes immoraux entre les deux groupes d’un côté et des multinationales de l’autre.

Le second groupe, plus rusé et plus technique, prend la parole : « Nous allons vous laisser faire ce vous voulez dans vos pays respectifs, sans qualifier vos régimes de dictatoriaux, nous placerons vos pays dans la classe des pays sûrs, ce qui vous épargnera le regard des médias internationaux ; en plus, tous ceux qui fuient vos régimes verront leur demande d’asile rejetée. Mais uniquement à certaines conditions : vous devez laisser le monopole du marché des matières premières à nos multinationales et signer un accord de réadmission pour que nous puissions vous renvoyer vos nombreux requérants d’asile ».

Il faut rappeler que si le second groupe ne respecte pas ses engagements, il verra le marché des matières premières passer dans d’autres mains, mais que si c’est le premier groupe qui trahit ses promesses, il sera confronté à un opposant fabriqué de toutes pièces, armé et accompagné dans sa conquête du pouvoir. Pendant que les balles crépitent, que des innocents meurent, les contrats seront signés dans les hôtels ; l’ancien ami recevra une balle dans la tête ou sera traduit devant la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

Ici prend fin notre conte paradoxal qui, contrairement aux contes qu’on lit aux enfants, ne finit pas dans le bonheur et la félicité. Heureusement, il s’agit d’un conte, pas d’une réalité, qui ne ressemble évidemment en rien à ce qui s’est passé entre la patrie des droits de l’Homme et beaucoup de pays africains tels que le Gabon, la Guinée, la Côte d’Ivoire, en fait une coopération communément appelée LA FRANCAFRIQUE.

PITA

Membre de la rédaction valaisanne de Voix d’Exils




« L’ampleur du « non » à l’initiative en faveur de six semaines de vacances pour tous est surprenant »

Nicky Le Feuvre, Professeure à l’Université de Lausanne

Le peuple suisse a rejeté l’initiative en faveur de six semaines de vacances pour tous par 66,5% des voix le 11 mars dernier, ce qui a suscité de vives réactions de la part des pays voisins européens. Pour mieux comprendre ce phénomène, Voix d’Exils a choisi de donner la parole à Nicky Le Feuvre, Professeure ordinaire en sociologie du travail à l’Université de Lausanne. Interview. 

Voix d’Exils : Pouvait-on s’attendre à ce que cette initiative soit acceptée ou rejetée et pourquoi ?

Nicky Le Feuvre : Le rejet de cette initiative était plutôt prévisible. C’est davantage l’ampleur du « non » qui était surprenant, même si la plupart des commentaires soulignent les écarts entre la suisse romande et le Tessin (plutôt partagés sur cette question) et la suisse alémanique (franchement hostile à l’initiative).


Quelle est la place du travail dans la vie des Suisses ?

La Suisse fait partie des quelques pays européens où la durée moyenne du travail est très élevée. En réalité, la situation varie beaucoup selon le sexe. Les hommes suisses connaissent des durées du travail très au-dessus de la moyenne européenne, alors que les Suissesses travaillent beaucoup plus souvent que leurs voisines européennes à temps partiel.


Selon vous, que ce serait-il passé dans les années à venir si les Suisses et les Suissesses avaient accepté l’initiative ?

Défendue par l’organisation syndicale faîtière Travail Suisse, l’argumentaire en faveur de l’initiative se fondait sur deux arguments principaux : les effets délétères pour la santé des travailleurs / travailleuses de l’intensification actuelle des rythmes de travail (représentant des dépenses élevées pour l’Assurance-invalidité, notamment) et les difficultés de « conciliation » de la vie professionnelle et familiale induites par les durées élevées de travail. Pour leur part, les opposants à l’initiative ont surtout mis l’accent sur les risques en matière de compétitivité des entreprises suisses en cas d’augmentation des congés payés et ont brandi la menace d’une augmentation potentielle des taux de chômage.


Quels sont selon vous les facteurs qui ont favorisé ce rejet massif de l’initiative ?

De toute évidence, l’argument économique s’est avéré beaucoup plus convaincant que l’argument en faveur de la santé et du bien-être des salarié·e·s. Il faudrait évidemment mener des recherches plus approfondies pour comprendre précisément ce qui a motivé ce choix, mais l’on peut déjà noter que, dans toutes les enquêtes menées sur ce sujet, les Suisses déclarent des niveaux de satisfaction au travail qui sont largement supérieurs à ceux que l’on trouve dans la plupart des pays voisins. Indépendamment des conditions objectives de travail (horaires, salaraires, etc.), ces résultats témoignent surtout de l’attachement fort des Suisses à la « valeur travail » et c’est bien cela qui semble avoir primé lors de cette votation.


Pourquoi le « non » massif est-il si incompréhensible pour les voisins européens de la Suisse ?

Les résultats de cette votation ont surtout été accueillis avec une certaine incrédulité en France, où la réduction du temps de travail et l’augmentation des congés payés sont généralement perçus comme un facteur de bien-être par les salarié·e·s. Certes, les employeurs se sont également mobilisés en faveur d’un assouplissement de la Loi Aubry de 2001 sur les 35 heures, mais celle-ci demeure une référence dans beaucoup de secteurs d’activité. Lors de son adoption en France, cette mesure de réduction du temps de travail était surtout présentée comme une solution au chômage (partage du travail entre un plus grand nombre de travailleurs) et non pas comme un risque pour la performance économique du pays. Assez curieusement, pourtant, même avec ces durées réduites de travail et ce supplément de vacances (5 semaines), les Français et les Françaises se déclarent moins satisfait·e·s de leur situation de travail que les Suisses et les Suissesses…


Est-ce que deux semaines de vacances en plus améliorerait la santé des travailleurs et travailleuses suisses?

L’intensification des rythmes de travail et leurs effets négatifs sur la santé des travailleurs sont des réalités confirmées à maintes reprises dans la littérature scientifique. Il n’empêche, les recherches récentes tendent à suggérer qu’une réduction des durées quotidiennes ou hebdomadaires de travail offrirait une meilleure solution à ces problèmes, et aux difficultés de « conciliation » des temps de vie, que l’octroi de semaines supplémentaires de vacances.


Qui est selon vous gagnant avec ce rejet et pourquoi ?

Il s’agit là d’une victoire très nette pour les entreprises et les employeurs, qui ont emporté l’adhésion du plus grand nombre. Néanmoins, les syndicats peuvent se féliciter d’avoir réussi à inscrire la question de la durée et des rythmes de travail à l’agenda d’un grand débat national. De mon point de vue, avec le vieillissement de la population et l’allongement de la vie active, ce sont là des questions qui devront être prises très au sérieux par les responsables politiques au cours des années à venir.

Propos recueillis par :

Hochardan

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils




L’histoire de Wahid venu d’Afghanistan (1/2)

Source: http://pierzo.blogspot.com/2009_11_01_archive.html

Partie 1/2

Bonjour, je m’appelle Wahid (nom d’emprunt). A l’âge de 10 ans, mon père a eu un cancer et est mort deux ans plus tard. Toutes les difficultés ont alors commencé pour moi et le reste de ma famille. Je suis l’aîné d’une famille de quatre enfants, j’ai un frère et deux sœurs. Avec mon frère, mes sœurs, ma mère et ma grand-mère nous vivions tous sous le même toit.

Dès 12 ans j’ai été forcé à travailler

Pour ramener de l’argent à la maison, dès 12 ans j’ai gardé des moutons et des chèvres. J’ai aussi travaillé au service de personnes riches. Comme j’étais petit je ne pouvais pas faire d’autres travaux. Mes frères et mes sœurs pouvaient ainsi aller à l’école, mais moi je ne pouvais pas. Dès l’âge de 15 ans, j’ai fait de la manutention jusqu’à l’âge de 19 ans. Ce travail était bien pour moi, ma famille était contente, mes frères et mes sœurs pouvaient continuer à apprendre.

Un jour, un accident est arrivé

Un jour, je déchargeais des poutres d’un camion et un accident est arrivé. Une poutre est tombée sur mon collègue Rmzdym et il est mort. Ce n’était pas ma faute. Je suis alors rentré à la maison et j’étais très mal, très triste. Je ne savais pas quoi faire. Mon frère m’a dit : « le frère de Rmzdym, s’appelle Javid et il te cherche! ». Je me demandais ce qu’il voulait de moi. Ne sachant quoi faire, je suis allé prendre conseil chez mon ami Hysa qui est pour moi comme un frère. Hysa m’a dit : « Wahid, il faut que tu partes, Javid te cherche, il te menace de mort, on ne peut pas aller voir la police car ils ne feront rien, ils ne vont pas te protéger ».

Pendant deux nuits, je me suis caché dans la maison de Hysa. Lorsqu’il se rendait au travail en ville, il entendait que ça n’allait pas mieux pour moi. Je devais partir mais je n’avais pas d’argent. Hysa m’a alors prêté une somme, m’a fourni du carburant et m’a mis en contact avec l’un de ses amis qui était chauffeur. Le lendemain, à 4 heures du matin, j’ai quitté ma ville, ma famille, j’étais très triste.

On est parti pour Kandahar où on est resté deux jours et deux nuits. J’ai téléphoné à Hysa et les nouvelles n’étaient pas bonnes. Il m’a dit : « ne reviens pas sinon ils te tueront, si tu veux parler avec la famille de Javid, il faudra attendre très longtemps ».

Fuir au Pakistan

J’ai alors pris la décision de partir plus loin, au Pakistan où j’espérais trouver un travail. 5 jours plus tard, j’ai heureusement trouvé un emploi dans un restaurant car je n’avais plus d’argent, je dormais dans la rue, je ne mangeais plus. Le travail dans le restaurant ne payait pas beaucoup, je n’arrivais pas à vivre et à rembourser Hysa. Puis il m’a conseillé de me rendre en Iran, il pensait que j’y trouverais de meilleures conditions pour vivre et travailler. De plus, il avait un frère qui vivait là-bas.

Partir en Iran

Une semaine plus tard, je partais pour l’Iran. Je me suis rendu chez le frère de Hysa qui m’a donné de l’argent pour payer les passeurs qui m’avaient accompagné. Je suis resté une semaine chez lui, jusqu’à ce qu’il me trouve un travail. Il travaillait dans une usine de découpage de pierres et, peu de temps après, j’ai pu le rejoindre. Trois mois plus tard, la police iranienne m’a attrapé lors d’un contrôle, car je n’avais pas de passeport. Elle me demandait de l’argent pour me libérer. J’ai payé la police par l’intermédiaire du frère de Hysa et je suis sorti. Je suis alors retourné travailler à l’usine et 6 mois plus tard, la police est revenue pour me demander à nouveau de l’argent. Je me suis dit alors que ça ne finirait jamais…

Histoire à suivre dans quelques jours

Histoire de vie racontée par :

Fardudin

Membre de la rédaction neuchâteloise de Voix d’Exils





Édito. Monde civilisé ? Du n’importe quoi !

l’Édito est une nouvelle rubrique qui fait aujourd’hui son apparition dans Voix d’Exils.

On vit dans un monde où les pays dits « civilisés » dictent ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Ils nous dictent aussi ce qui est politiquement correct de dire/faire et même de penser en société et au nom de leur civilisation. Dans ce monde on assassine même en direct des prisonniers de guerre et on sourit quand on voit ces choses horribles.

Le monde civilisé est champion de la politique deux poids deux mesures. Capable de diaboliser Mugabe du Zimbabwe. De chasser Gbagbo de la Côte d’ivoire et de l’incarcérer à la Haye. D’organiser l’assassinat de Kadhafi en direct et en mondovision. Pour quelles raisons? Au nom de la démocratie? De la civilisation? Au nom d’intérêts économiques inavoués ? Allez savoir.

Ce qui est sûr, c’est que les réels motifs de ces acharnements n’ont rien à voir avec l’envie des pays civilisés de restaurer la démocratie et le bien-être dans ces pays. Sinon, comment expliquer que les dictateurs les plus féroces et les plus sanguinaires comme Paul Biya du Cameroun, Teodoro Obiang Nguema de la Guinée Equatoriale, Sassou Nguesso du Congo, Joseph Kabila de la République Démocratique du Congo, continuent à séjourner en Occident et sont reçus en grandes pompes par les pays dits « civilisés » et sans la moindre gêne? « On va vous aider avec une coopération policière ». Propos de Michèle Alliot-Marie, alors ministre français des Affaires étrangères, tenus pendant que le printemps arabe battait son plein en Tunisie et que les morts se comptaient par dizaines déjà. Cela avait montré aux yeux du monde entier une insensibilité incroyable de ce pays dit « civilisé ». Le dictateur Ben Ali était un « ami » (leur ami). Réveillez-vous ! Le monde est déjà un enfer ou des humains dansent autour des cadavres et où des gens se considérant comme « civilisés » fêtent avec un grand sourire la mort. Pourquoi ferment-ils les yeux sur ce qui se passe dans les autres pays comme le Gabon, l’Ethiopie, l’Erythrée, la Guinée équatoriale, le Maroc, le Swaziland, la République centrafricaine, l’Ouganda, le Soudan, le Cameroun, la République Démocratique du Congo, le Congo, le Burkina Faso ou le Togo? Et pourtant, nombre de ces régimes dictatoriaux (en Afrique, au Moyen-Orient, au Sri Lanka, à Cuba…) pourraient être renversés sans difficultés majeures si les occidentaux (monde civilisé) fournissaient les moyens adéquats comme la mise en place de sanctions diplomatiques, politiques et économiques contre ces dictatures ; grâce auxquelles les populations et les institutions indépendantes pourraient, au nom de la démocratie, restreindre les sources de pouvoir des dirigeants en place et, ainsi, endiguer leur nuisance. Ce qui n’est pas le cas. Pourquoi ?

Il y a vingt ans, la jeunesse africaine de la plupart des pays susmentionnés était déjà descendue dans la rue pour manifester son exaspération contre les dictateurs. Malheureusement, à l’époque, cette jeunesse africaine connaissait moins de succès. En fait, la jeunesse africaine avait été sacrifiée sur l’autel de la « realpolitik », autrement dit, par le cynisme des Occidentaux (le monde civilisé) en terre africaine. Les despotes africains, ayant eu plus de soutiens de la part des pays occidentaux (le monde civilisé) qui défendirent dans les années 90 leurs intérêts impérialistes, y compris à coups d’interventions militaires. Ils se sont offerts le luxe de ne pas céder à la pression de la rue. En lieu et place, il y a eu des milliers de meurtres perpétrés en plein jour par des forces armées.

On a organisé des conférences nationales dites souveraines par ici, composées des gouvernements de transition démocratique par là. Malgré tout cela, le changement espéré est demeuré une utopie. Pire, lorsque les tensions ont baissé, les dictateurs sont revenus au-devant de la scène, en force. Certains sont même morts de vieillesse au pouvoir comme Omar Bongo Ondimba du Gabon après… 42 années de règne sans partage ou encore Gnassingbé Eyadema du Togo après… 38 années de dictature. Et ils se sont faits remplacer à la tête de ces Républiques par leurs fils avec la bienveillance et la bénédiction des pays dits civilisés !

Ces régimes sont notoirement imperméables au changement, à l’alternance et ils répriment lourdement la dissidence. La corruption (y compris le détournement de l’argent du fond mondial destiné aux interventions contre la pauvreté et les maladies) et les atteintes massives aux droits humains sont le lot quotidien de millions de citoyens dans ces pays qui sont à la peine économiquement et qui, pourtant, recèlent d’immenses richesses naturelles, comme des gisements de diamants, de pétrole, d’or, ou la culture du cacao, du café etc. En parlant de la corruption, elle est si répandue que les conditions de vie dans ces pays, pour la majorité de la population, sont révoltantes. Le prix abordable des produits de première nécessité, l’accès à l’eau potable, à l’électricité, aux services de santé, de l’éducation, à l’emploi et à la sécurité sont de véritables gageures.

Face à ça, l’extravagance du train de vie de la classe dirigeante. Par exemple, le dictateur Paul Barthelemy Biya Bi Mvondo du Cameroun vit trois quarts de l’année à l’Hôtel InterContinental de Genève en Suisse, l’un des hôtels les plus chers du monde. Les ressortissants camerounais établis en Europe organisent d’ailleurs régulièrement des marches de protestation devant cet hôtel. La facture exorbitante que dégage ses séjours prolongés là-bas (plusieurs millions de francs suisses par… mois) est bien entendu assurée par le contribuable camerounais. Rien que ça. Il n’est ni Kadhafi, ni Gbagbo. Il n’a pas tenu tête aux Occidentaux (monde civilisé). On ferme les yeux tant qu’il protège nos intérêts en Afrique. On s’en fout, même s’il massacre les siens.

Monde civilisé ? Du n’importe quoi !

Edito signé :

Fbradley Roland

Membre de la rédaction vaudoise de Voix d’Exils