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Les « étrangers » sont parmi « nous »

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Le cors des Alpes est un instrument initialement utilisé pour communiquer d'une montagne à l'autre

Le cor des Alpes, instrument initialement utilisé pour communiquer entre les montagnes.

A l’heure ou certains se font appelés « citoyens du monde », ou simplement « enfants de Dieu », et rêvent d’un univers sans barrières, d’autres semblent cependant avoir oublié d’où ils viennent, mais croient savoir où ils vont.

Suisse, Etat de l’Europe alpine créé en 1291, situé entre la France à l’ouest, l’Italie au sud, l’Autriche à l’est et l’Allemagne au nord. Plus varié que sa forte ossature montagneuse alpine et jurassienne, carrefour européen d’une superficie réduite d’environ 41,290 km2. Ce pays offre une belle diversité, non seulement géographique, mais aussi économique, culturelle avec quatre langues officielles. Une diversité également politique avec un Conseil Fédéral, d’ailleurs l’unique au monde, et bien sûr des partis politiques, dont l’un se fondant principalement sur les égoïsmes nationaux.

Qui sont les « étrangers »?

Très peu de citoyens suisses ont encore en mémoire le souvenir du 17e siècle, lorsque de nombreux helvètes avaient pris le chemin de l’aventure pour l’Amérique latine et celle du Nord pour y fonder des villes aux consonances très helvétiques comme « Vevay » dans l’État de l’Indiana ou « New Berne » qui se trouve dans le nord de la Californie. Peu de citoyens savent qu’actuellement 10% de la population suisse vit à l’étranger. Aujourd’hui, les citoyens et citoyennes suisses sont comme frappés d’une amnésie collective et ont oubliés qu’ils appartiennent à une population de migrants. Mais qui est donc cet « étranger » ? Un requérant d’asile ? Un homosexuel ? Est-il celui qui à un parent venu d’ailleurs ? Celui qui ne parle pas notre langue ? Celui qui ne s’adapte pas à la fondue ? Ou tout simplement celui qui à une couleur de peau foncée ? En date du 1er janvier 2010, la Suisse comptait 7’783’000 habitants, dont 1’711’000 âmes étrangères. Après une décennie de quasi-stagnation, la courbe des natalités a repris une tendance ascendante, et cet accroissement est dû désormais à l’arrivée des étrangers. Mais le regard est davantage pathétique chez les requérants d’asile déboutés et NEM, qui enregistrent l’un des taux de natalité des plus élevés, surtout qu’il s’agit là d’enfants innocents qui arrivent au monde avec un destin scellé de « bébés déboutés ». Selon L’OIM (Organisation International des Migrations), sur quatre personnes qui gagnent leur vie en Suisse, une est étrangère. Rappelons ici que sans cette main d’œuvre étrangère, l’économie suisse ne fonctionnerait tout simplement pas. La Suisse emploie surtout cette population dans le personnel d’appoint : la construction, la restauration et l’hôtellerie ; des secteurs d’activités qui intéressent peu les autochtones. Notons cependant que depuis 2002, les travailleurs européens peuvent venir voir si l’herbe est plus verte en Suisse grâce à l’accord sur la libre circulation des personnes, alors qu’à l’époque, les égoïstes nationaux craignaient les effets de cette décision politique. Pourtant, en 2005, l’impact de cette ouverture du marché de l’emploi sur l’Europe s’est révélé finalement très faible, ce qui nous rappelle un adage bien connu « s’il y a pour un, il y a pour tous ».

Les « étrangers intégrés »… sont-ils intégrateurs ?

Est-ce que les étrangers intégrés, qui sont au bénéfice d’un permis de séjour stable et qui vivent depuis des décennies en Suisse rendent pour autant plus facile la tâche aux nouveaux venus ? Je ne crois pas vraiment, dans la mesure ou le statut de chacun divise très souvent la population étrangère elle-même. Les déboutés se retrouvent trop souvent sans frères ni amis. Plongés dans la solitude, ils n’ont plus que les bénévoles pour leur tenir la main. Selon un adage africain : « certains mangent et cassent ensuite la marmite » et c’est bien ce qui semble être le cas entre les étrangers intégrés et les nouveaux venus. En effet, certains étrangers intégrés dissimulent leur identité pour s’avouer suisse. Or, ce n’est qu’une histoire de nationalité acquise et quelques-uns vont même jusqu’à devenir les ténors d’un parti politique réputé hostile aux étrangers. Ceci est perceptible dans certains milieux étrangers où se conjuguent trahison et jalousie. Une tendance parmi les étrangers en possession d’un titre de séjour valable est de déserter ceux qui vivent dans la précarité. Preuve en est qu’on trouve très peu d’étrangers naturalisés ou intégrés s’investissant de manière bénévole en faveur de ceux qui ne le sont pas. Comment le processus d’intégration peut-il se faire si les portes se ferment à toi ? Est-il suffisant de s’adapter ?

Une intégration réussie est-elle suffisante?

Kader Zoumana Dosso photographié par Gervais Njiongo Dongmo

Kader Zoumana Dosso. Photo: Gervais Njiongo Dongmo

Personne n’a encore oublié le 1er août à Sainte-Croix lors duquel un requérant d’asile ivoirien du nom de  Kader Zoumana Dosso, érigé comme modèle d’intégration, a pour la première fois de l’histoire helvétique tenu une allocution officielle lors de la fête nationale. Le quotidien 24 heures lui avait même consacré la première page de son édition en raison de son intégration réussie sur tous les plans : pompier bénévole, emploi rémunéré, appartement à ses frais, impôts payés et surtout pas connu des services de police. Une intégration tellement réussie que certains disent de lui qu’il s’y connaît mieux qu’un suisse en matière de fondue et de raclette ! Seul bémol, comme il semble être de coutume pour les personnes ayant ce profil,… L’ODM exige de lui qu’il quitte la Suisse. Entre-temps, soutenu par pléthore de personnalités suisses, dont Paul Schneider, chirurgien à la retraite et président de Café contact, une association de bénévoles auprès des requérants d’asile, Blaise Fatterbert,  syndic socialiste de Sainte-Croix, ou encore Thierry Blaser, président du groupe Ouverture. Un élan qui à même reçu l’adhésion des partis politiques, dont L’UDC de Nicolas Warren, président de la section UDC du balcon du Jura. Tous reconnaissent le parcours exemplaire de Kader Zoumana et ils se sont engagés dans une course contre la montre pour la  collectes de signatures de soutien. Comment les nouveaux venus vivent-ils cette situation et celle-ci les incitera-elle vraiment à «s’intégrer » ?

Les « étrangers » ne sont pas des dossiers

Dans ce grand débat que représente l’asile, beaucoup oublient qu’ils ont affaire à des êtres humains en chair et en os et non pas à des piles de dossiers qu’on élimine sans conséquences. Un jour viendra peut-être le moment d’assumer les répercussions dramatiques de ces décisions et actions. S’agirait-il d’une volonté délibérée de dissuader les requérants d’asiles à s’intégrer ? Toujours est-il que des personnes se retrouvent dans cette situation qui est souvent due à la longueur et à la complexité des procédures rallongeant à tel point la durée du séjour qu’ils finissent par ne jamais repartir. Ils se retrouvent alors dans la précarité et nul n’ignore que celle-ci est à l’origine de l’alcoolisme, de la dépression, de la délinquance. Maux de notre temps qui n’est pas exclusivement l’apanage des étrangers, mais susceptibles d’atteindre toute personne en situation d’instabilité ou marginalisée.

Gervais NJIONGO DONGMO



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